Blogborygmes

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mercredi 11 mai 2011

Tant-BourrinEst-ce bien assez sonnet ?

Comme un verrat crasseux affalé dans la fange
Ou le Souf' alangui après un bon litron,
Un zeste malheureux sur le presse-citron,
La crotte molle au cul du bébé que l'on change,

Comme un bout de chiffon plein d'huile de vidange
Dont la forme équivoque est celle d'un étron,
Comme une grosse tache au milieu du plastron,
Comme un prurit anal douloureux qui démange,

Comme un slibard douteux traînant sur le parquet,
Un rugbyman K.O. après un gros taquet,
Comme un tube usagé d'aspirine du Rhône,

Comme des poils frisés au fond du lavabo
Ou le débandement des membres de Blogbo,
Ci-gisent sous ces vers mes ultimes neurones.

mercredi 4 mai 2011

AndiamoZouzou Pontiac (une enquête de Chauguise)

Il fait beau ce matin, Chauguise a horreur des vacances forcées, aussi prend-il ses trois semaines de congés comme ça lui chante, au gré de sa fantaisie.

Ainsi, en ce joli matin du mois d’août 1952, il se rend au 36 quai des orfèvres à pied depuis la station Châtelet. Il aime bien finir cette partie du chemin en flânant, il écoute et regarde la rue, il adore.

Ce matin, les crieurs de journaux ont un « gros morceau » : l’affaire Dominici.

Il y a deux jours, dans la nuit du 4 au 5, toute une famille d’Anglais : le père, la mère et leur fillette âgée de 7 ans ont été assassinés d’une façon horrible… La petite Elisabeth tuée à coups de crosse de fusil ! Principal accusé : Gaston Dominici, 75 ans, patriarche de la grand’terre, c’est ainsi que l’on nomme le domaine qu’il exploite à Lurs, commune des Basses Alpes (le département s’appelle maintenant Alpes de Haute Provence… Ça ne l’a pas relevé pour autant) !

Chauguise a acheté le Parisien (libéré) au jeune crieur qui se trouve à l’angle de la rue Saint-Denis et du quai de la Mégisserie, puis, tout en parcourant distraitement la « une », il est entré dans la cour pavée du 36.

Crafougnard son jeune adjoint, l’attend.

- Bonjour patron ! On vient de recevoir un coup de téléph…

Chauguise ne le laisse pas terminer sa phrase.

- Mouais, minute ! Laisse-moi l’temps de me poser, j’vois pas d’fumée, il ne doit pas y avoir le rife !

- Ben si… Justement, il n’y a peut-être pas le feu, mais un cadavre tout chaud, aux studios « ECLAIR » d’Epinay sur Seine !

- Epinay ? Mais Juliette y fait actuellement un stage !

- Ju… Juliette est là-bas ?

- Bon, on y va Dugland, et fissa… Capito ?

- Vous connaissez le chemin, patron ?

- Ouais, tu sors à la porte de la Chapelle, l’avenue Wilson à la Plaine, puis Saint-- Denis, après… J’expliquerai !

La traction avant passe devant les énormes réservoirs de la porte de Paris à Saint-Denis. Ils renferment le gaz de ville produit à partir du coke, sur les immenses terrains appartenant à Gaz de France.

Après un « à gauche » spectaculaire ayant donné une frayeur à deux clebs et une mèmère au carrefour appelé « le barrage », la quinze six cylindres se pointe devant l’entrée des studios « Eclair », situés à la limite d’Enghien-les-bains.

Un gardien en uniforme se pointe. Chauguise lui flanque sa carte rayée bleu, blanc, rouge, sous le pif …

- Ouvre fissa, je suis le commissaire Chauguise !

La barrière actionnée manuellement se lève. Crafougnard embraye et s’arrête un peu plus loin.

Trois hommes et deux femmes sont là. Visiblement, il est attendu.

- Par ici, Commissaire, suivez-nous.

Un grand hall, des projecteurs, des décors en trompe-l’œil, et là, assise dans un fauteuil de toile avec son nom inscrit au dos…

Zouzou Pontiac, et à ses cotés le grand Louis Voujet !

Chauguise s’est arrêté, il a rejeté son bitos troué en arrière afin de mieux voir.

- C’est qui ? demande Crafougnard.

- Tu ne les reconnais pas Dugland ? C’est Zouzou Pontiac et Louis Voujet, ils ont joué ensemble dans : « Du résiné plein les rigoles » !

- J’vois pas !

- Ah bien oui, t’étais encore dans les loukès de ton dab ! Et la célèbre réplique : "T’as d’beaux ch’veux tu sais ?", "Brossez-les moi !" qu’elle lui répond.

- Ben dites donc, elle n’est plus toute jeune !

