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samedi 30 septembre 2006

Manou3 interludes

J'avais pris mon stylo, le plus beau papier dont je disposais et j'avais écrit mon désir de lui par le menu, détaillé les gestes que j'envisageais d’avoir en sa présence.

Plus j’écrivais, plus je m’imaginais l'effet produit sur cet homme quand il lirait mes mots. Plus mon désir de lui s’accroissait. Je construisais le plaisir à venir.

Il pouvait refuser, il pouvait craindre, il pouvait se moquer. Il ne fit rien de tout cela. Nous nous sommes rencontrés comme je l’avais écrit.



On entendait la fête, il faisait nuit
J’avais ses cheveux gris contre ma tête
De lui, j’avais voulu le jeu, l’étreinte
Les plaintes
Le plaisir assouvi

vendredi 29 septembre 2006

Tant-BourrinDétail

L'homme au costume gris acier marchait tranquillement sur le trottoir, au milieu des passants, d'une démarche un peu raide. Il scrutait alentour, les bâtiments, les voitures, les gens, d'un regard froid, presque métallique. Personne ne faisait particulièrement attention à lui. Et pourtant...


- La translation ondulaire du droïde s'est parfaitement déroulée. Les êtres frustes peuplant cette planète semblent le prendre pour un des leurs. Nous avons donc bien réussi à reproduire leur apparence physique et leurs vêtements.
- Parfait ! La transmission de données est-elle satisfaisante ?
- Transmission parfaite : aucune défaillance de capteur à signaler. La mission "éclaireur" est un succès total.
- Tant mieux pour les habitants de cette planète : si tout continue de bien se passer, nous allons pouvoir les placer en phase d'observation pour quelques siècles avant colonisation éventuelle. Restez quand même prêts à actionner la procédure de destruction si le droïde venait à être démasqué.
- Ce sera fait si besoin est. Même si...
- Même si ?
- Même si je trouve cela un peu cruel. Ces êtres sont certes frustes et leur apparence est monstrueuse, certes, mais j'imagine qu'ils éprouvent certaines formes de sentiments, d'émotions, et les détruire uniquement parce que le droïde éclaireur est découvert me semble...
- ...semble entièrement normal et relève de la prudence la plus élémentaire ! Nous ne disposons pas encore de suffisamment d'informations pour connaître le degré de développement technologique de ces êtres. Qui sait si, sous des dehors frustes, ils ne possèdent pas de moyens techniques leur permettant d'attaquer notre galaxie s'ils venaient à en deviner l'existence ? Nous ne pouvons pas faire courir le moindre risque à notre civilisation : si le droïde est démasqué, nous devons instantanément vitrifier cette planète, que cela soit clair.
- Clair. Je respecterai la procédure.


Les yeux métalliques de l'homme au costume gris acier continuaient d'enregistrer des milliards d'informations et à les stocker dans les circuits internes, au plus profond de lui-même, dans ce que les humains alentours auraient appelé son ventre. Et sur sa face impavide et figée, on ne lisait aucune vie, que la froideur du métal sous une fine pellicule couleur chair.


- Alerte niveau 2 ! Un échauffement trop élevé est signalé dans les circuits internes ventraux du droïde. Le niveau de refroidissement par aération est insuffisant !
- Comment est-ce possible ?
- Je crains que les étoffes que nous avons tâché d'imiter pour vêtir le droïde ne soient trop peu perméables à l'atmosphère de cette planète et que la prise d'air ventrale ne peine à évacuer la chaleur... Température toujours en hausse ! Nous approchons de la limite autorisée, les circuits ne vont pas résister !
- Il n'y a pas des centaines de solutions : envoyez l'ordre au droïde d'aménager un passage pour l'atmosphère ambiante au travers de ses vêtements !


L'homme au costume gris acier obéit immédiatement à l'ordre qui lui venait de là-haut, à plusieurs milliers de kilomètres au-dessus de sa tête, permettant une meilleure aération de ses circuits internes. Puis il reprit sa marche raide et mécanique.


- Ouf, la température interne a chuté. Tous les relevés reviennent à la normale.
- Les habitants de cette planète viennent sans le savoir de l'échapper belle !


