Samedi 22 avril :

Sale défaite ce soir. L'équipe était pourtant bien en place, on tenait solidement le match nul à l'extérieur, jusqu'à ce que Michael fasse cette putain de passe molle en retrait à notre gardien. Il n'avait pas vu l'attaquant adverse qui a intercepté le ballon et nous l'a planté dans les filets. Shit ! J'en suis encore vert, je vais mal dormir cette nuit.


Samedi 29 avril :

Ce soir, on a joué le leader du championnat, et toute l'équipe s'est sorti les tripes pour faire un résultat. Enfin, presque toute l'équipe : Michael ne semblait toujours pas à l'aise en défense, sûrement encore sous le coup de sa bourde de samedi dernier. Moi, j'ai bien tenu mon côté droit et l'équipe, globalement, n'a pas à rougir de sa prestation. Même si Youssef a crucifié notre propre gardien de la tête en voulant dégager en corner. Merde, on n'est franchement pas vernis en ce moment !


Mardi 2 mai :

Incident à l'entraînement aujourd'hui : Youssef a failli me démonter la jambe en me taclant avec un peu trop d'enthousiasme. Comme je lui faisait vertement remarquer que ce n'était qu'un match d'entraînement, j'ai remarqué Goran et Jérôme qui se marraient en douce. Putain, l'ambiance se dégrade dans le club. Va falloir que le coach reprenne sérieusement les choses en main !


Samedi 6 mai :

Ce soir, il fallait absolument faire quelque chose à l'extérieur après nos deux dernières contre-performances, au moins ramener un point, surtout que nos adversaires naviguaient dans le ventre mou du championnat et étaient donc prenables. Patatras, on est repartis avec trois pions dans la valise ! Faut dire que notre milieu de terrain était plutôt aux abonnés absents, ce soir ! C'était la journée "portes ouvertes" ! Et vu que le seul but que Viktor, notre avant-centre, a réussi à planter était dans notre propres filets sur un de ses rares replis défensifs, c'est sûr qu'on ne risquait pas gagner... Cette équipe se barre décidément en couille ! A ce train-là, il va bientôt falloir songer à éviter la relégation !


Dimanche 7 mai :

Je pensais que le coach recadrerait les choses au décrassage ce matin en poussant une bonne gueulante. Au lieu de ça, il était tout sourire et nous a dit que bof, tout cela n'était pas grave, tant qu'on a la santé, hein ! Ça devient carrément dreamland... Va vraiment falloir qu'on s'arrache samedi prochain, on reçoit le dernier du championnat et on n'a pas le droit de perdre !


Vendredi 12 mai :

Bizarre, le journal de ce matin : la page des sports semblerait presque avoir été écrite par le club des supporters de nos adversaires de demain tant elle est partiale et chante leurs louanges. Ce n'est pas exactement l'idée que je me faisais de la presse locale. A croire qu'ils souhaitent même notre défaite...


Samedi 13 mai :

Quelle soirée de merde ! Encore perdu ! Je me suis pourtant défoncé sur mon côté droit : j'ai servi deux caviars à Viktor, mais il a fait deux frappes de poussin asthmatique trente mètres à côté des cages, le sourire aux lèvres. Steph, au moins, a une frappe de mule. Dommage qu'il n'ait su la dégainer que dans nos propres filets, ça devient une sale habitude ! Mais ce qui a été moins habituel, c'est qu'au lieu de se prendre la tête à deux mains après ça, il a arraché son maillot de joie pour le faire tournoyer au-dessus de sa tête... et que dessous, il portait le maillot de l'équipe adverse ! J'en suis resté bouche bée, mais tout le monde semblait trouver ça normal. Si c'est ça le football de haut niveau, je sens que je vais me convertir au tricot, moi !


