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vendredi 31 octobre 2008

CalunePas rassis, le Chelon !

Samedi 11 octobre 2008.

Une date marquée d'une pierre blanche. Que s'est-il donc passé le samedi 11 octobre 2008 ? Oui, c'est vrai que c'était la veille du millième de blogbo, mais bon, à part ça... je vous le dis tout de suite : un indice se cache dans le titre.

Le samedi 11 octobre 2008, le 4e festival de la cuvée de Parassy atteignait son (milieu et son) point culminant. Parassy-s/Beuvron est une charmante bourgade du Cher. Le mieux pour parler d'un endroit, c'est encore une petite vue g***maps :



Oui, alors, euh, google et ses avions ont entrepris de photographier toutes les rues des villes de France, mais visiblement ils n'ont pas commencé par ici, enfin Parassy - et c'est d'autant plus dommage que ç'aurait été vite fait.



Donc, à Parassy, ce soir-là à 20h, il y avait : sous le Grand Chapiteau, les Ogres de Barback (un peu surfait quand même, les Ogres de Barback) et sous le Petit Chapiteau... Georges Chelon (yeeepeeeeee !!!).

Chelon, pour vous la faire courte, j'avais découvert son existence (et son oeuvre, surtout) il y a quelques mois, grâce à des gens bien aimables (qui ont un coffre, une maie en fait, à trésor), de la famille éloignée par alliance de Choufifrounet ; et donc grâce à blogbo, et donc grâce à Rezvani (tous les chemins, ou presque, partent de Rezvani).

Forts de ces quelques éléments de base, je vous laisse prendre connaissance de la suite à travers une petite chanson. Le modèle de base est "Le petit chat m'aimait", un opus du maître qu'il chante à toutes les occasions, pour une raison... mystérieuse ; cette chanson, à part la substance du texte que je vous laisse apprécier par vous-mêmes, a ceci de remarquable qu'elle est à ma connaissance la seule à avoir fait l'objet d'un clip, oui oui, d'un clip que je vous enjoins d'aller voir tant il est... euh, drôle. Probable que si j'avais entamé ma découverte de Chelon par là, je n'aurais pas été beaucoup plus loin ! (bon, c'est vrai, il y a aussi des versions un peu moins ridicules...)

La doublure de Johnny s'étant désistée sous le vil prétexte que "faire du Chelon comme Chelon, c'est trop difficile" (promis Billy, la prochaine fois on fera du Graeme Allwright), c'est mézigue qui s'y suis collée. Je présente donc d'emblée mes excuses à l'artiste, sa famille, ses amis et ses fans. Bon, ça c'est fait. Allez, fini de rigoler maintenant, zouh.


      Je serais bien restée
      La musique était bonne
      Le chanteur s'enflammait
      Il avait accepté
      Ce festival paumé
      Au titre de cuvée
      Festival d'la cuvée d'Parassy
      Aux fins fonds du Berry
      Reculé loin des hommes

      Je serais bien restée
      La musique était bonne
      Le chanteur s'enflammait
      En plus c'était l'automne
      Et la lumière du soir
      Embrasait la forêt
      Le chemin était long et pendant le trajet
      Je pensais
      Que c'est beau la Sologne

      Ce concert ça faisait longtemps que j'le guettais
      Que j'espérais surtout qu'il s'rait pas annulé
      Je n'l'avais jamais vu, le pas si grand dadais
      Découvert par hasard, un disque dans la maie
      Et puis un peu plus tard, un à un, les CD
      J'm'étais mise à aimer

      Quand on y pense c'est drôle les hasards de la vie
      Arriver sur Chelon en partant d' Rezvani
      On croit avoir tout vu, et puis voilà qu'un jour
      On tombe incidemment sur un vrai troubadour
      Qui s'était fait discret qui continuait sans bruit
      Qui préparait peut-être, en secret, l'embellie

      Je serais bien restée
      La musique était bonne
      Le chanteur s'enflammait
      Ce soir-là il a fait
      Frémir le microphone
      S'allumer les briquets
      Il s'est planté parfois
      Mais avec cette voix
      Ce cachet
      C'est sûr on lui pardonne

      Le Petit Chapiteau d'la cuvée abritait
      Une scène deux baffles et quelques bancs tout usés
      On n'était pas nombreux mais pourtant à l'étroit
      Les pieds dans l'herbe verte indifférents au froid
      Ecoutant la guitare jouer sur l'écriture
      Chanson après chanson la voix et ses murmures

      D'une ballade à l'autre le chanteur en violet
      Cabotinait un peu, brodait sur ses couplets
      Il jouait de tous les temps, les gens étaient ravis
      Balayait tous les genres, ça donnait le tournis
      Il a chanté à part trois de ses bagatelles
      Et on ne comptait plus, à la fin, les rappels