Quelques milliers de kilomètres plus bas, la main d'un vieillard tapotait l'épaule de l'homme au costume gris acier.
- Excusez-moi de vous déranger, Monsieur, mais je tenais à vous signaler que votre braguette est ouverte...

jeudi 28 septembre 2006

Saoul-FifreVinaï II

Ce soir j'ai pas plus d'idée de billet que de poils sous les bras et de valises sous les yeux le jour de ma naissance. Autant dire peu. Alors je vais foutre la frousse à Matthieu en vous racontant mon week-end dans un bled paumé de chez isolé. D'ailleurs la commune mitoyenne (mais il faut passer une frontière et changer de pays) s'appelle Isola, je n'invente rien. Isola, l'ami Georges a insisté pour nous y faire monter. On était dans un putain de brouillard, enfin, dans un brouillard, on y voit un peu mais là, on barbotait plutôt dans une soupe de pois cassés froide et Monsieur voulait en sortir par le haut, émerger du nuage, se la jouer Saint-Exupéry, le courrier meurt mais se rend à l'adresse indiquée... Résultat : trempés jusqu'aux os par le brouillard, t'as déjà vu ça ? On a rien vu. Sur un panneau touristique, il y avait un poème à la gloire de Fausto Copi. Il fallait se mettre à 10 cm pour le lire. À un moment, notre hôte, tout fier de nous faire visiter sa belle région d'origine, nous dit :

- Regardez le lac !

- Quel lac ?

Ha effectivement, en s'accroupissant, on pouvait entr'apercevoir qu'il y avait de l'eau juste à nos pieds. Heureusement qu'il nous a prévenu, on allait glisser dedans ! Ha la beauté surnaturelle d'un lac de montagne ourlé de sa brume diaphane... Bon, passons. Le retour en bagnole fut stressant. On ne savait pas si on était à droite ou à gauche de la route, mais on savait qu'elle était bordée de précipices. D'aucuns exprimaient avec force leur motivation à terminer les 30 bornes restantes à pied. Les phares d'un camion s'allumèrent brusquement droit devant. Il nous esquiva avec élégance sur notre droite. Nos repères spatiaux se précisaient : nous mordions légèrement beaucoup sur la voie adverse et le précipice était donc un poil supplémentaire à notre gauche puisque le camion n'était pas tombé dedans. Après ce bref instant de folie britannique, nous tînmes le plus possible notre droite. Nous dûmes guetter pendant 15 kilomètres "un chemin sur la gauche", pour aller rendre visite à un membre de la famille. Georges avait du mal à nous aider dans notre recherche car la dernière fois qu'il avait vu sa cousine remontait à 10 ans et il faisait nuit. Après être passé 3 fois devant, nous en primes un au hasard et il se trouva que c'était le bon. Le bon vrai gros bien dilaté trou du cul du monde. La ferme d'alpage estival du berger et de sa famille. La saison se terminait, d'ailleurs. Le troupeau de 200 vaches redescendait lundi dans la vallée pour prendre ses quartiers d'hiver, avant les premières neiges. Nous allions rater ce spectacle hallucinant que la cousine nous décrivait avec ses mots émouvants :

- Quand je leur accroche la cloche du retour, mes vaches, on dirait des personnes. Elles savent. Elles sont contentes de revenir au village...

Bien qu'avec ce brouillard opaque à la con, le spectacle eut été surtout olfactif et auditif ? Enfin, à un jour près, nous sommes passé à côté de cette déshumance bovine. Pour nous consoler, nous lui avons vidé son stock de fromages et de saucissons, à des tarifs carrément tiers-mondistes d'avant-guerre, et l'avons écouté nous raconter sa vie ici, dans un français lettré et sans accent. C'est une turbine branchée sur une canalisation forcée, alimentée par une source, qui leur fournit l'électricité qui fait trembloter la lumière de l'ampoule, tourner le compresseur du frigo et la machine à traire. Elle est la seule femme ici, à s'occuper de son mari, de toute l'équipe de bergers, de la fabrication des fromages, des cochons, de la vente aux touristes, et comme cela lui laisse visiblement un max de temps libre, elle fait gîte rural et reçoit des bandes de 10, 12 enfants citadins ! Farniente est un mot d'origine italienne.

