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mardi 7 février 2012

Tant-BourrinComment survivre en temps de crise

Que vous le vouliez ou non, 2012 sera l'année de la crise. Et pas une petite crisounette de rien du tout, non : la big crise, bien maousse et poisseuse, le merdier absolu, quoi !

Dans ces conditions, plus d'un risque de voir sa situation personnelle se détériorer sévèrement et de ne plus pouvoir profiter du haut niveau de vie que lui offrait jusque-là notre brillante civilisation occidentale.

Vous-même, peut-être, êtes-vous inquiet pour votre avenir ? Que faire si vous vous retrouvez, du jour au lendemain, sans emploi, sans revenu, démuni de tout, pour conserver un train de vie plus proche du TGV que du vieux tortillard poussif ?

Pas de panique : Blogborygmes est là pour vous aider !

Voici quelques exemples de situations auxquelles vous pourriez être confronté et les réponses à y apporter...

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samedi 4 février 2012

Scout toujoursJennifer

Jennifer est une jeune antillaise plutôt jolie. Je l'ai rencontrée pour la première fois il y a un peu moins d'un an. Sa voix était tellement entrecoupée de sanglots qu'elle ne parvenait pas à terminer ses phrases. J'ai dû lui demander d'arrêter de parler, de s'étendre sur le divan et de fermer les yeux pour reprendre son souffle. Je lui ai dit de parler calmement, sans se précipiter, prenant le soin de l'interrompre à chaque fois que les sanglots la submergeaient. Elle m'a raconté son histoire : son enfance passée à Paris, sa mère dépressive qui l'emmenait tous les jours se promener au bord de la Seine, les bras chargés d'énormes sacs. Chaque jour la petite Jennifer aidait sa maman à remplir ces sacs d'objets lourds, bouteilles, statues en pierre, etc., et partait avec elle, portant héroïquement ces énormes fardeaux, pour la bonne cause, telle Cosette allant puiser son eau. Ces sacs, elle l'a compris au fil du temps n'étaient en fait destinés qu'à les maintenir toutes deux dans les profondeurs du fleuve lors de l'ultime plongeon. La pauvre enfant espérait que son calvaire allait finir, lorsque, à l'aube de ses dix ans, après s'être magnifiquement habillée et maquillée, sa maman lui apparut plus belle que jamais. Elle embrassa une dernière fois sa fille et se défenestra sous ses yeux.

Le choc émotionnel et l'immense déflagration qui s'en suivit déclencha chez l'enfant un diabète grave accompagné d'une maladie inflammatoire appelée sarcoïdose et qui atteignit son foie, ses poumons et son estomac. Ajoutée à cela une grande instabilité émotionnelle qui la faisait fondre en larmes à la moindre émotion. Elle me raconta son parcours, la suite de son enfance passée chez une horrible grand-mère qui prenait plaisir à la torturer, l'accusant de la responsabilité de la mort de sa mère. Le viol qu'elle subit en voulant protéger une amie, l'enfant qu'elle perdit à cause de son diabète, ses quatre injections d'insuline qu'elle effectuait chaque jour elle-même, puis sa grande fierté, son diplôme de préparatrice en pharmacie, les problèmes qu'elle avait avec ses collègues de travail qui lui rendaient la vie impossible, puis sa brouille avec sa meilleure amie qui repoussait toutes ses tentatives de réconciliation, sa logeuse qui la mettait à la rue, et surtout son ex-compagnon, un parasite vivant à ses crochets dont elle avait dû se séparer après qu'il lui ait mis en pièces une voiture qu'elle n'avait même pas fini de payer, mais qui continuait quand même à la harceler.

Cette extraordinaire cascade de catastrophes l'avait réduite au point de ne plus pouvoir travailler, elle craignait à présent pour son emploi. Je la voyais chaque semaine, et la redécouvrais chaque jour encore un peu plus mal en point qu'avant.

Ce jour-là, Jennifer était seule, et véritablement au bout du rouleau. Ses petits yeux d'oiseau blessé et ses paroles suppliantes m'indiquaient qu'un geste sans cesse repoussé s'imposait à moi à présent ; geste sans lequel il y aurait eu véritablement non assistance à personne en danger. N'y tenant plus, et au risque des conséquences, je la pris dans mes bras comme on prend un enfant. Elle me serra convulsivement. Ses sanglots étaient entrecoupés de "Merci". L'étreinte était intense, j'en restai totalement pétrifié, comme si cette extraordinaire accumulation de souffrances qu'elle portait en elle, me traversait le corps, j'étais dans un état de compassion extrême, le moment était très fort. Nous restâmes enlacés elle et moi plusieurs minutes jusqu'à ce que je sente son étreinte se relâcher. Elle avait enfin retrouvé son sourire et se mit à me parler à nouveau. Mais rapidement son émotion l'envahit et je vis qu'elle avait à nouveau besoin d'une accolade. Je tiens à préciser que ces étreintes, même si elles n'étaient pas très conventionnelles, n'avaient absolument rien d'embrassades amoureuses.

