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lundi 28 février 2011

Mam'zelle KesskadieRendez-moi mon innocence !

Non, pas l'innocence de la vierge, ciel qu'avoir su, nous aurions eu tant de plaisirs coquins, mais mon innocence télévisuelle.

Que vaut ce cri déchirant devant la télévision ? Le bâillement de la défaite de la crédulité. Cachez ce tour de scénario que je ne veux pas voir.

Bref, je ne suis plus capable de ne pas être surprise quand le héros passe pour mort cinq minutes avant la fin. Hého, on n'est pas des imbéciles! Il va falloir le ressusciter pour la suite et pour que les produits dérivés soient rentables, c'est mieux de ne pas voir le héros en photo avec les yeux sortis de la tête avec la langue qui pend sur le côté (voir photo des têtes d'orignaux ou de chevreuil que les chasseurs mettent sur le toit de leur jeep. De quoi décourager le plus neurasténique zhumains et de quoi menacer les petits veaux : tu vois ce qui va t'arriver si tu manges trop ?).

Et vous imaginez le talk-show? Alors, mourir, c'était comment pour vous ? Aussi agréable que pour nous ? Ref : le gars qui dit à la fille, alors, chérie, c'était comment ? La première fois. Parce que la troisième, il ne dit rien, il ronfle comme une femme ménopausée en sur-poids.

AH! Voici l'histoire imprévisible de 4 ou 5 parias, le nombre dépend du salaire de chacun, si on n'a pas Bruce Willis qui fait tout à lui tout seul, on engage 5 qui se partageront le salaire et les méchants. J'aimerais savoir comment ils répartissent les fusils. J'imagine les voir se chamailler : c'est à mon tour le AK-47 dit le noir chauve Ben oui, le noir est toujours chauve, il ne peut pas tout avoir ! Il en faut un qui ait la chevelure du prince, un qui ait les lunettes noires, un qui ait le T-shirt déchiré, un beau, un laid, et dépendamment du budget, un déprimé. En général, ils se passent du déprimé, ou ils le font mourir assez tôt. Ça équilibre le scénario, le genre humain et quelle morale : si vous tenez à la vie, tenez bien votre arme ! Si vous n'y tenez pas trop, passez la à gauche ! (NDLR : je travaille en santé mentale avec des gens suicidaires. Svp, ne pas leur montrer mon texte).

Je laisse ici le soin à votre expérience française des stéréotypes de conclure ce que le noir a que les autres n'ont pas, ou en moins.

Il y a toujours un des compagnons qui s'éloigne parce qu'il ne croit plus au projet environ aux trois quarts du film. Ben tin. Il en faut un qui vienne les secourir à la dernière minute, donc, il faut qu'il fiche le camp de l'action, le scénariste va espérer qu'on a oublié qu'il doit revenir et zou, il apparait pour tuer par derrière le Méchant Dr Je-veux-être-Bond-à-la-place-de-Bond.

Des fois, il y a une fille. Des fois, elle est méchante, mais des fois, elle est gentille. En général, le père de la fille est quelqu'un d'important qui a été kidnappé, tué, torturé, je ne sais pas moi, en tout cas, elle a de la grosse peine. Si elle fait partie des méchants, ou elle couchera quand même avec un des bons, ou elle n'est pas vraiment méchante et on n'a pas besoin qu'un des gars sacre le camp en plein milieu de l'action pour tuer par derrière Dr Je-veux-gna-gna, parce que c'est elle qui va le faire. Par contre, si c'est elle qui tire, un des bons va quand même la sauver de quelque chose, en général, le sous-secrétaire jaloux du patron Mr. Je-voudrais-être-Dr-Je-veux-être-bond-à-la-place-de-Bond.

Le scénario se passe l'été. Ben, tsé, se promener les muscles à l'air par moins quarante au Canada, ça gèle un peu l'action. Et se promener avec une doudoune de duvet, on a beau mettre des lunettes de soleil, c'est moins sexy. Ça donne un prétexte pour le torride, la sueur, les bikinis et justifie le fait que les méchants parlent français avec un accent étranger, mais vraiment étranger, pas québécois. Nous, les québécois, on fait de très mauvais méchants, on donne plutôt dans les tarés voir Romaine au Canada.

Il faut aussi un bal. Comme les héros sont fauchés, et comme le bal n'est pas censé être dans leur plan du départ, c'est bien que les héros soient des hommes masculins. Sinon, vous voyez le topo ? Cinq filles qui se cherchent une robe de bal pour un bal qui aura lieu dans trois heures moins cinq minutes ? Remarquez que là, ça serait un vrai film d'action pour filles... par contre, je m'égare, nous en sommes aux stéréotypes.

Donc, il y a le bal. Tous les gars ont des costards (han ? Non mais qui c'est qui fait des progrès en français, han ? Han ?) qui leur vont bien. Pas un qui a la culotte trop courte ou trop longue. Comment ça se fait qu'ils y arrivent à la dernière minute alors que dans les mariages prévus depuis des lunes, les hommes trouvent le moyen d'avoir l'air idiot et mal habillés ? Et il n'y en a pas un qui se plaint de la cravate, en plus ! C'est là qu'on voit que c'est un film.

Ensuite, l'action.

Pourquoi, diantre, les policiers crient toujours le nom du suspect quand ils sont hors de portée, ce qui fait que le suspect se met à courir et eux doivent détaler après ? Parce que c'est un show de lapins ! (mouhaaaaaaaahahahhaaha !)

