Va au lit !

C'est pas faute que Tant-Bourrin ne m'ait envoyé force œillades et allusions, mais je viens juste de comprendre que je m'étais associé avec un fanatique des jeux collectifs, et que, faisant pendant à mon durillon de comptoir, lui s'était forgé un fort beau durillon d'accoudoir, au long de longues soirées de fauteuil devant la télé.

Le dernier billet , bien sûr, mais plein d'autres, ici , et et beaucoup de clins d'yeux, de commentaires, partout, et la démonstration que nous avons affaire à un obsessionnel du sport groupal ne devrait pas être trop dure à faire pour quelqu'un qui y consacrerait un moment.

Moi, j'ai pas le temps. Je m'étonne simplement qu'un genre de loup solitaire comme Tant-Bourrin, dont la réaction-réflexe quand on sonne chez lui est de couper le jus pour qu'on croie qu'il n'est pas là, soit à ce point fasciné par les sports d'équipe ? Natif du Sud-Ouest, natif du Sud-Ouest, d'accord, c'est vite dit, mais j'ai vraiment du mal à le visualiser en train de rouler une galoche à une grosse masse gélatineuse et suintante qui vient de réussir un but particulièrement ardu ? À le voir prêter sa savonnette dans les douches collectives ? L'entendre s'égosiller sur Allez ho avec son pote Byalpel ? Emboîter violemment son nez sous une aisselle à qui il n'a jamais été présenté ?

Non, moi je dis que les sports de ballon pour Tant-Bourrin, ça reste du virtuel, voire du thérapeutique. Devant TF1, avec sa coupe de Champomy, en toussant un léger "Hunhun" après les meilleures actions, je pense qu'on atteint là les limites extrêmes de son enthousiasme pour le beau sport.

Dès nos premiers échanges de mail, un des premiers fichiers qu'il m'envoya fut un genre de pastiche très drôle sur le thème du rugby. Tout en le félicitant sur la qualité du travail effectué, j'avais dû me laisser aller à ironiser sur ces gorilles au regard bovin qui se disputent un œuf d'autruche et à sarcasmer au sujet de ces bœufs de Kobé dopés à la bière qui meuglent pour appeler leur mère, à chaque œuf enterré par leur équipe.

Le Tant-Bourrin est consensuel et ne moufta pas, n'abordant plus jamais un sujet qu'il sentait pouvoir glisser vers le pugilat virtuel sans rien ajouter à sa gloire. Quand nous eûmes le blog, il se tint coi itou pendant une année entière, puis craqua au cours du Mondial de foot de 2006 où il se défoula dans une rafale de billets, de s'être trop longtemps retenu, sans doute. Les billets étaient drôles, distancés, mais révélaient une connaissance profonde de ce milieu qui ne pouvait être le fruit d'une rapide recherche sur Google.

Une puce commença à me gratter l'oreille.

Et puis il y eut Le Oui-oui trafiqué en Footix, divers billets et chansons sur le rugby... Après mon billet sur Roger Couderc, les réactions des commentateurs furent émues et Tant-Bourrin se sentit soutenu, voire encouragé et lâcha la bonde de ses connaissances.

La puce a fini de me bouffer l'oreille et s'attaque à me dessiller les yeux : j'ai uni une partie de ma destinée avec un authentique aficionado du crampon destructeur de pelouse !

Il est capable de crier des injures homophobes à un arbitre essayant juste de faire honnêtement son job !

Il met sa mémoire supérieure à contribution pour apprendre par cœur des listes de joueurs sélectionnés !

Il achète peut-être même l'Equipe ? ? ?

Mondieumondieumondieu, quelle horreur, dites-moi que je me trompe, je vous en supplie, Grand Manitou !