Plus tard, Jennifer a rencontré un compagnon plus digne d'elle et a pu retrouver un peu plus d'autonomie, au moins sur le plan affectif. Notre dernière rencontre a eu lieu lorsqu'elle est venue m'annoncer éplorée que la Sécurité Sociale venait de refuser la prise en charge de son billet d'avion pour Paris. Un geste vital devait être fait d'urgence sur son estomac qui saignait. La pauvre malheureuse, se vidait de son sang et avait déjà reçu deux transfusions sanguines. Deux solutions s'offraient à elle pour survivre : soit l'ablation de l'estomac, soit une électrocoagulation qui ne pouvait s'effectuer en Guyane. J'ai dû la faire hospitaliser d'urgence et donner de la voix dans les bureaux des ronds de cuir de la sécu pour qu'elle obtienne gain de cause.

Aujourd'hui Jennifer a enfin pu prendre son avion. Elle est en ce moment hospitalisée à Paris, près de chez vous, et se débat corps et âme pour sauver son estomac.

Prions pour qu'elle puisse y parvenir.

mercredi 1 février 2012

AndiamoVacances de gamin

J’avais neuf ans, la guerre était finie depuis trois ans. Les « vieux » en parlaient encore, pour moi ça remontait à Mathusalem !

Vous l’avez sans doute remarqué : le temps ne s’écoule pas de la même manière quand on a neuf ans et quand on en a quarante. Ouais, je vous vois venir, tas d’hypocrites : le doyen, avec ses soixante-douze balais, qu’est-ce que ça doit filer… Ben oui : ça file !

Donc j’avais neuf ans et, après une année scolaire brillante (hi hi), ma mère nous dégotte par l’intermédiaire d’une grand-tante religieuse (vous marrez pas, elle était ADORABLE, ma tata !) une pension pour les vacances.

Elle servait (et le terme convient parfaitement) chez les filles de la charité. Mais oui, les sœurs en cornettes ! L’ordre de Saint Vincent de Paul. Elle faisait partie de la communauté basée à Clermont-Ferrand et comme la tantine était issue d’un milieu plus que modeste, n’ayant pas apporté de dot… qu’est-ce qu’elle a gratté ! D’ailleurs elle répétait souvent à ma mère : " la plus grande peine que me ferait ta fille serait qu’elle entre en religion !" C’est dire….

Donc ma brave tantine nous avait dégotté une pension pour ma mère, mon frère (12 ans), ma sœur (10 ans) et moi, un hébergement dans un hospice pour vieillards, tenu par des religieuses bien sûr, à Cunlhat (prononcez KIN YA), petite bourgade Auvergnate située non loin de Clermont-Ferrand.

Il s’agissait d’une grande chambre dans laquelle avait été dressés deux grands lits. Ma mère occupait l’un d’eux avec ma sœur, et moi je partageais l’autre avec le frangin, ça ne nous changeait pas, vu qu’à la maison nous partagions déjà le même pieu… Je ne te raconte pas les bagarres, mais j’en garde un excellent souvenir !

Mon père, lui, était resté à Paris, il travaillait durant ses vacances afin de nous permettre de partir. Pas riches certes, mais nous n’avons jamais manqué de quoi que ce soit.

Tous quatre nous prenons le train à la gare d’Austerlitz. Mon père nous conduisait toujours jusqu’à l’avant du convoi, afin de nous faire admirer la locomotive : une énorme machine noire, fumant de toutes parts, laissant échapper des jets de vapeur, des roues énormes, les immenses bielles et contre-bielles. La noble race des trains qui fument !

C’était sans doute, je l’ai appris plus tard, une « Pacific », ces locos vendues par les Américains après la guerre, dans le cadre du plan Marshall.

Les compartiments desservis par un couloir, nous voyagions en troisième classe (elles n’existent plus), huit personnes par compartiment, des sièges de moleskine… Verte la moleskine, les filets à bagages tendus au-dessus des places assises et, juste en dessous, des photos en noir et blanc, représentant des paysages de notre beau pays de France !

Bien sûr, nous avions emporté un peu de lecture, quelques illustrés, ou un livre ou deux de la comtesse de Ségur (née Rostopchine… t’as vu je m’en souviens encore !).

Pas le droit de parcourir le couloir, nous devions rester bien en vue quand nous nous y rendions, histoire de se dégourdir les guibolles !

Pour le casse-croûte, point de wagon-restaurant pour nous, le budget maternel ne le permettait pas. Le préposé passait avec sa clochette qu’il faisait allégrement carillonner, afin d’annoncer les différents services.

Ma mère déballait quand il était l’heure : sandwichs au pâté, au fromage, des œufs durs, sans oublier le dessert, quelques biscuits secs. En guise de boisson : de l’eau, précieusement contenue dans une bouteille de verre soigneusement « entortillée » dans un torchon humide, pour la conservation de la fraîcheur !

