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vendredi 30 janvier 2009

Saoul-FifreRégression

Ha j'adore écrire des billets de vieux con, surtout depuis que je suis assuré du soutien indéfectible et redondant de mon aîné Andiamo. Enfin, je me comprends : quand je dis "j'adore", c'est faux, j'aimerais de tout mon cœur que la matière me manque, que mon analyse soit bancale, que n'importe quel optimiste béat me ridiculise en 2, 3 coups pleins d'évidence, mais malheureusement, il suffit juste d'un peu de mémoire, et la mienne, pourrie, est encore de trop : le progrès recule, ô oui ô oui, ils nous enculent.

Nous vivons tous convaincus que le monde va vers le mieux, que nos grands-parent étaient des primitifs à peine descendus de leur branche et que nous seuls avons su évoluer en bien, en ne conservant que la malignité du singe, notre ancêtre.

Et ce mythe mensonger a la dureté et la durabilité de la carapace de la tortue têtue puisqu'il nous manipule depuis que l'homo ça pience et plus particulièrement depuis le fardier de Cugnot.

En vérité, je vous l'affirme, les choses et les gens évoluent en bien ou en mal, c'est selon, et je n'en veux pour preuve que mon expérience, identique à tant d'autres.

Quand j'étais petiot, le secret des correspondances privées était un commandement d'ordre divin gravé dans le marbre PTT. Si pour une raison ou pour une autre (mauvaise adresse, enveloppe tombée dans l'eau...) une lettre ne pouvait être remise à son destinataire, elle prenait la direction de Libourne. Là, une petite équipe, assermentée, avait seule le droit d'ouvrir le pli litigieux à la recherche d'un élément permettant de finaliser le noble travail postier : acheminer le message à son destinataire, sans que nul ne l'intercepte.

Aujourd'hui, n'importe quel enquêteur peut se faire communiquer nos mails, nos textos, nos mouvements de banque et pister notre carte bleue. Cela fait 20 ans que l'on nous a révélé l'existence de la NSA et du système ÉCHELON. L'outil n'a pu que s'affiner. Bien que tout soit perfectible.

Quand j'étais petiot, les routes étaient sûres : il y avait peu de véhicules et ils ne roulaient pas vite. Ça parait dingue, mais n'avaient pas encore été inventés : les ceintures, les sièges bébés, les éthylo-tests, les radars. Il y avait bien une vitesse maximum mais rien pour mesurer son dépassement. On pouvait rouler bourrés ! Pas de niqueurs d'amortisseurs à passer à 5 à l'heure maximum. Pas de contrôles techniques. C'était de l'économie durable, les pare-chocs attachés avec du fil de fer !

Aujourd'hui, ô misère, enfin, vous m'avez compris.

Quand j'étais petiot, il y avait une gare dans le moindre petit village, avec des trains tout le temps, et pas chers. Si on remonte encore un peu en arrière, il y avait même une troisième classe ! Les pauvres pouvaient voyager pour des nèfles. On achetait son ticket pour un trajet et si on changeait d'avis, il restait valable toute l'année. On pouvait le refiler ou le revendre à quelqu'un... Quand on ratait son train, on prenait le suivant. On descendait à une station, à la poursuite de cette jeune fille au manteau rouge, puis on reprenait son voyage, trois mois plus tard. Avec le même billet. Le train, c'était la liberté qui pelotait la poésie.

Aujourd'hui, toutes les petites lignes qui desservaient les villages de montagne et autres tréfonds culiers ont été démontées. On a revendu les gares et les maisons de garde-barrières. Le prix du ticket change toutes les deux heures : attention il remonte, vitevitevite, hé merde il a rebaissé, je l'ai acheté trop vite. On se croit en train de jouer en Bourse, mais pour revendre les titres et faire des bénefs, macache ! Votre billet est nominatif, inéchangeable et valable sur ce seul train. Ou alors c'est que vous l'avez payé dix fois le tarif de base, et dans cet unique cas là, vous avez six minutes chrono pour courir l'échanger au guichet contre une place dans le train suivant. S'il en reste. Où que vous habitiez, il vous faut passer par Paris pour aller autre part. Il n'y a plus que six lignes : Paris/Biarritz, Paris/Brest, Paris/Lille, Paris/Strasbourg, Paris/Marseille et Paris/Toulouse est sur la sellette (rentabilité limite).

