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mercredi 24 janvier 2007

ManouStabilétalon



La méthode "participative" se développe de façon foudroyante. Aussi vais-je vous demander de faire appel à votre prodigieuse mémoire : citez-moi quelques phrases (vraies, évidemment) que vous avez lues, prononcées, entendues ou fortement pensées, dans la journée d’hier. Je vous promets d'en faire le programme d'un futur billet. Je m'y colle pour l’exemple :

- Hanmi hand tachi waza katate dori kubishime san kyo.
- Ushiro waza ryo hiji dori naname kokyu nage.
- Tachi waza katate ryote dori shio nage et kote gaeshi.
- Ushiro waza haga hijime.

- Il reste du papier sous le lavabo ?

- Désirez-vous une carte client ?
- Non, par pitié.

- Je te souhaite une belle et heureuse année. Moi, j'ai passé une année 2006 affligeante.

- Bonjour, je suis XXXX de YYYY. Je traite actuellement le dossier ZZZ. J’aurais besoin d’une adresse e-mail afin de vous envoyer la procédure d’inscription sur le portail fournisseurs. Comment ? ... Vous en avez un peu assez d'établir des devis pour YYYY ? ... Je vous en prie, considérez-moi comme une tombe. Une tombe rancunière .

- As-tu pris rendez-vous chez le toubib pour ton oreille purulente ? Toujours pas ? Je t’en prends un ? De toute façon tu n’iras pas ?

- Bordel de bordel, l'écran de mon micro vient de s’éteindre !!! J'ai appuyé partout. Plus moyen de rien faire!
- Enlève la batterie si tu veux t'en sortir.

- Moi, voir des femmes bricoler, ça me fait marrer.
- (Faites-le taire ou je lui fais bouffer la batterie !)

- Il y a les hommages de circonstances et il y a les autres. (Pujadas au 20 heures).

A vous.


L’astuce du jour :

Savez-vous que les oreilles et le nez grandissent jusqu'à notre mort ?
Tant que mon stabilo ne pénètre pas dans mes narines, je ne m’inquiète que moyennement.

mardi 23 janvier 2007

Tant-BourrinUn cadeau inestimable

La chose fut ardue d'un point de vue technique, mais j'y suis arrivé. Je souhaitais te faire un immense cadeau, chère amie lectrice, cher ami lecteur, pour te remercier de ta fidélité. Un cadeau unique et inestimable.

Eh bien, c'est chose faite : je t'offre avec ce billet un poème. Oui, mais pas n'importe quel poème : un poème, fruit du hasard, que toi seul au monde as en possession.

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lundi 22 janvier 2007

Saoul-FifreMiroir

Le miroir lisse
De Narcisse
Ressemble à l'eau du lac
Par un matin sans vent
D'une journée d'Hiver.

Sous les yeux ronds dans l'eau
Nagent des poissons bleus
Et des algues
Aux gestes filandreux.
Des cils
Aux battements de libellule
Ombrent les regards
Fuyant se cacher
Derrière des touffes de roseaux.

Oreille inquiète
Lèvres tremblantes
J'attends la bête
Au bout de mon bouchon.
Viendra t-y t-elle, viendra t-y pas ?
Une grenouille répond
En me tirant la langue :
Je crois pas...

Le saule pleureur
S'arrache les cheveux.
La petite barque
À laquelle il tenait
A détaché sa chaîne :
Trop tristounet.

Narine palpitante,
Le levraut renifle, écoute et scrute
Profite de la vie, des odeurs,
Du plaisir,
Jusqu'à l'heure
De l'œil dans le viseur.

Le canard offre sa joue à la cane
Elle nage autour de lui,
Puis le bouscule
Et s'en va, droite et régulière,
Les plumes de son derrière
À peine frémissantes.

Le miroir lisse
De Narcisse
Ressemble à l'eau du lac
Par un matin sans vent
D'une journée d'Hiver.

dimanche 21 janvier 2007

ManouLes Soldes


Avant la recette voici l'astuce du jour :

Pour éviter l'incontinence à votre camenbert, stockez-le debout.



