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lundi 29 juin 2009

Saoul-FifreLe bon score des pipes

Issu d'un milieu paysan, j'ai toujours eu pour le sport l'œil noir du toro pour le torero. Ces feignants qui éprouvent le besoin d'aller se fatiguer après le boulot, ah y z'auraient remué 500 ballots d'foin comm' vous m'voyez là, on les verrait pas faire leur joguingue en pyjama fluo, c'moi qui vous l'dit !

N'ayant, ni mes parents ni moi, jamais eu la télé, je ne connus jamais non plus la tentation du sport en chambre, devant petit écran, une bière à la main en train de hurler mes encouragements à de vraies brutes musculeuses, au risque d'être filmé à mon insu et de faire la joie du public de Vidéo-gag, toute ma honte bue. Ah si ! Un Dimanche nous avions été invités à une "partie de jardin" pour les 40 ans d'un ami, barbecue/tonneau de rouge/piscine/pétanque, très chouette, nonon les parisiens, vous ne pouvez pas connaitre, c'est dommage peut-être mais c'est comme ça... quand vers la fin de l'après-midi je sentis un brouhaha, une ambiance fébrile s'emparer des éléments mâles présents. Dans le soir descendant, au lieu de s'extasier sur la chemise de nuit rougeoyante dont se drapait le soleil exténué, ils s'activaient, sortaient un grand écran par la fenêtre, alignaient des chaises devant ; nous concoctaient-ils un petit visionnage impromptu d'un de ces films mythiques que l'on peut revoir à l'infini sans se lasser ? Je m'en enquis et lus dans le regard ébahi, ahuri, abasourdi, stupéfié, statufié de mon ami toute la profondeur de mon excentricité et de mon marginalisme :

-"Quoi ? Tu ne sais pas que c'est ce soir la finale de la Coupe du monde ??"

- "Heu, tu n'es pas loin d'avoir raison... un jour je me souviens d'être allé au stade voir mon frère ainé qui jouait au rugby, j'avais 9 ans...". Je m'enfonçais, je sentais bien qu'il ne m'inviterait jamais plus : nous étions en 1998 et c'est la France qui gagna, je me suis dépêché d'oublier contre qui. Ce fut le seul match de foot que j'ai regardé du début à la fin. Vous mettrez à mon crédit moral que je n'en ai pas profité pour aller draguer leurs femmes pendant ce temps, je ne me valorise pas de ces facilités-là.

La notion même de sport, de sportifs me bloque. Les sportifs professionnels bien sûr : ils se sont spécialisés très jeunes, en faisant l'impasse sur tout le reste, sur tout ce qui fait la vie, la culture, la philo, la conscience politique. La bêtise abyssale (ça fait longtemps qu'on n'y a plus pied) d'une Laure Manaudou peut faire très peur, débouchant sans prévenir au coin d'une interview ! Les exceptions en sont d'autant plus sympathiques : le fin Rocheteau, le touche-à-tout Eric Cantona ou le réjouissant Yannick Noah

Mens sana in corpore sano tant que vous voulez, le corps est un outil dont il faut prendre soin, il ne faut pas qu'il rouille, que les tuyauteries se bouchent ou que le moteur cale. J'ai toujours été actif (un peu moins ces temps-ci), à crapahuter dans les bois, monter aux arbres, nager dans les étangs, pédalouiller sur les chemins vicinaux. Mais bon, c'est la vie toute simple, ça, ce n'est pas du sport, c'est juste ne pas rester scotché sur son fauteuil ?

Par contre, à l'école : cours d'Education Physique ! Tout de suite les grands mots. Des exercices complètement déconnectés du réel, que l'on devait exécuter sous les regards goguenards des autres, aux ordres glapis d'un petit fuhrer de gymnase qui ne considérait sa matière que sous le signe de la compétition, dans le but primitif de classer les élèves en "bons" (à caresser, à encenser, à tripoter, à embrasser sur la bouche, à féliciter, raviravi comme si le prof était le véritable auteur des exploits en question), et en "mauvais" (à humilier, à insulter, à ridiculiser, à livrer tout crus aux moqueries sadiques, à vouer aux enfers avec tous les autres résidus de fausse-couche d'intellos de merde).

Ah j'ai souffert, vous pouvez pas comprendre. Tout ce qui était gymnastique, athlétisme, j'étais nul. Mais pas le nul basique, sympathique, cossard, mot d'excuse de la maman et tout ? Le vrai beau nul de compétition, là oui, je les battais tous : j'étais le meilleur des nuls. À pas savoir faire une roulade. À ne pas toujours arriver à sauter le 0,90 en hauteur. Le dernier 15 mètres derrière les autres au 100 mètres, bien sûr, toujours.

Alors les sports d'équipe, là c'était encore autre chose. Plus pathologique. Le prof comprenait vite ma haine viscérale de tout ce qui est groupe, troupeau, horde, meute. En foot, on me mettait arrière, c'était bien, arrière. Je discutais avec le goal (le goal s'ennuie souvent), un peu inquiet quand même car il connaissait le niveau suprême que j'avais atteint dans l'art de l'esquive, quand arrivait le ballon. Un mauvais coup est si vite attrapé, avec ces couillons de jeunes bisons fonçant sans réfléchir, à la poursuite d'une obsession bien de leur âge : aller aux buts.