Je regardais justement un des lapins courir dans une ruelle (c'est fou ce que les grandes villes ont de ruelles quand on se fait courir après par un poulet à qui on veut poser un lapin ! Mouuahahahahaha, je pense qu'il est temps que cette chronique achève). Et je me demandais pourquoi la scénariste avait laissé traîner une cannette de Coca-cola par terre.

Rép : Parce que c'est un produit "placé". Coke a payé trois mille dollars par seconde où on voit une cannette de coke. Pas une ligne, une canette. Spèces de voyous que vous êtes. Et qu'ensuite, ça fait une marque naturelle pour le lapin qui court pour bifurquer avant d'entrer en collision avec la caméra. Tu vois mon chou ? Lui a dit la scénariste : tu détalles, svp, ne tire pas la langue, et quand tu vois la cannette, tu tournes à droite. Pourquoi pas à gauche ? Aucune idée. Faudrait voir si la droite du coureur correspond à la droite du décor par rapport à la gauche du caméraman et si le monteur ne déplace pas l'action en faisant tourner le lapin policier du côté opposé à l'angle droit de l'hypothénuse.

Je m'égare. Moi, voyez-vous, la droite, la gauche, je suis toujours un peu perdue géographiquement, mais pas dans le scénario, je suis et je devance !

Je me demande aussi pourquoi le policier ne part pas à courir avant d'interpeller ? C'est vrai que ça ferait moins glamour : Monsieur pffp pfff Dupont! Pff pfff Police! Pfff pfff. Ne déguerpissez pas pff pfff je suis déjà en train de courir pff pfff.

Tiens, ça serait bien. Et Dupont l'attend et quand il arrive en courant , lui fait un croc-en-jambe avec son soulier Nike, l'assomme avec son Ipad, sort son Iphone et tweette à ses potes (autre mot français placé, ciel, je suis prête pour un retour à Paris !).

Faites gaffe, le scénario a des changements.

jeudi 24 février 2011

Tant-BourrinLes Blogbobandes dessinées (4)

Ça faisait longtemps que je n'avais pas publié ici mes petits miquets (cf. les livraisons 1, 2 et 3).

Et puis, tout d'un coup, ça m'a démangé d'aller refaire un tour sur , le site qui aide les gros nuls en dessins comme moi à se la péter !

Blogbobander, ça vient comme une envie de pisser ! :~)




Tant-Bourrin : caca bouddha


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Mam'zelle Kesskadie : laisse-moi devenir l'ombre de ton chien


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Saoul-Fifre : mutants modernes


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Andiamo : la soupe à la grime-âge


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Tant-Bourrin : myope, la boum !


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Mam'zelle Kesskadie : complètement pommée


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Saoul-Fifre : comme une boisson dans son bocage


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Andiamo : elle avait des faux-cils


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dimanche 20 février 2011

Saoul-FifreBon Anniv' Olivier

Je vous ai déjà parlé de mon débarquement dans cette Provence accueillante comme un digicode plein de vomi. L'accent chantant et le sourire plein de dents, c'est la vaseline pour faire passer l'esprit de lucre et la détestation de l'étranger. Je m'y sentais comme un poisson des tropiques paumé au milieu d'un banc de sardines au large de la Laponie.

Et avec le recul, en y ayant réfléchi longuement et calmement, la petite lueur boréale qui me fut promesse d'un peu de chaleur humaine se nommait Olivier.

Nous étions collègues, embauchés presque en même temps dans cette petite boite de monteurs en téléphonie. Le patron était raide, je n'avais jamais rencontré un salaud pareil, un vrai rat, il avait d'ailleurs une gueule de fouine. Le boulot était dur, on était poussé au cul, il fallait lui construire des installations impecs, sans malfaçons, le pire étant de retourner sur un chantier et de se farcir le sourire sardonique de l'abonné qui s'était plaint "à qui de droit" de billevesées.

Aujourd'hui, on parlerait de harcèlement mais à l'époque, on baissait la tête et on serrait les dents. De toute façon, dans une petite entreprise de moins de 10 salariés, on savait qu'on avait droit à rien et que la moindre plainte ne nous obtiendrait qu'un doigt nous montrant la porte. Dans cette ambiance glauque, et si on y ajoute mon statut d'immigré de frais, and a long way from home, avoir un bon copain était une chance extraordinaire.

Olivier connaissait bien le secteur, l'emplacement des centraux, des sous-répartiteurs. Ça n'a l'air de rien, mais ce genre de connaissances valait de l'or en barre. On était lâchés dans la nature, sans aide. Le listing avec adresses précises existait bien mais était jalousement gardé par les gars de France Télécom. Et merde. Le boulot était suffisamment dur comme ça pour que l'on ne perde pas 2 heures à chercher tout au fond d'un lotissement ou d'une cave l'armoire bien cachée où nous devions tirer nos "ficelles"?

On nous donnait trop de travail, bien sûr sans primes de rendement ni heures supplémentaires. Nous étions "mensualisés" et je rentrais souvent à la maison à la nuit, n'ayant même pas pu tout faire. C'est Olivier qui m'a "déniaisé", m'indiquant la rentabilité correcte d'une journée, celle qui ne me ferait pas engueuler le lendemain. C'est lui qui m'a appris à rendre des dossiers "abonné absent", pas vu pas pris, en m'approchant à quatre pattes des boites aux lettres pour y glisser un "avis de passage". Des installations que nous n'avions absolument pas le temps matériel de terminer.

Un imbécile a fait chanter un jour à un surexcité "La solitude, ça n'existe pas". Oui mais quand on s'expatrie, c'est un peu dur au début quand même. C'est encore Olivier qui m'a refilé les premiers éléments de ce qui devait devenir un réseau d'amitié en béton précontraint, fidèle, généreux, sur qui nous pouvons toujours compter vingt-cinq ans plus tard.