- 1 gastronome sans culotte courte
- 3 caddies vides
- 1 carte bleue
- 3 rosettes de Lyon (pour les petits creux impromptus)
- 10 orchidées blanches
- 1 clavier azertyuiop^$qsdfghjklmù*wxcvbn, ;:! (sans pavé numérique)
- 7 litres de pur jus de pomme
- 1 lampe halogène coopérative
- 1 siège-enfant vide
- 10 à patchs de nicotine non utilisés
- 1 machine à laver 1600 tours/minutes
- 1 fusil à pompes
- 12 œufs extra-frais
- 1 pot de fromage blanc 0%
- 2 camisoles de force
- 1 protège-slip usagé (pour se rappeler l'odeur)
- 3 paquets de Kleenex
- 1 jeu de Jokari
- 1 tondeuse à gazon électrique
- 1 agrafeuse
- 2 * 5 doigts + 2 * 5 orteils
- Le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la laitière
- 1 boîte de 50 préservatifs
- 3 choristes
- 5 geysers islandais
- ½ Benoit XVI (le bas)
- 50 assiettes en plastique bleu
- 1 téléphone portable déchargé
- 3 livres de Jules Verne
- 1 peigne amincissant
- 1 photocopieuse unisexe
- 1 chevalier accompagné de son fidèle fournisseur de mouches
- 4 tapis de bain
- 100 g de farine de blé de couleur
- 1 brumisateur à la menthe
- 1 empire pour mon cheval
- 6 cordes à sauter le pas
- 1 poil de longévitude
- 1 tube d'Elancyl que vous prêterez à votre pote Byby

Voilà pour le décor. Demain j’attaque la liste des ingrédients.

samedi 20 janvier 2007

Tant-BourrinUn poste avancé

Tino Brunart ne remarqua absolument rien la première fois qu'il alluma le petit poste de radio qu'il venait d'acheter. Il faut dire qu'il avait l'habitude d'écouter la radio comme on écoute un robinet d'eau tiède couler : sans y prêter grande attention. C'était pour lui surtout un moyen d'avoir un vague bruit de fond pendant que, la gueule encore tout ensommeillée, il avalait son café du matin. Un dérisoire palliatif à sa désespérante solitude depuis que sa femme l'avait quitté.

Ce n'est que le second jour que son attention fut captée par une information au milieu du journal de sept heures : "... bla bla bla crise politique bla bla bla chiffres du chômage bla bla bla bla projet de loi bla bla bla bla et nous apprenons à l'instant le décès cette nuit de Lou Saffire. Lou Saffire qui avait connu la gloire dans les années 70 avec des titres comme "dirty underwear", "the perfume of a goat" ou "the tractor song" et qui s'est donc éteint cette nuit des suites d'une longue maladie dans un hôpital de Los Angeles. Voilà, sur cette triste nouvelle, s'achève ce journal, rendez-vous à 7h30 pour un prochain flash d'info..."

Tino fut très affecté par cette annonce : Lou Saffire avait été l'idole de sa jeunesse, un des rares chanteurs qu'il avait affichés, sous forme de poster, aux murs de sa chambre d'enfant. "Merde alors ! On est peu de chose... Chienne de vie..." se dit-il, abasourdi que Lou Saffire ait ainsi pu mourir aussi bêtement, comme un humain normal, en donnant à cette matinée le goût amer de la fin de toute une époque.

Ce fut la première chose dont il parla, ce matin-là, aux collègues à la machine à café.

- Au fait, vous avez entendu ça ? Lou Saffire est mort !
- Hein ? Non, je ne suis pas au courant. Comment est-il mort ?
- D'un cancer, je pense. Dans un hosto...
- Hé, Tino, t'es sûr de ce que tu racontes ? Parce que j'ai écouté les infos sur l'autoradio dans la bagnole, et ils n'en ont pas du tout parlé. Ça m'étonne, ton truc.
- Appelle-moi Ducon tant que t'y es ! Je te dis qu'ils l'ont annoncé ce matin. Et fan comme je l'étais de Saffire, tu penses bien que j'ai bien écouté !
- Mouais... bon, bin, je vais aller voir sur internet ce qu'ils en disent. Je veux en avoir le coeur net.

Cinq minutes plus tard, aucun site d'information ne parlant d'un quelconque décès de Lou Saffire, Tino Brunart dut admettre, même si la chose lui paraissait plus qu'étrange, que ses sens avaient dû le tromper. Ou alors qu'il n'était pas bien réveillé ce matin et qu'il avait mélangé rêve et réalité. Ou que l'information ne circulait pas vite sur internet. Ou alors que quelqu'un avait fait un canular de très mauvais goût. Il en fut quitte pour subir les quolibets de ses collègues toute la journée.