- T’aurais vu les « roberts » de la donzelle à l’époque, à faire pâlir Martine Carole, en personne ! Et puis pour tirer la gazelle, j’aime autant t’dire que je n’aurais pas chargé mon fusil avec du gros sel, elle était sacrément bien viandée la gerce !

Chauguise et Crafougnard sont conduits dans les loges. Avachie dans un fauteuil, le teint cireux, une très jeune starlette, la tête renversée en arrière, a visiblement cessée de consommer de l’oxygène !

La maquilleuse est là, prostrée sur son tabouret.

- J’étais en train de lui « faire » les ongles, quand tout à coup elle a hoqueté, puis sa tête a basculée… Comme vous la voyez là, je n’ai touché à rien.

- Mouais, articule Chauguise, en tournant lentement autour du corps. C’est le flacon de vernis dont vous vous êtes servi Mademoiselle ? dit Chauguise en montrant le petit récipient.

- Oui… Oui, Monsieur le Commissaire.

- Dugland, prend un chiffon et rebouche ce flacon, ne le touche pas à mains nues ! Puis emballe-le comme il faut dans une feuille de papier, on va le porter à fin d’analyse à Couillette.

Julien s’exécute.

- Ne touchez à rien, les gars du labo vont passer également : bouclez la pièce.

Georges Souclot le metteur en scène est là

- Mais, et mon film ?

- Vous reprendrez plus tard, pour l’instant je suis obligé de boucler… Verstehen ?

- Bon, bon, d’accord… Tout le monde rentre, c’est fini pour aujourd’hui !

Juliette un cahier d’écolière sous le bras, s’avance vers le duo infernal :

- Bonjour Papa !

Un gros bisou qui claque.

- Bonjour Julien !

Un autre bisou, moins sonore sur la joue, mais beaucoup plus tendre.

Chauguise regarde, sourcil relevé :

- Ouais, c’est comme dans les histoires de cocu : le principal intéressé est le dernier prévenu !

- Mon p’tit Papa, t’es fâché ? Tu sais, Julien et moi, c’est sérieux, depuis l’affaire du rapin, nous nous sommes revus !

- Fâché non !

Puis s’adressant à Julien :

- Toi, je te préviens, si je vois UNE SEULE larmichette au coin de l’œil de ma fille à cause de toi, j’te plombe comme un scaphandrier… Cappice ?

- Euh… Oui, patron.

- Bon, on n’a plus rien à foutre ici, on rentre ! Allez Juju, profites de la voiture, on te raccompagne à la maison, ton boss t’a donné ta journée !

- Papa ! Ne m’appelle plus Juju, je ne suis plus une petite fille…

- Pour moi : OUI !

Julien revient à petite allure, afin de profiter au maximum de la présence de Juliette.

Tu sais Papa, Zouzou Pontiac et la petite qui est morte s’étaient disputées…

- Ah bon ? Raconte…

- Voilà : il y a une scène au cours de laquelle Zouzou Pontiac pose tendrement sa main sur celle de Louis Voujet. Cette scène devait être filmée en gros plan, et le metteur en scène, Monsieur Souclot, avait fait appel à une doublure un « body double » comme on les nomme dans le cinéma, beaucoup plus jeune la doublure, car il trouvait que Zouzou avait les mains un peu ridées !

Ça n’a pas plu du tout à Miss Pontiac, elle a engueulé vertement la pauvre Sylvette, c’est le nom de la jeune fille qui est décédée.

- C’était quand ?

- L’altercation a eue lieu avant-hier, Papa…. Je crois.

- MMMMH….

Un peu plus tard, Julien a garé la Citroën devant le quarante de la rue du Mont Cenis, il est descendu afin d’ouvrir la porte à Juliette.

- Ah dis donc, t’es bien galant… Pourvou qué ça doure ! a lâché Chauguise, un petit sourire au coin de la bouche.

A peine arrivés, Chauguise suivi de Julien ont porté le flacon de vernis à ongles au labo tenu par Bourrieux dit « Couillette ».

- Tiens Couillette, lâche ce que tu fais et analyse-moi ça vite fait… Fais gaffe, ça contient peut-être un truc violent !

- Si je lâche ce que je tiens là, ça va faire BOUM, c’est de la nitroglycérine !

- Fais pas l’con, Couillette ! Je plaisantais.

Après avoir délicatement posé l’éprouvette dans un support et enfilé des gants de caoutchouc, Bourrieux prend le flacon que lui tend Julien. Il en retire le papier journal qui l’enrobe.

- Donne-moi la feuille lui dit Chauguise, c’est la UNE de mon canard !

Tiens, la voilà, et revenez quand je vous sonnerai, je vais me mettre au boulot, et personne dans mes pattes quand je bosse !

Chauguise, les pieds sur son bureau, lit tranquillement le journal.

- Vous pensez que c’est le « vieux » Dominici qui a fait le coup patron ?