Grâce à la gestion pointue de cette bestiasse de patron, la boite fit faillite, je m'orientai vers l'agriculture mais Olivier resta dans le milieu de la téléphonie. Il en gravit les degrés, technicien, chef d'équipe, de chantier, de secteur pour finir par monter sa propre boite, récemment. Un vrai gars du combiné. Nous n'avions pas encore de portable , ni nous ni nos enfants, qu'Olivier jonglait déjà avec deux ou trois de ces engins, à usage privé ou professionnel. Ils sonnaient à tout bout de champ, en plein milieu du repas... On ne mouftait pas, c'était normal, c'était Olivier.

Là il a le dernier et l'avant-dernier I-phone. Avec sa clef G3, son mur Facebook et ses nombreuses applications, on dirait un gros bébé pourri-gâté au pied d'un sapin de Noël. Mais c'était son anniversaire, là. Quel cadeau offrir à quelqu'un qui a tout ? À un vrai gars du téléphone qui a, comme moi, commencé sa carrière en bas de l'échelle, à planter des poteaux à la barre à mine ?

La qualité du matériel PTT n'est plus à démontrer. En galvanisé massif, ça ne bronche pas sous les intempéries, ça résiste à tout. Olivier m'ayant toujours aimablement fourni ces diverses pièces désormais cultes, pour mes bricolages à la ferme, je décidai de le remercier par une œuvre faite avec ces boulons, ces tire-fonds, ces tendeurs, ces plaques de serrages, ces cornières à trous que nous avons tellement utilisés quotidiennement que, même écartelés, démembrés, tordus, soudés, sciés, j'étais bien certain qu'il les reconnaitrait comme frères au premier coup d'œil.

C'est une fille qui danse. C'est un peu le symbole de la femme idéale qu'il cherche avec constance et acharnement depuis qu'il est né. Il en a essayé suffisamment depuis mais, jouant de malchance, ce n'était jamais la bonne.

Celle-ci est solide. Mon souhait est qu'elle lui fasse de l'usage.

mercredi 16 février 2011

AndiamoLes magnans

Le plateau de Peyrebeille, le haut Vivarais. L’hiver a été rude, Mathilde a surveillé avec un soin jaloux les graines qui ne sont autres que les œufs du Bombyx du mûrier.

Pour les tenir au chaud, afin de favoriser l’éclosion, elle a disposé ces œufs dans un petit sac de toile fermé par un lacet : une coulisse, servant également de lanière, puis précautionneusement elle a glissé le petit sachet entre ses seins généreux. « Bien au chaud » comme elle dit, en riant aux éclats !

Quand les œufs écloront, donnant naissance à des vers blancs que l’on nomme ici : magnans (goinfres en Provençal), commencera le véritable travail. Il faudra les nourrir, car ils sont voraces, et leur nourriture c’est la feuille du mûrier. Il faut en cueillir énormément, à s’en arracher la peau des mains.

Quatre repas par jour, c’est leur ration !

Quand ils se nourrissent, leurs mandibules font un tel vacarme qu’on les entend dans toute la maison. Il est vrai que seul un plancher de châtaignier, sépare le grenier du reste de l’habitation.

Ce châtaignier, le bois dans lequel l’Ardéchois naît, le bois dans lequel l’Ardéchois meurt. Ce bois sert aussi bien à fabriquer les berceaux, que les cercueils ! Et entre deux, il les nourrit, c’est l’osmose parfaite entre l’homme et cet arbre.

Pourtant cette tâche est nécessaire, même vitale, dans ces régions désolées aux hivers si rudes, où la terre est peu généreuse.

Les « échamps » comme on les nomme par ici, ce sont les terrasses cultivées, taillées à flanc de montagne. Au moindre orage, il faut remonter la terre, à dos d’homme pour les plus pauvres, à l’aide d’un âne ou d’un mulet pour les plus nantis.

Lorsque les vers auront tissé leurs cocons, un long fil de soie, de huit cents à mille deux cents mètres de longueur ! Il faudra les ébouillanter, pour tuer la larve, et récupérer les cocons de soie, puis les envoyer à Lyon. Cette soie qui vêtira les bourgeoises de la « haute », après être passée entre les doigts habiles des canuts.

Ce travail épuisant, harassant, rapporte quelques sous. Cet argent sert à se procurer les choses que l’on ne produit pas soi-même, comme les outils ou un âne pour aider aux tâches. Pour le reste, c’est l’autarcie, quelques poules ou lapins, un cochon, sa pauvre terre pour les légumes. La vie des paysans à la fin du XIXème siècle, ça n’était pas celle des images toutes faites, dans l’esprit des gens d’aujourd’hui, qui pensent que c’était une vie « saine » au grand air à bouffer bio.

Que nenni, on ne bouffait pas à sa faim ! Les pommes et patates qui passaient mal l’hiver, et qu’il fallait manger, quand bien même elles étaient un peu moisies, sous peine de crever de faim ! La viande pas tous les jours… Loin s’en faut.

Les soirs d’hiver, on se serrait devant la cheminée, le ventre cuit, le dos glacé, les mêmes histoires ressassées cent fois, les mains toujours occupées, éplucher les châtaignes pour la soupe du lendemain ou le filage pour les femmes. Sur ces plateaux du haut Vivarais, il fait « un froid de loup » à la mauvaise saison, le reste de la maison n’est pas chauffé, alors on ne traîne pas pour aller au lit, récupérer un peu de chaleur.

