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vendredi 22 février 2013

AndiamoDu gaïl pour les rosbifs

Mes deux complices sont secs ! Si, ce sont eux qui me l’ont dit, secs comme une vieille prostate ? Ou les couilles à Taupin ? Nul ne le sait, je vous entend : « ça y est, on nage en plein romantisme chez Blogbo ».

Ne nous remerciez pas ! Nous sommes des grands romantiques, mais nous le cachons bien, très bien même.


Bon, revenons au billet car je m'y suis « collé » : normal, c’est moi le plus jeune….

Ça pourrait faire une histoire pour Chauguise, ça : « du gail pour les rosbifs » !

La devise des rois d’Angleterre : HENNIT SOIT QUI MAL Y PENSE.

Ch'tiot crobard Andiamo


NAN, mais vous vous rendez compte ? « On » leur a fait bouffer du cheval aux Anglais, il est des pays où on voudrait bien bouffer tout simplement ! Déjà ils ne mangent pas d’escargots, ni de cuisses de grenouilles.

Ou bien le cheval leur rappelle peut-être la Princesse Anne, dite « longues chailles » ? Ce doit être ça !

Tenez, j’ai fait une tite caricature.

Ch'tiot crobard Andiamo

J’ai même pas exagéré !

Prenons exemple sur les Chinois. Pourquoi ? J’avais un copain Chinois au boulot, un jour il me dit :

- En Chine, on mange tous les animaux qui ont le dos qui regarde le ciel !

Ce à quoi je lui réponds :

- Chez toi, y’a pas intérêt à se foutre à quatre pattes !

Et puis il me semble que les premiers cas de « vache folle » avaient été signalés chez les rosbifs justement, il y a plus de vingt berges ? Allons, vous qui avez une mémoire éléphantesque, rappelez-vous !

Décidément, je préfère le cheval fou… Le crazy horse, surtout quand il est au saloon !

vendredi 15 février 2013

AndiamoMardi ça saignera (une enquête de Chauguise)

Ah ! Il a fait les choses comme il faut, Julien : il est venu un soir avec une boutanche de derrière les fagots… Un Châteauneuf du Pape, je ne vous dit que ça.

Avec son commissaire de chef, un coup à toi, un coup à moi, puis il s’est lancé Dugland, comme l’appelle Chauguise.

- Patron, je suis raide dingue de votre fille Juliette et je voudrais l’épouser…

- Elle est d’accord, ma Juju ? D’abord, qu’est-ce qu’elle fout dans la cuisine… Juju ! Viens ma chérie.

- Voilà, papa.

- T’es d’accord pour épouser Dugl… euh, Julien ?

- Oh oui, papa !

Se tournant vers Julien.

- Si jamais tu la fais chialer UNE seule fois Dugland : j’te fume, verstehen ?

- Il n’y a pas de danger, patron.

- Bon, alors c’est oui… Mais ça pouvait pas attendre encore un peu ma fillette ?

- Tu sais, mon Papa, Julien et moi, on s’aime !

- Alors rien à ajouter.

- Merci patron !

- Pfuuu.

- Mais franchement tu crois que c’est le moment de te la jouer bluette, marguerite et zanana ? Avec l’affaire qu’on a sur les bras ?

Depuis plusieurs jours, un cinglé (il faut bien l’appeler ainsi) nargue Chauguise, il lui fait parvenir une prose à l’aide de mots découpés dans divers journaux, toujours à peu près la même formule :


MARDI, JOUR SOMBRE... MARDI ÇA SAIGNERA !

Bien sûr, c’est une allusion au film de Hugo Frégonèse « Black Tuesday » qui vient de sortir sur les écrans des grands boulevards de 1954, rebaptisé « Mardi ça saignera ». Avec le grand par le talent Edward G. Robinson, Peter Graves et… la très belle Jean Parker !

Sympa les Blogbos je vous ai dégotté l'affiche du film et la très belle Jean Parker !


Chauguise reçoit sa correspondance le vendredi et, immanquablement, un homme est retrouvé mort le mardi. Tous tués de la même façon : un coup de poignard en plein cœur. Le quartier où sont découvertes les victimes change à chaque fois

La première fois, derrière l’hôtel Dieu, allée Célestin Hennion dans le premier arrondissement.

La deuxième fois, dans le square Paul Langevin, ce square est situé rue des Écoles dans le quartier latin le Vème.

La troisième, square du Temple, rue Perrée dans le IIIème.

