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jeudi 30 avril 2009

Tant-BourrinA day in the life

La journée avait été parfaite, gorgée de soleil à souhait et paisible comme une émission de Michel Drucker. Une fin idéale de vacances, là-bas, dans la banlieue bordelaise, avant le retour prévu le lendemain matin dans les brumes parisiennes.

Nous avions emmené Tant-Bourriquet au parc, une vaste étendue de verdure boisée dans laquelle les bambins et les bambines peuvent déverser leur trop-plein d'énergie à loisir, avec le secret espoir parental qu'il en résulterait un sommeil plus profond et plus durable le lendemain matin. Tant-Bourriquet y avait fait sa énième conquête, une jolie petite blonde de cinq ans avec laquelle il avait galopé en riant tout l'après-midi.

De retour à la maison familiale qui a connu mes propres galopades d'enfant, je trouvai ma mère qui, dans la cuisine s'appliquait une poche de glace sur le menton. Elle marmonna entre ses dents quelque chose comme "heu huis hombée", remonta un peu sa jupe pour laisser apparaître un genou ensanglanté et, écartant la poche de glace, je découvris alors, une boule dans l'estomac, son visage quelque peu tuméfié.

Bon sang, elle était retombée ! L'âge avançant (80 ans), les pas se font moins sûrs, les réactions plus lentes, et ma mère avait déjà ces quelques dernières années chuté deux ou trois fois, sans trop de dégâts heureusement. Cette fois, son pied avait visiblement ripé sur le bord du trottoir et elle avait chu face la première. Et dans le combat trottoir contre menton, c'était le trottoir qui avait gagné.

Comme la douleur semblait forte et ne pas devoir passer, il n'y eut pas à tergiverser : j'amenai illico ma mère aux urgences qui, par chance, se trouvent à une portée de lance-pierre de là.

Une grande première pour moi : malgré un âge légèrement avancé, c'était la première fois de ma vie que je mettais les pieds dans un tel service. Et des pieds, il allait m'en falloir pour franchir la première étape : l'accueil administratif.

Après m'être assuré que ma mère était bien installée dans la salle d'attente, j'allai faire le piquet dans la file d'attente. Quatre personnes devant moi et, très rapidement, cinq ou six qui débarquèrent et prirent à leur tour leur place dans la queue.

Etrange, je m'imaginais trouver dans un service d'urgences des types avec une jambe à moitié arrachée, un couteau à viande planté dans la main ou avec un pitbull incrusté dans la chair de leurs fesses. Mais là, nib de chez nib : que des personnes sans la moindre gouttelette de sang, solidement campées sur leurs deux guiboles, patientant gentiment sans émettre un seul gémissement de douleur.

Heureusement, une ambulance s'arrêta bientôt dans le hall pour me confirmer que je n'étais pas en train de faire la queue devant un guichet SNCF. Deux brancardiers vinrent se planter devant l'accueil avec leur malade sur un lit roulant, faisant jouer leur priorité pour l'enregistrement. Je crus toutefois percevoir un petit soupir d'exaspération derrière moi, et je m'attendais presque à ce que quelqu'un s'écrie "à la queue, comme tout le monde !" Mais il faut croire que la dureté des couilles est inversement proportionnelle à celle de la connerie, et le cri ne vint pas.

Au bout d'un quart d'heure d'attente, un infirmier passa et demanda à chacun, dans la file d'attente, la raison de sa présence, peut-être pour essayer de désengorger ce qui pouvait l'être. Je pus alors constater que près de 80% des personnes présentes était venues pour une urgence dentaire.

Mon dieu ! L'époque était donc devenue bien chochotte pour rappliquer ainsi aux urgences au premier bobo quenottal venu ! Et je vous en parle en toute connaissance de cause, moi qui ai aujourd'hui plus de plomb que d'émail dans la bouche... Combien de fois ai-je passé des nuits légèrement inconfortables à me gaver d'aspirine, à me rincer régulièrement la bouche à l'eau froide pour évacuer un peu la douleur, à m'écraser la joue sur l'oreiller ? A l'époque, il n'était même pas envisageable d'aller encombrer les urgences pour un petit nerf endolori : on attendait tant bien que mal le lendemain pour chercher un dentiste à même de guérir le bobo. Mais autres temps, autres moeurs, je suppose...