Mathilde a surveillé les magnans avec un soin jaloux, après leur éclosion, aidée en cela par sa fille Cécile, la cadette Nicolette est encore trop jeune pour aider.

Un matin, alors qu’elle distribue les feuilles de mûrier récoltées dès potron-minet, elle aperçoit dans le grouillement blanchâtre, un magnan plus gros que les autres et légèrement orangé.

Il ne se nourrit pas de feuilles, mais attaque et mange les autres vers. Elle le prend délicatement, puis s’apprête à l’écraser d’un coup de talon, craignant une maladie quelconque, pouvant anéantir le reste de l’élevage.

Le magnan entre son pouce et son index, elle le porte à hauteur de ses yeux. Elle ressent une douce chaleur à l’extrémité des ses phalanges. Étonnant, car habituellement ils sont froids !

Elle renonce à le jeter à terre, elle est comme « vapée », des images multicolores s’enchevêtrent dans sa tête, un bien-être l’envahit. Délicatement, elle repose le ver parmi les autres.

Les magnans ont bien « profités », ils ont quasiment augmenté leur taille initiale de près de quatre-vingts fois ! Alors ils s’agrippent aux branches que l’on a arrimées, et commencent à tisser leur cocon de soie.

C’est la phase la plus délicate. Ils tissent leur cocon durant quarante-huit heures environ, et ce sans interruption. Un orage peut tout gâcher, le bruit les dérangent, ils peuvent interrompre leur tissage à tout moment.

Le magnan orangé lui continue de se nourrir, n’ayant plus de vers à sa disposition, il s’attaque aux cocons et dévore les larves présentes à l’intérieur. Mathilde l’a isolé dans un coin du grenier, c’est son petit secret, pourquoi fait-elle cela ?

Elle-même n’en a aucune idée, elle le fait : c’est tout !

Le « collecteur », comme on le nomme ici, est passé, il a pesé la récolte, cinquante kilos seulement, c’est une toute petite année ! Il a estimé la qualité, a donné quelques pièces, emporté les cocons…

Ce matin, Mathilde, comme à son habitude, se rend au grenier. Surprise ! SON magnan a commencé à tisser son cocon, une teinte orangée comme lui, il est énorme. Il faut dire que le vers était gros lui aussi, deux fois plus imposant que ses congénères !

Le soir avant de se coucher, Mathilde, prétextant un rangement, lampe à pétrole à la main, se rend au grenier. Le cocon est là, énorme, de la taille d’un bonnet de dentelle, comme ceux que l’on met aux nouveaux-nés.

Elle est comme fascinée. Sa main se porte vers l’étrange pelote, puis son geste s’arrête. Dans sa tête, les mêmes images qu’il y a un mois : kaléidoscope de couleurs enchevêtrées. Elle reste prostrée.

- Alors, qu’est-ce que tu fiches ? Tu vas descendre, oui ?

C’est la voix de Fernand, son mari, qui l’appelle depuis le bas de l’escalier.

Fernand, ça n’est pas un malin. Aujourd’hui, on dirait qu’il est brut de décoffrage, un peu rustre, primaire, mais courageux. A la tâche, il vaut deux hommes dans la force de l’âge.

Avec Mathilde, il est gentil, pas prévenant, ça n’est pas bien la coutume que les hommes se laissent aller à montrer leurs sentiments, mais il l’aime bien, Mathilde le ressent.

- Ho !

Elle se secoue.

- J’arrive ! lance-t-elle.

Les jours suivant, rien ne change, le cocon est là, figé, lente métamorphose...

Puis au matin du trente-deuxième jour, Mathilde comme à son habitude se rend au grenier. Le cocon orangé est éventré.

Dans la caisse, une chose bizarre : quinze centimètres de haut environ, un œil unique et noir comme le jais, qui la fixe. L’étrange kaléidoscope se remet en route dans sa tête, des images de sang, de viande, de nourriture, de sang frais : manger… Tout de suite…

Mathilde se rend au poulailler, elle est dans un état second, Fernand est aux champs, sa fille garde les trois malheureuses chèvres. Elle se saisit de l’une des poules.

La volaille tenue par les pattes, elle rejoint le grenier, dépose le poulet dans la caisse hébergeant la drôle de créature. D’un mouvement brutal et rapide, cette dernière a bondit sur la galline et l’a saignée comme le ferait une belette.

Mathilde est horrifiée, mais aussitôt des images colorées et apaisantes envahissent son esprit, elle se calme, se détend, et sourit même à l’étrange chose qui se délecte du sang de sa victime, que quelques soubresauts agitent encore.

Le lendemain, Mathilde occupée à « tremper » la soupe, ressent tout à coup l’impérieux besoin de se rendre dans la remise, là où sont alignés les clapiers. S’essuyant les mains sur son tablier, elle cesse son travail et, tel un automate, se dirige vers les petites cages. Elle ouvre l’une d’elles, saisit un beau lapin par les oreilles, puis entre dans la maison, toujours dans un état second, grimpe l’escalier menant au grenier et, devant la caisse de son magnan, elle pose le lapin devant la "chose" qui se précipite sur sa proie et la saigne immédiatement.

Deux jours se sont écoulés, Mathilde « entend » à nouveau l’appel de la bête. Lentement, elle gravit l’escalier, retrousse sa manche, s’approche de la caisse.

La bouche collée à la pliure de son avant bras, les dents aigües ont facilement trouvé la veine, la "chose" se repait du sang de la femme.

