Moulefritx, débarrassée de son don d’ubiquité, soliloque à longueur de temps. Hiii peut tirer sa révérence (par exemple). Bras dessus, bras dessous, Mioule et Froutrix le raccompagnent jusqu’à la porte d’entrée fraîchement repeinte. Comme il n’a que deux mains, Hiii lâche une caisse avant de prendre la porte et dévaler les escaliers. C’est au prix d’une âpre négociation que Foutrix récupère la porte infidèle en échange d’une touffe de ses cheveux, de beaux cheveux bruns où l’odeur de peinture s'accorde (paisiblement) à celle du confit-d’oie.

« Moulefritx, précise Foutrix en remettant la porte sur ses gonds, tu vas me faire le plaisir de supprimer quelques références de ton anthologie, s’il te plaît. D'autant que le suicide involontaire de Biquet risque de faire mauvais genre auprès des voisins ». « Connais-toi toi-même, répond (paisiblement) Moulefritx ». Foutrix, candidat à la canonisation ante mortem, évite la polémique directe en s’adressant à Mioule « Demande à ta fille de me parler sur un autre ton ». Mioule hausse les épaules. Puis elle jette l'éponge.

Elle aspire à un instant de plénitude, ici et maintenant, entre le tapis du salon et Foutrix maculé de peinture blanche. Elle s’allonge à plat ventre, les mains le long des cuisses, la tête tournée du côté du soleil levant. De ses lèvres entrouvertes s'élève un son millénaire « ômmmmmmmmmmmmmmmmmmmmmm ». Intrigué, amoureux, attiré, langoureux, Foutrix refuse que sa Mioule puisse se refroidir. Il s’allonge sur elle, dos contre dos. Moulefritx illustre ce geste d’amour d’un paisible « Cette leçon vaut bien un fromage, sans doute ». Lasse, très lasse, écrasée, Mioule articule : « Je veux bien tout ce qu’on veut, mais je vous fiche mon billet que La Fontaine n’est pas un philosophe ».