Au bout de quarante minutes, enfin, l'enregistrement était fait. Je retournai m'asseoir auprès de ma pauvre mère qui se tenait toujours la mâchoire. Pourvu qu'elle ne soit pas fracturée...

Il était alors 19h30. Je me dis que l'attente ne serait peut-être pas trop longue, vu que c'étaient surtout les dentistes urgentistes qui devaient être débordés (oui, je sais, j'aurais pu dire "sur les dents", mais cela aurait été un peu trop facile). En effet, une demi-heure plus tard à peine, ma mère fut appelée. Je la laissai en bonnes mains et, plutôt que de poireauter dans la salle d'attente surchauffée, je décidai d'aller respirer la douceur de l'air extérieur : le hall étant vitré, je verrai bien quand ma mère ressortirait...

Devant l'entrée, une petite étendue de pelouse, fraîchement tondue, donnait au lieu un air bucolique. Je remarquai immédiatement, au milieu de celle-ci, des rectangle de terre retournée, visiblement en attente de plantations pour créer des massifs floraux : six rectangles parfaitement alignés, trois à gauche de l'entrée et trois à droite de celle-ci. Des rectangles de terre retournée d'environ deux mètres de long sur 80 cm de large.

Oui, vous avez compris la pensée qui me traversa alors fugacement l'esprit : il ne manquait plus qu'une croix plantée à la tête de chaque rectangle ! Un camouflage pour dégonfler les statistiques d'échec des urgences ? Tssssst... Je chassai bien vite cette image : je n'allai quand même pas faire du mauvais esprit en un moment pareil !

Un autre type faisait également les cent pas (ou plutôt les dix mille pas, vu le temps que cela allait durer) pour patienter. Celui-là semblait ne pas savoir quoi faire pour passer le temps, commençant à cramer une cigarette, puis bidouillant son téléphone portable, allant à gauche, à droite.

Puis il se dirigea vers le parking quelques mètres plus loin et ouvrit la portière de sa voiture. Je pensai alors qu'il cherchait simplement à s'asseoir, mais non : il déverrouilla son coffre, sortit une boîte d'outils, et commença à s'activer sur sa voiture. La chose était fascinante : je ne sais pas ce qu'il pouvait bien faire à son véhicule, mais voir ce type qui, visiblement, avait un de ses proches en train d'être soigné aux urgences, fignoler le tuning de sa caisse sur le parking de l'hosto touchait au surréalisme. Un hyperactif qui chassait son stress dans le travail manuel, peut-être ?

Peu après, un homme, accompagné de deux enfants, sortit à son tour. Leur mère, comme je l'avais entendu tout à l'heure, était là pour une urgence dentaire. Il était près de neuf heures moins le quart. Le petit garçon s'amusait à marcher sur des gros cailloux décoratifs coulés dans le ciment, près de la porte vitrée. La petite fille parlait avec son père. L'air était doux, la pénombre peu à peu envahissait le ciel. Les gamins garderaient sûrement un excellent souvenir de cette soirée pas comme les autres, hors du rythme habituel de la cellule familiale. Leur mère un peu moins, sûrement.

Celle-ci finit d'ailleurs par sortir une bonne demi-heure plus tard, l'air visiblement soulagée, sous les vivats de sa progéniture. La cohorte des faiseurs de cent pas s'en trouva donc fort réduite. Seul mon ami le bricoleur fou m'accompagnait encore.

Le temps n'en finissait plus de ne pas en finir. Pourquoi était-ce si long ? Etait-ce bon signe ? Mauvais signe ? Des gens entraient. D'autres sortaient. La pénombre peu à peu gagnait.

Et d'ailleurs, à propos de gens qui sortaient, je vis bientôt une dame, la quarantaine, qui quittait les lieux et partait vers le fond du parking, là-bas, à droite, suivie par une autre dame plus âgée (sa mère ?). Ce qui attira mon attention était ce mouchoir qu'elle tenait pressé sur sa bouche. Encore une urgence dentaire ? Elle n'avait pas eu droit à une anesthésie locale ? Ou bien...

