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mardi 18 décembre 2012

AndiamoLe violon sur le pré

Ils étaient trois, trois petits enfants, ils n’allaient pas glaner aux champs comme dans la chanson.

Il y avait une fille et deux garçons. Le plus jeune avait neuf ans, l’aîné douze ans et, entre deux, juste au milieu, leur sœur.

Ils passaient leurs vacances en Auvergne, leur Maman les accompagnait. L’après-midi se passait en pêche aux vairons, en tentative d’attraper une pauvre grenouille et, quand ils y parvenaient, ils la relâchaient bien vite : courageux les Parigots, mais pas téméraires, des fois que ça morde ?

En baignades aussi dans ce qu’ils rebaptisaient le fleuve Amazone (deux mètres de large à tout casser, le fleuve Amazone de leur enfance) rempli de piranhas, de crocodiles et surtout d’anacondas énooooormes et extrêmement voraces.

L’heure du goûter arrivait, la Maman sortait d’un grand panier d’osier pain de campagne en tranches, carrés de chocolat ou confitures, un peu de beurre conservé dans un pot de grès, mais non pas celui du petit chaperon rouge, je vous vois venir !

Ils avaient faim, les minots, après une journée pareille. Alors commençait la cérémonie. La Dame, très jeune elle n’avait pas trente-trois ans et déjà trois grands enfants ! Elle s’asseyait dans l’herbe, les jambes sagement repliées sous elle, sa robe disposée en corolle afin qu’elle ne se froissât pas. Puis elle saisissait un grand écrin en bois verni, l’ouvrait précautionneusement, il était garni de feutrine rouge, je m’en souviens encore, elle en sortait un violon, puis délicatement saisissait l’archer, enduisait les crins de ce dernier de colophane afin qu’il glissât mieux sur les cordes.

Pendant un moment, elle accordait l’instrument, tournant les petites clefs prévues à cet usage, elle réclamait le silence, car il faut une oreille exercée pour mener à bien l’opération, et elle avait « de l’oreille » comme on dit.

Puis elle commençait à jouer, les enfants oubliaient les tartines, les yeux rivés sur les doigts qui vibraient sur les cordes, elle fermait les yeux pour mieux s’imprégner de la musique, elle commençait toujours par ceci : La méditation de Thaïs de Jules Massenet.


Immanquablement, les trois durs avaient de grosses larmes qui coulaient sur leurs joues… Durs les Parigots, mais pas trop !

Alors, afin de leur redonner le sourire, elle enchaînait : Le concerto pour violon en ré majeur de Brahms, c’est enlevé et le sourire revenait.


Puis, le goûter avalé, ils retournaient à leurs jeux. Au retour, c’était la dispute à celui qui porterait l’instrument merveilleux.

Elle a joué de moins en moins, la Dame, ses doigts devenaient plus gourds, « moins déliés » comme elle disait.

La dernière fois que je l’ai entendue jouer, elle avait environ quatre-vingts ans. Puis, petit à petit, la Dame s’est recroquevillée, elle s’est voûtée. A la fin, on aurait dit qu’elle se mangeait elle-même, il n’en restait plus comme on dit, mais, toujours l’œil vif à plus de quatre-vingt-dix ans, elle lisait sans lunettes, l’esprit affûté comme un rasoir coupe-chou ! Et puis à quatre-vingt-douze ans, elle s’est envolée légère comme un arpège, sans faire de bruit…

Elle s’appelait comme moi, plutôt c’est moi qui m’appelait comme elle, c’est normal dans la même famille.

mercredi 12 décembre 2012

Saoul-FifreLa Fête de la verge

M'enfin, Andiamo, j'ai pas dit "la fête à ma verge", nonon, une vraie fête, le long du quai (et non "le lait du con"), dans la belle ville de Sète (et non "dans l'eau d'vaisselle de bite"). C'est Croukougnouche, toujours fourrée dans les bons plans, qui nous a prévenus de ce coup-là, elle qui fait partie de longue date de la mouvance du Lieu noir et de la Compagnie Cacahuete . Et sincèrement, elle et son mari Vincent méritent vraiment la médaille des Relayeurs de Convivialité, je fais la grève de la faim tant qu'ils ne l'ont pas obtenue.

Enfin, non, juste un petit régime.

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samedi 8 décembre 2012

AndiamoMa communion solennelle

J’en vois qui se marrent déjà : l’autre mécréant qui va nous parler de sa communion ! Autrefois, quand t’étais minot, t’avais pas le choix : t’allais au caté, tu faisais ta communion et tu fermais ta gueule ! C’était comme ça pour la plupart d’entre nous ! Élevé dans la religion catholique, apostolique et romaine… Amen.

