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lundi 30 mars 2009

AndiamoDouleur !

Ernest Chapoutier était un petit bonhomme sans histoire, célibataire, on aurait pu dire vieux garçon, un Monsieur "tout le monde", modeste employé de bureau. Il avait eu un mal de chien à passer à l’informatique quand, dans les années soixante-dix, la compagnie d’assurances qui l’employait, "Le Gagne Petit", s’était informatisée.

Il avait bien fallu s’y mettre sous peine d’un licenciement au motif de manque de compétences !

Pourtant, quelques années plus tard, cette même compagnie avait fait faillite, laminée, broyée, mise en pièces par sa concurrente et rivale : "La Musaraigne".

Chapoutier s’était retrouvé demandeur d’emploi, terme moins affligeant que celui de chômeur, mais c'était la même affaire !

Un soir, alors qu’il rentrait d’un entretien avec un employé de l’A.N.P.E., il croisa dans le couloir, son voisin, Séraphin Calanchard, veuf de son état et sans enfants.

- Bonsoir, cher voisin ! Je sais que vous êtes en recherche d’emploi ?

- Euh oui… avait balbutié Chapoutier.

- Ecoutez, si cela vous intéresse, un poste vient de se libérer à "La Musaraigne", la compagnie d’assurances dans laquelle j’assume une certaine responsabilité en tant que chef de bureau, avait-il prononcé avec un ton suffisant, et je peux vous recommander, si cela vous convient, bien évidemment.

- Merci, Monsieur Calanchard, ce sera avec grand plaisir, et je saurai me monter digne de votre confiance.

Pourquoi avait-il ajouté cela ? Rentré chez lui, il en eût honte. Faire partie de la compagnie qui avait été la cause de tous ses malheurs… Quelle humiliation !

On ne pouvait pas dire que Calanchard harcelait Chapoutier, non, c’était beaucoup plus insidieux et pervers, chaque jour et plusieurs fois dans la même journée, ce chefaillon relevait les fautes de frappes ou les erreurs bien minimes commises par son subordonné.

- Allons Chapoutier, ça n’est pas BIEN grave, mais tout de même il vous faudra faire plus attention la prochaine fois, n’est-ce-pas ?

- Oui, bien sûr, Monsieur Calanchard, s’entendait balbutier Ernest Chapoutier, encore un peu plus mortifié, à chacune des remarques de ce trou du cul imbu de sa petite personne.

Un jour, Calanchard proposa à Chapoutier de l’accompagner au stand de tir dont il était membre.

- Je suis inscrit dans un club dans lequel nous pratiquons le tir à l’arbalète, vous devriez m’accompagner un samedi matin, vous verrez, c’est très intéressant.

Afin de ne pas déplaire à son chef plus que par goût, Chapoutier s’inscrivit, prit une licence et s’acheta une arbalète. Bien sûr, pas du haut de gamme, ses modestes moyens ne le lui permettaient pas,

Tous les samedis, Séraphin et lui se retrouvaient au stand de tir. Calanchard l’emmenait dans son automobile, une golf VW. Tout au long du trajet, pas très long fort heureusement, Calanchard lui vantait les mérites et la supériorité des voitures allemandes. Chapoutier n’avait jamais passé le permis donc… pas de voiture.

Ça agaçait fortement Ernest, mais l’humiliation était à son comble lorsque, au stand, Calanchard, d’un carreau (nom donné aux traits de petites dimensions) aussi précis que bien ajusté, frappait la cible dans le "MILLE".

Douleur ! hurlait le maître d’armes, c’est l’expression consacrée, lorsqu’un trait, un carreau ou une flèche atteint le cœur de la cible.

Jamais encore Ernest Chapoutier n’avait entendu crier "douleur" lorsqu’il tirait, s’appliquant, ajustant, transpirant, retenant son souffle, immanquablement, le trait allait se ficher loin du centre.

Jamais il n’avait fait mouche, atteint le mille tant espéré !

Et l’autre salaud, condescendant, le gratifiait d’un "ça viendra mon vieux Chapoutier, ça viendra !"

Un soir, alors qu’il était à sa fenêtre, il vit pour la énième fois sa voisine d’en face de l’autre coté de la cour qui se déshabillait. Elle prenait son temps, sachant que l’autre voyeur, ce Chapoutier, la matait !

Une fois, elle l’avait humilié : la croisant dans la rue, il avait osé l’aborder. Ses longues séances d’observations lui donnaient toutes les audaces, pouvoir serrer ce corps, caresser cette opulente poitrine que pratiquement chaque soir elle offrait à sa vue…

- J’aimerais Mademoiselle vous offrir un café, nous sommes voisins et…

- Ah oui ! C’est vous qui me matez chaque soir, je vous reconnais, vieux pervers !