Je les regardai s'éloigner jusqu'à ce qui devait être leur voiture. Celle-ci démarra et prit le chemin de la sortie. Elle allai donc passer près de moi. Je ne pus m'empêcher de jeter un rapide coup d'oeil au passage. L'image fut fugace mais se planta ongles en avant dans mon cerveau : elle conduisait, le visage tordu par le chagrin, en larmes. Je compris alors que ce n'était pas elle la malade, et que les nouvelles d'un proche avaient dû être mauvaises. Très mauvaises.

Il fit soudain plus froid alors que la voiture s'éloignait déjà.

THCHIMM BOOOOM THCHIMM BOOOOM THCHIMM BOOOOM...

Moins de dix secondes s'étaient écoulées qu'une puissante musique techno s'éleva, faisant exploser en éclat l'émotion de l'instant.

Je me tournai et vis mon bricoleur fou qui paraissait lui-même un peu surpris se jeter sur le bouton de son auto-radio pour éteindre celui-ci. Une fausse manip de sa part au cours des réparations : tout frappadingue qu'il soit, il n'était visiblement pas du genre à organiser une rave-party au pied d'un établissement de soin.

Ce n'est que vers dix heures du soir que je vis enfin ma mère apparaître, là-bas, dans le hall, accompagnée d'une infirmière. Ouf ! Tout allait bien. Pas de fracture de la mâchoire ni d'autre chose, et un analgésique avait fait partir la douleur. Ma mère pouvait de nouveau parler et se sentait visiblement soulagée. Elle en serait quitte pour de belles traces de contusion sur son visage, notamment son menton qui avait viré carrément au violacé.

Je soupirai de soulagement, dans la nuit maintenant noire, en quittant les lieux avec elle.

Sans mouchoir sur mon visage.

dimanche 26 avril 2009

AndiamoLa guerre du GULF

Il neige sans discontinuer depuis un mois ! Et nous sommes le seize juillet 2012, les manifestations de la prise de la Bastille ont été annulées !

Météorologiste de mes deux, réchauffement de la planète… Mon cul, il fait froid, de plus en plus froid, le thermomètre flirte avec les moins vingt, plus bas je ne le saurai pas, le mien ne descend pas en dessous.

A jouer au con, avec nos p’tites autos, nos centrales électriques, au fuel, charbon, etc…

Voilà, ce qui devait arriver est arrivé, conséquence inattendue, le GULF STREAM s’est arrêté de circuler, comme ça net.

Les savantasses nous ont expliqué, ils savent tout sur tout, on nous esssplique bien, mais APRES !

Il fonctionnait comme un tapis roulant ce brave courant chaud, partant des Caraïbes, et plongeant dans l’océan arctique, et ce grâce à des mécanismes complexes.

Ce mécanisme s'appelle la circulation thermohaline, l'augmentation de la température a affecté cette circulation, en modifiant la température et la salinité de l'eau, affectant la zone de "plongée" du Gulf Stream.

Ces zones où le courant plonge sont la mer du Labrador ainsi que les mers nordiques en Atlantique nord.

En hiver, les eaux salées et chaudes provenant de l'Atlantique tropical, refroidissent, ce qui a pour effet de réchauffer l'atmosphère, mais aussi d'augmenter la densité de l'eau, lorsqu'elles sont suffisamment refroidies, elles deviennent assez lourdes pour plonger au fond de l'océan, cette "chute" entraîne par effet dynamique le courant, créant ainsi une sorte de tapis roulant liquide.

Mais si la température augmente, le refroidissement des eaux nordiques sera moindre, de même que la fonte de la calotte glacière (composée d'eau douce gelée) fera varier la salinité des eaux, la plongée dans les eaux profondes sera ralentie, voire stoppée.

Et voilà c'est arrivé, certains tels Cassandre nous avaient avertis, mais les voies du dollar et de l'euro son impénétrables.

Donc, d’un coup, le beau tapis roulant s’est arrêté NET ! Il ne "plonge" plus le beau tapis…

Plus de bouillotte pour réchauffer notre vieux continent, alors forcément ça caille ! Notre belle, notre vieille Europe, grelotte. J’ai un mal de chien à taper sur les touches. Si ça continue, tout va s’arrêter, les câbles qui alimentent la capitale sont givrés à mort, ils ne tiendront pas longtemps, déjà plusieurs régions sont touchées, les morts se comptent par milliers, impossible de les enterrer, trop froid, le sol est dur comme du béton.