Quand j'étais petiot, on titillait le levier qui faisait venir la demoiselle des PTT et on lui demandait par exemple le numéro de Manou (le 69 à Asnières). Le prix de l'appel local était de quelques centimes et l'on parlait tant qu'on voulait, de tout et de rien. Le service après-vente était global et gratuit : sur simple appel (gratuit) au 13, un réparateur débarquait illico et réparait la panne, comme son titre l'indiquait. Il changeait le poste si c'était le poste, retirait le fil si c'était le fil, replantait un poteau si un chauffard l'avait fauché à ras, changeait les para-foudres s'il y avait eu un orage, le tout gratuitement, sans essayer de vous culpabiliser et avec le sourire dû à tout client.

Aujourd'hui, le marché des céphalalgiques est soutenu à bout de bras par les ceusses essayant de comprendre les grilles tarifaires des opérateurs de téléphonie. Les petits qui se croient malins, bien imbibés du concept libéral, mettent les entreprises en concurrence, alors qu'elles se sont arrangées dans leur dos depuis lurette, pour bien les plumer. Et bien sûr, évitez de tomber en panne, car salée sera la facture. L'attente avant la mise en relation, puis l'exposé des doléances est payant. On vous menace, vous qui n'y connaissez rien et qui appelez au secours : "vérifiez bien que la panne ne se situe pas à l'intérieur de votre logement, sinon notre technicien sera obligé de vous facturer sa prestation". Alors là, normal, vous demandez "combien ?", et la réponse vous file un tel coup de taser que vous raccrochez.

Je n'évoque même pas ceux qui manifestaient aujourd'hui pour tenter de sauver quelques bribes d'avantages acquis. Le code du travail a été déchiqueté, haché menu, mixé, centrifugé, jusqu'à en obtenir une pommade à consistance de vaseline, si vous voyez ce que je veux dire ?

L'Etat nous prend pour des cons, l'Etat nous rend cons.

Et d'entendre l'autre Napoléon le petit tenant à rappeler ... que le service public appartient au public après avoir tout fait pour le privatiser et le démanteler, et ben ça me fait légèrement mal aux seins, sans du tout me remettre dans le chemin de la bonne humeur.

jeudi 22 janvier 2009

Saoul-FifrePasse-moi le SEL

Non, pas du "NaCL", il paraît qu'on en mange trop , que les industriels nous en rajoutent à tire-larigo, que ça leur fait de la saveur "à pas cher", tout le monde sait qu'une quiche lorraine presque trop salée est délicieuse oui mais voilà, c'est mauvais pour la santé, ça encrasse les corps spongieux et les canaux séminipares et je vous le redirai pas deux fois.

Non, je vous parle des SEL

Le Système d'Échange Local existe depuis très longtemps et nous vient des Etats-Unis. Ça me devient de plus en plus difficile de rester anti-américain primaire, avec Al Gore, Obama, Chomsky...

Le premier SEL que j'ai connu était en Ariège, en 1994, département dont l'annuaire téléphonique a des allures anorexiques mais qui est toujours à la pointe des innovations. Le pouvoir, sentant le danger du truc, passa à l'attaque et exprima des tas d'opinions désagréables comme quoi on lui volait de la TVA, des taxes d'URSSAF, des impots sur le revenu, que c'était pas sympa et qu'on allait voir ce qu'on allait voir.

Ce fut vite vu : la jurisprudence réaffirma la légalité de ce système parallèle à condition qu'il reste dans des limites traditionnelles d'entraide entre amis et voisins. Mais rien n'empêche d'en créer dans tous les villages et de les fédérer et de nous associer entre nous et de foutre en l'air ou au moins de mettre une bonne grosse claque au pouvoir économique dominant. Qui connaitrait une vraie décroissance positive tandis que le développement des SEL surferait à la montée sur des graphes nous rappelant le dynamisme des années 70.