Les sports à 2, j'étais un peu meilleur, voire bon. Je ne sais pas pourquoi cette notion de se confronter, de se mesurer, à la loyale, les yeux dans les yeux, me plaisait. Un de mes profs était fan de lutte gréco-romaine et avait réussi à nous transmettre le virus. Je n'était pas bon, mais ça me plaisait, y avait du mieux. Le ping-pong aussi, c'est un jeu, ça doit m'évoquer les Dames ou les Echecs, enfin un truc de musclés du cerveau.

J'aime bien la confrontation, mais à 2. Dès qu'on est plus de 4..., vous connaissez la suite du poème. J'ai fait des milliers de kilomètres en vélo mais je ne me suis jamais intéressé aux champions cyclistes, ni au Tour de France. J'ai fait quelques courses mais toujours contre un pote, 1 contre 1 et que le meilleur gagne. J'ai eu mon époque tennis, également. j'aimais bien jouer à deux contre un fronton. Très physique. Plusieurs années de karaté, aussi. Moins que Poussin Rose, mais quand même ! En kayak ou en canoë mono place. Toujours mono place. La dernière fois où je suis monté dans un bi-place, je me suis engueulé avec le copain. La nage aussi. Quel est le plus rapide des 2 ? Il faut bien le savoir, merde ? Ce jour là, après une course de 1 km dans le Grand Lac du Parc des Expositions à Bordeaux, j'ai bien failli être le vainqueur ET le survivant, mais il me restait assez d'énergie pour aller sauver mon pôte épuisé qui se noyait, les pieds pris dans les algues, à quelques brasses de l'arrivée.

C'est contre soi-même que l'on se bat. Toujours.

Mais la grâce est de trouver chez l'adversaire le visage d'un ami.

vendredi 19 juin 2009

Saoul-FifreLe sujet qui fâche

Dans le style, c'est un must. Si on veut mettre à jour les tendances fâchisantes (sic) de quelqu'un, il est bien pratique d'avoir un simple prénom tel que "Dieudonné" à avancer dans une conversation.

Dans le genre provocateur, on peut difficilement trouver mieux.

Il a toujours été comme ça, il a toujours aimé frapper fort. Pendant 6 ans, avec son génial acolyte Elie Semoun, ils ont dynamité, pulvérisé toutes les formes de racisme. Le racisme étant une petite bête difficile à extirper de l'âme humaine, c'est sans doute par l'humour et le tournage en ridicule que l'on y arrive le mieux. Et sûrement pas en lui opposant un racisme équivalent en face, ce qui alimente la machine en carburant.

Cohen et Bokassa , par exemple, un petit bijou d'écriture qui assimile les conflits de soi-disant adultes à des embrouilles de gosses en récréation, met bien le doigt sur les sources du racisme : un manque de dialogue, une crispation autour des valeurs de sa communauté que l'on pare d'une supposée supériorité, une faiblesse de l'imagination et de l'espoir qui empêche de croire dans un monde meilleur.

Elie et Dieudonné se séparèrent en bons termes, chacun préférant poursuivre une carrière solo. Quand on en parle à Elie, celui-ci plaisante en précisant que c'était Dieudo le plus rapiat, le plus accro des deux aux royalties. Dieudo a eu son propre théâtre, La main d'or, très tôt, en 90, sa propre maison d'édition, etc... Je suis d'avis que ce côté "fils d'expert-comptable", fier de sa réussite artistique et conscient de son talent, explique assez bien la façon dont il a réagi aux attaques mettant sa carrière en danger.

Après avoir quitté Elie, il se lance dans la politique en se présentant contre le FN et sa candidate Marie-France Stirbois, à Dreux, aux législatives de 1997, où il fera un score honnête de 7,74 %. Il ne quittera plus l'arène politique, et la plupart des observateurs diront qu'il se "droitise" de plus en plus. Il votera pourtant José Bové au premier tour des présidentielles de 2007 (celui-ci récusera cette embarrassante recrue) et Ségolène Royal au deuxième tour (j'imagine qu'elle ne lui a pas prêté son micro non plus).

Parallèlement, il continue de nous régaler de ses sketchs hilarants. La fine équipe du 11 date de 2003. Quel talent, quelle intelligence et quel courage ! Car quel autre humoriste osera ainsi s'attaquer de front aux terroristes religieux, les déboulonner d'une aussi efficace estocade ?

Quand il met en scène un inquiétant roitelet africain, qui d'autre pourrait se permettre une telle gifle sans se faire traiter de sale colonisateur ? Dieudo est le meilleur car il n'hésite devant aucune énormité, qu'il est toujours profond et qu'il a refusé une bonne fois pour toutes le rire huhu de salon, bien consensuel qui ne vexera personne. Là, au débotté, sans réfléchir, je ne vois que Bénureau et Timsit pour jouer dans la même cour.

Et puis il y a eu l'affaire Fogiel qui a tout fait basculer. Affaire Fogiel où il n'y a eu que Fogiel de condamné, d'ailleurs. On dit que tout est parti de là, la décrépitude de Dieudonné, tout ça, ce qui est faux.