On les aligne dans des hangars. Remarquez, le froid les conserve, ça me rappelle le bouquin de Barjavel : "ravage", les centrales électriques cessent de fonctionner, phénomène électromagnétique brutal et soudain ! Une poignée d’hommes et de femmes tentent de survivre.

Deux jours se sont écoulés depuis mes dernières lignes, je pen

vendredi 24 avril 2009

Saoul-FifreCe si doux brin de fille

Les chansons sont comme des enfants. Elles naissent, on s'extasie, le moindre de leurs gazouillis tient du génie, et puis elles grandissent, bien sûr, on est pas des brutes, on les aime toujours, mais on voit mieux leurs défauts, on s'en lasse, et puis personne ne les chante plus, ne les fait plus vivre, on les oublie dans un coin de l'ordi ou au fond d'une cassette poussiéreuse.

Et puis un jour, on reçoit un mail.

C'est mon pote musicos qui me dit : "Va voir là-bas et dis-moi ce que tu en penses ?"

Tiens, la chanson a grandi, elle a mûri, trouvé son rythme, un public, elle a l'air heureuse, ses fans aussi.

Ça fait plaisir de la savoir vivante.

J'ai prononcé la cédille
Brin de laine, brin d'osier
De ce si doux brin d’ fille
J'ai le cœur dans un brasier

Et le seuil des décibels
Brin de laine, brin d'osier
Je l'ai passé avec elle
Tous deux extasiés

Et j'ai manié la litote
Brin de laine, brin d'osier
Au travers de sa culotte
La main sous le chemisier .

De son ventre à ses épaules
Brin de laine, brin d'osier
Ma bouche est devenue folle
Comme un désert, mon gosier .

Sa jeune poitrine en fièvre
Brin de laine, brin d'osier
S’embrasait contre mes lèvres
Et mes dents de carnassier

J'ai su l'odeur de l'azur
Brin de laine, brin d'osier
Mes ongles dans sa frisure
Son caviar m'a rassasié .

Une touffe de bruyères
Brin de laine, brin d'osier
Cachait la source d’eau claire
Où je venais m’abreuver

Puis j'ai glissé sans ambages
Brin de laine, brin d'osier
Le feuillet entre les pages
De son livre de chevet .

Son corps prend toutes les formes
Brin de laine, brin d'osier
J'y mord comm’ dans une pomme
Je croque tout le panier…

J'ai prononcé la cédille
Brin de laine, brin d'osier
De ce si doux brin d’ fille
J'ai le cœur dans un brasier

mercredi 22 avril 2009

Tant-BourrinAllô, Tant-Bourrin ?

lundi 20 avril 2009

Mam'zelle KesskadieL'envolée

Dans le petit matin du nord, la fille du nord était assise sur le bord de la 101.

À un mille de distance, on ne voyait pas d’autos ni à gauche, ni à droite.

Dans le petit matin frisquet de novembre, la fille du nord donnait du pain à un corbeau gros comme un chat noir devant elle.

Il n’y avait pas encore de bruits, l’air était sec et les champs alentours avaient cette barbe blanche des petits matins avant la neige.

L’asphalte était zébrée de noir. La ligne jaune s’écaillait à l’infini devant .

Les fourmis dormaient pour l’hiver dans le sol déjà gelé. Rien d’autre que des engins à quatre roues ne pouvaient arriver dans l’histoire qu’écrivaient ses mains livides et le corbeau sombre.

Rien d’autre, pensait-elle. Rien.

De ses doigts blancs de froid rougis de sang, elle tendait morceau après morceau la chair tiède à l’oiseau.

Bientôt, il lui faudrait choisir. Ce côté ci de la route pour le nord, l’autre côté pour le sud. Un côté pour ses racines, l’autre pour la cime de ses ambitions.

Et ses tripes au milieu du chemin.

Emmenées dans un truc à quatre roues, quelque part loin d’un côté ou de l’autre.

Et du bord du fossé fumait à peine le cadavre de l’entremetteur entre le ciel et son destin.

