Tout le merdier vient du pouvoir. Quel que soit le système en place, la façon démocratique ou non dont il l'a obtenu, quelle que soit la sincérité et l'honnêteté du gars à qui on délègue une parcelle de pouvoir, celle-ci va le corrompre, à plus ou moins longue échéance.

Le pouvoir est au peuple, il ne devrait pas avoir à le déléguer à quiconque.

C'est le principe de la polis athénienne : tous les Dimanches, les citoyens se rendent sur l'agora, écoutent les problèmes qui se posent, décident des solutions qui s'imposent et des gens aptes à les mettre en œuvre. A l'échelle d'un village, d'un quartier, où tout le monde se connait, c'est faisable, surtout avec l'aide du principe du "bâton de parole", que l'on se passe, et qui interdit de couper la parole à celui qui le tient entre les mains. Le principe des "3, et seulement 3 prises de paroles par session et par frère", en vigueur chez les Francs-maçons, aide aussi à affiner et préciser sa pensée.

Le plein exercice de la démocratie rend le citoyen plus sensible aux atteintes à ses droits et à sa liberté. Petit à petit, sa conscience politique et son sens critique se développent, sa confiance en lui aussi, et il est moins tenté par les sirènes extrémistes.

Ce qui est envisageable au sein de petites structures laisse bien sûr intact le problème de la délégation de pouvoir quand les questions à régler s'éloignent du citoyen, géographiquement (région, continent, planète...) ou tout simplement techniquement (ambassades, contrôles sécurité...). Il faut donc mettre en place des mesures destinées à "dépouvoirer" au maximum les élus délégués fonctionnaires qui auront l'insigne honneur d'être dépositaires, pour un temps limité et dans un domaine précis, d'un peu du pouvoir du Peuple, pour des raisons de facilité d'exécution. Le mandat qui leur est "prêté" devra être le plus clair précis, délimité dans le temps et renouvelable si l'intérêt de la communauté l'exige.

Mais en général, le principe de base sera "fais tourner le pouv'", afin que nul ne s'installe dans un professionnalisme du pouvoir, et ne finisse par trouver normal de se retrouver attributaire attitré, homme ou femme d'influence, et d'en déduire une prétendue supériorité par rapport au citoyen lambda. Une délégation de pouvoir est un honneur, un devoir, une responsabilité, mais n'amène à son titulaire aucun droit particulier, aucune supériorité, si ce n'est morale.

Il est bien clair que ce que nous appelons aujourd'hui "le monde politique" n'existe plus, à ce stade. La notion de "Partis" n'a plus sa place que dans les mémoires et dans l'équivalent actuel de nos anciennes histoires "belges". Le pouvoir est revenu au Peuple et à lui seulement. Il l'exerce par référendums, vote à mains levées pour les simples décisions locales, votes électroniques pour le choix des délégués ou des lois.

Puisque il n'y a plus de partis, nous sommes tous devenus hommes et femmes politiques. On aurait pu croire que les citoyens réagiraient par un ras-le-bol généralisé envers la réunionnite, mais le fait de constater que nos votes sont vraiment suivis d'actes conformes au désir de la majorité, et que rien n'est définitif, si les effets nous en paraissent déplaisants, nous pouvons facilement revenir à la situation antérieure, fait que nous avons vraiment retrouvé goût et confiance dans la "vie de la cité".

Tous les choix sont faits en 3 temps :

- Présentation. Un problème est apparu, remonté par un groupe de citoyens. L'ensemble des citoyens, anonymement, prend connaissance des documents, propose des solutions. Des synthéseurs élus nettoient tout ce qui est hors sujet, agressif, non argumenté, non basé sur des faits, défendant visiblement un intérêt particulier. Une synthèse de toutes les idées jugées valides est présentée au vote.

Ou bien un poste de délégué est à pourvoir. De la même façon, les candidatures arrivent, étayées uniquement par des faits, des diplômes, des éléments de biographie dont la véracité se voit criblée par des vérificateurs. Les dossiers anonymes ne comportent pas de photos, ni mention de l'âge, ni du sexe, ni de la couleur des prétendants.

- Le vote est secret, comme actuellement. Qu'il soit bien clair que rien n'est obligatoire. Ni le vote, ni la candidature à quoi que ce soit, ni l'apport d'idées à un débat mais la participation directe à la vie politique est une idée tellement neuve et tellement valorisée par tous que le plus rétif, le plus timide des citoyens, en voyant passer un vote qui le concerne personnellement, se dira : "Là je m'y connais et j'ai des choses à dire".

- L'après-vote. Avant, la campagne et les élections étaient l'apex de la vie politique. Ensuite, les élus, propriétaires des voix de leurs électeurs, agissaient comme bon leur semblait, parfois à l'opposé de leurs promesses, mais jamais à celui de leurs intérêts. Aujourd'hui, le service après-vente est particulièrement soigné. Le citoyen est tenu au courant du résultat concret, sur le terrain, de ses choix et, en toute transparence, des actes faits en son nom par ses "élus".

La loi s'est épurée naturellement : elle se contente d'égrener dans un Français simple que tout le monde peut comprendre, quelques fondamentaux logiques à peine plus nombreux que le Décalogue. De toute façon, une justice entièrement indépendante, élue parmi des candidats réputés pour leur sagesse, est là pour régler les cas particuliers. Elle est secondée par une troupe d'enquêteurs qui, saisie par une poignée de citoyens dubitatifs, auront la tâche de vérifier si un abus de pouvoir, avantage ou discrimination, a réellement été commis par un délégué.

La plupart des fonctions proposées à nos élus sont des petits contrats compatibles avec un autre "vrai" métier exercé à plein temps. Evidemment, certains postes sensibles peuvent demander une longue expérience et on ne peut se priver de compétences rares, mais le turn over sera toujours encouragé et au minimum le changement régulier d'affectation, pour éviter qu'une situation de pouvoir perdure trop longtemps sur une seule tête à un seul endroit. Sans oublier la règle de l'anonymat dans l'exercice de ses fonctions, chacun étant appelé par son titre.

Autant dire que nous sommes loin d'un star système, d'une personnalisation à outrance de la vie politique, de comédiens-candidats et de charmeurs-séducteurs charismatiques mais incompétents.

Ce sont les médias, qui tirent désormais une triste tronche, eux qui faisaient leurs choux gras des petites phrases, des langues de bois et du bagout de bateleur de ces menteuses marionnettes.

Je n'ai pas abordé le pouvoir économique car je pense qu'il est fragile et que, face à un peuple conscientisé, il s'écroulera sur lui-même.