C’est alors que Nicolette, sa fille cadette surgit, sa tête est coiffée d’une casserole en cuivre, elle joue à la guerre, avec le Toine, le fils du voisin.

- Maman ! Qu’est-ce que tu fais ?

Mathilde ne répond pas, elle est dans un état second.

La chose veut prendre possession de l’esprit de la fillette, malgré ses efforts elle n’y parvient pas, le « casque » en cuivre fait obstacle ! Horrifiée, Nicolette s’approche…

- Laisse ma Maman ! hurle-t-elle. Puis se saisissant de l’un de ses esclops, elle commence à frapper l’horrible bestiole, qui lâche prise, se pelotonne sous les coups furieux de la fillette.

Un coup plus violent, le crâne éclate, un dernier soubresaut, la « chose » est enfin immobile.

Mathilde revient à elle…

- C’est quoi ça ? murmure-t-elle en regardant la bouillie informe allongée dans le fond de la caisse.

- J’sais pas M’man, mais elle te faisait bobo !

(ch'tiot crobard Andiamo 2011)

samedi 12 février 2011

Mam'zelle KesskadieCe qu'on apprend chez les Ursulines

J'ai cinquante et un ans. Vous le savez, non pas parce que vous avez une excellente mémoire, mais parce que je mémérise à tout bout de champs avec mon âge. Ne vous en plaignez pas, quand je change de mémérage, c'est mon poids ou mon célibat (même en kilos, mon poids reste supérieur à mon âge, ne l'ébruitez pas). À tout prendre, prendre le chiffre le moins haut, celui de la balance ou du certificat de naissance.

Donc, ayant toujours été douée pour les questions existentielles et assez peu pour les réponses, je continue à les poser. C'est ainsi qu'un lundi pm, encore à la course joual vert (ch'val vert est un sacre, un juron) entre une commission et le chaudron que je dois rendre à ma mère, je me retrouve au CLSC (centre local de service communautaire), avec ma mère. La question : quand est-ce que j'apprendrai que ??

Voyez le contexte : merci maman pour ta soupe. Si j'ai deux minutes pour une petite commission ? (voir leçon précédente sur la traduction simultanée du langage maternel, le non n'existe pas dans la réponse de la fille. Sauf dans la locution : "Non, ça ne me dérange pas"). Ok. On y va. Au CLSC.

- Maman, il faut prendre un numéro.

Mère : non, non, c'est juste une petite chose que j'ai à demander.

- Maman, on prend un numéro et on va attendre dans la salle d'attente.

Mère n'écoute pas. Elle est à un pied (environ 30 cm) derrière le monsieur qui est en train de se faire servir au guichet. Elle prépare l'offensive et se montre à la préposée par la gauche du monsieur. Celle-ci ne bronche pas. Mère recule et pince les lèvres. Houille! Un pincement de lèvres maternel est synonyme de guerre déclarée. Elle se déporte à la droite du monsieur qui raconte quelque chose au sujet de sa facture de téléphone (non, les CLSC ne s'occupent pas des factures de téléphone, juste des messieurs qui jasent). La préposée l'ignore encore. Mére recule, croise les bras. Me regarde. J'agite le numéro que j'ai cueilli. Elle fait sa préposée au guichet et m'ignore.

Un monsieur entre derrière nous. Il me regarde. Maman le regarde avec l'air de dire : prenez votre tour, c'est moi qui est ici. Croyez-moi, ma mère sait se faire comprendre !

La salle d'attente est bondée.

Vous pensez que le tout influence la détermination de Yolande ? Autant que cela influence la facture de téléphone du monsieur devant nous, qui a fait du progrès, il a remis son porte-feuille dans son pantalon. Il ne lui reste plus qu'à boutonner son manteau d'hiver, ajuster son foulard, mettre un gant, l'autre gant. J'cré ben que j'ai appris son numéro de téléphone par cœur par le temps qu'il y arrive.

Ma mère voit une éclaircie, c'est-à-dire que le sieur a jeté un coup d'œil à la porte. Elle se précipite, non, elle ne le bouscule pas, elle le contourne. Quand même ! Ma mère a fréquenté l'école normale des Ursulines de Québec ! (je vous parlerai un jour de cette fréquentation dont je connais plus de détails que celle qu'elle a eue avec mon père).

Madame, dit-elle de sa petite voix de vieille, en tendant sa main de petite vieille qui a un papier recyclé où elle a noté qu'elle devait venir au CLSC chercher une barre d'appui pour entrer dans le bain (barre que j'ai amplement prescrite aux petits vieux du temps que j'étais ergothérapeute en CLSC. Le destin se venge, que personne n'en doute !) et déclare sur un ton de petite vieille auquelle tu ne vas quand même pas rien refuser : "je ne prendrai pas beaucoup de temps".

La préposée, nullement émue, beaucoup d'expérience dans la petite vieille pressée, n'en démords pas. Prenez un billet.

La face de ma mère ! Non seulement un pincement de lèvres, mais un menton relevé, un sourcil froncé, et un bras qui ramène la sacoche sur son devant, signe d'indignation et de mécontentement profond.

Moi : Maman, tout va bien, regarde, j'ai un numéro, viens on va aller s'assoir.

Mère dubitative regarde le monsieur après nous et se rend devant le fait que lui non plus n'ira pas directement à la préposée. Elle vient de perdre une bataille, mais pas la guerre.

Elle s'assoit. Je la regarde dans les yeux et articule : Maman, reste ici. Je vais aller téléphoner à mon client, tout va bien.