Sous l’insulte, Ernest était resté sans voix, puis avait rougi. La plantureuse l’avait regardé droit dans les yeux, puis avait tourné les talons, accompagnant cette volte d’un grand éclat de rire. Chapoutier en avait gardé une rancune tenace.

Légèrement en retrait, il l'observait, elle prenait des poses, langoureuse femelle, balançant les hanches au rythme de "Summertime" divinement chanté par Ella Fitzgérald. L’aguicheuse transpirait un peu sous les aisselles, Ernest avait horreur de ça, alors il lui vînt une idée.

Faire d’une pierre deux coups, ou plutôt d’un trait deux vengeances.

Les portes des appartements se verrouillaient à l’aide d’antiques serrures actionnées par des clés en ferraille, énormes. Se procurer tout un trousseau au marché aux puces de Saint-Ouen fut un jeu d’enfant.

Un soir, Ernest alla frapper à la porte de son voisin :

- Monsieur Calanchard, vous êtes là ? C’est votre voisin, Chapoutier !

La porte s’ouvre, Calanchard est là, sans cravate, des pantoufles du "Docteur Jéva" aux pieds, il lève les sourcils en signe d’interrogation.

- Monsieur Calanchard, c’est mon anniversaire, aussi j’ai pensé que nous pourrions arroser ça, j’ai justement une vieille bouteille de calva, qui m’a été offerte, il y a un certain temps, par un cousin qui habite près de Caen.

L’œil interrogateur de l’interpellé fait place à un œil brillant et enjoué. Chapoutier avait observé à l’occasion des rares "pots" donnés, un départ à la retraite ou les veilles de Noël, que le père Calanchard ne crachait pas sur le goulot !

- Mais ce sera avec plaisir !

Les voilà tous les deux dans l’appartement de Chapoutier, deux verres, une bouteille presque pleine d’un joli liquide ambré, signe d’un long séjour en fût de chêne avant la mise en bouteille.

A la tienne, à la mienne, les verres se vident et se remplissent… Enfin surtout celui de Calanchard, car Ernest boit très peu, c’est toujours le même verre qu’il tient et qu’il vide de temps en temps, discrètement, dans le vase vide posé sur la table. Au bout de deux heures, la bouteille est quasiment éclusée.

Alors Calanchard se lève en s’agrippant à la table, il titube et, d’un pas plus qu’hésitant, se dirige vers la porte.

- Eh bien, mon vieux Ernest, tu permets que j’t’appelle Ernest ?

Le voilà qui se met à l’appeler par son prénom et à le tutoyer !

- Bien sûr, Monsieur Calanchard.

- Il me semble que j’en tienne une bonne !

Il sort sur le palier, se dirige d’un pas mal assuré vers sa porte, avec beaucoup de peine, trouve le trou de la serrure, ouvre et entre chez lui, à nouveau le grincement de la clef, Calanchard a refermé sa porte.

Chapoutier ne s’est pas couché, il attend. Une heure s’est écoulée depuis le départ de son voisin, il se lève calmement, enfile une paire de gants en latex, qu’il a pris la précaution d’acheter dans une pharmacie éloignée de son quartier.

En face, la mère j’t’allume commence à onduler de la croupe, les fenêtres de son appartement sont grandes ouvertes, en cette fin de juin torride. La musique lui parvient…

Summertime and the living is easy.
Fish are jumping and the cotton is high…

Il se faufile dans le couloir, muni du trousseau de clés acheté aux puces : "je les collectionne" avait-il menti au vendeur. Après quelques essais infructueux, il déniche enfin la bonne clé et, lentement, déverrouille la serrure.

Le cœur battant, il pousse la porte de l’appartement de Calanchard, ce dernier ronfle comme une locomotive, il est affalé en travers du lit, ses "Jévas" pas même retirées. Il cuve, songe Ernest.

Il se rend à la fenêtre, l’ouvre : l’aguicheuse commence son effeuillage, il fait très chaud malgré l'heure tardive, les fenêtres de la plantureuse sont grandes ouvertes.

Oh your dad is rich and your mam’ good looking.
So hush little baby don’t you cry.

Sur le sommet de l’armoire, Ernest repère l’arbalète, il se hisse sur la pointe des pieds, saisit l’arme, une arbalète "TWO-POINT LX", un engin haut de gamme, deux mille euros au bas mot songe Ernest. Il n’a aucun mal à trouver les « carreaux », bien rangés dans un carton.

Alors, posément, calmement, Ernest arme l’arbalète de son voisin, se rend à la fenêtre, la voisine a dégrafé son corsage, elle ne porte rien dessous, ses énormes seins ballottent un peu.

Ernest peut voir les auréoles dues à la transpiration qui ont marqué le corsage sous les aisselles, il a une moue de dégoût. Il ajuste calmement la femme, retient son souffle...

One of these mornings.
Your going to rise up singing.

Il presse la détente, le trait part, et touche la strip-teaseuse en plein cœur... DOULEUR ! crie Chapoutier tandis qu’elle s’écroule sur le plancher !