La quatrième et dernière victime - enfin jusque là ! - retrouvée dans le jardin Brassaï à la butte aux cailles dans le XIIIème !

Ce qui a fait dire à Julien :

- Vous avez vu patron ? C’est pas loin du métro Glacière, il se serait bien conservé !

Regard noir de Chauguise...

- Et c’est un gugus comme toi qui va me faire des petits-enfants ? PFUUUU !

Toujours la même méthode : un coup de surin en plein cœur, un seul, mais mortel ! Et d’après Bourrieux dit « Couillette », l’assassin n’est pas très grand, car les coups de surin sont portés de bas en haut, selon le relevé que le légiste a fait.

Rentré au 36, Chauguise a convoqué toute son équipe, et à l’aide d’épingles surmontées d’un petit drapeau rouge, il a marqué chacun les endroits où ont été retrouvés les corps.

Soudain Julien s’écrie :

- Regardez patron, les drapeaux forment une spirale !

Effectivement en prenant du recul on s’aperçoit aisément que le dessin formé par les aiguilles représente une spirale.

- C’est bien Dugland, y’en a au moins un qui n’a pas de la merde dans les calots ici !

Le vendredi suivant, Chauguise reçoit encore sa bafouille, mais cette fois un détail l’intrigue, il voit comme une trace noire sur l’enveloppe. Précautionneusement, il saisit l’enveloppe avec une pince à épiler, et la tend à Julien.

- Tiens, porte ça à Couillette, qu’il analyse le truc noir, là. On ne sait jamais, il a peut-être commis sa première connerie, c’t’endoffé !

Deux heures plus tard, Bourrieux dit "Couillette" appelle le patron.

- Ça y est, Chauguise, je sais ce que c’est !

- Accouche, nom de Dieu, ou j’te mets les forceps !

- Mollo, c’est du noir de fumée.

- Quoi ?

- Du noir de fumée, ça sert dans la fabrication du caoutchouc, avec du latex, du soufre, du talc et un tas d’autres trucs.

- La vache, et d’où il a pu sortir ça, ce con ?

Chauguise sort dans le couloir et gueule à la cantonade :

- Tout l’monde dans mon casino ! Schneller, verstehen ?

Aussitôt, l’équipe au grand complet est là, et rapidos : quand le boss jacte en chleu, ça rigole pas !

- Bon, l’un de vous connaît–il dans Paris une manufacture de pièces en caoutchouc ?

Dutilleul, un vieil inspecteur près de la retraite s’avance.

- Je connais patron : près de chez moi - je crêche à Belleville -, il y a rue Piat une petite boîte qui fabrique des pièces en caoutchouc, même que ça schmoute sévère dans le quartier !

- Bon, merci Dutilleul. Alors voilà, les pieds nickelés, on va se poster près de cette boîte et on surveille 24 heures sur 24 s’il le faut, pas de dimanche qui tiennent... Capito ?

La rue Piat est située dans le XXème, coincée entre la rue de Belleville et la rue des Couronnes. Dans les années cinquante, c’est un quartier extrêmement populaire, avec encore des manufactures, des artisans et des façonniers, un Paris qui travaille, pas encore « bobotisé ».

- En attendant, Dugland, on va partir en repérage, va faire chauffer Titine, j' lancebruque un chouaille et j’y go !

Chauguise se rajuste et grimpe dans la quinze, non sans avoir allumé une « Boyard » papier maïs et lorgné sur Julien, histoire de le contrer s’il fronce le nez en signe de réprobation.

- Euh, patron, je connais pas bien…

- Vas-y, emmanche le Sébasto, après la rue Turbigo, arrivé à la Répu, t’emmanches l’avenue du même blase, ensuite l’avenue Parmentier… Tu suis toujours patate ?

- Elle est bonne celle-là, patron !

- Dans la foulée, tu prendras la strass du faubourg du Temple, la rue de Belleville c’est en face, et après tu mates la rue Piat : c’est à droite, à droite en sortant des chiottes ! Putain Dugland, faut qu’t’apprennes Pantruche ! J’espère que ça n’est pas pour tout pareil, sinon ma Juju elle va s’emmerder sévère !

Arrivé rue Piat, Julien gare la pompe à proximité de chez « DYNAGOMME » la boîte qui fabrique des accessoires en caoutchouc, notamment pour l’industrie automobile. Et là, Julien avise une boîte à lettres peinte en bleu (comme à l’époque).

- Vous avez vu, patron, la boîte ?