Tout va bien... Quelle fantaisie que de penser que la fille de Yolande va être en retard à cause que la préposée ne veut pas entendre que ce que demande ma mère, c'est juste une petite chose !!!! Que le reste de la salle d'attente ait des préoccupations ne lui traverse ni l'esprit, ni la collaboration, encore moins , le désir d'obéir à une règle qui ne s'applique pas à son cas.

Point.

Donc, elle se retourne vers son voisin le plus immédiat, et croyez-moi que dans la salle d'attente, les sièges sont assez immédiats, merci, et lui demande de changer de billet.

Il a l'outrecuidance de refuser !

Moi, riant pas trop fort, dur combat, je lui dis : comment ? Vous osez refuser à ma mère ?!

Lui, pas trop certain, mais rassuré quand il m'entend rire. Au fait, je me demande de quoi il avait peur, de mon gabarit, de mon rire ou de ma mère.

Toujours est-il que je lui redis de rester tranquille, que j'allais téléphoner et que je reviendrai dans cinq minutes.

Évidement, toute la salle d'attente suivait le déroulement du tragi-comique incident, qu'est-ce qu'il y a d'autres à faire ? Surtout pas de se mêler de ses affaires ???

Donc, je vais à l'auto, je téléphone. Le tout a duré au moins trois minutes quarante secondes. Je me précipite pour aller tenir compagnie à ma mère, qui elle, sort triomphalement avec sa barre d'appui.

Ben oui, un monsieur a eut pitié et lui a offert (qu'elle dit) son billet pour qu'elle passe plus vite.

Bon, j'ai réussi à ne pas trop rire et à reconduire sécuritairement ma mère chez elle.

J'ai cinquante et un ans, disais-je, et j'en ai encore à apprendre sur le savoir-faire de ma mère. Hi que j'ai hâte d'être vieille et de marchander mes billets !

mardi 8 février 2011

Tant-BourrinMon prochain album (11)

Je sais, je sais : deux années de silence, ça vous a paru bien long. Peut-être imaginiez-vous même que j'avais renoncé à ma fabuleuse carrière artistique qui ne va pas tarder à décoller tel un pois sauteur du Mexique vers le sommet des hit-parades ? Tsss, ce serait mal me connaître ! Je crois en ma destinée et tous ceux qui m'ont mis des bâtons dans les roues en seront réduits un jour à me supplier de les laisser me lécher les orteils.

Non, en fait, au vu de votre réaction, aussi glaciale qu'un sourire de Poutine, lorsque que je vous ai présenté ma dernière maquette d'album pourtant vachement chiadée, j'ai décidé de bouder un peu. Na.

Et il faut dire qu'il y avait de quoi, merde ! Surtout que votre manque d'enthousiasme était déjà perceptible à l'écoute de mes maquettes précédentes (, , , , , , , et itou).

J'ai donc décidé que vous ne me méritiez pas. J'ai dit.

Mais après deux ans de réflexion intense, j'ai réalisé que sans acheteurs, j'aurais du mal à vendre mon prochain album de la mort qui déchire sa race.

Alors je reviens, mais soyez sympas cette fois, hein ?

D'autant que j'ai sous le bras une nouvelle maquette si puissante que j'ai l'impression de manipuler de la nitroglycérine. Un putain de concept-album qui laissera une trace brûlante dans l'histoire du rock !

Malheureusement, alors que j'avais eu une ligne de crédit illimitée pour ma maquette précédente (grâce à mon ami Bernard), j'ai dû cette fois faire avec les moyens du bord et partir à la chasse aux sponsors pour trouver le financement de mon projet. En particulier, il me fallait de quoi rémunérer les enfants de l'école primaire Hippolite Laganache pour leurs chœurs en leur offrant un goûter. C'est fou ce que le prix des BN a augmenté !

Au final, j'ai fini par trouver un fromager du Nord auquel j'ai réussi à vendre mon idée de concept-album chantant les louanges des produits de sa région. Il n'a certes pas accepté de financer mon projet en monnaie sonnante et trébuchante, mais il m'a fourni gratuitement cinq quintaux de Maroilles dont la date limite de consommation était légèrement dépassée.

Cela m'a permis d'offrir le goûter promis aux enfants (après tout, le Maroilles est meilleur pour la santé que les BN) et, en revendant quelques fromages sous le manteau, j'ai pu réunir de quoi payer la production de cette maquette que je vous propose d'écouter.

Attention, chef-d'œuvre ! Ça va décalaminer vos portugaises !




Cliquez sur l'image pour voir la pochette en grand

Tant-Bourrin - Un vieux débris de Maroilles


Dis donc Ninon, quelle infection !
Dis donc Ninon, ça pue, ça cogne !
Comme un parfum de troufignon...
Peuchère, ça sent la charogne !
Hé, peuchère, ça sent la charogne !

T'affole pas, c'est juste un vieux débris de Maroilles
T'affole pas, c'est juste un vieux débris de Maroilles

Dis donc Ninon, quelle infection !
Dis donc Ninon, ça pue, ça cogne !
Comme un parfum de troufignon...
Peuchère, ça sent la charogne !
Hé, peuchère, ça sent la charogne !

T'affole pas, c'est juste un vieux débris de Maroilles
T'affole pas, c'est juste un vieux débris de Maroilles

(Téléchargeable directement ici)


Alors ? Plutôt décoiffant, non ?

Un seul petit truc me chiffonne : mon mécène fromager, quand je lui ai fait écouter mon tube, a pris une drôle de couleur, dans des tons violacés, s'est tenu le cœur et est tombé à la renverse.

Bah, c'est sûrement l'émotion, le syndrome de Stendhal. Je le comprends : moi-même je me sens presque tomber en pâmoison quand je m'écoute.