Tout a basculé en l'an 2000, quand Dieudonné a demandé au Centre National de la Cinématographie une avance sur recettes pour tourner le film-phare de sa lutte contre l'esclavage, "Le code noir". Et que le CNC a refusé, alléguant que l'esclavage n'était pas un sujet de film, alors qu'il avait déjà soutenu plusieurs films sur la Shoah et que les films sur l'esclavagisme, si l'on excepte "Autant en emporte le vent", n'encombrent pas nos écrans, c'est une évidence.

La paranoïa anti-sioniste de Dieudo a commencé ici, son délire de persécution vient du fait qu'il a vécu ce refus comme venant d'un "lobby sioniste" qui voudrait se réserver une espèce de monopole de l'horreur, avec la Shoah. Perso je ne connais pas les membres de la commission d'attribution de l'époque et je ne me prononcerai donc pas. Toujours est-il que le ton de Dieudo monte, se fait de moins en moins subtil, attire l'attention d'associations comme la LDH, la LICRA, l'UEJF, le Consistoire, etc et qu'ils ne le lâcheront plus, enchainant procès sur procès. Les cathos de l'AGRIF s'y mettront eux aussi. Finalement, les seuls à ne pas trop bouger, et il y aurait eu pourtant matière à fatwa, avec sa peu respectueuse "Fine équipe du 11", ce sont les musulmans. Voici des alliés tout trouvés, et, comme par hasard, ils ont en commun la critique de la politique d'Israël.

Jusqu'à fin 2003, jusqu'à l'affaire Fogiel et son sketch vraiment baclé sur un coin de table et pas drôle pour un sou , Dieudo était reçu à la télé, il était même réputé comme un bon client pour les talk-shows. De ce jour, il fut pestiféré, Ardisson l'invita une dernière fois pour lui signifier qu'il était grillé. Les copains jusque là solidaires (Elie, Djamel, Dany Boon, Gad Elmaleh, Alain Chabat, Guy Bedos...) s'éloigneront. Ses nouveaux amis sont tous pro-palestiniens et n'apprécient pas du tout l'axe du bien américano-sioniste, c'est le moins qu'on puisse dire.

Tout s'est passé très vite, il est le dos au mur. Il ne peut pas revenir en arrière, dans ses années de gauche utopique. Il est persona non grata dans les médias. Le bétar attaque son spectacle de Lyon (il y aura une blessée), son concert de l'Olympia aura lieu dans la rue, les directeurs de salles prennent peur et annulent ses dates. La tactique de ses ennemis est claire : ils le frappent au porte-feuille.

Il réagira en se cherchant des soutiens et par là, un public. C'est l'escalade et la découverte par ses anciens fans d'un parcours politique particulièrement chaotique et bizarroïde qui ne peut s'expliquer que par une idée-maitresse de vengeance supplantant toutes les autres : la meilleure défense c'est l'attaque. Les médias le boycottent, il va donc se faire sa pub sur leurs dos, en étant toujours au cœur de l'actualité, créant la surprise, causant le scandale.

Il se rapproche du FN, s'invite à une fête Bleu-Blanc-Rouge. Le Grand Timonier borgne se méfie de cet ancien adversaire soudain tout sourire qui va défendre un de ses lieutenants, Bruno Gollnisch, mais il se laissera séduire. Dieudo fricote avec Les Ogres, se lie avec Alain Soral et même avec le sulfureux Kémi Séba. Toujours à la recherche du "coup de pub" qui lui ouvrira les colonnes des journaux ou les écrans qui le rejettent, il convainc Jean-Marie Le pen d'être le parrain de sa fille et c'est l'abbé intégriste Philippe Laguérie qui la baptise. Hurlements généraux qui semblent mettre Dieudo aux anges qu'on parle de lui.

Apothéose de cette campagne de communication, il fait monter Faurisson le négationniste sur la scène du Zénith. Pourquoi ? Parce que c'est un monstre. Parce qu'il représente un tabou majeur à envoyer bouler. Pour s'amuser. Pour emmerder ceux qui l'ont emmerdé.

Et là il vient de monter avec d'autres branques une liste anti-sioniste. Qu'est-ce que ça peut bien avoir à faire avec l'Europe ? Ce n'est pas un peu restrictif comme programme ? Et un peu antisémite sur les bords ?

Non non, c'est juste pour faire chier. Ça fait très "ambiance de cour de récré". La boucle est bouclée. Dieudonné s'est transformé en un des personnages dont il se moquait avec Elie Semoun dans "Cohen et Bokassa".

Nananè-reu, on a fait 6,35 % à Gen-neu-villiers, c'est bien fait pour votreu gueu-leu !!

Moi je dis que si la commission du CNC avait accordé son avance sur recettes au "Code Noir", on en serait pas là.

jeudi 4 juin 2009

Saoul-FifreLe stress de 9 h 23

Ha quand il arrive, çuici, on aimerait bien le rater mais on est obligé de monter dedans et de faire avec.

Ho ya bien des solutions, yen a même plein, tout le monde a son "petit truc" plus ou moins efficace.

Le système "à la Calune", par exemple, c'est le tripatouillage. Et que je te tripote, et que je te détripote, et que je te retripote, le tout en tout bien tout honneur, bien entendu, ça se voit que vous ne connaissez pas Calune, pour avoir des idées pareilles ?