Ça me faisait carrément tartir, j’avais tout de même un pote ou deux dont les parents badigeonnaient les murs à la barbouille noire « US GO HOMME », c’était à la mode après la guerre, les Ricains étaient venus nous libérer, merci pour tout, mais maintenant : caltez ! Ils étaient comme ça, les cocos, reconnaissants… mais pas trop. Ben oui, y causaient pas patois les vieux de mes potes, alors des fois le « H » y restait dans l’pot, ou bien y’avait un « M » en trop ! Mais le pot, c’est eux qui l’avaient, mes potes, biscotte y z’allaient pas au caté le jeudi.

Putain, cavaler à l’aut’ bout de Drancy pour écouter le cureton me raconter des trucs incroyables ! Le p’tit Jésus qui marchait sur la baille, ou bien il levait les bras au ciel...

- Tu fais quoi seigneur ? demandait Saint Pierre.

- J’amorce, mon bon Pierre… J’amorce.

Et crac ! La pèche miraculeuse, les filets pleins à craquer d’ablettes et de goujons ! Plus que dalle à picter ? Une tite prière et HOP du pinard à la place de la flotte ! Il tombe sur un atigé des gambettes : un p’tit massage sur les rotules et le v’là qui cavale comme une autruche. C’est bien d’être le fiston de Dieu ! Et sa Maman toujours vierge ! Tu sais, moi, à dix ans, j’savais pas bien ce que ça voulait dire « vierge » ! T’as beau avoir fait ton éducation sexuelle dans la rue, à dix balais, on n’était pas encore bien fufute et puis y’avait pô internènette et « minous.com » pour te coller au parfum.

Bien sûr on avait des frangines, alors on n’ était pas tout à fait crétins, on avait bien vu qu’à la place de not’bout d’mastic elles avaient un joli sourire d’avril, en long le sourire, pas en large !

Et puis y’avait aussi le mec qui s’était mis face à la mer rouge ! Moi, j’imaginais une mer de résiné, ça m’foutait les j’tons, alors le curé il nous disait :

- Moïse, il écarta les bras et la mer s’ouvrit, alors les Hébreus traversèrent à pieds secs. Je soupçonnais un peu l’arnaque, ayant déjà pataugé au bord du canal de l’Ourcq où on allait se baquer étant minots, en cachette de Clémenceau bien sûr. Les bords du canal, c’était gadoue, tas d’boue et tout l’toutim ! Alors après avoir écarté la mer rouge, ça devait vachement patauger dans la vase, non mais des fois. J’étais pas costaud en histoire sainte, mais en baignades prohibées, fallait pas m’la faire, je suivais mon frangin qui n’avait peur de rien, alors j’me déballonnais pas, il m’aurait traité de chiasseux !

Donc je me prépare pour la communion, j’avais onze ans, j’avais tout fait ça comme y faut, j’étais le der à y passer, mon frangin, ma frangine y étaient passés avant, fallait pas que j’déconne, on comptait sur moi !

Le jour arrive, en juin comme toutes les communions. En juin à Pantruche, ça ressemble parfois à octobre ou novembre, si tu vois ce que je veux dire, c’est l’automne qui s’attarde ou qu’est en avance, c’est selon !

Il tombait des hallebardes, bien sûr toute la famille était là… Mais NON, y’avait pas Georgio le fils maudit, chez les Ritals la famiglia c’est sacré. Il ne fallait surtout pas bouffer car on communiait pour la première fois ! Va expliquer ça à un gamin de onze ans, je crevais la dalle ! Et dans un réflexe intempestif et blasphématoire, je chope un morceau de sucre et je l’engloutis ! Ma mère catastrophée, à l’époque elle croyait toutes les conneries ecclésiastiques apostoliques et romaines qu’on lui racontait, plus tard son fiston l’a fait changer d’avis.

Elle a tout raconté au curé, ma brave Maman. Ça l’a fait sourire, ce brave curé, il n’était pas trop borné et même plutôt sympa. Et puis il avait dû en voir d’autres le sapeur dans sa vie, quand les autres l’ont lâché il s’est retrouvé bien seulabre pour monter là haut ! Alors mariner un moment les ribouis dans le sucre, ça ne devait pas l’affoler.

Ils l’ont vachement lâché, Pierre, Paul, Jacques et les autres….