En revanche, c'est plutôt au bord du nervous breakdown que je suis quand j'entends les mauvaises langues qui pérorent encore et laissent entendre qu'il y aurait peut-être un soupçon de début de commencement d'ébauche de ressemblance entre ma maquette et ça !

Pfff, je préfère ne pas répondre, il y en a qui ne manque pas d'air !

Heu... d'ailleurs, à propos d'air, je me demande si c'est une bonne idée d'avoir stocké les cinq quintaux de Maroilles dans mon salon. Je sens que je vais avoir du mal à tout écluser...

Un Maroilles en prime avec chacun de mes CD, ça serait peut-être une bonne idée ?

vendredi 4 février 2011

AndiamoLes solutions d'Onc Andiamo II

Il y a deux ans, je vous avais livré quelques solutions afin d’éviter :

- Les repas de réveillons onéreux,

- La belle mère envahissante,

- Des dépenses somptuaires en faveur d’adoléchiants boutonneux, et pas toujours méritants,

- Etc.

Devant l’immense succès (comment, j’exagère ?) remporté par ce billet, j’ai décidé de vous faire bénéficier de mon IMMENSE expérience dans le domaine du : comment emmerder ceux qui voudraient vous emmerder !

1) Les mômes des autres… Ils sont un peu comme les pets, il n’y a QUE les siens que l’on supporte !

Vos amis, sœurs, frères, etc., vont débouler avec leurs chiards, pour le sempiternel repas dominical.

Des modèles ! Studieux en classe, polis, ne parlant que si on les interroge. Alors que les vôtres n’en foutent pas une rame, doivent être rappelés à l’ordre pour dire bonjour, coupent la parole aux adultes, mangent comme des gorets : des mômes normaux en somme !

Quoi de plus énervant ? Les parents sont là, étalant les résultats scolaires, montrant comment leur dernière sait bien placer ses mains en couronne. Pensez ! Quinze jours qu’elle pratique la danse « classique » ! Elle est douée, nous a affirmé son PROFESSEUR, lâche l’autre conne de belle-sœur en faisant sa bouche en cul de poule !

Ah ! Ça agace, et il y a de quoi, je vous comprends, je suis passé par là !

Alors voilà, suivez LE conseil d’Onc’ Andiamo.

Laissez les parents étaler les prouesses de leur progéniture acnéique, les gamins jouent ensemble dans la chambre des enfants… Au docteur ? Peut-être !

Puis au bout d’une demi-heure, prenez l’air le plus détaché du monde et déclarez :

- Nous revenons d’un voyage dans les Caraïbes. Patrick et Charlène ne sont pas biens, nous avons pris rendez-vous avec le professeur Mollard, le spécialiste des maladies tropicales, car nous craignons beaucoup, surtout avec le choléra qui sévit dans ces régions en ce moment…

Et là, vous verrez la tronche des deux abrutis virer au vert. Ils prétexteront une casserole de lait oubliée sur le feu et appelleront leurs chers anges, leur intimant l’ordre de se rhabiller et de partir au plus vite !

- Vous ne voudriez pas que notre appartement parte en fumée ?

- Ben non !

- Alors on rentre ! N’embrassez pas vos cousins, et excusez-nous, une autre fois peut-être ? Et tenez nous au courant, ça n’est peut-être pas aussi grave !

Et hop ! Partis. Bien sûr vous n’aviez pas préparé un repas pour huit personnes, seulement pour vous quatre… On est si bien en famille !

La belle-doche qui rapplique à l’improviste ?

A l’improviste certes, mais curieusement toujours au moment du dîner !

- J’avais une tite course à faire dans l’quartier, alors j’chu v’nu faire un p’tit bécot à ma fillotte ! Hummmm, ça sent bon chez vous, c’est quoi dans le grand faitout, qui mijote et qui sent si bon ?

- Une soupe à la culotte Belle-Maman, et de la ragougnasse de tétons de négresses. Vous resterez bien avec nous pour dîner ?

- Euh… Une autre fois peut-être, j’ai un reste de tarte aux nouilles qui m’attend... Au revoir, vous embrasserez Véronique pour moi.

Et voilà, ça n’est pas compliqué, vous êtes resté poli, avenant, vous l’avez même invitée, mais elle n’est pas restée, ainsi votre épouse ne pourra pas vous faire l’ombre d’un reproche ! Le gendre i.dé.al !

Vous êtes invités chez une amie de votre épouse ?

Elle est moche, imbaisable, elle va encore vous bassiner avec « les feux de l’amour » ou l’élection de la dinde de l’année : une Bretonne ! Tu sais où elle peut se le foutre son menhir, la Bretonne ?

Pas de panique ! Voici le moyen de faire plaisir à tout le monde tout en échappant à la soirée...

Tout d’abord, allez chez le marchand de farces et attrapes du coin, achetez (ou volez-les) deux « boules puantes ».

Rentré chez vous, précipitez-vous aux toilettes : prétextez la chiasse du siècle !

- Tu sais Minou, si tu n’es pas bien, on peut rester, je vais téléphoner à Bertille afin de décommander, vous déclare votre épouse attentionnée.

- Non Bibiche ! J’aime trop ta copine et son mari (supporter du PSG) pour décliner l’invitation.

- T’es gentil Minou ! (et toc la bourgeoise dans la poche).

Vous arrivez chez la bonne copine, après avoir tourné une demi-heure avant de dégauchir une placarde, vous sonnez, tout en vous tenant le ventre et en sautant d’un pied sur l’autre.