Tout le monde faisait de même, les conversations allaient bon train, les langues se déliaient au bout d’un moment, les trajets étaient longs. Après guerre, certains ponts et viaducs étaient encore en réfection. Ils avaient souffert des bombardements, le convoi roulait au pas au moment de la traversée et, j’avoue, mais je n’étais pas le seul… nous n’en menions pas large !

Enfin après mille tortures et de longues heures à se chamailler, rire aussi, nous arrivions en gare de Clermont. Tantine nous attendait, embrassades (pas fastoche avec la cornette !) et larmes de joie pour elle, qui ne nous voyait pas souvent :

- Comme ils ont grandi ! Toi, tu n’es toujours pas très gros ! Si tu avais autant de kilos que de frisettes !

Elle nous accompagnait jusqu’à la gare routière, et là nous prenions après mille embrassades un antique autocar ! J’ai revu les mêmes dans le film de Pierre Granier Deferre, "la veuve Couderc", et aussi dans celui de Jean-Loup Hubert, "le grand chemin"… Tu vois ?

Alors là, je ne me souviens plus si le trajet était long ou pas, nous arrivions épuisés, c’est sûr !

Repas pris dans un grand réfectoire en compagnie de quelques pensionnaires comme nous, puis dodo !

Le lendemain, un copieux petit déjeuner : chocolat et gros pain de campagne frais, beurre et confitures maison, la bouffe était bonne, j’en garde un bon souvenir.

Nous descendions au village, le vrai patelin auvergnat années quarante, les bouses de vaches partout, la grand’rue pavée, les autres remblayées avec de la caillasse, ça ne nous gênait pas, à Drancy dans ma rue c’était kif-kif !

Une grande place accueillait une foire toutes les semaines, un peu marché aux bestiaux et marché tout court.

Mais ce qui nous attirait le plus, c’était l’échoppe du sabotier située juste au pied de l’hospice.

Un tout petit atelier partagé par un père et son fils, un grand et fort gaillard le fiston !

Il était « monté » à Paris pour faire son régiment, et il en parlait ! A l’entendre, toutes les gonzesses de Pigalle portaient le deuil depuis son départ !

Nous le regardions tailler la bûche de bois, d’abord à l’aide d’un genre de massicot, puis avec des tarières, gouges et autres engins tranchants forts impressionnants pour un gamin, nous voyions les copeaux odorants voler sous ses mains habiles, et le bois informe prenait petit à petit l’allure d’un « esclop » !

Et je vous assure que cela allait très vite, il devait fabriquer si ma mémoire est bonne au moins une paire de sabots par jour, si ce n’est plus.

Il coulait en contrebas du village un ruisseau. Dans mes souvenirs de gamin, il était large, mais lorsque je l’ai revu une vingtaine d’années plus tard, il ne mesurait en fait que trois mètres de large à tout casser !

Nous nous y baignions, ou plutôt nous y pataugions, dans nos maillots de bains « tricotés main » par ma mère, ça ne sèche jamais ces saloperies de maillots !

Presque tous les jours, nous pêchions des vairons, que les sœurs nous faisaient cuire ! C’est amer comme tout, mais nous ne l’avouions pas, trop fiers de déguster notre pêche ! Parfois, nous allions tenter d'attraper des écrevisses, et là... c’était une autre affaire !

Tout d’abord, nous demandions bien poliment, tu penses, au boucher de nous mettre de coté quelques têtes de moutons. Dans ces villages, à l’époque, les petits commerces étaient encore bien présents : boucherie, boulangerie, mercerie, et même un casino, ou familistère je ne sais plus très bien.

Nous laissions dans un coin du grand jardin "faisander" les têtes de moutons, puis armés de balances toutes neuves nous partions à la pêche !

Les têtes disposées au fond des balances que nous mettions à l’eau. Il faut attendre deux bonnes heures au moins, nous recommandait notre mère, mais va faire comprendre la patience à des gamins !

Toutes les cinq minutes, nous relevions les balances, faisant fuir les bestiaux ! Le soir, c’est avec quelques dépressives écrevisses candidates au suicide que nous rentrions, priant les sœurs de bien vouloir nous les passer au court-bouillon !

Cette campagne était truffée de petits chemins coupant la route en plusieurs endroits. Point de tracteurs en 48, tu penses, en Auvergne les vaches servaient de bêtes de trait. Les paysans n’étaient pas bien riches, ils tenaient des fermes et non des exploitations agricoles ! Ils étaient paysans et non exploitants !

Quel noble mot que : paysan. Nous avons TOUS, j’en suis certain un paysan accroché à la boue de nos chaussures, et ça nous l’avons oublié.

Quand je suis retourné plus de vingt ans plus tard dans ce joli village, le casino avait disparu, le boucher aussi, les chemins sont envahis par les ronces, les tracteurs empruntent la route, laissant les vaches profiter, et donner beaucoup de bon lait que l’on ne pourra pas vendre ou alors à des prix…

Ah oui, l’échoppe du sabotier ? Fermée bien entendu, mais qui porterait des sabots aujourd’hui ?

Allez, on s’est bien fait NIKER !

Cette photo je l'ai chopé sur le net.

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