Le matin également, avec les bancs de brume au fond des vallées, il fallait aiguiser son regard pour voir les cèpes pointer sous les feuilles. La température frisquette, en revanche, rendait la montée vers le fort, fort agréable. J'ai déjà parlé de la beauté de l'utile. La richesse végétale de ce vallon me comblait de ses fruits : châtaignes, noix, noisettes, les plus gros cynhorodons que j'ai jamais vu, et des champignons, bien sûr. Cerise sur le gâteau : nul insecte et son cortège d'agaceries car le coin regorgeait de belles amanites tue-mouches, dans leurs robes rouges à pois blancs.

Une éclaircie inattendue me permit de prendre quelques photos non sépias, et nous pique-niquâmes en tout bien tout honneur sous l'église dédiée à Santa Anna dont la spécialité est la protection rapprochée des gros bourrins à la vue basse et à la vitesse excessive. Efficacité corroborée et prouvée statistiquement par les 2 murs d'abside de l'église couverts d'ex-votos jusqu'au plafond. Le fait qu'on ressorte indemne d'un accident de vélo contre un arbre ne me subjugue pas vraiment, ça m'est arrivé plus d'une fois, mais cela montre simplement que toute l'aide que nous prodigue Santa-Anna n'est pas encore répertoriée de manière exhaustive.

En attendant les filles (comment venir en Italie sans prendre le temps de renouveler bottes et bottines de ce cuir inégalé ?) nous préparons les braises avec un fagot de mort-bois glané en faisant les champignons, faisons chauffer la fine lauze et y faisons griller diverses saucisses. Salades, gros rouge qui tache pour nous, Champagne pour les filles, puis petite sieste bien méritée, le tout en se repassant les jumelles pour regarder et entendre les marmottes s'amuser, siffler et se goinfrer avant de plonger dans leur long sommeil hibernal.

Le soir, après cette sombre et désastreuse virée au cœur du gigantesque cumulo-nimbus qui englobait tous les sommets des Alpes du Sud, nos guides agréés nous emmenèrent dans un resto tenu par 2 frères guides de chasse en montagne. Onze plats. Sans compter le café-Fernet-Branca de Georges, ni mon café-génépi. Avec une soupe d'un autre monde, des herbes de montagne, du cerf, des cèpes en papillotes, de la polenta avec des tas de viandes, de sauces, des fromages qui cherchaient à s'échapper, des gâteaux qui croulaient sous la crême...

Et pour faire glisser tout ça, des cascades de leur vin pétillant juste ce qu'il faut...

mercredi 27 septembre 2006

ManouINDE (2)

Epi ne revient pas. L'atmosphère devient de plus en plus lourde. Nous ourdissons (du verbe ourdir : Préparer les fils de la chaîne, les disposer en nappe sur l'ourdissoir) un complot afin que cela cesse.

Est-il besoin de préciser que l'échec s'avère une excellente façon d'apprendre ?

Outre (peau de de bouc cousue comme un sac et servant à contenir des liquides) que cela me ramène à une humilité primordiale (la lumière joue un rôle majeur dans la croissance des plantes), je confesse, hélas, aussi, un dilletantisme de bon aloi et de mauvaise augure...










mardi 26 septembre 2006

Tant-BourrinUn bien étrange colis

Jeudi dernier, il m'est arrivé une bien étrange aventure. Un gros paquet a été livré chez moi. Avec un nom d'expéditeur que je ne connaissais pas.

Photo prise au téléobjectif à l'abri d'un épais mur de béton

Bon, vous commencez à me cerner et vous savez que je ne suis pas homme à me laisser impressionner par la peur de l'inconnu. C'est pourquoi, après avoir mobilisé les pompiers, la police, l'armée, les services du contre-espionnage et provoqué l'évacuation de 20000 personnes dans un périmètre de 800 mètres autour de mon logement, j'ouvrais sans ciller ledit paquet.

Et là, je fis de grands yeux tout ronds. C'était en fait la caverne d'Ali Baba que je venais d'ouvrir : devant moi s'étalait une foison de merveilles.

Mon oeil fut attiré par une carte postale "Portes ouvertes au Conseil de l'Europe" qui trônait sur le tout. Je la retournai et... je compris tout !

Je me remémorai soudain cette faiblesse, quelques mois plus tôt : après des années de résistance forcenée, j'avais fini, un soir de désespoir où j'avais bu un verre de Champomy de trop, par céder à l'appel des sirènes du filet garni et donné mes coordonnées. Le temps avait depuis passé, chassant dans les couches neurologiques profondes ces souvenirs honteux.