La blessure avait tranché dans le cou, à la bonne place , un trait avait suffit malgré son inexpérience.

Il avait bien gigoté un peu pour la forme, écroulé dans le fossé.

C’était son destin à lui de lui donner son avenir à elle.

Le corbeau s’irrita d’un moment d’hésitation quand elle avait regardé de nouveau le corps mort. La vie criait sa faim.

Et elle, quand serait-elle rassasiée? Les maigres racines du nord ne pouvaient plus suffire. Les cieux enfumés de par là-bas obstruait la vue des jardins d’Éden.

Ce côté ci, de l’autre bord?

Ronronnait au loin une machine en crescendo indécent vers l’indécise. Quand elle passa dans le fortissimo de son intrusion, le chauffeur aperçut la fille et dans le rétroviseur le cadavre.

Il recula.

C’était un policier.

Il regarda dans le fond du fossé. Ausculta l’arme en connaisseur. Un peu incrédule à la vue d’une femme qui s’en serait servi.

« Ouain.. » dit-il. « Qu’est-ce que tu vas en faire? »

« Sais pas. Je sais pas quoi faire ». Répondit-elle.

« C’est sûr qu’un orignal pour toi toute seule, c’est du gaspille. Tu as une famille pas loin qui pourrait venir le chercher? »

Le corbeau s’était envolé sur un poteau téléphonique qui bordait la route. Elle le regarda comme s’il pouvait avoir une réponse.

Venir chercher la viande… son corps vivant, le corps allongé. Si elle était un buck femelle morte, ou corbeau volant, saurait-elle plus où sa vie mène à la satiété?

« Je vais à Montréal. Faites-en ce que vous voulez. Il est frais tué de cette nuit. »

« Ton arc, tu fais quoi avec… »

Elle prit l’arme, ajusta la flèche qui avait transpercé la bête encore maculée de sang. Elle visa le corbeau qu’elle venait de nourrir.

Le policier ricana, un peu niaisement.

Elle le tua.

Et partit avec son auto, loin, en laissant le corbeau manger les tripes de l’orignal.

Ou le policier.

Elle ne se tourna pas pour savoir la faim d’autrui , elle cherchait sa fin propre.

samedi 18 avril 2009

AndiamoDes villes qui font rêver

Quand j’étais petit, il y avait des noms de villes, de pays ou de lieux qui me faisaient rêver, sourire, voire franchement me marrer, ou bien qui me faisaient peur.

Les villes qui font rêver tout d’abord :

- Samarkand ! C’est où Samarkand ? En… Et puis non tiens, cherche ! Ouvrir un dico, ça ne fait pas de mal ! Soyons franc : jusqu'à aujourd’hui, je ne savais pas non plus ! Samarkand, ça sent les épices, le jasmin, on voit les palais, les harems. Samarkand, c'est l'orient fabuleux, celui de mon enfance, loin des conflits et de la violence.

- Bagdad, y’en a qui se marrent ! Je l’attendais, mais je veux parler du Bagdad d’avant le pétroleum ! Bagdad des mille et une nuits, la belle Shéhérazade, le film magnifique à mes yeux d’enfant avec Sabu : "le voleur de Bagdad", les tapis volants, la lampe magique, le génie balèze torse nu, le crâne rasé, seule une très longue natte pendait derrière sa tête, impressionnant !

Après avoir vu le film, de retour à la maison assis en tailleur sur un vieux sac de patates, j’essayais de m’envoler au dessus des palais et des mosquées !

- Nijni-Novgorod, le beau film Russe : "le tour du monde de Sadko", dans la Russie des tsars, le héros doit affronter des tas d’épreuves, un peu comme Ulysse en quelque sorte.

- Tombouctou, c’est drôle et mystérieux à la fois, devant moi défilait le Hoggar, les oasis, les Touaregs, tu te rends compte ? Les hommes bleus, vêtus de leurs gandourahs, ne laissant apparaître que leurs yeux, les princes du désert, fiers, assis en tailleur, pieds nus sur leurs méharis. C’était L’Atlantide, Pierre Benoit, la Belle Antinéa, j’aurais bien aimé être le capitaine Morange !