      Je serais bien restée
      La musique était bonne
      Le chanteur s'enflammait
      Dans la nuit berrichonne
      Le bouillant auditoire
      Ardemment l'acclamait
      Je serais bien restée
      Mais y'avait plus personne
      Saint-Georges en avait terminé



Notes :

  • Autant le savoir, Chelon porte la même chemise - violette - à tous ses concerts (et à la tivi). Soyez sympas, achetez ses disques.
  • "Grand dadais" est le titre d'une chanson... que je n'ai encore jamais entendue, une musique de film.
  • "Chansons à part" est le titre d'un CD (de 2002) à part, essentiellement constitué de chansons un peu, disons, décalées - excellent disque au demeurant.
  • en bonus track, une image de l'après-concert, quand l'essentiel du public enthousiaste s'est pressé à la sortie du chapiteau, disons en fait à l'entrée, qui était aussi l'issue de secours... enfin bref - pour acheter des disques et surtout les faire dédicacer ; vu de derrière, c'était beaucoup plus doux, plus calme... :


vendredi 24 octobre 2008

AndiamoLa fête à Pigalle

J'avais quinze ans quand, pour la première fois, je suis allé à la fête foraine de Pigalle.

Elle s'installait en automne et restait un bon moment, elle s'étirait de Pigalle à la place Clichy, en passant par Blanche (ligne 2, n'est-ce-pas Pousse-Manette) ?

Pour nous y rendre le dimanche, on empruntait le bus et le métro. Afin de ne pas payer les transports, on collectait auprès des voisins les cartes hebdomadaires.

Ces cartes étaient vendues pour la semaine, six jours (samedi inclus), une carte pour le bus, une autre pour le métro. Généralement, les gens ne travaillant pas le samedi avaient le droit (ou plutôt la tolérance) d'utiliser le jour vacant le dimanche.

Quelle aubaine ! Nous demandions - bien poliment, t'imagines ! - aux voisins que nous connaissions de nous donner leurs cartes, ce qu'ils faisaient volontiers. Ce coupon était en principe nominatif, mais personne ne le signait ! Et puis les contrôleurs n'étaient pas regardant, après tout, la carte avait été payée, non ?

Pour mécolle, pas de problème, j'allais à l'école dans Paris, donc j'étais pourvu.

On descendait à Pigalle, c'est là qu'elle commençait vraiment.

Magnifique, fabuleuse, époustouflante, pour un p'tit gars de banlieue qui n'avait vu jusque-là qu'un manège d'autos-tamponneuses, une chenille poussive et deux stands de tir miteux !

Et tout à coup ça "clinquait" (pas Français, m'en fiche), ça hurlait, vociférait, interpellait le chaland...

ROULEZ, ROULEZ, ROULEZ, de la vitesse, encore de la vitesse : en voiture la jeunesse !

Les loteries aux couleurs vives, une grande roue, avec les lots inscrits dans chaque secteur, le cliquetis de la lame de ressort qui tressaute à chaque passage de chacune des petites tiges métalliques, TRRRRRR... Encore un heureux, encore un veinard, il a gagné "un canard" !

La musique des manèges, tonitruante, elle vrille les tympans, il faut hurler pour s'entendre, tant pis pour le voisinage !

C'était Piaf, Ray Ventura, Luis Mariano, Bécaud ou Sydney Bechet, le rock n'était pas né... Pas encore.

La guimauve, rose, blanche, jaune, qui dégouline. D'un geste appliqué, la belle foraine, à l'aide d'une spatule en bois, remonte la pâte collante et la suspend au crochet chromé.

Les odeurs de caramel brûlé, près du chaudron à barbe à papa, la baguette agile récupère le sucre qui s'effiloche.

Je n'ai jamais su résister à la barbe à papa, c'est léger, "volatile", comme un gamin de quinze ans.

La mère exaspérée distribuant une torniole au gamin trépignant, gesticulant, hurlant, chandelle sous le pif, réclamant un tour supplémentaire du manège fabuleux, avec ses chevaux en carton pâte, harnachés comme pour la parade, montant et descendant au rythme effréné d'un accordéon musette.

Tout à coup, un attroupement... Approchez, doucement... Au milieu du cercle des badauds, un petit bonhomme, aussi haut que large, casquette crade, pull col roulé délavé en fin jersey, les muscles énormes qui saillent... Un gorille !

C'est Yves Laboulange, un des derniers bateleurs que j'aie connu, il était passé il y a fort longtemps, dans une émission que les moins de soixante ans ne peuvent pas connaître : 36 chandelles, présentée par Monsieur Jean Nohain.