Car les SEL ne sont ni plus ni moins qu'un vrai système économique révolutionnaire avec création de sa propre monnaie : Le grain de sel. Selon le groupe et ses statuts, le grain peut avoir un cours en €, mais la plupart du temps, le grain est une unité de temps, ce qui a l'avantage de l'égalité : la minute de l'informaticien va être rémunérée pareil que la minute du maçon ou de son arpète.

Ça sent son Insurrection qui vient , non ?

En pratique, chaque membre du groupe publie ses compétences ou les objets qu'il propose à l'échange, et aussi ce dont il a besoin, dans un catalogue des offres et des demandes dont tout le monde prend connaissance sur le site de l'association.

Exemple : à la dernière assemblée générale, une petite brunette s'approche de moi, me demande ce que je propose et me parle de son problème : une haie à tailler et un pin dangereux pour sa maison, à tomber. On discute du prix de l'heure, en rajoutant un petit quelque chose pour la fourniture de matériel (tronçonneuse) et je viens lui faire son chantier. Elle marque le nombre de grains de sel dont nous avons convenu, dans la colonne "crédit" de ma feuille, signe et met son numéro d'adhérente. Waw, je suis riche, je lui demande ce qu'elle a à me proposer. Elle me dit qu'elle est coiffeuse, regarde l'approximatif agencement de ma chevelure et éclate de rire. Je lui confirme qu'elle ne doit caresser aucun espoir de m'avoir un jour comme graindeseleur mais que ma fille sera peut-être intéressée, ce qui se confirmera.

Si ce qu'elle propose ne me convient pas, je peux très bien aller craquer mes gains chez autrui, simplement muni de ma feuille de "crédit". Mais même si je suis débiteur, j'ai quand même le droit de dépenser. Le système est très souple et très libéral dans son principe. Certains adhérents ne sachant que offrir doivent apprendre à se laisser "aider", pour dépenser leurs grains qui n'ont une valeur qu'à l'intérieur de l'association, bien sûr. Il y a aussi les "surendettés", comme dans la vraie vie. Et bien, des "sages" de l'assoce viennent faire le point avec eux sur leurs compétences, sur ce qu'ils pourraient "offrir" aux autres pour leur faire plaisir.

Et tout rentre dans l'ordre.

J'ai toujours eu du mal avec les rapports d'argent. Je n'ai jamais su me vendre. Quels qu'étaient les travaux que je faisais pour d'autres, même dans des domaines sophistiqués où je pouvais me targuer de 10 ans d'expérience, je me suis toujours compté au SMIC. C'est plus simple. Ou alors, si je culpabilisais encore, je proposais des échanges. Même avant les SEL, je fonctionnais comme ça. Récemment, un ami m'a fait plaisir en me présentant ainsi à quelqu'un : "Saoulfifre ? Il fait tout le temps du troc !"

D'ailleurs, je dois un litre d'huile d'olive à Nathalie, en échange de son dernier opus . On attend de se rencontrer pour solder les comptes et faire les niveaux.

Et puisqu'on en parle, je tiens à signaler à l'aimable compagnie que l'année oléicole a été bonne, en quantité comme en qualité, et que, les stocks provencaux étant à leur plus haut niveau, les prix n'ont jamais été aussi bas. Bon, c'est quand même un produit de luxe, l'huileu d'ooooliveu garantie d'ooorigineu prooovençaleu, hein, ne l'oubliez pas ?

Toujours est-il que sur une base de 12 € le litre, en bidon de 5 L (plus le port, à moins que je passe devant chez vous, ou vous devant chez nous), j'attends vos propositions de troc. Ou d'achat bête et méchant, selon l'ancien système monétaire bientôt obsolète.

Et je dis "Banco" à la proposition de Françoise Simpère pour les échanges livres contre huile.

Sans poser aucune condition restrictive quand à l'usage qu'elle pourrait faire du contenu de son bidon q:^)