Et voilà que sur cette carte que je tenais entre mes doigts désormais tremblants, j'avais une authentique dédicace du Maréchal-Président à Vie, Anténor himself ! Le nom inconnu sur le paquet était son vrai nom de la vraie vie, et toutes ces splendeurs entassées dans le paquet constituaient un véritable filet garni maréchal-présidentiel !

C'est Byzance !

Une énorme boule d'émotion dans la gorge, j'en dressai l'inventaire pour l'édification des générations futures :

  • un sachet de levure chimique Alsa
  • un sachet de sucre vanilliné Alsa
  • un sachet de Riewele Supp à l'alsacienne
  • un paquet de spätzle d'Alsace
  • un paquet de pates alphabet Hochzeit Nudeln
  • une flasque de Cognac
  • 6 bougies père Noël
  • un poivron
  • une éponge grattante
  • un livre de Marc Lévy
  • un gros smiley jaune qui produit de la chaleur quand on tord la petite pastille à l'intérieur
  • un vache verseuse pour servir le lait
  • une attache pour feuilles perforées
  • un petit pot de confiture de coing
  • un petit pot de confiture de quetsche
  • deux pastilles d'Omo
  • un filet pour lessive
  • deux coquetiers
  • un dépliant "10 questions réponses sur le don d'organes"
  • un dépliant touristique sur le Fort Carré
  • un pot de sel au gingembre et au thé vert
  • un gant de plastique
  • 7 mini-Mars

Voilà. Je laisse le soin aux exégètes de trouver les messages subliminaux cachés dans ce filet garni confectionné avec tant de délicatesse. Pour ma part, je me contenterai de lancer un énorme...

"Merci Anténor !" :~)

lundi 25 septembre 2006

Saoul-FifreVinaï

Passé le col de Larche
De l'autre côté du brouillard
Les rochers sont en marche
Suspendant leur espoir
Dans le Fort Albertino
Où l'un soudé à l'autre
Les autres sur les uns se juchant
Très fous, très hauts, très costauds
Barrant le vallon et son ruisseau.

Courageuses fortifications
Qui tentent maladroitement
D'endiguer l'invasion
De touristes en mal de piments.

dimanche 24 septembre 2006

ManouAcceptation et Paic



Dans la mesure du possible, j’avais préparé un billet humoristique. Ce soir je ne suis pas d’humeur. La santé chancelante de mes parents me rapproche de leur fin. Comme de la mienne. Je me sens dépassée, inutile face aux études de mes enfants. Je n’ai plus les connaissances. Au mieux, je leur donne des techniques d’analyse, de synthèse. Je relis.

Ni la démarche de ma mère, ni la respiration de mon père ne s’amélioreront. Ma peau s'adoucira. Mon corps suivra de plus en plus péniblement le rythme des entraînements sportifs. Signe d’acceptation, je me foutrai de ne pas arriver où j’arrivais hier. On dit, travaillons la précision au lieu de la vitesse. On dit que la compréhension remplace l'instinct. On triche. Evidemment. On ment. On dit : maturité, sagesse. On dit ça. Et ce soir je me dis résignation.

Enfant, je comparais mes souvenirs à des diamants intacts, impérissables, purs. L’impermanence de la pensée, les recompositions subjectives des évènements me semblent tellement naturelles à présent. Rien n’est vrai. Rien ne dure. Nous ne sommes ni ange ni démon. Il n’y a que la vie. Dans une centaine d’années mes yeux et ceux de tous les miens seront fermés.

Pourtant demain j’aurais encore envie de me lever, de laver la salade, de toucher, d’écrire, de marcher. Demain, j’aurais encore envie de vivre. Peut-être davantage. De toute façon, demain il faudra racheter du Paic.



Du coq à l'âne, je vous fais profiter d'une citation qui avait ébranlé mes diamants d'enfance. Les dernières phrases du livre de Jacques MONOD - Le hasard et la nécessité - :

L'ancienne alliance est rompue; L'homme sait enfin qu'il est seul dans l'immensité indifférente de l'univers d'où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n'est écrit nulle part. A lui de choisir entre le Royaume et les ténèbres.

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