- KI Ksè KI CONNAÎT JESUS DE NAZARETH ? qui demandait le centurion en Araméen-Latino-Arabique à la sauce couscous.

- De Nazareth ? qui répond Pierre, faut changer où pour Nazareth ?

- Du Jésus, j’en ai vu à Lyon qui disait Paul, mais il était pas casher !

Et après ça on m’a fait gober que c’étaient des saints…

Enfin on part, on nous avait rassemblés sur la place de la mairie, face à l’église, chacun un cierge à la main. Au bout de trois pas, le mien se casse en deux ! Il pendait lamentablement comme une vieille quèquette… Désolée qu’elle était ma pauvre Maman, moi ça m’faisait marrer !

La flotte avait détrempé mes vêtements, mon premier costard et mon premier futale long, la veste était bleu marine, elle avait déteint sur le brassard… Faites pas des yeux de merlan frit, on portait un brassard blanc en forme de croix, le brassard commençait à se teinter de traînées bleuâtres… Ma-gni-fique !

Et puis c’était bien, tous ces communiants et ces communiantes, nous n’étions pas en aube alors, les mecs en pantalon, les filles en robe, et là tu voyais tout de suite le niveau social. Les riches avec des toilettes somptueuses, les petites ressemblaient toutes à des minis mariées, oui je t’assure. Vu que chez moi, pour passer ente deux feuilles de paye, fallait s’faire vachement mince, ma mère avait tout confectionné, pas maladroite, j’avais fière allure, à part le cierge à la con et la couleur qui dégueulait, mais ça allait bien avec moi qui n’en avait rien à foutre !

C’est ce jour là que ma grand’mère m’a offert ma première montre. Elle portait la boîte comme l’évèque le Saint sacrement, j’aurais préféré de la thune pour aller au cinoche avec mes potes ou acheter des ICHE LIFFE - on ne prononçait pas « High Life » -, des cibiches qui n’existent plus, vendues par paquet de dix clopes.

Et pis y’a eu l’hostie… C’est un peu dégueu au goût, et pis ça colle, ça adhère au palais, DÉFENSE de toucher avec les doigts ! Péché MORTEL, MORTEL le péché ! Alors tu joues des mandibules, tu ressembles à un Ricain en train de bouffer son sème sème gum, ou alors on dirait l’cul d’ta sœur quand elle monte une côte à vélo ! T’as les mandibules qui vont un coup à gauche, un coup à droite. Et puis une fois avalé, ça cale pas, t’as autant la dalle.

Chez nous, ça s’était bien passé, par contre chez la voisine…. Avant la communion, on faisait une retraite pendant deux ou trois jours. On partait de neuf heures à seize heures dans un joli parc où créchaient des frangines, celles avec des cornettes. Alors ce parc de Drancy il a changé de blase au gré des élections, mais oui, c’était un peu Clochemerle, Drancychovski…

D’abord le parc des sœurs, puis il s’est appelé Parc Jacques Duclos, un député Coco des années cinquante, z’avez pas connu, vous êtes trop petits. Et maintenant, c’est le parc « Ladoucette », du nom de la première occupante des lieux, une baronne qui soit dit en passant avait fait beaucoup pour la ville, quand c’est bien il faut le dire aussi.

Oh ! C’était plutôt marrant la retraite, on récitait bien quelques prières, on nous refaisait un peu de caté, le midi on bouffait son panier repas préparé par les Mamans, et l’après-midi on jouait dans ce grand parc.

Mais la voisine, elle avait fait « la bleue ». La retraite ? Lapuche ! Alors quand le matin elle est arrivée en tenue de communiante, le curé a refusé de lui faire faire la dite communion ! Putain le bordel, toute la famille était là ! Ils ont tout de même fait le repas mais sans la communiante qui s’était pris une avoinée de première. Confirmation et communion en même temps : le premier « kit » en somme !

(ch'tiot crobard Andiamo 2012)

dimanche 2 décembre 2012

Saoul-FifreLe régime Dukon

Régulièrement, j'entends le moteur à Margotte qui change de régime, elle cherche sans doute à perdre un os, quand elle explique devant moi, doctement, à un aréopage d'amies disons "bien enveloppées" qu'elle a deux-trois kilos à perdre, je sifflote en regardant ailleurs, j'ai honte de son manque de savoir-vivre. Ainsi touiller dans les plaies sanguinolentes de nos appâts rances !

Elle entraine souvent dans son sillage notre fille qui, entre un bol de mayo et un de Nutella se préoccupe soudain de son tour de taille alors qu'à son age on perd ou on gagne 10 kilos juste en fonction de la météo.