Mais le lendemain matin, les rires n'étaient plus de mise et le regard de ses collègues avait changé du tout au tout : Lou Saffire était mort durant la nuit dans un hôpital de Los Angeles.

- Ah bin merde, Tino ! Là, tu me bluffes ! Comment t'as pu savoir ça avant même qu'il soit mort ? T'avais entendu dire qu'il était malade ? Ou t'as des dons de voyant ?

Tino était dépassé par les événements. Il répondit "eh, qui sait ?" avec un petit sourire au coin des lèvres. Mais en fait, intérieurement, il était pris dans un véritable vertige métaphysique : avoir ou ne pas avoir entendu, telle était la question qui le taraudait. L'hypothèse d'un rêve prémonitoire qu'il aurait confondu avec la réalité fut celle qu'il privilégia, par défaut, ne trouvant aucune autre explication satisfaisante.

Le lendemain matin, il écouta toutefois son poste de radio d'une autre oreille, bien plus attentive. Ou du moins, il essaya, mais il avait bien du mal à se passionner pour l'actualité : "...bla bla bla ultimatum de l'ONU bla bla bla bla coup d'état bla bla bla bla attentat bla bla bla bla vote à l'assemblée bla bla bla..."

Même avec la meilleure volonté du monde, l'esprit passablement obtus de Tino Brunart peinait à rester concentré sur le flux verbal : les informations lui rentraient par une oreille et, ne trouvant personne à qui parler à l'intérieur de son crâne, ressortaient par l'autre sans y laisser de trace. La marche du monde n'était vraiment pas la préoccupation première de Tino, beaucoup plus sensible à ce qui le concernait, lui, directement, comme la météo.

Tiens, justement, voilà qu'arrivaient les prévisions du jour : "la météo pour ce 21 janvier : la perturbation qui est arrivé hier sur la côte atlantique et qui a donné beaucoup de pluie sur l'ensemble des régions peinera aujourd'hui à s'évacuer par l'est. Il faudra donc garder son parapluie puisque nous aurons encore un temps très couvert et de nombreuses précipitations sur la majeure partie de la France..."

"Quelle bande d'incapables, pensa Tino, ils se plantent lamentablement : on a eu du soleil hier... heu... mais ils sont encore plus nuls que je le pensais : hier, c'était hier, il devraient quand même savoir le temps qu'il a fait !"

Il était perplexe. Il sentait qu'il y avait quelque chose qui ne collait pas dans ce qu'il venait d'entendre, au-delà de l'erreur sur le temps de la journée écoulée. Mais impossible de savoir quoi.

Il regarda sa montre : il était temps de se préparer pour se rendre au boulot. Il se figea. Il venait de comprendre ce qui clochait : sur sa montre, un petit "20" lui rappelait la date du jour. Or il était certain d'avoir entendu "la météo pour ce 21 janvier" à la radio... Ou plutôt, non, il avait dû rêver. Il avait forcément dû rêver. Ou le journaliste s'était trompé. Sur la date et sur le climat de la veille ? Hum, cela paraissait beaucoup, mais il fallait bien se raccrocher à des explications un tant soit peu rationnelles. Il partit travailler, en se promettant d'éclaircir ce mystère dès le soir venu.

Quand il revint à son domicile une dizaine d'heures plus tard, la première chose qu'il fit fut d'allumer son poste de radio. Rien d'anormal dans ce qu'il entendit : des chansons insipides, quelques spots de publicité, du blabla creux et superficiel au milieu... De la radio commerciale dans tout ce qu'elle peut avoir de chloroformant pour l'esprit.

Ce fut au moment du flash d'information de 19 heures qu'il entendit enfin ce qu'il espérait entendre : "Vous écoutez EuroTL, il est 19 heures. Voici toute l'actualité de ce vendredi 21 janvier. Tout d'abord bla bla bla bla..."

Cette fois, sa concentration avait été maximale. Plus aucun doute n'était permis : on était jeudi 20 janvier, son poste de radio semblait décalé d'une journée dans le futur. Il écouta les titres, guettant l'information qui pourrait lui permettre de vérifier ce qu'il commençait à entrevoir : "... bla bla bla chiffres de la délinquance bla bla bla manifestation bla bla bla bla en Coupe de l'UEFA, le PSG a connu hier au soir un véritable naufrage en perdant sur son terrain face au modeste club luxembourgeois d'Esch sur Alzette sur le score sans appel de 5 à 0. Le club semble à nouveau en proie à une crise profonde bla bla bla..."

