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mardi 24 novembre 2015

AndiamoSaint-Denis

Saint-Denis.

Saint-Denis, ville des Rois, Basilique dans laquelle reposent les Rois de France, des gisants sculptés dans du marbre blanc... Une splendeur.

Saint-Denis... En quelques heures, ce nom, cette ville, sont devenus signe d'horreur, de terreur, de violence.

Saint-Denis, bien sûr, dans quelques temps on aura oublié, il y aura eu d'autres choses, plus horribles encore !

Saint-Denis... Andiamette y est née il y a... Non je suis galant je ne le dirai pas. L'endroit où elle résidait s'appelait "l'îlot Saint-Léger" , une îlette, un petit bout de terre entre deux rivières : le Rouillon et la Vieille Mère, deux jolies rivières aujourd'hui canalisées, enfermées sous buses des cimenteries "Lambert" ou "Lafarge" (pub gratos).

Andiamette me parle souvent des roseaux qui bordaient sa maison, la pêche aux grenouilles ou aux tétards, les colliers de perles confectionnés avec les perles des couronnes mortuaires, prélevées dans le cimetière tout proche, des jeux interdits bien sûr. (z'avez pas connu les couronnes mortuaires en petites perles ? Moi oui), ce qui faisait hurler sa chère Maman, on s'en doute ! Elle se rendait à l'école de Marville, en sabots l'hiver, car point de route, des chemins boueux ! Les chaussons dans le cartable pour rentrer en classe.

De jolis peupliers italiens ombrageaient l'endroit, l'été les Parigots y venaient pour un pique-nique loin des fumées de la capitale. Pas le déjeuner sur l'herbe certes, ce brave Edouard n'avait point planté son chevalet en cet endroit... Va savoir ? Mais ça y ressemblait beaucoup.

Chez elle, ni eau ni électricité, la flotte ? Un robinet communal situé à 500 ou 600 mètres, ah oui ! Ils s'éclairaient à la lampe à acétylène ! Alors bien sûr ni télé et encore moins de téléphone !

Aujourd'hui, on se plaint ! On chiale avec la bouche pleine, Andiamette et sa sœur ne se plaignent jamais de leur enfance, elles ne se plaignent jamais du reste. Des dures à cuire, les frangines ! Une autre génération sans doute, se plaindre n'était pas de mise. Passé le certif', c'était le boulot à 14 ans, une demi heure à pied afin de rejoindre la gare, le train jusqu'à la Gare du Nord, quelques stations de métro, et encore une bonne balade pour atteindre l'atelier de couture. A 14 ans, c'est pas vieux tout de même !

J'ai vécu à Saint-Denis dans les années 60, une cité ouvrière, populaire mais pas racaille, un monde de besogneux, d'ouvriers, une main d'œuvre hautement qualifiée et recherchée, qui savait travailler, gagnait bien sa croûte, bien sûr foin des 35 heures, c'était 35 heures en trois jours !

J'ai travaillé avec des gens de tous pays et de toutes confessions, jamais il n'y a eu le moindre bémol, ils vivaient comme nous !

J'ai travaillé chez Bourjois (les parfums), beaucoup de femmes Maghrébines, aucune, je dis bien aucune, ne portait le voile ! C'étaient de braves mères de famille qui travaillaient dur, comme toutes ces femmes du reste, le travail à la chaîne, ça n'est pas évident. Toujours souriantes, elles rapportaient parfois des pâtisseries faites maison, quelle gentillesse, que s'est il passé ?

Mes banlieues s'appellent Drancy, Bobigny, Aubervilliers, Saint-Denis. Là où j'habite, je suis à une volée de plombs du stade de France, ils peuvent tirer les barbus, ils peuvent tirer sans crainte ces courageux, je leur tourne le dos.

Aujourd'hui à l'heure où j'écris, il pleut sur Saint-Denis, est-ce que ce sera suffisant pour laver cette horreur ?

(ch'tiot crobard Andiamo)

J'ajoute ceci : une petite vidéo montrant Nasser le président Egyptien, cette vidéo à plus de 50 ans ! Edifiant...

jeudi 19 novembre 2015

Oncle DanBonjour l'ambiance !

L'Institut Notre-Dame de Mont-Roland s'inscrivait dans la "stratégie scolaire" des Jésuites et constituait l'un des maillons de la chaîne de collèges qu'ils avaient créés le long de la frontière de l'Est et du Nord-Est, comme autant de bastions dressés face à la Genève protestante et aux régions luthériennes d'outre-Rhin.

Il empruntait son nom au mont "Roland", joli petit bois à l'écart de la ville dont les sentiers conduisaient tous à une magnifique chapelle de style gothique, ressuscitée en 1843 par les Compagnons de Jésus. Ce lieu de retraite privilégié, serti dans son écrin de verdure, ne représentait qu'une infime parcelle de l'immense fortune immobilière des jésuites qui tirait son origine des donations faites par des particuliers ou par le Roi au cours des siècles et des siècles. Amen.