Non, le stress-toy a Calune est disponible en permanence (sauf rupture de stock) et s'achète pour une modique somme chez ces bienfaiteurs de l'humanité nerveuse et sur les dents que sont les gars du dindon point com. Il suffit de leur mailer donne la papate au monsieur et elle arrive chez vous, d'attaque.

Et vous vous mettez à malaxer ce truc et ça vous calme. L'erreur du débutant est de ne commander qu'une boite, car, comme c'est classique de se la faire piquer, ça vous énerve et tout est à recommencer.

Comme exception à la règle, vous avez aussi "la papate qui change de couleur quand on la tripote, mais que là, malgré toute l'ardeur que vous y mettez, elle reste rigoureusement du même jaune qu'au début".

Et bien évidemment, ça vous crispe un peu, c'est humain, vous avez hululé des tyroliennes haineuses pour moins que ça.

Le dindon.com ne travaille pas uniquement dans le destressage.

Si vous leur commandez ceci, par exemple , dont j'ai déjà parlé par ici n'en escomptez nul effet calmant, bien au contraire !

Bon moi c'est les sudokus qui me relaxent, c'est vraiment pas prise de tête, comme jeu, c'est le Destop des tuyaux de la tête.

Ya aussi le bruit de l'eau qui coule , qui me rend zen.

Toutes les tensions se dénouent. C'est magique.

mercredi 20 mai 2009

Mam'zelle KesskadieLa froide réalité d'une fraîche divorcée

Chers vous autres,

Je finis ma journée du jeudi mieux que je ne l'ai commencée. J’ai des matins comme ça, où je suis complètement rapapla.

Je ne suis pas allée travailler, question de santé mentale. J’avais une urgence, la mienne.

Ce qui ne va pas ? Tout et rien, il faut un an pour faire son deuil normal. Bon, j’ai pris un appartement après mon divorce voilà trois mois, donc, faut pas pousser trop fort dans la joie de vivre pour le moment.

Vous voulez que je vous raconte la vie d’une fraîche divorcée qui n'a pas les enfants cette semaine ?

Préambule fallacieux, je vous raconte pareil.

Constatation n°1 : moi qui ne savais pas épeler le mot budget sans faire de fautes, je me suis souvenu d’une certaine signification. Bref, je suis sans-le-sous.

Constatation n°2 : j’ai découvert de petites joies. Exemple : je peux mettre en boucle mon disque préféré sans que ça emmerde personne et mon voisin. Ombre de la chose : je l’ai tellement écouté que j’en suis écœurée. Va falloir que je m’en trouve un autre. Le hic ? Voir constatation n°1.

Autre petite joie : je peux manger chaud. On sait que la mère de famille doit nourrir les petits avant de se sustenter elle-même ce qui arrive quand le plat est rendu froid. Ombre au tableau : seule, on mange plus rapidement, donc, je me brûle la langue régulièrement, moi qui ai l’habitude du tiède.

Autre petite joie : je cuisine ce que je veux. Ombre au tableau : après trois fois d’un même plat mijoté, on mijote de passer à autre chose et on découvre les vertus du congelé.

Petite joie : le matin, on ne s’occupe que de soi-même. Ombre : le matin, on ne dit bonjour qu’à soi-même. Mieux vaut être de bonne humeur parce que ça part mal la journée si on a une face de bœuf.

Petite joie : on a l’ordi pour soi toute seule. Ombre au tableau : aucune, té ben pour ça en ti péché !!!!.

Dans les joies de la fraîche divorcée, elle n'a plus à dire : qui c'est qui a pris mes ciseaux ? L'ombre, c'est de se dire : où c'est que j'ai bien pu les mettre ? Personne d'autre que soi à blâmer. À moins de croire aux extraterrestres venus voler la serpillère pour étudier le mode de vie des humains.

Ai-je la foi t'à ce point ?

Constatation n°3 : le sexe. Pour ce qui est de son sexe à soi, tout va, c’est l’autre sexe qui nous concerne de plus en plus (eh oui, il se peut que je sois encore plus préoccupée par la chose que par le passé). Donc, pour ce besoin essentiel et existentiel, il y a les clubs de rencontre. Pour ma part, voir constatation n°1. Allons donc à une solution plus gratuite, les listes de rencontre sur le web. Gratuites pour s'inscrire, mais si on veut parler à quelqu’un, il faut s'abonner (payer), voir constatation n°1. Tant pis, le crédit existe pour les besoins essentiels, vivement visa.

Voyons voir, étant donné que j'ai vieilli et grossi, je suis plus difficile pour le partenaire et moins désirable pour ledit homme. Ça promet.

Premier critère : Comment le futur candidat parle-t-il de son ex-femme ? Si le sire est potable, il ne la lapidera pas de ses postillons vengeurs et amers.

Donc, s’il parle en bien de son ex : la question qu’on se pose alors, pourquoi se sont-ils séparés ?? De deux choses l’une, elle l’a planqué là et vous ne voulez pas de restants, ou il est encore amoureux et vous avez une rivale avant même d'embrasser le prince. Vous sourcillez en regardant d’un air suspicieux le dit candidat.

S’il parle en mal de son ex, il n’a absolument aucune introspection. S’il choisit aussi mal ses partenaires, pourquoi donc vous choisit-il vous, ce qui vous met mal à l’aise et vous regardez d’un sourcil hautain et d’un air suspicieux le candidat.