Le match n'aurait lieu que ce soir ! Tino en était tout tremblant d'émotion. Cela confirmait donc que... Non, il se refusait encore à y croire. Il vérifia sur le programme de télé : pas de doute, le match PSG-Esch sur Alzette passait le soir-même en direct sur la première chaîne à 20h45 !

Et, plus tard dans la soirée, au fur et à mesure que le match avançait et que le score se creusait, contre toute attente, en faveur d'Esch sur Alzette, Tino Brunart s'enfonçait, songeur, dans son canapé. Et au coup de sifflet final sur le score de 5-0, il se sentit tremblant de la tête aux pieds.

Cette fois, plus de doute possible : son poste de radio était en avance de 24 heures sur le reste du monde. Vingt-quatre heures ? Mais alors...

Le lendemain soir, il écouta le flash d'information de 21 heures, un stylo à la main, le coeur battant d'excitation : "... bla bla bla vives tensions au Proche-Orient bla bla bla bla menaces d'embargo bla bla bla bla bla côte de popularité en baisse bla bla bla bla bla et pour finir, le résultats du loto. Au premier tirage, il fallait jouer le 6, le 8, le 17, le 35, le 46 et le 48, numéro complémentaire : le 2. Au second tirage, il fallait cocher les cases 12, 17, 29, 30, 42 et 43, numéro complémentaire : le 20. Ainsi se termine ce journal. Je vous laisse maintenant en compagnie de bla bla bla bla..."

Il n'osait pas y croire. Il regardait les numéros devant lui qu'il avait consciencieusement notés. Ce n'était pas possible ! Et pourtant...

Le lendemain, il fit le pied de grue un quart d'heure devant le bar tabac du coin en attendant son ouverture, tant il était impatient de remplir ses grilles de loto. Ce qu'il fit. Deux grilles, pas une de plus, avec les deux combinaisons.

La journée lui parut une éternité.

L'émotion n'en fut que plus forte au moment du tirage. Tino Brunart vit les bons numéros sortir les uns après les autres, comme dans un rêve. A l'issue du premier tirage, il en pleurait d'émotion. Après le second tirage, il dut s'asseoir, ses jambes ne le portant plus.

Il resta dans l'histoire du Loto comme une hérésie statistique, l'homme le plus chanceux de l'univers : celui qui avait décroché les six numéros aux deux tirages le même soir en jouant seulement deux grilles. Une chance sur environ 200000 milliards !

La vie de Tino en fut bouleversée du tout au tout.

Deux mois plus tard, il vivait dans un somptueux palace sur la Côte d'Azur, en compagnie d'un top model, en menait la vie dorée d'un milliardaire. Une vie de luxure et de paresse. Tout au plus consacrait-il environ une heure par jour à la gestion de ses affaires, florissantes au-delà de l'imaginable.

En fait, il allait deux ou trois fois par jour s'enfermer dans son bureau et écouter son poste de radio. Tout ce qui l'intéressait était de capter les quelques informations qui lui permettraient de faire entrer des bons coups. Entendait-il parler d'une hausse du cours du dollar ? Il en achetait des millions dans l'heure qui suivait. Une vague d'attentat aérien qui allait sûrement donner un coup de frein aux valeurs de l'aéronautique ? Il vendait toutes ses actions 24 heures avant tout le monde. Et il continuait, de temps à autres, à jouer au Loto et au PMU, en utilisant toutefois des prête-noms pour que la chose ne finisse pas par paraître suspecte. Bref, l'argent entrait à flots, bien plus vite qu'il n'arrivait à le dépenser malgré son train de vie fastueux.

Mais le naturel de Tino était ainsi fait que même sa petite heure de travail quotidienne finit par le lasser : les flash d'actualité lui paraissaient interminables et relativement pauvres en informations réellement utiles à ses affaires, les faits d'actualité lui passaient toujours largement au-dessus de la tête. "... bla bla bla tensions exacerbées bla bla bla bla casques bleus bla bla bla bla menaces d'attentats bla bla bla plan vigipirate rouge bla bla bla bla moins de tués sur les routes bla bla bla bla..."

