Tant-Bourrin et moi, quand on fait nos fables-express, on pense à Gotlib, à Mandryka, à Goscinny... Mais ce ne sont pas ces grands piliers de la BD moderne qui en ont inventé le principe : ils ont eux-mêmes été influencés par de grands anciens qui avaient besoin de se décontracter les zygomatiques.

Maurice Donnay (de l'Académie Française, s'il vous plait) nous a laissé celle-ci:

Un jour un grand serpent, trouvant un cor de chasse,
Pénétra dans le pavillon,
Et comme il n'avait pas beaucoup de place,
Dans l'instrument, le reptile se tasse.
Mais, terrible punition :
Quand il voulut revoir le grand air et l'espace,
Et la vierge forêt au magique décor,
Il eut beau tenter maint effort,
Il ne pouvait sortir du cor,
le pauvre boa constrictor,
Et, pâle, il attendit la mort.

Moralité :
Dieu, comme le boa est triste au fond du cor !

Tristan Bernard, qui ne respectait rien, s'est permis de raccourcir une fable de La Fontaine :

Deux pigeons s'aimaient d'amour tendre.

Moralité : L'un d'eux s'ennuyait au logis.

Celle-ci est de Boris Vian :

Un cheval, mal ferré d'un fer plein de défauts,
Fit des trous dans la route en allant au galop.

Moralité : Tel fer, tel piste.

Et celle-ci, de Willy, le mari de Colette :

Une caissière aimable, et souriante, et gaie,
D'un monsieur, certain jour, reçut un coup de poing,
Ayant pris son argent et gardé la monnaie.

Moralité :
Rien ne sert de sourire, il faut sortir l'appoint.

Le roi étant, encore dans ce domaine, Alphonse Allais, on ne le dira jamais assez :

Losque tu vois un chat, de sa patte légère,
Laver son nez rosé, lisser son poil si fin,
bien fraternellement, embrasse ce félin.

Moralité : S'il se nettoie, c'est donc ton frère.

Lorsque tu verras une bonne
d'enfants, et non autre personne,
Assise au milieu d'un tender
(ou wagon de chemin de fer)
Découvre-toi sur son passage,
Salut à son noble visage !

Moralité : À bonne en tender, Salut !

Et puis une bien courte, d'un anonyme, comme on les aime :

Un bébé, sur son pot, s'efforçait.

Moralité : Le petit poussait !