Je restai jusque là spectateur souriant de ces obsessions nutritionnistes bien que mon quintal eut eu bien besoin des mêmes attentions, mais le simple mot de régime me renvoyait à des souvenirs de pesage systématiques de denrées, de comptage de calories, en gros de systèmes très contraignants qui vous font passer auprès de vos proches ou de vos hôtes pour un emmerdeur mahoussement psycho-rigide et insupportable à table.

Et je tiens par dessus tout à mon image de bon vivant cool no souçaille.

Je l'ai lu donc, le livre du docteur Dukon, pas difficile : il était aux chiottes (le livre, pas le docteur). C'est un salmigondis de règles très précises, de phases à respecter, de jours spécialisés, enfin quoi, un système très dirigiste rempli de tabous et, au milieu de ces interdictions, des permissions bizarroïdes voire inquiétantes : l'aspartam, l'huile de paraffine (!), le chewing-gum, le son d'avoine, le médiator ...

Le principe de base de son régime a l'air frappé au coin du bon sens, aussi me suis-je lancé dans une imitation, éliminant tous les trucs zarbis, trop compliqués et surtout anti-conviviaux. Il faut avoir entendu un amalgame de dukonneurs échangeant leurs expériences, ça parle de "semaine protéines", de "phase de consolidation", de "chat-coaching", de "rentrée en stabilisation" (et non "en stabulation" comme j'en connais des bouseux qui pourraient confondre), d'"instinct-stockage" etc... Ce genre de lexique spécialisé met vite les boules aux braves personnes venues là pour se déstresser après une &$%WWWW§*£ de journée de labeur merdique en sirotant un ou plusieurs cognac-fizzs et en compensant par poignées de cacahuettes.

J'ai donc fait une criti-relecture de son livre à la sauce Saoul-Fifre, un gonze qui n'aime pas trop les contraintes extérieures. Et ce d'autant plus que le docteur a l'art de susciter les attaques de ses confrères , peut-être de gros jaloux, mais soyons prudents.

Quand il dit que l'ennemi, c'est le gras et le glucose, on ne peut que le suivre, tout ça se fixe autour du cœur, le ralentissant, encrasse les artères, enrobe les intestins, persille tous les muscles, n'en faut plus !

Enfin, je dirais qu'il ne faut pas en rajouter dans les aliments bruts qui en contiennent naturellement, bien sûr.

Pour les protéines, Dukon conseille une période "consommation à volonté" qui évitera le sentiment de manque et pendant lequel le corps sera obligé de "bruler" ses propres graisses, cholestérol et autres triglycérides. Ça parait logique mais ce côté "tout ou rien" me semble dangereux. Je crois d'ailleurs que c'est le danger potentiel de toutes ces protéines d'un seul coup que ses collègues lui reprochent (risque de blocage des reins, toxines...). Cette phase, très agréable pour un viandard (tartare, plateau de fruits de mer, poisson, fromage 0 %, œufs...) a donc été très courte chez moi et j'ai vite introduit des légumes crus ou cuits, des fruits (interdits par Dukon !), en bannissant bien entendu toutes les graisses, huile (même d'olive), beurre, charcuterie, fromages etc... et les sucres, confitures, miel, riz, pâtes, couscous, farine, pain, légumineuses, patates...

Ça nous donne ce genre de menus :

Petit déjeuner : eggs and bacon sur un chapati au son d'avoine, thé sans sucre, pomme.

Déjeuner : tartare de bœuf, salade de légumes crus à base de tomates ou carottes sauce yaourt vinaigre balsamique, fromage 0 % avec une giclée de sirop d'agave (faible indice glycémique)

Diner : soupe de légumes, truite ou saumon fumé, petit bout de fromage, mandarine, 2 carrés de chocolat 99 %...

Vous voyez, c'est sympathique, je n'hésite pas à faire de petits écarts par rapport à l'orthodoxie, je ne me refuse rien de bon mais je reste ferme sur le gras et attentif aux sucres. Ce régime agréable mais sévère par rapport à mon ancienne façon de me nourrir me permet je pense, les jours où nous avons des invités ou ceux où nous serons nous même de sortie, de manger de tout sans pousser des cris d'orfraie ni me mettre à l'abri derrière le sacro-saint régime puis chipoter ensuite avec une mine terrorisée.

C'est ce que Dukon appelle des "repas de gala", alors vous pensez, si j'ai en plus sa permission ?