Chers Dieux
(Ne vous méprenez pas, ce n’est qu’une formule de politesse)

Chers Dieux, donc, disais-je, laissez-moi vous poser une question subsidiaire et néanmoins pertinente, qui me taquine gravement la coloquinte depuis pas mal de temps. Pour ne pas dire d’ailleurs depuis toujours, depuis que l’on m’obligea un beau matin à aller user mes culottes Petit Bateau au catéchisme, et que l'on essaya de me fourrer dans la susdite courge l’idée saugrenue que vous n’étiez qu’Amour.

Amour mon cul, oui.

Donc cette question qui me brûle les lèvres et celle de mes sémillants lecteurs et trices, c’est : « Mais qu’est-ce que vous branlez, bordel ? ! ? ! ? »

Non mais c’est vrai à la fin ! Qu’est-ce que vous foutez, là-haut, toute la sainte journée à regarder d’un œil torve s’étriper vos ouailles, vos sbires, vos diacres, vos moines, vos fous et vos émissaires depuis des millénaires ? Vous jouez à la belote coinchée ? au tric-trac ? ou bien vous faites des mots fléchés ? Ou encore vous vous tripotez la nouille en reluquant la photo de Choron coincé entre les cuisses d'une nymphette, dans un vieux numéro d’Hara Kiri un peu moisi, datant d’avant l’interdiction de publier, suite à un certain bal tragique à Colonglisse les deux Zobis...

Vous n’entendez pas comme un léger bruit ? Il ne vous parvient pas comme une infime rumeur au fond des esgourdes, comme quoi qu’il y aurait comme un schisme au royaume d’en bas ? Un truc qui tourne pas rond. Des gens dont à propos desquels on dit qu’ils se réclament de vous, pour pouvoir s’adonner aux pires exactions ?

Quoi qu’il en soit, on ne m’ôtera pas de l’idée que vous n’en avez strictement rien à secouer de ce qui se passe ici-bas, dans cette vallée de l’arme. Je parie que dans votre claque cinq étoiles pour divinités séniles, vous n’avez même pas un smartphone potable, histoire de vous envoyer des hashtags ou des mails pour vous tenir au jus des derniers buzz sur le net. C’est quand même bizarre qu’en étant prétendument omnipotents, on ait surtout l’impression que vous soyez complètement impotents…

Nonobstant, en toute logique, vous qui Pouvez tout, vous ne devriez pas rester les bras ballants. Enfin quoi, un peu de cojones, caramba ! qu’est-ce que vous attendez pour intervenir ? Vous qui n'êtes qu'Amour ? Non ?

Bon, d’accord, toi Dieu, et toi Jehotruc, (ou Yahvchose, enfin Geronimo Cohen) vous êtes vraiment croulants, vous deux, si ça se trouve vous avez les portugaises ensablées, et la sono cassée. Depuis le temps que vous vous faites passer la brosse à reluire sur le petit jesus, sans rien foutre, par vos adorateurs, vous êtes devenus mous du genou, vous pouvez plus arquer, vous devez être clafis de rhumatismes et d’arthrose galopante.

Toi Bouddha, tu te contentes de compter tes followers par milliards en faisant du gras sur ton sofa, astiqué par une déesse à dix bras à défaut de celle à cent bouches…T’es pas hargneux, t’es plutôt non-violent, mais tu laisses faire…Tu pourrais -y dire, toi, aux autres, qu'ils se gourrent grave.

Quant à toi Allah, le grand, le miséricordieux, je sais bien que t’en as marre de vider les corbeilles à papier ou de faire le mort au bridge, mais tu ferais bien de surveiller un peu ton prophète, il n’a que treize siècles, le galopin, et il est en train de nous faire sa crise d’ado, je ne vous dis pas. M’est avis que l’eau de rose, ça va pas suffire pour soigner ses boutons d’acné. Ça tourne doucettement au furoncle surinfecté, c’t’affaire…

En attendant, je vous ferai dire que j’ai vraiment pas envie de faire les frais de votre inconséquence et de votre gâtisme avancé. Parce que moi, je fais partie d’un groupe à part, qui n’a jamais eu très bonne presse (si j’ose dire en ce moment). Celui des ceusses qui n’ont pas besoin de vous. Non, c'est vrai, sans façon, on se débrouille, allez. Les athées, on nous appelle.

Les plus frileux se disent agnostiques, ils ne veulent pas se mouiller. Des fois que quand même, au final, il y aurait une infime portion de (mal)chance que vous existiez. Moi je me dis athée, et fière de l’être. Ça ne m’empêche pas d’aimer mon semblable et de respecter mon différent. On a de la moralité, quand même, faut pas croire qu’en croyant pas à vous, on croie à rien.

On croit au pinard, à la musique, aux étoiles, à l’amour, longtemps, souvent et même tout le temps. On croit aux fleurs et aux oiseaux. On croit à nos livres sulfureux et nos chansons subversives. On croit au plaisir d’être ensemble. A la Liberté, surtout. A la Vie. Aux amis.

Au bonheur, tout de suite et sur terre, et pas dans deux mille ans au jugement dernier. On n'est pas méchant. On veut juste avoir la paix.

Bref, contrairement à vous, qui nous avez soi-disant créés à votre image pour ensuite vous contre-foutre de ce que nous sommes devenus, nous croyons à Nous.

A la vie à la mort.



A Charlie et à quelques autres…