Dans la mesure du possible, j’avais préparé un billet humoristique. Ce soir je ne suis pas d’humeur. La santé chancelante de mes parents me rapproche de leur fin. Comme de la mienne. Je me sens dépassée, inutile face aux études de mes enfants. Je n’ai plus les connaissances. Au mieux, je leur donne des techniques d’analyse, de synthèse. Je relis.

Ni la démarche de ma mère, ni la respiration de mon père ne s’amélioreront. Ma peau s'adoucira. Mon corps suivra de plus en plus péniblement le rythme des entraînements sportifs. Signe d’acceptation, je me foutrai de ne pas arriver où j’arrivais hier. On dit, travaillons la précision au lieu de la vitesse. On dit que la compréhension remplace l'instinct. On triche. Evidemment. On ment. On dit : maturité, sagesse. On dit ça. Et ce soir je me dis résignation.

Enfant, je comparais mes souvenirs à des diamants intacts, impérissables, purs. L’impermanence de la pensée, les recompositions subjectives des évènements me semblent tellement naturelles à présent. Rien n’est vrai. Rien ne dure. Nous ne sommes ni ange ni démon. Il n’y a que la vie. Dans une centaine d’années mes yeux et ceux de tous les miens seront fermés.

Pourtant demain j’aurais encore envie de me lever, de laver la salade, de toucher, d’écrire, de marcher. Demain, j’aurais encore envie de vivre. Peut-être davantage. De toute façon, demain il faudra racheter du Paic.



Du coq à l'âne, je vous fais profiter d'une citation qui avait ébranlé mes diamants d'enfance. Les dernières phrases du livre de Jacques MONOD - Le hasard et la nécessité - :

L'ancienne alliance est rompue; L'homme sait enfin qu'il est seul dans l'immensité indifférente de l'univers d'où il a émergé par hasard. Non plus que son destin, son devoir n'est écrit nulle part. A lui de choisir entre le Royaume et les ténèbres.