La croix et la tanière
Par Oncle Dan, jeudi 13 août 2015 à 00:03 :: La vraie vie :: #1788 :: rss
Au collège, je me sentais plus proche de la première partie de la vie d'Ignace de Loyola (fondateur de la compgnie de Jésus en 1540) que des suivantes.
N'oublions pas que le jeune Ignace, alors qu'il était page, ou secrétaire, ou encore écuyer, était un joyeux luron. Page, oui, sage, non. Là où il passait, il scandalisait les gens par ses dérèglements. Il s'adonnait davantage aux jeux, aux rixes et aux femmes qu'à la prière. C'était un habitué des endroits malfamés, hantés de rôdeurs, de pillards et de paillards. Etudiant, il vivait dans un véritable labyrinthe de ruelles infestées d'immondices, de bordels et de petite vérole. Finalement, ce Loyola était un bien mauvais sujet. On dit même qu'à l'âge de vingt-quatre ans, il s'est trouvé impliqué dans une affaire d'assassinat. On veut bien admettre que ça n'était pas lui le meurtrier, mais il est passé en jugement, le bougre ! Il a fait de la prison ! Dans le genre "jeunesse tumultueuse" (on ne dira pas "tueuse"), voilà un courtisan qui pouvait en parler.
Tiens, c'était comme ce bon Père Charles de Foucauld. Encore un Saint qui avait fait des siennes. Pour les Jésuites, il était à classer dans la catégorie: Cachez ce saint que je ne saurais voir. Cela suffisait pour me le rendre sympathique. Cet officier fatigué d'avoir fait des frasques avec les femmes de mauvaise vie, lassé de s'enivrer de champagne qu'il buvait dans leurs chaussures, s'était fait missionnaire malgré les objurgations de son ami le général Laperrine, qui n'était encore que capitaine, et qui arrivait trop tard avec son goum pour le sauver des méchants Touareg qui assiegeaient son bordj. Selon une version, dont l'authenticité n'est pas encore tout à fait démontrée, il aurait dit "mon oeil" sur un ton pétri d'incrédulité, à l'un d'eux qui manifestait un désir évident de le tuer sans les sommations d'usage, et ceci pour une raison qui m'échappe aujourd'hui. Cet individu basané, dénué de savoir-vivre et d'imagination, mais cependant adroit, lui aurait alors tiré dans l'oeil. Le bon père Charles de Foucauld met les pouces. Il ne joue plus. Le sang coule sur sa joue. Il meurt. C'est triste, mais c'est beau.
J’avais découvert toutes ces aventures dans un bel ouvrage à la tranche dorée et à la couverture de cuir sur l'étagère d'une bibliothèque de couvent.
Cela me rappele le temps des récollections qu'il était d'usage de faire au début de chaque année scolaire.
Lorsqu'ils ne priaient pas, la principale occupation des moines était autrefois la transcription des Ecritures Saintes et de divers ouvrages pseudo-scientifiques. Sans doute, faut-il trouver dans cette réalité historique l'origine des magnifiques bibliothèques généreusement garnies qui constituaient toujours, avec les objets du culte, l'essentiel des meubles meublants de ces monastères et abbayes.
Inutile de préciser que dans ces ouvrages, nous étions davantage à l'affût de l'homme et de ses faiblesses, que du Saint et de ses miracles. Lorsque nous l'avions découvert, il était d'autant plus facile d'en faire profiter les petits copains que le livre bénéficiait d'une aura de sainteté qui le dispensait de circuler sous le manteau. Sa lecture se résumait alors au chapitre signalé par une image pieuse de première communion.
Commentaires
1. Le jeudi 13 août 2015 à 08:59, par Andiamo
2. Le jeudi 13 août 2015 à 10:09, par Oncle Dan
3. Le jeudi 13 août 2015 à 13:51, par françoise
4. Le jeudi 13 août 2015 à 18:05, par Oncle Dan
5. Le jeudi 13 août 2015 à 23:08, par Blutch
6. Le vendredi 14 août 2015 à 10:20, par Lise
7. Le mardi 18 août 2015 à 12:26, par Célestine
8. Le dimanche 23 août 2015 à 09:06, par Oncle Dan
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11. Le lundi 24 août 2015 à 02:27, par Célestine
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