Then you’ll spread your wings…

Le lendemain, quand les policiers débarquent chez Monsieur Séraphin Calanchard, irréprochable chef de bureau dans la vénérable compagnie d’assurances "La Musaraigne", ils trouvent un homme pas rasé, vaseux, une tasse de café à la main, sur la table, bien en évidence… une arbalète.

lundi 16 mars 2009

Tant-BourrinMalgré...

Tous ceux qui ont un jour gratté des paroles de chanson sur une feuille sans savoir gratter une guitare savent le poids de la frustration qui peut en résulter : on imagine, pour structurer son texte, une mélodie que l'on joue dans sa tête et dans laquelle se glissent les mots. Mais voilà, quand on ne sait pas jouer du moindre instrument (malgré quelques tentatives d'apprentissage désespérées), on n'a plus qu'à chanter "avec mon petit texte, j'avais l'air d'un con, ma mère" quand vient l'heure où l'on aimerait partager le fruit de sa créativité avec le reste de l'humanité.

Heureusement, la technique fait parfois des progrès immenses : grâce à un logiciel récent baptisé Songsmith, les handicapés de la musique comme moi peuvent enfin exfiltrer les mélodies de leur tête sans trop de difficulté. Il suffit de chanter (en mesure si possible) et le logiciel bâtit lui-même un accompagnement en proposant des accords à peu près cohérents avec la mélodie. Bon, dans mon cas, mes capacités vocales relativement limitées ont dû perturber légèrement l'algorithme, et j'ai dû, en tâtonnant, retoucher un chouia les accords proposés jusqu'à obtenir un résultat à peu près à mon goût. Ça ne remplacera bien sûr jamais de vrais musiciens mais, pour se faire plaisir, c'est bien suffisant.

Je peux donc enfin vous proposer une chanson dont je suis l'ACI (auteur, compositeur, interprête). Les mauvaises langues diront qu'AC eût été assez, mais je n'ai pas encore de logiciel qui corrige les fausses notes lorsque je me risque à chanter.

Voici donc la chose, guillerette comme il se doit pour un début de semaine... Les jeux de mots sur "malgré de canard" ou sur les différents sens du mot "canard" sont tout à fait dispensables, hein ! :~)




Malgré...

Paroles & Musique : Tant-Bourrin


Téléchargeable directement ici

     Malgré la gueule dans la glace
     Qui me suivra, quoi que je fasse
     Malgré les ravins, les crevasses
     Qu'a laissés le temps sur ma face

     Malgré le poids de ma carcasse
     Bouffée des vers sous la cuirasse
     Malgré le coeur pris dans la nasse
     Sans éclat d'une vie fadasse

     Je continue sur mon chemin
     Goudronné de fatalité
     Je déambule vers demain
     Comme un canard décapité

     Malgré le bourbier des angoisses
     Malgré les peurs, les guerres lasses
     Et ces envies de volte-face
     Où s’engloutissent mes audaces

     Malgré les chagrins si tenaces
     Bien trop pesants dans la besace
     Malgré ces idées que je chasse
     Mais qui s’accrochent à ma tignasse

     Je continue sur mon chemin
     Goudronné de fatalité
     Je déambule vers demain
     Comme un canard décapité

     Malgré la bêtise vorace
     Et la raison mise à la casse
     Malgré la haine qui grimace
     Qui se bouffit, qui devient masse

     Malgré les apprentis-Midas
     Qui changent les rêves en mélasse
     Malgré les fléaux qui menacent
     Malgré les nuées de rapaces

     Je continue sur mon chemin
     Goudronné de fatalité
     Je déambule vers demain
     Comme un canard décapité

     Malgré ces putains de caillasses
     Qui font souffrir dans les godasses

     Je continue sur mon chemin
     Goudronné de fatalité
     Je déambule vers demain
     Comme un canard décapité
     Comme un canard décapité
     Comme un canard décapité

samedi 7 mars 2009

Tant-BourrinLa discothèque imaginaire (addendum)

Mon billet d'hier étant particulièrement léger, j'ai imaginé une variante de la chaîne que m'a refilé la Trollette, laissant une plus grande place à un chouille de créativité...

1 - Choisir un blog dans votre blogroll

Etrangement, ma souris a été comme hypnotisé par celui de notre cher Maréchal.

2 - Choisir le titre d'un de ses cinq derniers billets

Je n'ai pas hésité longtemps : j'ai flashé sur séance ordinaire chez ma psy, je ne saurais pas dire pourquoi !

3 - Mettre une jolie photo et composer la pochette de l'album imaginaire que vous rêveriez d'écouter

Voilà, c'est fait...



Ça ne donne pas envie de se précipiter chez son disquaire, ça ? :~)


PS : s'il y en a qui sont prêt à reprendre cette nouvelle chaîne, faut pas hésiter, servez-vous ! :~)