Dimanche 14 mai :

Décrassage ce matin. Le coach semblait ravi de notre défaite de la veille et a même félicité Steph pour son but contre notre camp. Puis il nous a donné ses consignes pour le prochain match. Il nous propose de jouer en 1-2-7 ! Cette tactique résolument tournée vers l'offensive est certes louable (bien que nos avants passent en ce moment plus de temps à chercher des trèfles à quatre feuilles dans la pelouse qu'à attaquer), mais je me vois mal tenir la défense à moi tout seul. Je m'en suis ouvert au coach, qui m'a rabroué vertement. Il m'a rappelé que c'est lui qui avait la charge de cette équipe et que si ça ne me plaisait pas, je pouvais me mettre sur le marché des transferts. Au train où vont les choses, ça ne va pas peut-être pas tarder !


Samedi 20 mai :

Soirée cauchemardesque. Evidemment, en jouant seul en défense, je ne pouvait pas arrêter toutes les attaques adverses. Je me suis démené comme un malade, mais ils ont réussi à nous en mettre sept au fond des filets. Le pire, c'est que j'ai plusieurs fois vu mes coéquipiers applaudir les actions de nos adversaires. Sans compter que sur les sept buts, cinq ont été inscrits sur des passes décisives de notre part. En plus, Lamine m'a presque niqué la cheville en me taclant alors que j'avais le ballon. Il s'est excusé en prétendant qu'il m'avait confondu avec un adversaire. Le fait que nos adversaires jouaient en rouge vif et nous en blanc semble fragiliser quelque peu cette excuse. C'est vraiment n'importe nawak !


Jeudi 25 mai :

Le coach nous a confirmé la tactique du jeu en 1-2-7 pour le prochain match. Je n'ai plus osé rien dire, de peur de me faire souffler dans les bronches. Mais j'ai vraiment eu du mal à garder mon calme quand il a annoncé qu'il titularisait dans l'équipe deux minimes, trois poussins, le jardinier du stade et le président d'honneur des white hair devils (un club de supporters du troisième âge)...


Samedi 27 mai :

Je suis à bout. Je ne comprends plus rien. Tout cela me dépasse. J'ai passé ma soirée à essayer de colmater les brèches. J'ai eu l'impression de jouer seul contre 21. J'ai renoncé à compter les passes à l'adversaire et les buts contre notre camp. Le stade entier applaudissait la moindre action de nos opposants et me sifflait copieusement à chaque fois que j'essayais de sauver les meubles en défense, chose d'autant plus surprenante que l'on était censés jouer à domicile ! J'ai même vu Youssef sortir en plein match un fanion aux couleurs adverses et réclamer un but sur l'air des lampions... Et il a été servi : je pense que cela faisait longtemps qu'une équipe n'avait pas perdu sur le score de 17 à zéro en championnat. C'est pas bon pour notre goal average, ça. Et pourtant, j'en avais des crampes dans les jambes tant j'ai couru ce soir pour éviter un désastre plus grand encore... Je ne comprends vraiment plus ce qui se passe, j'ai l'impression d'être passé dans la quatrième dimension... Tout cela me fait peur !


Vendredi 2 juin :

Causerie de veille de match ce matin avec le coach. C'est la dernière rencontre de la saison et l'on a tellement dégringolé dans le classement qu'une défaite nous condamnerait à la relégation. J'espérais sans trop y croire que, la situation devenant sérieuse, le discours de l'entraîneur en ferait autant. Au contraire, il a achevé de me traumatiser : il veut désormais que l'on joue en 1-0-9. Michael devra jouer les yeux bandés, Youssef et Goran à cloche-pied, Steph à reculons et Viktor sur les mains. Je n'en peux plus, j'ai envie de pleurer... Au secours !


Samedi 3 juin :

Match décisif. Au coup d'envoi, je me sentais mal. Très très mal. Et puis dès la troisième minute, j'ai stoppé une attaque adverse. J'ai d'abord songé à relancer vers mes neuf attaquants, mais je me suis aperçu en levant les yeux qu'ils avaient tous revêtu le maillot de l'autre équipe. Alors, je me suis retourné vers mon gardien et je lui ai fait une passe en retrait.

En pleine lucarne.

C'est fou comme je me sens bien depuis !