Tant et si bien qu'il renonça à écouter les flashes d'information : il avait découvert une rubrique économique diffusée tous les matins qui répondait parfaitement à ses besoins en distillant quelques tendances de la veille sur la bourse (et donc, en fait, de la journée qui commençait !), exactement ce qu'il lui fallait pour faire ses spéculations lucratives... Il put dès lors se contenter d'un quart d'heure par jour de gestion de ses affaires.

Quelques jours plus tard, un terrible tremblement de terre, de magnitude 7,6, frappa au petit matin la Côte d'Azur, faisant plusieurs centaines de morts. Au nombre de celles-ci figurait Tino Brunart : l'épicentre du séisme était extrêmement proche de son palace, et celui-ci s'était littéralement effondré sur lui-même et sur ses occupants.

Tous les flashes d'informations du soir firent bien évidemment leurs gros titres sur ce terrible tremblement de terre. Des flashes d'informations que Tino Brunart aurait pu entendre dès la veille au soir sur son poste de radio magique, s'il s'était donné la peine de s'intéresser à la marche du monde.

Trop d'info tue l'info, est-il courant de dire. Mais le manque d'info tue aussi.

Tout court.

vendredi 19 janvier 2007

Saoul-FifreLa gnole de Dieu, toi qui enlèves les pêchés du Monde...

... donne-nous la Paix !

J'ai toujours pensé que Bof ajoutait par ses commentaires sous nos billets un peu de ces racines authentiques qui nous manquent ou dont nous sommes éloignés. En acceptant de rejoindre notre joyeux (mais pas que) Dream Team, il concourrait au rayonnement de son Limouzi tant aimé ? Ce n'est pas faute de lui avoir fait de pressants et allusifs appels du pied dans ce sens. Mais MÔssieur aime se faire prier de remettre la sienne. Alors j'insiste, et en attendant une réponse positive, je suis bien obligé d'user d'expédients pour vous faire profiter de sa plume ironique, enlevée et précise, bien que trempée plus souvent que de raison dans une encre à teneur alcoolisée élevée. Je n'en suis pas à mon coup d'essai puisque vous avez déjà pu vous délecter de la prose bofienne ? bofeuse ? bofesque ? en tous les cas pleine de bravitude ...

Je sais, je sais, je prends des risques : un jour viendra ou Bof ne m'écrira plus de peur de retrouver ses épîtres publiées, d'ailleurs il a commencé puisque ce billet potentiel avait Margotte pour destinataire désignée. Mais je ne l'ai pas pris en traître : sitôt reçu le mail je lui répondis ceci :

-"Ho mais avec très peu de modifications, ça peut faire un très beau billet, ça q:^) !!"

... qui le laissa coi, stoïque et non-bronchant, ce que j'interprétai comme une autorisation en bon uniforme.

Musique !

Ma chère Margotte,

je passe de bonnes vacances et je vous embrasse tous bien fort, même cet affreux Saoulfifre. Non, c'est même pas vrai, je prends seulement un jour de RTT demain pour un travail extrêmement très important. Ce soir, nous avons déposé au pied de l'alambic ambulant, Alex et moi, la récolte 2006 qui sera distillée dès demain matin à 5 h 30. Après avoir examiné les bidons, le distillateur a été catégorique : " rien à voir avec ce que tu m'as fait bouillir l'an dernier ". Nous avons donc de gros espoirs sur la qualité des produits (prune et poire) mais aussi, ce qui n'est pas pour me déplaire, sur la quantité de ces produits. C'est pour cela que je tenais à te remercier pour ces jolis bouchons qui neigent: je viens de leur trouver un usage, mais je suis sûr que tu n'en doutais pas. Demain à cette heure-ci, je serai peut-être en prison suite à un contrôle d'alcoolémie, au CHU suite à un coma éthylique, ou en train de me frotter les mains devant le résultat de la distillation. Je profite de l'évocation de tous ces aléas pour te dire que si je meurs demain d'avoir trop goûté la gnôle trop fraîche et trop forte, j'emporterai avec moi dans l'au delà le souvenir de cousins que j'aurais peut-être pu connaître plus tôt mais que je serai content d'avoir connu au crépuscule de ma vie. C'est la faute à la culture de bandes, culture tant répandue dans ce Limousin si austère et si sauvage, et si peu peuplé, ce qui devrait être un obstacle à la culture de bandes, justement : ma famille fréquentait les campagnards, votre famille ne fréquentait que les villauds, membres émerites de divers Cercles et autres inventions bourgeoises. Je vais maintenant essayer de trouver assez de bouteilles - je le répète, j'ai de gros espoirs pour demain - que je vais devoir rincer pour stocker mes jus de fruits corsés. Il fait nuit, je vais avoir des engelures sur mes mains martyrisées par le dur labeur de bouilleur de cru, mais sache, Margotte, que si nous nous revoyons, si Dieu, dans sa grande bonté, me prête vie, que je t'en ferai goûter de ce produit, toi qui nous a offert des bouchons qui neigent. Pour ton mec, je réfléchirai, si bien entendu, Dieu, dans sa grande bonté, me laisse cette possibilité. Peut-être adieu les cousins de Provence, si maladroits, si dangereux : promis, demain, s'il ne m'est rien arrivé, je vous donnerai les résultats de la distillation. Hé, hé, hé !