- Ben non, j’ai une canne blanche, t’as pas remarqué ?

- Tout de même, vous n’êtes pas aimable !

- Ouais, ben faudra t’y faire… Mon GENDRE !

Une sonnerie se fait entendre, il est dix-sept heures trente, les ouvriers et ouvrières sortent, certains portent encore leurs bleus de travail, les pognes tout juste lavées, la fouillasse à l’est, la musette sur le râble, le goulot du jacquot qui dépasse. Ils cavalent pour attraper le bus ou s’engouffrer dans la station Pyrénées. Des morts de soif s’arrêtent chez Bébert, le rade à côté de l’usine, histoire de faire descendre le noir de fumée encore collé dans leurs gosiers.

Puis ce sont les premières femmes qui sortent, pomponnées, arrangées, on ne dirait pas qu’elles ont travaillé sur des intermix, mélangeurs ou autres presses à injecter le caoutchouc.

Une petite femme, trente ans tout au plus, tient une enveloppe à la main, elle passe devant la boîte des PTT s’arrête et commence à glisser l’enveloppe dans la fente. Julien a bondi et saisit l’enveloppe avant qu’ elle ne tombe dans la boîte, Chauguise l’a rejoint, il chope l’enveloppe sur laquelle on peut lire :

Monsieur le commissaire Chauguise

36 quai des orfèvres

Paris 1er

La jeune femme est emmenée sur l’île de la Cité, et Chauguise en personne l’interroge, doucement calmement. La femme est apeurée, on devine une grande détresse.

Lentement, elle commence à parler…

- Je m’appelle Yvette Marchand, j’ai 29 ans, c’est bien moi qui ai tué les quatre hommes, et je m’apprêtais à en tuer un cinquième… C’était le dernier.

- Pourquoi vous avez fait ça, Madame ? Chauguise, contrairement à son habitude, est tout miel, il pressent un horrible drame derrière ces assassinats, son fameux flair.

-J’étais serveuse, Monsieur le commissaire, au restaurant « l’escargot », rue de Charenton, dans le quartier de la Bastille. Un soir, cinq types sont venus manger, ils arrosaient la vie de garçon de l’un deux qui devait se marier le samedi suivant. Ils ont beaucoup bu ce soir-là, Monsieur le commissaire, et quand je suis sortie vers vingt-trois heures trente, ils m’attendaient, ils m’ont forcé à monter dans leur voiture, une 203 noire Monsieur le commissaire, ils m’ont bandé les yeux afin que je ne puisse pas reconnaître l’endroit où ils m’emmenaient et là…

- Oui Mademoiselle, j’ai compris, inutile d’aller plus loin….

- Mais pourquoi ne pas avoir porté plainte ?

- Ça aurait été de ma faute, allez, on m’aurait dit que je les avais allumés ! Alors j’ai mené ma petite enquête. J’en connaissais deux parmi mes agresseurs, ils venaient de temps en temps, je les ai suivis, ils m’ont mené chez les autres. Après, ça a été plus facile : vous savez, les hommes, quand il s’agit de se déshabiller, ils feraient n’importe quoi ! Je les ai rencontrés un par un en leur faisant croire que ça m’avait plu et que je voudrais bien recommencer. Un rendez-vous, et le tour est joué…

- Dites voir, Mademoiselle, les rencards en des lieux choisis de manière à former une spirale, c’était voulu ?

- Hé oui, une coquille, commissaire… Une coquille d’escargot !

dimanche 25 novembre 2012

Tant-BourrinUn vieux livre poussiéreux

Je le sais bien : je n'ai que trop remué la poussière du passé, trop provoqué ton ennui à essayer de faire revivre ce qui n'est plus, à vouloir rebâtir Resgaille, là-bas, entre Eauze et Gabarret, à rêver d'insuffler un souffle de chaleur là où ne règnent plus que délabrement et froide moisissure. Les portes du temps se sont à jamais refermées sur cette ruralité ancestrale, sur ces gestes millénaires rythmés par les saisons, sur cette terre oubliée où j'ai connu mes plus grands bonheurs d'enfant et l'on n'y peut plus rien.

Oh, je te devine bien qui souris à me voir m'enfoncer dans une vaine nostalgie, à imaginer que les souvenirs peuvent se transmettre par des mots. Non, rassure-toi, je continue à vivre ma vie sans marcher à reculons, à m'activer, à rire, à faire des projets, même englué dans la grisaille poussiéreuse de mes jours. Mais si j'ai un pied sur le bitume, Je conserve l'autre pied solidement planté dans la glaise, mon corps ici mais un peu de mon âme là-bas.