Il est là Yves, il arpente calmement les trois mètres carrés de son tapis crasseux, posé à même le sol, il attend que la recette soit assez conséquente avant de "commencer l'travail", comme il dit.

Yves se tourne alternativement vers les quatre points cardinaux : au Nord, des radins... Au Sud, pas mieux... A l'Est, des pingres, du bout du pied, il repousse négligemment les tunes et les laranqués (pièces en alu de 5 et 2 francs, des anciens francs, que dalle quoi) ! Il ne garde que les pièces jaunes, 10 et 20 francs anciens, pas un seul bifton, tu penses !

Puis, pivotant encore d'un quart de tour, il déclare regardant les badauds un à un : "à l'Ouest, rien de nouveau" !

Quand sa tirelire est suffisamment remplie, il commence "le travail", d'abord un poids de vingt kilos soulevé "à la coiffe", c'est à dire qu'il prend le poids en forme de tronc de pyramide, le coiffant de sa large pogne, la paume posée sur le sommet, et le soulève ! Essayez, vous verrez, la partie la plus étroite étant vers le haut, ça ne demande qu'à glisser.

Ensuite, il soulève le même "à la pince", c'est à dire qu'ayant saisi le petit rebord situé dans le haut du poids, entre le pouce et l'index, d'un mouvement de bascule vers son avant-bras, il lève les vingt kilos. La prise n'est qu'un bord de fonte de 8 millimètres de large par 5 ou 6 millimètres de profondeur. Essayez là aussi, mais écartez vos pieds d'abord ! Ses pognes ? Des machines à broyer !

Yves Laboulange, ça n'est pas le grand Zampano de "la strada", mais ça lui ressemble !

Les stands des "curiosités" : Zouzou, la femme la plus grosse du monde, quatre cents livres au bas mot !

Jacky : l'enfant-singe de Bornéo (vous avez remarqué : tous ces êtres, étaient toujours originaires de contrées exotiques, pas de Hénin-Liétard, ou de Boue-sur-Vase, non, non des régions sub-tropicales UNIQUEMENT) !

Ça n'est pas un homme, ça n'est pas une bête, c'est Jacky, l'enfant-singe de Bornéo, recueilli alors qu'il n'avait que sept ans environ... etc.

Plus loin, c'est Odette, la femme à deux têtes ! Ou encore Madame Suzy, qui présente des pinces en lieu de mains !

Nous n'allions pas voir ce genre d'attraction, ça m'aurait mis mal à l'aise, ces pauvres gens exposés à une curiosité malsaine.

Après le train-fantôme, les chenilles, cages à écureuils, autos-tamponneuses rutilantes, chromes éblouissants sous les projecteurs, ça me changeait des bagnoles plutôt minables de mes fêtes drancéennes ! Au détour d'un stand de tir, repérable à distance grâce ou à cause de l'odeur de poudre, voici...

Voici : le ring JACKSON !

Sur l'estrade, dominant la foule, alignés en rang d'oignons, un lutteur, un boxeur, un catcheur, et un judoka.

Le père Jackson, mégaphone en main, invective la foule, cherchant un "audacieux" qui osera relever le gant, qui défiera ses champions !

Il y a toujours dans la foule rassemblée devant le stand, un type ou deux qui lèvent la main.

Bravo Monsieur, c'est courageux, de combattre le champion de Belgique et des environs.

Bien sûr, c'est un "baron", un comparse, mais il n'empêche que pour une somme raisonnable, on assiste à un véritable combat de catch ou autre, qui dure un quart d'heure au bas mot.

J'ai connu il y a... fort longtemps, dans une petite boîte de Bagnolet (ne la cherchez pas, rasée, laminée, la boîte, la rue avec, en lieu et place, l'échangeur de Bagnolet) un garçon qui avait travaillé pour le ring Jackson, ce copain avait été catcheur.

Il nous racontait qu'il effectuait six à sept combats journaliers et, bien que ce soit un comparse contre lequel il combattait, c'était épuisant.

Quand nos poches étaient vides, ce qui était assez vite fait étant donné qu'au départ elles n'étaient pas bien pleines, on flânait encore, nous saturant les mirettes de ces néons multicolores, du vermillon des pommes d'amour et du rose bonbon de la guimauve.

On tardait à rentrer, les effluves de vanille, noix de coco, gaufres, nougats et caramels, nous retenaient encore un moment dans ce lieu magique.

Enfin on reprenait le métro, faisant le chemin en sens inverse, les musiques des manèges tournaient dans nos têtes : la belle de Cadix, la vie en rose, Davy Crockett.

C'étaient nos musiques, le cha cha cha venait d'éclore, les Beatles jouaient aux billes dans la banlieue de Liverpool, Bill Haley n'était pas encore une comète, Paul Anka chantait pour ses copains et le King répétait ses déhanchements.