Avec ses imposants bâtiments et son parc, il n'avait rien à envier aux autres établissements scolaires de la Cité de Pasteur. Ajoutez à cela quelques chapelles supplémentaires au sein du collège, une grotte artificielle et une piscine véri-table, et vous obtiendrez le cadre le plus recherché de la région pour délivrer à votre fils son ticket d'entrée à l'enseignement supérieur dans la plus pure tradition jésuitique.

On accédait à ce vaste domaine protégé de hauts murs, par un concours d'entrée, mais aussi par deux portiques diamétralement opposés, l'un s'ouvrant sur les allées du parc, l'autre sur la Cour d'Honneur, qu'encadraient les principaux corps de bâtiment.

En son centre, une statue de la Vierge, entourée d'un parterre de fleurs parfaitement entretenu, s'imposait au premier regard. Posée là au début du siècle, elle avait toujours fière allure, et paraissait capable de porter encore de nombreuses années l'enfant qu'elle avait dans les bras. C'est en tous cas ainsi que l'entendaient ses propriétaires qui avaient fait graver sur son piédestal l'inscription "SERVATUM - SERVABIT". Je m'abstiendrai de tout commentaire grivois à ce stade de mon propos. L'ayant revue récemment, je suis en mesure de vous dire qu'elle servait toujours vaillamment, sans manifester le moindre signe de fatigue. Pas même un petit rictus ne venait trahir une lassitude

bien compréhensible et qu'aurait justifié amplement ce poupard insouciant et décontracté qui ajoutait à sa bonne mine réjouie le poids de sa couronne et de ses habits d'apparat. Sans doute quelqu'un d'important.

Cette vierge avait une santé de bronze.

En perspective, un porche, sous le bâtiment central, laissait apercevoir d'autres cours, de part et d'autre d'une large allée gravillonnée, bordée d'arbres centenaires, qui conduisait au parc.

Tout était calme, silencieux, en ce mois d'août 1958, et ces vieilles pierres, qui avaient connu tant de générations d'écoliers, tant d'Histoire peuplée de Jésuites en soutanes, avaient quelque chose d'envoûtant pour le petit Dan qui découvrait ces lieux.

Le premier habitant de ce nouveau monde, le premier qu'il rencontra, était à la fois capital et insignifiant, inévitable et inexistant pour lui. Pour ses yeux encore tout inondés de la blancheur des graviers de la cour, il se confondait avec l'obscurité de sa loge de concierge.

L'ombre en blouse grise grimaça, - c'était un sourire -, s'informa, puis téléphona. Comme papa et maman Dan désiraient parler au Directeur, ils furent conduits au parloir, salle particulièrement étudiée pour cela. Dan connaissait déjà ces maisons où chaque pièce a sa fonction: le dortoir pour les batailles de polochons, le parloir pour écouter les autres parler, le couloir pour courir etc...

Il devait être assez agréable d'écouter dans ce parloir-ci. Tables et guéridons étaient ornés de bustes qu'il identifiera plus tard comme étant ceux d'Homère, Virgile et Molière. Les murs étaient recouverts de tapisseries et de gravures dont l'une est restée gravée dans ma mémoire. Il s'agissait d'une œuvre de Nicolas Labbé, personnage au nom prédestiné, représentant le siège de Dole en 1636 par le Prince de Condé à la tête de 20000 fantassins et de 8000 cavaliers. A l'horizon, ou si vous préférez dans le coin supérieur droit du tableau, on apercevait un nuage noir s'élevant au dessus du Mont-Roland que les alliés

suédois du prince, et autres hérétiques de tous poils, incendièrent après l'avoir pillé. La pièce était en outre garnie de quelques objets de première nécessité: l'indispensable crucifix, cela va sans dire, mais aussi, le piano, témoin de l'importance du chant et de la musique dans la vie quotidienne du Jésuite.

Assis au bord d'un canapé Louis XV, le petit Dan avait des préoccupations très éloignées des problèmes de rentrée scolaire, ou du moyen de se faire admettre dans cette vénérable institution. Vaguement inquiet de ce qui l'attendait, mais ne se sentant pas immédiatement menacé, ses pensées vagabondaient.

En entrant, le Père Jésuite le fit émerger de ses rêveries. Très digne, en cheveux blancs et chaussures noires. Il engagea immédiatement avec ses parents une conversation courtoise et pleine de grâce, à laquelle le principal intéressé ne prêtait guère attention, tant il était subjugué par le millier de boutons qui fermaient la soutane du prêtre, et qui, pensait-il, l'obligeaient certainement à se lever très tôt le matin pour être à l'heure à la messe.

Isolé de la discussion, dont il ne percevait que quelques bribes à travers l'épaisseur cotonneuse de ses réflexions, il s'efforçait en vain de comprendre les motivations de l'inventeur de ce supplice quotidien. Peut-être, était ce une invita-tion à la prière et à la méditation. Peut-être devaient-ils remplacer avan-tageusement le rosaire, encore qu'il ne parvenait pas à différencier les "Notre Père" dans cette collection de billes noires uniformes.