- Yokohama, le Japon, le Fuji-Yama se dressait devant moi le cratère tout blanc, à ses pieds les cerisiers en fleurs, la vraie carte postale ! Moi, c’est comme ça que je voyais le Japon, pas celui d’Hiroshima ! Les pousse-pousse dans les rues, les toits pagodes et, à chaque coin de rue, Mitsuhirato, l'infâme.

- Calcutta, Pondichery, les Indes… Des bêtes effroyables surgissaient, des tigres, des panthères noires, des cobras, je lisais Kipling, j’avais 12 ans, Rikikitikitavi n’avait pas de secrets pour moi (je viens de l’écrire de mémoire sans me gourrer), la courageuse petite mangouste qui tuait le vilain cobra royal, dans un combat singulier… Epique !

- Le Kamtchaka, comme le mot est plaisant à prononcer : KAM TCHA TKA. Il s’articule bien dans la bouche, c’est joyeux, et puis c’est très loin : sur un planisphère c’est à l’autre bout de la planète, alors pensez, ces gens du bout du monde ne viendraient jamais égorger nos fils et nos compagnes ! Tranquilles qu’on était, sereins, confiants.

D’abord : c’était nous qu’on avait le plus bath pays du monde et des environs… Alors !

- Mais la région du globe qui nous faisait le plus marrer, c’était le JUTLAND. A l’énoncé de ce beau pays, la classe pouffait, et chacun de répéter : le JUTland, waouh ! La honte crêcher dans un bled pareil, ça devait glisser méchant ! Une fois la première vague de rires apaisée, l’instituteur reprenait les troupes en main.

C’était : bande de crétins, idiots, imbéciles ! La grosse gomme volait bas, il visait bien la vache, et PAN ! En pleine poire, fallait pas moufter et rapporter la gomme de surcroît ! Pas sûr que les profs puissent en faire autant aujourd’hui sans encourir les foudres des parents et de leur hiérarchie. Autres temps……

Si j’avais ramené ma fraise, j’en aurais pris une autre de fraise, et pas sucrée celle-là, alors je ne mouftais pas.

- Salamanque, ça ressemble à Samarkand, alors je confondais, et puis à part aujourd’hui, je n’ai jamais vraiment cherché à savoir où c’était : tant pis pour eux !

- Istambul, voilà une ville versatile, elle a changé de nom tout au long de son histoire, un peu comme une gonzesse qui n’arrêterait pas de se marier puis de divorcer, une inconstante, une hésitante, une p’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non ! Alors voilà : un coup c’est Byzance, un autre Constantinople, puis Istambul, au gré des conquêtes et des coucheries, une belle certes, mais une belle un peu volage.

- Bamako, en voilà un nom rigolo quand on a 12 ans, BA-MA-KO, ça sonne comme noix de coco, c’est sucré, ça vient de loin, ça sent l’Afrique, dans nos têtes de mômes, c’était Tarzan, la forêt tropicale, les lions féroces, les éléphants amis de l’homme. J’ai appris depuis qu’il fallait se méfier de ces bestiaux-là quand on croisait leur chemin, mais enfin, là où j’habite, à six heures le soir, ils ne descendent pas jusqu'à la Seine pour boire, non, ils ne descendent pas !

- Et le lac Titicaca ? En voilà un qui nous a fait bien marrer et ça continue encore, rien à foutre de savoir où il était ! Dans les Andes ? Il aurait été dans ma cave que ça m’aurait pas plus impressionné. C’était le nom qui nous éclatait, il m’en a valu des 100 lignes quand, une heure après le cours magistral sur cette saloperie de lac, le voisin de pupitre me balançait en loucedé et à voix basse : Titicaca, je pouffais bien entendu et paf ! Oeil-de-lynx qui avait tout vu, sauf le souffleur, me collait une péno à faire signer !

- Le Kilimandjaro, rigolo aussi celui là, ça sonne comme guili-guili, je ne sais pas pourquoi mais très longtemps étant môme je l’appelais le KiLILImandjaro, comme si ça n’était pas assez compliqué comme ça !

- Zanzibar, elle m’a fait bien rire, celle-là aussi !

- Maracaïbo ! La mer des Caraïbes ! Et c’est toute la flibuste qui me saute au visage, Errol Flynn, "le vagabond des mers", la rousse flamboyante Maureen O’Hara dans "à l’abordage", je me souviens de son surnom de femme pirate : la rafale.