Cela te surprend, bien sûr, et tu as bien raison : malgré le magnétisme de ce coin de terre sur la moindre de mes cellules, je n'ai jamais vraiment été de là-bas et ne le serai jamais, moi, le cousin égaré de la ville, étranger à ce sol sur lequel tous mes ancêtres s'étaient escrimés, mais tout aussi étranger à la grand ville où je vivais en me sentant d'ailleurs. Finalement, tu sais, c'est dans l'anonymat de Paris qu'aujourd'hui j'ai trouvé un équilibre, étranger parmi des flots d'étrangers à cette ville ogresse qui n'est la terre nourricière de personne.

Dans cet univers minéral qui est aussi le tien, les hommes s'agitent dans une course effrénée, dans une vaine tentative de clamer leur caractère organique. Mais leurs yeux sont déjà morts de ne plus qu'entrapercevoir le soleil entre les buildings, leur sang se dessèche par manque d'humus. Et je suis des leurs désormais, tu sais.

Souvent, le soir, au coucher, après une journée de bruit et de stress, je songe à Resgaille, au silence seulement rompu par le craquement du bois ou le chant d'un grillon, j'imagine la cime des chênes ondulant sous la brise, je vois cette terre où plus personne ne veut vivre. Et je sais que cela ne sera plus. Toute chose est éphémère : les minutes, les journées, l'existence, les civilisations elles-mêmes. Nos vies ne sont rien d'autre qu'une infime tâche colorée sur une immense toile pointilliste : ma tâche sera juste dans des tons de gris et la tienne aussi, c'est tout.

Allez, c'est promis, je ne te rabâcherai plus ces vieilles histoires : il ne sera plus une fois Resgaille. Je vais laisser les morts, la Mamée, son Pierre et tous les autres, dormir tranquillement, là-bas, entre Eauze et Gabarret, refermer pour de bon ce vieux livre poussiéreux, puis j'irai le ranger soigneusement au grenier des souvenirs.

Oui : soigneusement.

Car qui sait ? Peut-être auras-tu un jour envie de le rouvrir pour savoir d'où tu viens, mon fils.

jeudi 28 juin 2012

Scout toujoursBernard Dimey

Mais qui était Bernard Dimey, ce poète parisien, amoureux de Montmartre, compagnon des ivrognes, des putes, des truands et des artistes, disparu si prématurément à l'âge de 50 ans en 1981, et à qui nous devons entre autres, deux des plus belles oeuvres de la chanson française ?

Tout d'abord Mémère , cette émouvante chanson taillées sur mesure pour un Michel Simon bouleversant jusqu'aux larmes, qui nous dépeint la complainte d'un vieux couple de Paname.

Et que dire de Syracuse , cette extraordinaire invitation aux voyages si merveilleusement interprétée par la douce voix d'Henry Salador, ce natif de Guyane qui mieux que tout autre pouvait imprimer dans les esprits cette nostalgie exotique si bien décrite dans la chanson.

Dimey écrivit pour les plus grands, d'Aznavour à Greco, en passant par Reggiani, Mouloudji et Montand.

L'interminable liste de ses poèmes serait trop longue à évoquer ici, citons simplement "le bestiaire de Paris", recueil de poèmes désespérés sur les bas-fonds parisiens.

Que rajouter de plus ? Rien, contentons nous simplement d'écouter ces deux chansons et disons nous que si le nom de Dimey est un peu tombé dans l'oubli, ces chansons elles, ont acquis une véritable immortalité. Même si les ruines de Syracuse disparaissaient dans un séisme, sa chanson survivra et continuera d'émouvoir les esprits, tant que la langue française existera. Dans cent ans encore, on aura la larmiche à l'oeil en écoutant la voix chevrotante de Michel Simon, et pour cela, je vous dis un grand MERCI Monsieur Dimey, vous nous avez beaucoup apporté.

samedi 16 juin 2012

Scout toujoursDieudonné de Cayenne

Dès mon arrivée à Saint Laurent du Maroni en 1986, le hasard fit que je cotoyai le dernier bagnard vivant encore en Guyane. L'homme était d'origine polonaise, il était particulièrement attachant et s'appelait Icek Baron. Il faisait office de bibliothécaire à l'hôpital de Saint Laurent, sa minuscule bibliothèque se situait entre le dispensaire où je travaillais et le service de médecine tous deux établis dans les anciens bâtiments du bagne. Nous nous retrouvions souvent lui et moi dans sa bibliothèque et j'avais plaisir à discuter avec lui, friand que j'étais de ses vieux souvenirs, lui qui avait vu et vécu l'enfer terrestre qu'était le bagne.

