F, ma charmante collègue de bureau à fleur de peau, parle et commente absolument tout ce qu’elle fait. J’aime bien. Ça me rappelle les bercements de mon enfance. Ma mère parlait aussi beaucoup.

Un matin, plongée dans mes colonnes de descriptions, j’eus de la peine à remarquer que F était bien plus à cran que d'habitude. Il a fallu que quelqu'un entre et lui dise « Tu vas bien ? ». « Non » répondit F. Je jugeais le moment opportun pour aller aux toilettes. Sur le chemin du retour, dans un couloir en baies vitrées donnant sur le vide je me résolus à lui poser la question.
- « Ça ne va pas, F ? ». Elle avait les larmes aux yeux.
- « Tu n’oses pas dire quelque chose à quelqu’un ? », poursuis-je.
- « Tu gardes pour toi ? ». Et là, F éclate en sanglots. Elle me décrit son ras-le-bol, l’impression que le chef lui met la pression constamment, ses presque 4 heures de transport par jour, sa fille qui veut quitter la maison...

J’ai fermé la porte. Puis je lui ai conseillé de préparer un entretien où elle parlerait, (1) des difficultés environnementales (le transport, les nouveaux outils informatique à intégrer, etc…, (2) du détail de sa charge de travail (ce qu’elle peut faire et ce qu’elle ne peut pas faire dans les délais). Pour sa fille, je n’ai rien dit, évidemment. Dans l'absolu j'aurais voulu fermer complètement ma gueule, la prendre dans mes bras et l'écouter.

F a encore pleuré un bon moment. Nous sommes allées manger au restaurant, elle n'avait pas envie de la cantine. Puis j'ai couru sur le Parvis et devant la tour Gan ai poussé un grand cri (intérieur).