Cher Saoulfifre

Tu verrais la cour, on dirait un bidonville : cinq bidons bleus de 60 litres chacun et deux jolis, noirs, de 30 litres pièce, lavés à l'eau de source sèchent tranquillement au soleil avant d'être remontés au grenier, prêts à faire leur boulot à la prochaine récolte. Il y a aussi un jerrican de 25 litres qui sèche lui aussi. Il a servi ce matin à ramener une première coulée qui sent bien bon, ma foi, et que nous avons déjà mise dans une bonbonne de verre. Pour l'instant, tout va bien, mieux que sur le plan. On remplit la cuve de l'alambic, le feu brûle en permanence, ce qui fait qu'on ne perd pas de temps: une coulée à 53 degrés, on vide la cuve, on la remplit à nouveau, et ça repart. Ca sent bon, il y a des vapeurs dans la tente du distillateur, on goûte le produit pour être sûr qu'il soit bon, on surveille ça de près, quoi. Normal, après tout le mal qu'on s'est donné pour ramasser les fruits : le dos cassé, la chaleur sur le râble, les guêpes et autres sales bêtes à éviter, parce que, sais tu, mon cher Saoulfifre, que ces sales bêtes aiment les fruits bien murs elles aussi ? La lutte pour la vie, quoi : l'Homme risque sa peau pour prendre un petit grog de temps en temps, en hiver, quand il est malade et qu'il se dit que le lendemain matin, il devra quand même se lever dans la nuit noire et se jeter à la mine, dans le troisième niveau tout noir lui aussi. Bon, j'y reviens.

Bon, les bidons sont au grenier, la boisson dans des récipients en verre, l'alambic s'en va demain faire de nouveaux heureux dans le secteur de Bujaleuf. Je n'ai pas fait de coma éthylique, je n'ai pas été coincé par les gendarmes : bref, je me frotte les mains, tant et tant, que des crevasses commencent à se former entre les cals nés de l'usage de la pioche et de la pelle, outils très usités par les mineurs. Ces crevasses ne m'inquiètent nullement, je peux maintenant les désinfecter avec un fond de gnôle et revenir dès demain travailler comme un forcené. Donc, je suis vivant, j'ai un tout petit peu reconstitué le stock d'eau de feu, je pense que ça va aller : encore une épreuve surmontée.

jeudi 18 janvier 2007

Manou3 Flash-back




Bienvenue au club (à peu près J-13000)

En septembre ma mère nous annonce une surprise pour décembre. Le 1er décembre nous la tannons donc. Elle confie sur le ton du secret : « Je peux vous le dire maintenant, un bébé arrivera à Pâques ». Je me sens comme qui dirait blousée tandis que mon petit frère commente "Tu parles d'un cadeau!". Le dernier, 2 ans, ne dit rien. Ma mère sort de la pièce plutôt fâchée. Je m'inquiète :« Où va-t-il dormir ? On est déjà 3 dans la chambre… »

Il a survécu.

Grégoire (J-5000)

J’ai travaillé un temps à Levallois. A la sortie de la gare se trouvait souvent un clochard aux yeux bleus. Il aimait la conversation. Son regard attentif et interrogateur vous retenait quelques minutes. Au milieu d’un mois de janvier il fut remplacé par une affichette : « A ceux qui l’ont connu, Grégoire est mort lundi des suites d’un refroidissement ».
Je garde en mémoire nos échanges, la couleur de ses yeux et la question de son regard.

Vous voudrez bien me pardonner (J-1)

Hier j'ai ri : « A la saint Valentin, elle m’a touché la main. Vivement la sainte Marguerite ».

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