- Penses-tu, il couvre ses fils ! A son âge, il s’en fout, ce qui compte dans l’esprit de ce paysan d’un autre âge, c’est que SA terre continue à vivre… Le reste, il s’en balance !

Quant au commissaire qui a été désigné pour enquêter, je le connais bien : c’est le commissaire Edmond Sébeille, de la brigade mobile de Marseille, on a fait l’école de police ensemble. Dans son genre, c’est un marle !

Deux heures plus tard, le téléphone sonne, c'est Bourrieux.

- Tu peux descendre, Chauguise, j’ai terminé.

Chauguise et Julien sont arrivés au sous-sol, Couillette les attend, large sourire.

Eh bien, ça n’était pas de la tarte, j’ai ramé… Enfin un peu, c’est violent ce qu’il y a dans cette saloperie de flacon…

-Bon accouche ! Je n’ai pas que ça à foutre, interrompt poliment Chauguise.

Voilà : c’est du venin de : Azureus de Dendrobates, plus communément appelée « grenouille de dards ». Cette appellation provient des Amérindiens d’Amérique du Sud qui enduisaient leurs flèches avec les sécrétions de cette bestiole ! Une jolie petite grenouille de couleur bleue… D’où son nom « azureus ».

C’est le venin le plus puissant sur terre, 2 microgrammes suffisent pour tuer un homme ! Cette saloperie mélangée au vernis à ongles, la pauvrette n’avait aucune chance ! Seule consolation, elle n’a pas eu le temps de souffrir.

- Bon, et bien Dugland, il ne nous reste plus qu’à fouiller : enquête de voisinage, la bignole de Miss Zouzou, etc. La routine, quoi !

Zouzou Pontiac habite rue de la Faisanderie, dans le très chic XVIème arrondissement. Julien gare la quinze entre une toute nouvelle Cadillac modèle 1952 « convertible » et une Rolls Royce « Silver Wraith » de 1950 !

- On fait un peu parents pauvres, vous ne trouvez pas, patron ?

- Critique pas, Dugland, y’a seulement trente berges, t’aurais eu un vélo !

Julien pousse la porte de l’immeuble cossu. Une immense entrée, dalles de marbre, et plantes vertes à profusion. Il frappe à la porte de la loge. Apparaît une femme entre deux âges, maquillée comme un modèle de Van Dongen !

- Vous désirez ?

- Police, annoncent dans un ensemble parfait nos duettistes, tout en exhibant le carton magique.

- Zouzou Pontiac, c’est bien ici ?

- Oui.

- On peut entrer ?

- Bien sûr, je vous en prie…

- Dites voir, Madame : Zouzou Pontiac elle est mariée ? Si j’en crois « Samedi soir » *

Ravie qu’on l’interroge, la bignole se « vide » littéralement.

- Oui, mariée à un vieux banquier bancal ! Elle rit de sa boutade dévoilant sa bouche édentée. Mais elle a « quelqu’un » !

- Ah bon ? Vous pouvez nous en dire davantage ? questionne le commissaire.

- Oui, c’est un Monsieur Pascal, je ne connais pas son nom de famille, il vient la voir plusieurs fois par semaine quand « Monsieur » est en voyage… Ce qui lui arrive souvent, vous savez ce que c’est : les affaires. Et ce Pascal en profite pour faire sa petite « affaire ».

Elle rit à nouveau, dévoilant le désert de son clapoir.

Mise en confiance, par le sourire du commissaire, elle se lâche tout à fait. Ce Monsieur Pascal, il travaille au jardin des plantes dans le…

- Oui, on connaît ! Merci Madame… Madame ?

- Cruchon… Germaine Cruchon.

Après avoir pris rapidement la tangente, le duo se retrouve dans la rue.

- Non mais quelle conne ! T’as vu ça, Dugland ? J’aurais pas voulu l’avoir pour voisine durant l’occupation ! Allez, en route, rue…

- Cuvier patron, dans le Vème.

- Ben tu progresses, bravo !

Julien s’est garé, le patron a présenté sa carte au gardien chef, puis a demandé à voir un certain Pascal.

- Ah ! Pascal Lechauve ? Vous le trouverez, c’est lui qui « soigne » les reptiles, deuxième allée à droite !

Le cueillir, puis lui faire avouer que c’était lui qui avait « récolté » le venin sur le dos de la grenouille, à l’aide d’un coton tige, pour le remettre ensuite à Zouzou Pontiac, ne fut le résultat que de deux ou trois mandales !

Zouzou Pontiac ne termina jamais le film… Et pour cause. Le budget fut confié à Christian Jaque qui sortit la même année : "adorables créatures", avec pour interprètes principaux : Martine Carole et Daniel Gélin.


* Samedi soir était à l'époque un journal grand format, relatant les potins des stars. L'équivalent de la presse people aujourd'hui.

(Toujours sympas les "Blogbos" je vous ai dessiné le commissaire CHAUGUISE... Alors heureuses ?)