Mon cinoche se mettait en marche, les riches galions Espagnols abordés par les pirates justiciers, des Robins des bois des mers, le foulard noué sur la tête, une large ceinture en tissu, toujours rouge, ceinte autour de la taille, le sabre entre les dents, les grappins jetés par-dessus bord : CLAC,CLAC,CLAC, pas de quartier, ça ferraillait sévère sur le gaillard d’avant, mais jamais de sang, on avait l’hémoglobine modeste à l’époque, les combattants prenaient plus de coups de pieds au cul et de coups de poings dans la gueule que des sabres en travers de la tronche ! Ah si les maths m’avaient fait autant rêver, mais va prendre ton panard avec un cosinus ou avec Pythagore !

Enfin au sommet du rêve : HOLLYWOOD ! Toutes les belles actrices Américaines : Marilyn, Ava , Maureen, Grace, Lana, Ingrid, Rita et Liz… (vous avez remarqué : je les appelle par leurs prénoms, ne soyez pas jaloux !). Où êtes-vous, blondes platines, rousses incendiaires, brunes assassines ? Envolées mes étoiles, bien rangées dans les cinémathèques.

Les villes qui faisaient peur c’était : Berlin de triste mémoire juste après la guerre, pas franchement en odeur de sainteté ! Pearl-Harbor, Midway, Okinawa, les war-birds, qui nous faisaient hurler dans nos cinoches de quartier, les héros Américains qui écrasaient les Japs ! On applaudissait, on trouvait ça "drôlement chouette", les P 45 Curtiss, les P 51 Mustangs, et autres F 4U "Corsairs" immortalisés bien plus tard par : pappy Boyington, les « zéros » et autres Nakajima n’avaient qu’à bien se tenir !

Sur le chemin du retour j'écartais les bras, j'imitais les moteurs vrombissants, et je t'assure j'étais alors un "thunder bolt" ce fabuleux chasseur bombardier Américain, armé d'une torpille !

On était minots, on ne savait pas, la guerre pour nous, c’était seulement des chouettes batailles sur un écran, de la "führer", de l’héroïsme, et le bon GI qui finit toujours, toujours par gagner !

- Dusseldorf, à cause du vampire du même nom, ça m’foutait l’trac, j’imaginais une ville toute noire, poisseuse, avec à chaque coin de rue un mec en noir portant une grande cape… Tain la chiasse !

Et puis, bien sûr, Auschwitz, Berkenau, ou Buckenwald !

Juste après la libération, les photos des camps circulaient beaucoup, des expositions avaient lieu un peu partout, sur la place de la mairie ou bien au marché, et pour un gosse, c’était très impressionnant !

On ne connaissait pas Beyrouth, personne n’aurait été capable de vous donner le nom de la capitale de l’Afghanistan.

Mais il y avait d’autres lieux tragiques oubliés aujourd’hui : Dien Bien Phu, le 36ème parallèle, la Corée, et plus tard : les Aurès !

A chaque époque ses conflits… A chacun son histoire…..

jeudi 16 avril 2009

Saoul-FifreGuten tag

Ben oui : "guten" parce que ça tombe bien. On s'est fait inviter ce soir dans un traquenard copieusement arrosé. Repas portugais, tapas diverses, calamars frits, rillettes de sardines, pois chiches en salade, riz porc-amandes de mer, tout ça inondé sous du vinho verde, fromages de chèvres, pâtisseries maisons, pousse-café, pas de café pour moi, merci...

Alors le billet, ben pour être tout à fait franc, je me le sentais pas, ce soir.

Et la proposition de ma coche préférée, heu : COACH préférée, tombe à pic.

Ha qu'il est doux de se faire taguer quand on a un trou dans sa couche de jaune. Surtout que le tag a l'air simple : une photo.

J'ai pu jadis, sur le coup de la colère, prononcer des mots très durs contre les chaines et tous les chaineux. Mais là, adjugé c'est vendu, je me laisse taguer sans plus me débattre..

La troisième du dernier dossier, donc.

Il y aurait beaucoup à dire sur la qualité technique de cette photo, mais nous aimons cet endroit mythique.

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