Constatation n°4 : le vocabulaire utilisé dans ces lieux internet a des définitions aussi nouvelles qu'inattendues ; petit dictionnaire pour débutantes :

Poids santé : ne veut pas dire être en santé et avoir du poids, mais bien, ne pas avoir de poids.

Être ouverte d'esprit : comprenez : vous savez bien où les hommes situent l’esprit.

Passé réglé : carte de crédit à zéro , ex-partenaire proche du décès. Enfants plus de quinze ans pouvant se garder seuls. Chien entraîné et castré. Toiture de maison changée et tablettes d’appartement posées.

Sportif : incroyable le nombre d’hommes sur ces listes qui sont actifs, sportifs ! Dire que Santé-Canada dépense des fortunes pour faire la publicité des joies de la gym… il devrait plutôt investir pour que les couples mariés puissent se payer des gardiennes, les hommes mariés doivent être les seuls hommes qui ne bougent pas, ils pourraient au moins sortir avec leurs femmes.

Couple ouvert : les deux n'ouvrent pas rien que leur porte, mais les jambes à n’importe quoi. Soyez prête à faire de même.

Ensuite, il faut trouver un surnom pour ce genre de correspondance. Vous comprendrez que nombre de Louises et de Sylvies ainsi qu’une armée de Michelines se présentent comme la candidate idéale au candidat idéal, faut se démarquer.

Le mien ? Kaféeine. Une trouvaille n’est-il pas ? Ça dit que j’aime le café et les fées. Tout moi. D’accord, il existe quelques petits à cotés de moi qui ne sont pas visibles dans ces quelques syllabes, mais pensons que Féedusexe ou Féedubourrelet seraient des surnoms qui rendraient la recherche incertaine pour repêcher le candidat idéal à présenter à mes nombreux enfants et à mes copines intellectuelles.

Voici le palmarès de mes succès internet.

Premier candidat en lice : Stratos heu non, Saltos. Moi pis ma mémoire des noms… en tout cas, Saltos est égyptien grec. Après deux mails, il me propose de devenir sa princesse puis sa reine égyptienne. Je veux bien moi, tiens, enfin le prince charmant !!! Je me doute que le baiser requis est un peu plus élaboré que celui de mes contes d’enfants, mais , enfin.. toujours est-il qu’il m’envoie la photo. Il a le même sourire que monseigneur Ébacher, valeureux évêque de mon diocèse, qui est un bon vivant, bon, c’est toujours ça de pris et de grandes oreilles me semble-t-il. Bof, nous avons certains princes ayant les mêmes caractéristiques, tout baigne. Il réclame une entrevue. Le hic, il est de Montréal. Là, ça se corse. S’il se pointe à Gatineau et qu’il espère consommer le même soir, faudrait qu’il me titille plus les hormones que Monseigneur Ébacher. Et s’il faillissait, je l’envoie dormir chez une copine en le présentant comme un ami de mon cousin qui a besoin d'un toit pour ce soir ?

Je pourrais toujours aller à Montréal, mais voir constatation n°1.

Cochonplus, ….. est deuxième en lice. Je ne lui ai pas répondu à la première missive, son nick ne m’inspirant pas confiance dans ses intentions profondes, j’ai quand même cédé à la deuxième tentative surtout qu’il avait utilisé un mail payant. Cochon, mais pas cheap. Du bon lard quoi. Mais quelque chose me dit que ça n’ira pas loin quand je lui ai dit que je n’étais pas intéressée par des aventures d’un soir. (Bien sûr que c’est pas vrai, mais vous n'allez pas lui dire, n’est-ce pas ?)

Autre candidat, pas de photos (au fait, il s’est passé quelque chose, j’ai été des mois sans messages, là, j’ai eu trois messages la même journée. Quelqu’un a du faire de la publicité pour moi dans un journal…), donc, voici TBIEN100. Hé oui. De la grande littérature. Voulait-il dire, TesBIEN sans moi ou très bien, 100 %? Je vous fais un suivi. Il veut correspondre, mais moi, méfiante, j’exige une photo. Ah ah!!! Ça me ferait de la peine de correspondre avec l’ex de ma voisine , qui plus est, avec l’ami de mon fils.

Constatation n°5 : je me demande quel saint est dévoué aux femmes divorcées, de bon poids et en santé, n’ayant pas l’esprit si ouvert que ça et un nick si bien trouvé.

Constatation n°6 : il parait que le sexe fait une peau resplendissante, pour le moment, ça me fait une belle jambe.

mercredi 13 mai 2009

Saoul-FifrePierre Dac, le pire des cas ?

J'ai 8 ans, je vis dans un pays qui n'était pas le mien il y a encore 2 ans, j'ai les oreilles dépliées comme des paraboles, je suis curieux jusqu'à l'avidité mais mon monde se résume à ma petite école à classe unique et à la ferme de mes parents, perdue au milieu des grands bois périgourdins.

Le soir je rentre à bicyclette du village distant de 6 kilomètres. Je n'ai pas de devoirs à faire. Il y a un seul maître, donc nous travaillons seuls pendant qu'il enseigne aux autres niveaux. Je ne sais pas comment fait la jeune génération actuelle, mais nous, nous avions un trou au fond des oreilles et les mots du maître se déversaient par là directement dans nos cerveaux.

