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lundi 31 janvier 2011

Saoul-FifreL'auto trop fit

Oui l'auto en fit trop, nous dirons-nous quand nous vivrons enfin dans la société solaire, gratuite et jubilatoire que Reiser appelait de ses vœux.

L'autotrophie, c'est le cadeau que fit au monde le Père Noël et dont nous avons profité, sans le comprendre et sans nous poser de questions, pendant des siècles.

Trophos, en grec, la nourriture : qui se nourrit tout seul, comme un grand, de l'air du temps, sans exploiter, sans polluer, en toute indépendance. Autorenouvelable, il est bien là, le mouvement perpétuel auquel ne croient pas les spécieux, qui se propage sans problème depuis la nuit des temps et qui continuerait itou presque ad vitam aeternam s'il n'y avait l'intervention de l'Homme, toujours aussi godiche et vicelard. Car il a suffi que les scientifiques commencent à comprendre comment fonctionnait le phénomène, au XVIII et XIX ièmes siècles, pour qu'ils veuillent faire les malins et imiter la Nature, au lieu de rendre un culte à ces arbres si doués, comme faisaient les Celtes.

L'autotrophie, c'est, pour simplifier, ce que savent faire tous les végétaux, gratuitement. Grâce à leurs pigments chlorophylliens, ils captent la lumière, puis ils sniffent du gaz carbonique, pompent quelques minéraux dans la terre et fabriquent avec :

- De la biomasse, c'est à dire des légumes, des fruits, tous les végétaux, des médicaments, des herbes de Provence, des isolants, des tissus, des fleurs, des instruments de musique, des colorants...

- De l'oxygène (on en a pas : on meurt)

Je signale quand même aux abrutis qui nous gouvernent que tous les ingrédients cités sont gratuits et inépuisables. Dans le cas du gaz carbonique, je me suis laissé dire que l'on en avait de trop, raison de plus de développer la filière végétale. Quand aux minéraux nécessaires, toutes les plantes secrètent des acides qui savent décomposer la roche-mère et se fournir en potasse et en phosphates, entre autres.

Reste le problème de l'azote. Une terre pauvre en azote va se couvrir naturellement de légumineuses, plantes sachant fixer l'azote de l'air. À la mort de ces plantes, elles restitueront cet azote aux autres plantes. Et toutes les bêtes du Bon dieu mangeant ces végétaux, Humains compris, ont pris la bonne habitude, depuis toujours, de faire un caca riche en azote qui devrait revenir, en bonne logique, à ses anciens propriétaires. La boucle est bouclée. Les chinois ne s'embarrassent pas de ces scrupules mais nous pourrions réserver le compost de caca humain aux cultures pour animaux (maïs, colza, foin...) et le fumier de nos amis bovins, ovins, gallinacés etc... à notre usage (jardins, vergers, céréales...)

La preuve que cela marche à la perfection c'est l'arbre dans sa forêt. Le forestier ne s'en occupe pas. Point d'engrais, chimique ou bio, de traitements fongicides, de désherbants et autres insecticides.

De l'eau, de la terre, de l'air et de la lumière, et roule ma poule ! Ya plus qu'à récolter les chênes ou les sapins majestueux :

- Les gros troncs bien droits, sans nœuds, pour les meubles, les charpentes, et tout le reste, qui était en bois et qui est maintenant en plastoc.

- Les petites branches, les troncs tordus, pour le chauffage. On entend souvent : le chauffage au bois, c'est contraignant. C'est désormais faux pour les maisons individuelles ou les immeubles, à condition d'avoir prévu le silo à copeaux dans les plans initiaux. Le système se régule tout seul comme une bête chaudière à fuel ou à gaz.

Quand mon alcoolique anonyme, Tant-Bourrin, répète à tout bout de champ que l'énergie est trop bon marché, il parle du nucléaire et du pétrole, qui n'intègrent pas leur coût de démantèlement et de retombées écologiques. L'usine solaire, Photosynthez Incorporated Company travaille gratuitement, sans grèves, sans fatigue, sans marges injustes, sans pressurer le tiers-monde. Au contraire, elle est plus rentable dans les zones tropicales, à condition de maitriser le facteur eau.

Elle demande bien sûr de la main d'œuvre ou de la mécanisation, ne soyons pas contre le progrès. Mais pas de forages couteux, de recherches minières, de corruption. Vous savez combien ça coûte un dictateur ?

L'agriculture peut être utilisée pour corriger les excès actuels. Quand j'entends parler d'eutrophisation des lacs à cause des lessives à la potasse, je me dis : chouette ! Ya qu'à la récupérer, c'est de l'engrais ! Quand en Bretagne ils se plaignent du développement des algues à cause des résidus azotés des porcheries, je leur dis que les goëmoniers ont toujours ramassé les algues sur les plages. Et ils les revendaient très cher comme engrais ! Et là, ils pourraient même se faire subventionner par les zinzins (les investisseurs institutionnels) ! Dans la Nature, rien ne se perd, tout se transforme, il faut juste être là au bon moment pour récupérer la bonne molécule.

Il faut vraiment se débarrasser du système capitaliste, ya pas photo ! Ce qui est gratuit et décentralisé ne les intéresse pas ! Ils mettront toutes leurs forces dans la bataille pour que nous n'allions pas dans cette direction ! Comment voulez-vous qu'ils mettent un compteur sur le soleil ! Ils préfèrent exploiter jusqu'à la lie un produit que nous savons bientôt épuisé sur lequel ils peuvent prendre des marges ou des taxes énormes, sans aucune pensée ni respect pour les générations futures.

Plus le pétrole sera dur à extraire, rare et donc cher, plus ils gagneront d'argent.

Achetez une voiture électrique et rechargez-la au soleil, même en roulant !