Il ne suffisait pas d'être déclaré admissible en sixième par un autre établissement scolaire, fût-il lui-même religieux, pour rentrer dans un collège qui avait la réputation d'approcher les cent pour cent de réussite au baccalauréat. Aussi, ce premier entretien n'était-il qu'un prélude, une sorte de "binette", qui devait être suivie, quelques temps plus tard, d'un petit examen éliminatoire... afin de ne pas être éliminé. C'est à cette occasion que le petit Dan fit connaissance pour la première fois avec ses futurs locaux.

La hauteur des salles et la longueur des couloirs confirmèrent son impressionnante impression du premier jour. Mais plus impressionnants encore étaient les escaliers. Il n'en avait jamais vu de semblables, de si monumentaux, de si larges, avec autant de marches, et qui montaient si haut.

On ne se déplaçait, à l'intérieur du collège, qu'en rangs par deux, et la règle ne souffrait pas d'exception. Cette évidence sautait aux yeux et l'avertissait de l'intransigeance de la discipline qui sévissait en ces lieux.

Combien d'années et de millions de pas avait-il fallu pour émousser et creuser à ce point, à leurs deux extrémités, ces marches de granit ? Combien de généra-tions et de milliers de potaches les avaient martelées de leurs semelles cloutées pour les gondoler de la sorte ?

Du haut de ces marches, deux siècles vous contemplent ! L'usure de ces marches le fascinait et l'angoissait tout à la fois, lui laissait une impression désagréable et indéfinissable, un goût amer dans le mental. Oui, une impression

mardi 3 novembre 2015

AndiamoGARAP

Fin 1953... J'ai 14 ans, pas bien grand, pas épais non plus, pourtant chaque matin je prends le 151 à 7 heures et quart, afin de me rendre à la Porte de Pantin, tout au bout de la ligne. De là je chope le métro ligne 5, et 6 stations plus loin "Gare de l'Est", je descends, une petite marche d'un quart d'heure et c'est la rue Martel dans le Xème arrondissement, plus exactement "le commercial Martel", deux ans dans cette école de : ^¨§$ & µ%# ! J'aurais eu mieux fait d'aller repiquer des salades tiens !

Chaque jour j'admire les belles affiches placardées dans le métro, des pubs essentiellement, à l'époque nous n'étions pas encore "gavés" de pubs en tous genres, nous "avalions" tout, des frères Ripolin qui à la queue leu leu écrivaient chacun dans le dos de l'autre, un canotier planté sur le sommet de leurs crânes. Egalement le gros paquet de lessive "Saponite" dont le slogan était, je m'en souviens encore : "Halte là qui vive ?... Saponite la bonne lessive".

Entre les stations, dans les longs couloirs obscurs, le sempiternel DUBO... DUBON... DUBONNET ! Pas con Dubonet, le seul à avoir placardé de la pub dans les tunnels ! Et tout le monde s'en souvient.. Pas les bouseux bien sûr, ni les moins de... Gna gna gna !

Et puis un beau matin d'octobre, (vous avez remarqué c'est toujours un "beau matin" dans les histoires, même si c'est un matin de merde, avec des attentats à la une, 20 centimètres de neige dans les rues de Pantruche, ou un vent à décorner les cocus, et là y'a du boulot !) Donc un beau matin que vois je ? Des affiches signées Savignac, mais oui le papa de la pub "Monsavon" tu sais la savonnette sous les pis d'une vache ! Tu veux un dessin ? Et là en l'au cul rance, un petit bonhomme coiffé d'un chapeau haut de forme, porteur d'un genre de loup noir, gants blancs, et fumant un cigare à la "Churchill" .. Va montrer un mec fumant le cigare aujourd'hui ! Un large bandeau en travers portant le mot "GARAP" !

Sympa L'ancien je vous ai dégotté l'affiche (on dit merci qui les filles) ? *

Voici l'affiche, avouez qu'il y avait de quoi intriguer, d'autant que la France s'est couverte de ces images, durant un mois, les radios, et même la vénérable R.T.F (radio télévision Française, non, non, il n'y avait pas le "O" devant, l'ancêtre ne perd pas ses boulons) diffusait ce GARAP, sans aucune explication.

Les commentaires et autres supputations allaient bon train : une nouvelle marque de pinard ? (les vins GRAP existaient déjà d'où l'amalgame) est ce un nouveau parti ?

En classe quand "Bobosse" le prof de Français ou "Néron" le prof de maths, avaient le dos tourné les "GARAP" fusaient, je me suis fait gauler : 500 fois GARAP à copier, signée des parents la péno, œuf corse !

Après un mois d'affichage, de slogans GARAP radio, et télé diffusés, nous avons enfin découvert le pot aux roses, GARAP n'était qu'un coup médiatique, afin de nous démontrer la toute puissance de la publicité !

Tout ce cirque médiatique avait été orchestré, dans le cadre de la semaine mondiale de la publicité. Les gens réclamaient du "GARAP" sans même savoir de quoi il s'agissait ! La preuve était faite, la force de la publicité démontrée, dans le village le plus reculé de France ... Et en 1953 il y en avait des villages reculés, entendez par là complètement ou quasiment ignorés, et bien dans chaque village on connaissait GARAP ! Même en Limousin, sûr Ségur, mon bon Bof !

  • (Image du net, si réclamation, je retire)