Rentré à la maison, je crapahute, je me bricole des trucs, n'importe quoi m'est jouet, je me raconte des histoires, je parle tout seul. Je lis. Beaucoup. Nous n'avons pas la télé mais une grosse radio PO GO FM OC trône dans un coin, assez souvent allumée. À cette époque, le présentateur annonce le nom du chanteur et même souvent l'auteur des paroles et de la musique. On a droit à une bonne part de sketches aussi. Il y a des feuilletons, et puis du théâtre, dans l'après-midi.

Et puis en début de soirée, à 18 h 45, à l'heure où selon les saisons je regagne mes pénates, mais l'important n'est pas là puisqu'en été j'abandonne tout, rien ne peut m'empêcher de rentrer écouter ce truc extraordinaire, ce feuilleton atypique qui ne ressemble à aucun autre : "Bons baisers de partout".

Le titre, déjà ? Ouvert, chaleureux, non-restrictif, et bien sûr sans aucun rapport avec le contenu car je viens de mettre un pied, non, une oreille chez les loufoques et chez le plus doux-dingue d'entre eux : Pierre Dac.

Ma mère me voit rentrer en courant dans la cuisine à l'heure dite. Son petit sourire est un peu d'ironie à me voir si mordu mais aussi de plaisir attendu car Dac l'enthousiasme également. Quand les allusions dépassent ma petite culture, elle est là pour m'expliquer les jeux de mots. Car il faut savoir qu'il existe un film nommé "Zorba le grec" pour apprécier le nom du méchant espion "Zorbec le gras", dont Roger Carel faisait la voix. Leroidec, le représentant en enclumes, c'est bon, je comprends tout seul. Fermtag aussi. Giorgio Loffismodi aussi, on a un disque d'Aznavour à la maison, avec "La mamma" dedans. Et est-il besoin d'une grande analyse sémantique pour se laisser gagner par le comique de sonorités quand intervient la "Comtesse Wanda Vodkamilkévitch veuve du général comte Alexis Vodkamilkévitch, née Catherine Legrumeau"?

Nicolas Leroidec, alias SGDG 06 1/2, puis alias inter 18 29 (la fréquence de France Inter sur les grandes ondes), joué par Paul Préboist est un magnifique anti-espion, hilarant dans son contre-emploi. Impossible de prévoir à l'avance ce qui va lui arriver, c'est du grand n'importe quoi. Pour se débarrasser de poursuivants, il jette par la fenêtre de sa voiture une boite de lacets car c'est bien connu, "les lacets sont dangereux dans les routes de montagne" !

L'opération "Tupeutla", ce sont les gesticulations de la France pour garder en sa possession l'irremplaçable invention du Professeur Slalom Jérémie Ménerlache, j'ai nommé le Biglotron , qui n'est en fait qu'un schmilblick à bidule. Oui oui, C'est Pierre Dac qui a inventé le Schmilblick aussi, bande d'incultes, ce n'est ni Guy Lux, ni Coluche !

En tout cas, ça marque à vie, ce genre d'expérience auditive. Que peut-on prendre au sérieux ensuite ? La politique ? Ben non, on s'est inscrit d'office au Parti d'en rire qui tient toujours ses promesses puisqu'il ne nous en fait aucune. Les disputes ? Au sujet de qui de quoi ? Il suffit de se remémorer sa Tyrolienne haîîîîîneuse pour en saisir toute l'inanité.

Je me suis fait traiter de vieux tromblon par Mademoiselle Dusk récemment, en citant mon Maître "63" (elle a disparu, quelqu'un a des nouvelles ?) mais il me semble qu'il y a de l'éternité, de l'intemporalité chez Dac. Quand on pense qu'il est né en 1893 et qu'il a été poilu de la grande guerre ? Quelle jeunesse !

Pour notre mariage, nous avons eu droit à son célèbre discours passe partout valable pour toutes les circonstances, bien pratique, ceci dit. Faut dire que mon cousin Jean-Baptiste Plait était de son vivant le meilleur interprète de Dac (et d'Alphonse Allais aussi, soyons honnêtes).

Je n'en sors pas.

Allez, une dernière de ses "petites annonces", pour la route :

Monsieur à qui on ne la fait pas cherche dame à qui on ne l'a pas fait

lundi 16 février 2009

Saoul-FifreFredo

Fredo (le froid, en italien) c'est mon pôte. On se connait depuis tant de temps. Faut dire que je suis né en 1956, l'année "où les oliviers ont craqué" et que, même en Algérie, on m'a confirmé qu'il avait gelé cette année là.

Non je ne m'en souviens pas moi-même.

Et puis on a débarqué en Périgord, en fin de période de petite glaciation. Je déconne pas, ça caillait sec à l'époque, on avait de la neige tous les ans, et les étangs gelaient, et je me farcissais mes douze bornes quotidiennes à vélo, les bouts de mon nez et de mes oreilles et de mes doigts (de pieds et de mains) s'en souviennent encore. Quand il neigeait, ben j'y allais quand même, à pieds. Comme j'étais "le plus loin", au bout de quelques kilomètres, je rencontrais le ramassage scolaire municipal de l'extrême : un tracteur avec une remorque-traineau, dont le V à l'avant faisait chasse-neige. Moi et mes copains, on faisait "poids" et le paysan nous emmenait à l'école tout en dégageant les voies communales.

