Il vous arrive sûrement parfois, malgré votre imagination débordante, de manquer d'idée et de matière pour pondre un billet sur votre blog. Que faire dans ce cas-là ?

Eh bien, aujourd'hui, je vais vous livrer un petit truc qui vous permettra de chiader un billet proustien composé d'une seule phrase, basé sur une méthode oulipienne, la littérature définitionnelle, conçue par Raymond Queneau, Marcel Bénabou et Georges Perec en 1966.

Le principe est, partant d'une phrase d'une extrême banalité, de remplacer tous les substantifs, adjectifs, verbes et adverbes par leur définition piochée dans n'importe quel dictionnaire, puis de recommencer la même manoeuvre sur la phrase obtenue, et ainsi de suite.

Par exemple, partons de cette phrase tellement plate et anodine que même Bernard Werber n'en voudrait pas pour ses bouquins :

Le bouseux écrit dans son journal.

Prenons un dictionnaire et cherchons les définitions de tous les mots...

  • Bouseux : fam. péjor. paysan
  • Ecrire : tracer les signes d'un système d'écriture
  • Journal : relation jour par jour de ce qui se passe

Je remplace les mots par leur définition, et j'obtiens la phrase suivante :

Le paysan trace les signes d'un système d'écriture dans sa relation jour par jour de ce qui se passe.

Reconnaissez que la phrase a déjà beaucoup plus de gueule ! Et ensuite, il suffit d'appliquer le même traitement à cette nouvelle phrase. Cela nous donne :

La personne qui vit à la campagne de ses activités agricoles représente par des lignes et des points les marques d'un ensemble ordonné d'idées scientifiques ou philosophiques de représentation de la parole et de la pensée par des signes graphiques conventionnels dans son lien existant entre des choses, clarté par clarté, de ce qui a lieu.

Pas mal, non ? Mais encore un peu court pour balancer cette phrase en guise de billet. Allons-y pour une itération supplémentaire...

L'être humain qui se procure les moyens de subsister dans l'étendue de pays plat et découvert par sa vivacité et son énergie dans l'action qui concerne l'agriculture rend perceptible par des traits continus dont l'étendue se réduit pratiquement à la longueur et des signes de ponctuation les traces de contact d'une réunion d'éléments formant un tout, que l'on considère en lui-même, qui a de l'ordre et de la méthode, de représentations abstraites d'un être, d'un rapport entre des choses relatives à la science ou relatives à la philosophie, d'action de rendre sensible quelque chose au moyen d'une figure de la faculté de parler propre à l'être humain et de la faculté de penser par des marques matérielles distinctives qui représentent par des dessins qui résultent d'une convention dans son rapport logique ou de dépendance actuel entre des êtres, des objets inanimés, éclairage répandu par quelque chose de lumineux par éclairage répandu par quelque chose de lumineux, de ce qui se produit.

Voilà, c'est parfait ! Il n'y plus qu'à balancer cette phrase magistrale en guise de billet. Votre piètre lectorat passera des heures à essayer vainement de saisir le sens profond de votre prose, n'osant pas dire qu'il n'y comprend rien par crainte de paraître ignare et limité intellectuellement (ce qu'il est de toute façon).

Et vous, vous avez alimenté votre blog sans aucun effort intellectuel, par un procédé purement mécanique, tout en renforçant votre prestige de grand penseur...

Merci qui ? Merci Blogborygmes !