A peine la porte ouverte, vous vous précipitez aux cagoinsses (deuxième porte à droite, suivez les mouches !) et là vous émettez quelques borborygmes destinés à imiter le bruit d’un intestin en surcharge, puis vous écrasez une boule puante.

Retour vers le salon, la télé est allumée : tu penses ! C’est la retransmission du match de la demi-finale de la ligue des clubs non vainqueurs de la coupe départementale, des clubs engagés… Vachement crucial !

Bien sûr, vous trainez l’odeur de la boule puante… La gueule de vos hôtes !

Prenez votre air crétin (même pas à se forcer) et bredouillez un : s’cusez moi, j’ai la boyasse en charpie, ça me prend tous les quarts d’heure…

La copine qui hume, tord le nez, retient un haut de cœur.

- Ben dis donc, ça m’a l’air sérieux ! On SENT bien que tu n’es pas dans ton état normal, t’as bouffé un putois ? Ça te prend tous les quarts d’heure dis-tu ? Tu devrais rentrer chez toi, c’est peut-être dangereux… Marcel, n’allume pas ta cigarette… On ne sait jamais !

- Ecoute, je suis désolé, mais effectivement, je pense qu’il serait plus raisonnable que nous rentrions… Une autre fois peut-être ?

Et voilà, et vu l’état de l’atmosphère après votre passage, ils ne sont pas prêts de renouveler l’invitation !

C’est marrant, vous avez remarqué ? Vous possédez une petite bicoque à la cambrousse, quand vous l’avez achetée, il y avait pas mal de travaux à effectuer. Pas l’ombre d’un copain, tout le temps qu’ont duré les travaux !

Maintenant qu’elle est pimpante, fraîche et accueillante, tout le monde rapplique les week-ends ainsi qu’aux grandes vacances !

Pas de panique ! J’ai la clef qui leur fermera définitivement la porte de votre charmante villégiature.

Avant l’arrivée des importuns, ne tondez pas la pelouse, cueillez les haricots verts, allez acheter une dizaine de kilos d’abricots, videz quelques seaux d’eau additionnés de brou de noix dans le sous-sol.

Quand vos amis arrivent, discrètement allez écraser la seconde boule puante (je vous avais bien dit d’en acheter deux !) dans le sous-sol.

Auparavant, vous aurez chaussé vos bottes. En entendant la voiture, sortez en prenant l’air affolé :

- T’arrives bien Robert : y’a la fosse septique qui a débordée, prends une paire de bottes dans la remise, et viens m’aider s’il te plait, il va falloir écoper ! T’es pas trop dégoûté au moins, Robert ?

- BEEEUUUU non… SLUUUUURP ! Le voilà qui appelle RAOOOUUUUL !

Au même instant, votre charmante épouse se précipite vers sa « bonne » copine :

- Thérèse (celle qui rit souvent), comme tu me fais plaisir, je ne m’y attendais pas ! Mais si tu veux manger ce soir, il y a les haricots verts à préparer, puis nous allons faire des confitures, car il ne faudrait pas perdre tous ces bons abricots que le voisin nous a donnés.

Faites-moi confiance : en voilà deux que vous n’êtes pas près de revoir !

Et enfin, le réveillon GORE !

C’est koitesse ? allez-vous me dire.

Rien de plus simple, marre des faux derches qui viennent s’empiffrer au moment du réveillon ? Ceux qui vous disent :

- Tiens Gaston, on pourrait réveillonner chez toi : la fosse septique fonctionne à nouveau, et puis tu as un grand séjour dans ta cambrousse, ce serait formidable ! Lucette et moi nous apporterons la bûche….

Ben tiens !

La veille du réveillon, rendez-vous chez votre poissonnier préféré, achetez : des huitres, des oursins, des pinces de crabes (bien grosses ce sont les plus dures), des bigorneaux, et enfin des amandes de mer.

Avant que vos invités arrivent, disposez dans de grandes assiettes, aux emplacements des convives : les pinces de crabes, les huîtres, les oursins, les amandes de mer et… les bigorneaux.

Vous aurez auparavant prévu d’acheter une pince genre casse-noix, et un couteau à huîtres, PAR COUPLE.

Après l’apéro (pas de champagne… Trop cher !) On passe dans la salle à manger…

- OH ! Des fruits de mer ! Quelle bonne idée ! entament dans un chœur parfait vos invités.

Et vous, à ce moment-là, prenez votre voix la plus suave et déclarez :

- A la guerre comme à la guerre… Chacun se débrouille (oui, j’ai écrit débrouille).

Un détail encore : mettez sur la table plusieurs rouleaux de "sopalin".

Et maintenant : que le spectacle commence !

Les couteaux à huîtres qui ripent… AÏE ! OUILLE ! Les oursins (une bestiole qui adore la viande) Putain ! Ça pique ! Les casse-noix qui pincent la peau des mains quand ils ripent sur les grosses pinces de crabes…OUH LA LA !

Et les amandes de mer… T’as déjà ouvert des amandes de mer ? Pas fastoche !

Alors on assiste au ballet des feuilles de sopalin, qui rougissent à vue d’œil, à la jolie toile cirée (surtout pas de nappe en tissu elle serait gâchée) qui se constelle de points rouges, aux jolis pinçons qui prennent une teinte bleuâtre.

Quelle belle harmonie de couleurs, quel doux concert de gémissements… Un bonheur !

Et je vous assure que plus jamais on ne vous cassera les pieds (oui j’ai écrit pieds) à venir réveillonner chez vous !

En conclusion : on dit merci QUI ?