Le Maître, lui, il habitait DANS l'école, il ne pouvait donc pas nous raconter que sa voiture avait pas pu démarrer ou que son petiot avait attrapé la grippe. On ne peut nier une efficacité certaine à ce système. Ho hé, silence dans les rangs syndicaux ! Il ne cotisait pas "aux intempéries", que je sache ?

Je vous vois venir, certains, qui pensez : "mais il cherche à nous faire pleurer ou quoi, moi, en Alsace, avec une simple petite machine à laver à chargement frontal pour me chauffer, oui, moi j'ai souffert..."

Non mais c'est pas pareil. Nous on aurait été nominés pour le César de la chaumière à trous-trous, pour le prix Coeff-G (plus il est élevé, moins votre isolation est bonne), pour le concours des miches fraiches, patronnées par Madame de Gouttonay...

On avait une cuisinière bois-charbon dans la cuisine, avec un bouilleur couplé à 3 radiateurs. Comme la maison était de plain-pied, qu'il n'y avait pas de circulateur et que le tuyau de retour d'eau froide passait lui aussi en haut de la pièce (petites précisions techniques pour les ingénieurs thermiciens), vous imaginez le rendement du thermo-syphon.

Ma mère, femme au foyer, alimentait en bois pendant la journée, et, le soir venu, m'envoyait à 100 m de la maison chercher un seau de charbon dans un silo humide sans lumière, la dose pour la nuit.

Oui-oui, tout comme Cosette. Je reperdais en quelques secondes les quelques calories que j'avais gagnées en claquant des dents pendant une heure, collé contre la cuisinière.

Positivons : la cuisinière, en posant une cocotte en fonte en bout de plaque, éloignée du foyer, permet de mijoter des plats d'un autre monde, que vous pouvez toujours essayer d'imiter avec votre micro-onde, fut-il perfectionné.

Mon lit était judicieusement positionné au Nord, contre un mur en torchis dont je pouvais vérifier l'humidité à ma guise, en posant la main dessus. Mais il faut reconnaitre que ma mère ne lésinait pas sur la couverture. J'ai un peu l'impression d'avoir passé mon enfance à détricoter de vieux pulls qu'elle récupérait par le biais de sombres réseaux sous la coupe de la diaspora vaticane, d'après certaines rumeurs. Je me revois les deux avant-bras parallèles faisant des moulinets pour suivre le fil de son détricotage. Ensuite la laine était reprise en pelotes rondes très serrées, pour qu'elle perde sa forme en zig-zag préjudiciable à son bon retricotage.

Et puis nous nous mettions, mes sœurs et moi, à confectionner de petits carrés de quinze sur quinze, au point-mousse, qui, assemblés, deviendraient de grands damiers à cases multicolores qui nous sauveraient la vie par les grands froids. Oui-oui, moi aussi je tricotais : le but était clair, louable et suffisamment motivant.

Dans la seule pièce chauffée, soyons francs, le thermomètre accroché à la droite de la porte d'entrée marquait 16, et 13/14, voire moins, en fin de nuit. Dans les chambres, il n'y avait pas de thermomètre et cela valait mieux pour tout le monde : ce qu'on ne connait pas ne peut pas nuire. Un hiver d'onglée particulièrement féroce, ma mère s'était faite prêter, toujours par sa catholic-connection, des couvertures électriques. Nous apprîmes plus tard par les journaux le point commun que celles-ci pouvaient avoir avec la chaise du même nom, mais comme il y a un bon dieu pour la racaille, nous en réchappâmes.

Syndrome d'Edmond Dantès, quand on a connu le pire, la vie devient un tapis de roses, on l'apprécie comme nul autre, tout a la saveur du "mieux".

Je passerai mes jours jusqu'au dernier à remercier mes parents d'avoir été pauvres (et travailleurs), à m'avoir appris à me contenter de peu, à ne pas me plaindre et aussi à chercher sans relâche dans la botte de paille de la détresse l'indispensable petite aiguille de l'humour.

Quand une envie me prend de me griller la cervelle, je le fais à feu vif en saupoudrant d'ail et de persil.

vendredi 30 janvier 2009

Saoul-FifreRégression

Ha j'adore écrire des billets de vieux con, surtout depuis que je suis assuré du soutien indéfectible et redondant de mon aîné Andiamo. Enfin, je me comprends : quand je dis "j'adore", c'est faux, j'aimerais de tout mon cœur que la matière me manque, que mon analyse soit bancale, que n'importe quel optimiste béat me ridiculise en 2, 3 coups pleins d'évidence, mais malheureusement, il suffit juste d'un peu de mémoire, et la mienne, pourrie, est encore de trop : le progrès recule, ô oui ô oui, ils nous enculent.

Nous vivons tous convaincus que le monde va vers le mieux, que nos grands-parent étaient des primitifs à peine descendus de leur branche et que nous seuls avons su évoluer en bien, en ne conservant que la malignité du singe, notre ancêtre.

Et ce mythe mensonger a la dureté et la durabilité de la carapace de la tortue têtue puisqu'il nous manipule depuis que l'homo ça pience et plus particulièrement depuis le fardier de Cugnot.

En vérité, je vous l'affirme, les choses et les gens évoluent en bien ou en mal, c'est selon, et je n'en veux pour preuve que mon expérience, identique à tant d'autres.