Sinon, une découverte me semble intéressante, celle du Professeur Hideki Koyanaka. Si Procrastin est dans les parages, j'aimerais bien qu'il nous donne son avis autorisé. Le lien est en anglais et je n'ai pas tout saisi. Il s'agirait d'une photosynthèse artificielle dix fois plus efficace que la naturelle, qui déboucherait sur la fabrication de sucres et d'éthanol.

Alléchant, non, et ceci grâce à du dioxyde de manganèse, un produit pas hors de prix ? Vous croyez vraiment que les pétroliers vont laisser faire ces braves chercheurs ?

Si ce n'est pas un fake.

lundi 3 janvier 2011

Saoul-FifreÀ consommer glacé

Ce matin les arbres agitaient dans le ciel, avec une violence pathétique, leurs bras nus, secs et décharnés.

Le mistral pendant la nuit avait de nouveau lancé ses hordes réfrigérantes et leur haleine glacée à l'assaut de notre pauvre Provence. Et ne discutaillez pas, nordistes incrédules ! J'entends d'ici votre sourde et jalouse rébellion. Du haut de vos grands chevaux à la crinière enneigée ou verglacée, vous vous croyez dépositaire du froid lui-même, sous l'hypocrite prétexte que votre villégiature se trouve au septentrion du parallèle passant par Égletons. Mais vous êtes donc des barbares ? Aucune curiosité d'ordre géographique n'a jamais obtenu de visa pour pénétrer votre esprit ? Le Mistral, vous le saurez dorénavant, ne s'imagine pas plus qu'il ne se théorise. Il se vit, il se souffre, il se subit sans échappatoire possible. Le Mistral se saisit de chaque frigorie disponible et ne se contente pas de vous mettre en présence, précautionneusement, comme le font vos sympathiques zéphirs intermittents. Il vous fouaille les viscères avec, profondément, avec sadisme. Il vous congèle le cœur, vous bloque la respiration, vous fige la moelle, vous transforme votre dernière engelure généralisée en un doux et poétique souvenir.

Oui le Mistral en hiver en Provence c'est la cryogénisation gratuite et obligatoire.

Mais au cours des différentes glaciations que cette plus ou moins riante contrée a connue, l'Homo Çapince a eu le temps de bien se geler les glaouis, d'envisager diverses parades et d'évoluer progressivement vers l'Homo Sapiens, sage humain tel que nous le sommes devenus aujourd'hui. Car l'humain et l'humaine ont avant toute chose une âme de chercheur. Ils sont observateurs, ils aiment faire des expériences. Ils ont par exemple très rapidement découvert le principe de la fermentation, bien avant la cuisson ou la position du missionnaire. Il leur a suffi de simplement goûter les fruits tombés à terre, à moitié pourris, et d'en arriver, par un processus cognitif itératif incluant les concepts de causalité séquentielle, à la constatation d'un effet euphorique induit proche du "Hébélà chsais pas c'que j'ai".

Les diverses recherches autour du "liquide qui fait rire", ainsi qu'on appela cette nouvelle molécule, se poursuivirent sans presque discontinuer. Les béta-testeurs du nouveau produit, que, soit dit entre nous l'on n'avait aucun mal à recruter, s'aperçurent au cours de leurs divers essais qu'il ne se solidifiait pas au froid, comme les autres liquides. C'est le chasseur de mamouths Boooff qui, le premier, retrouva gelé son pot de jus de pruneau fermenté, qu'il avait oublié dehors. Il jeta le glaçon en grognant de colère mais lécha le fond du pot avec un plaisir évident, tout en fourrageant dans ses parties sexuelles. L'anti-gel absolu à usage humain venait d'être inventé et révolutionna cette période de notre histoire où nos ancêtres ne connaissaient pas encore le régulateur de température avec sonde thermique extérieure. On prit l'habitude préventive, dans les périodes gélives, d'en mélanger à l'eau de boisson dans des proportions suffisantes et de s'en imbiber abondamment l'intérieur du corps, dans un but exclusivement sanitaire de résistance au froid. Le sang circulant plus vite, réchauffait les extrémités et, cerise sur l'auroch, la morsure du froid semblait de toute façon moins féroce sous ce léger anesthésique.

On vit aussi que cela brulait à la perfection. On en arrosa les plats pour les faire flamber. On découvrit ensuite que même Boooff, le gars le plus vilain de la tribu, devenait joli garçon aux yeux des filles qui avaient goûté à ces liqueurs, et l'espoir renaquit dans les cœurs esseulés. Parallèlement, la horde développa des techniques de chasse plus industrielles contre les palombes et les autres volatiles qui leur volaient les fruits avant complète maturité et teneur maximum en sucre. L'idée de l'agriculture s'instillait lentement mais sûrement dans les cerveaux embrumés au cours des longues soirées d'hiver bien arrosées. Le travail de la terre est difficile, éreintant mais les esprits et les corps s'y plient volontiers quand ils en connaissent à l'avance la finalité joyeuse. La viticulture, l'arboriculture fruitière mais également celle des céréales, du houblon, de la betterave à sucre, tous les produits procurant en fait ces sucres lents que le manant n'aura de cesse de transformer en sucres rapides, bien plus festifs.

Le monde de la glèbe se structurait, trouvait ses marques, son but : lutter contre les météores glaciaux comme ce fichu Mistral nous emmenant gerçures et gélivures, certes, lutter contre la froidure, oui, mais surtout contre la froideur des rapports humains.

Et quoi de mieux que se mettre une bonne murge pour que s'effondrent les tabous, se disloquent les résistances, se relativisent les conflits, tombent les inhibitions et s'annihilent les contraires ?

Et avec modération, bien entendu. Vous l'aviez deviné, c'était sous-entendu, cela va de soi même si personne n'y croit une seconde.