Mais quand ça va bien pouvoir finir ?

J'ai passé aujourd'hui le cap des 50 ans, Epi m'a envoyé ses condoléances, il est solidaire, il est de la classe. Ma famille aussi s'est apitoyée, sous couvert de félicitations, et pourtant, il n'y a vraiment pas de quoi : 50, c'est le bel âge, l'âge mûr, sucré, juteux, fondant, coloré, odorant... l'âge idéal où il convient de cueillir la vie dans ce qu'elle a de plus aboutie, expérimentée, connaisseuse...

Bon, un poil de plus en maturité, et la peau se fend, la fermentation commence, la pourriture s'installe, les vers s'y mettent, des liquides malodorants s'en échappent, les rides se creusent et le fruit se ratatine, se recroqueville, se dessèche pour donner vie au futur noyau, futur arbre, futur porteur de fruits... Attendez ? Il faut laisser la place aux jeunes, on est trop nombreux, vive la grippe aviaire et le terrorisme intellectuel qui ose mettre ses idées en pratique !

Je m'excite, je m'excite, mais je n'en suis pas encore à la fin du livre. Je me doute juste qu'il va mal finir et que le héros ne reviendra pas pour un deuxième tome. Vu l'hygiène de vie draconienne à laquelle je me suis astreint, j'estime les années que j'ai vécues, et bien vécues, à 50 % du total de vie que je m'accorde. Donc : 50 au jus. J'ai le temps d'acheter ma quille, rien ne presse.

20 ans de tabagisme militant et forcené, ya pas photo, non ? Tout le monde connaît l'excellente pérennité de la viande fumée, qui permettait aux boucaniers de traverser les océans ? De même, vous avez entendu parler des conserves à l'alcool qui défient le temps ? C'est bien entendu dans un but sanitaire que je m'imbibe et me désinfecte l'intérieur tous les soirs, au whisky, avant de me laisser glisser dans le sommeil réparateur. La choucroute au Riesling, les cornichons au vinaigre, les confitures de gratte-culs..., aucune technique de conservation ne m'est étrangère. Même si je ne les maîtrise effectivement pas de manière professionnelle, et que je fais largement 10 ans de plus que mon âge...

De toute manière, toute coquetterie mise à part, et en tout cas, en ce qui me concerne, la seule manière d'obtenir des compliments sur ma bonne mine malgré le poids des ans qui m'accable, c'est d'en avouer 15 de plus. J'ai donc passé ma journée à tester cette technique sur des connaissances éloignées, des commerçants, des clients de Super U...

Ce n'est pas fondamentalement réjouissant, car ça ne change rien au problème réel de base, mais quelques regards admiratifs et quelques bouches ouvertes stupéfaites à votre vue font toujours plaisir... On se fait les petits cadeaux d'anniversaire qu'on peut.