Quand j'étais petiot, le secret des correspondances privées était un commandement d'ordre divin gravé dans le marbre PTT. Si pour une raison ou pour une autre (mauvaise adresse, enveloppe tombée dans l'eau...) une lettre ne pouvait être remise à son destinataire, elle prenait la direction de Libourne. Là, une petite équipe, assermentée, avait seule le droit d'ouvrir le pli litigieux à la recherche d'un élément permettant de finaliser le noble travail postier : acheminer le message à son destinataire, sans que nul ne l'intercepte.

Aujourd'hui, n'importe quel enquêteur peut se faire communiquer nos mails, nos textos, nos mouvements de banque et pister notre carte bleue. Cela fait 20 ans que l'on nous a révélé l'existence de la NSA et du système ÉCHELON. L'outil n'a pu que s'affiner. Bien que tout soit perfectible.

Quand j'étais petiot, les routes étaient sûres : il y avait peu de véhicules et ils ne roulaient pas vite. Ça parait dingue, mais n'avaient pas encore été inventés : les ceintures, les sièges bébés, les éthylo-tests, les radars. Il y avait bien une vitesse maximum mais rien pour mesurer son dépassement. On pouvait rouler bourrés ! Pas de niqueurs d'amortisseurs à passer à 5 à l'heure maximum. Pas de contrôles techniques. C'était de l'économie durable, les pare-chocs attachés avec du fil de fer !

Aujourd'hui, ô misère, enfin, vous m'avez compris.

Quand j'étais petiot, il y avait une gare dans le moindre petit village, avec des trains tout le temps, et pas chers. Si on remonte encore un peu en arrière, il y avait même une troisième classe ! Les pauvres pouvaient voyager pour des nèfles. On achetait son ticket pour un trajet et si on changeait d'avis, il restait valable toute l'année. On pouvait le refiler ou le revendre à quelqu'un... Quand on ratait son train, on prenait le suivant. On descendait à une station, à la poursuite de cette jeune fille au manteau rouge, puis on reprenait son voyage, trois mois plus tard. Avec le même billet. Le train, c'était la liberté qui pelotait la poésie.

Aujourd'hui, toutes les petites lignes qui desservaient les villages de montagne et autres tréfonds culiers ont été démontées. On a revendu les gares et les maisons de garde-barrières. Le prix du ticket change toutes les deux heures : attention il remonte, vitevitevite, hé merde il a rebaissé, je l'ai acheté trop vite. On se croit en train de jouer en Bourse, mais pour revendre les titres et faire des bénefs, macache ! Votre billet est nominatif, inéchangeable et valable sur ce seul train. Ou alors c'est que vous l'avez payé dix fois le tarif de base, et dans cet unique cas là, vous avez six minutes chrono pour courir l'échanger au guichet contre une place dans le train suivant. S'il en reste. Où que vous habitiez, il vous faut passer par Paris pour aller autre part. Il n'y a plus que six lignes : Paris/Biarritz, Paris/Brest, Paris/Lille, Paris/Strasbourg, Paris/Marseille et Paris/Toulouse est sur la sellette (rentabilité limite).

Quand j'étais petiot, on titillait le levier qui faisait venir la demoiselle des PTT et on lui demandait par exemple le numéro de Manou (le 69 à Asnières). Le prix de l'appel local était de quelques centimes et l'on parlait tant qu'on voulait, de tout et de rien. Le service après-vente était global et gratuit : sur simple appel (gratuit) au 13, un réparateur débarquait illico et réparait la panne, comme son titre l'indiquait. Il changeait le poste si c'était le poste, retirait le fil si c'était le fil, replantait un poteau si un chauffard l'avait fauché à ras, changeait les para-foudres s'il y avait eu un orage, le tout gratuitement, sans essayer de vous culpabiliser et avec le sourire dû à tout client.

Aujourd'hui, le marché des céphalalgiques est soutenu à bout de bras par les ceusses essayant de comprendre les grilles tarifaires des opérateurs de téléphonie. Les petits qui se croient malins, bien imbibés du concept libéral, mettent les entreprises en concurrence, alors qu'elles se sont arrangées dans leur dos depuis lurette, pour bien les plumer. Et bien sûr, évitez de tomber en panne, car salée sera la facture. L'attente avant la mise en relation, puis l'exposé des doléances est payant. On vous menace, vous qui n'y connaissez rien et qui appelez au secours : "vérifiez bien que la panne ne se situe pas à l'intérieur de votre logement, sinon notre technicien sera obligé de vous facturer sa prestation". Alors là, normal, vous demandez "combien ?", et la réponse vous file un tel coup de taser que vous raccrochez.

Je n'évoque même pas ceux qui manifestaient aujourd'hui pour tenter de sauver quelques bribes d'avantages acquis. Le code du travail a été déchiqueté, haché menu, mixé, centrifugé, jusqu'à en obtenir une pommade à consistance de vaseline, si vous voyez ce que je veux dire ?

L'Etat nous prend pour des cons, l'Etat nous rend cons.

Et d'entendre l'autre Napoléon le petit tenant à rappeler ... que le service public appartient au public après avoir tout fait pour le privatiser et le démanteler, et ben ça me fait légèrement mal aux seins, sans du tout me remettre dans le chemin de la bonne humeur.

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