Un jour, je me risquai à lui poser la question fatidique : "qu'aviez vous fait pour vous retrouver au bagne ?". Il me répondit qu'étant engagé dans la légion étrangère, son officier l'ayant frappé, il avait tout simplement rendu le coup !! En insistant un peu, je finis par lui faire avouer que l'officier en question était mort des suites de ses blessures. Et j'appris plus tard que ce fameux coup rendu était en fait un coup de baïonnette bien appuyé... Non sans humour, il se plaisait à invoquer que si son geste avait été commis quelques mois plus tard, on lui aurait remis une médaille, eh oui l'officier était allemand et l'incident s'était passée en 1914 !

Un autre jour, il me confirma ce que je savais déjà, à savoir que Papillon n'était qu'un imposteur, qui s'était borné à se vanter des exploits de ses co-détenus, et surtout des exploits de l'un d'eux qui s'appelait Eugène Dieudonné. Ce nom m'interpela et je voulus en savoir plus. Alors Icek consentit à me raconter l'histoire de son camarade qui avait été emprisonné un an ou deux avant lui. Dieudonné était un anarchiste ami de Bonnot, le célèbre chef de bande qui terrorisa Paris dans les années 1912. A l'époque, un hold-up à main armée venait d'avoir eu lieu à la société générale de la rue Ordenner. La victime, un convoyeur de fonds, avait été blessée par arme à feu par un individu masqué qui était gaucher. Bonnot était anarchiste, et les brigades du Tigre qui n'y allaient pas par quatre chemins décidèrent d'arrêter tous les anarchistes sans faire de détail. Dieudonné était du nombre et fut reconnu par le convoyeur de fond, on se demande comment puisqu'il était masqué. Il cria son innocence, lui qui était droitier et qui avait un alibi (il était chez sa mère en banlieue parisienne au moment des faits). Il fut innocenté par Bonnot et par Callemin, tous deux étaient d'accord, c'était Garnier qui avait tiré. Néanmoins, devant l'insistance du témoin, Dieudonné fut condamné à mort puis gracié par Raymond Poincarré et sa peine commuée en travaux forcés. Au bagne, Il était devenu un détenu exemplaire malgré ses velléités à vouloir s'évader (1). Un jour qu'il était détenu aux îles du salut, il avait réussi une évasion spectaculaire, seul parmi les requins, sur un radeau fait de noix de coco et de troncs de bananiers, il avait regagné la rive. Malheureusement les courants ne furent pas favorables et il fut repris peu de temps après près de Kourou.

L'histoire commençait à me passionner et je pressai Icek de me raconter la suite. Il était tard, mais Icek se mit en tête de me raconter les deux dernières évasions de Dieudonné, celles qu'il connaissait le mieux. Une évasion, ça se prépare, pour cela, le plan est indispensable : le plan c'est une espèce de petit étui à cigare que les détenus cachent dans leur fion et qui contient une lame de couteau, une lime, et toutes leurs économies en billets roulés et en or. Les bagnards vendaient leur ration de pain pendant plusieurs années pour financer une évasion qui échouait la plupart du temps. Dieudonné avait organisé la sienne au village chinois de Cayenne qu'on appelle maintenant Chicago, près du lieu où je me suis fait agresser. Le rendez vous avec le piroguier avait eu lieu dans un bordel chinois. Dieudonné ne s'était pas laissé distraire par la pute chinoise qui cherchait à lui faire dépenser son argent, la "Belle", la vraie, celle qu'ils aiment plus que tout avait un autre charme que cette gourgandine un peu fanée. Rendez-vous est donc pris sur la crique Mahury avec quatre autres détenus. Les six hommes pagaient de nuit dans la pirogue et ne tardent pas à être enveloppés d'une nuée de moustiques qui ne les lâchera qu'à l'aurore. Quatre fois ils essaient de gagner la haute mer, mais quatre fois ils sont ramenés par le courant sur les sables mouvants. Enfin, après des efforts héroïques, ils finissent par réussir à franchir la barre, puis le piroguier hisse la voile, et voila nos lascars poussant des cris de joie en route vers la liberté. Le lendemain, ils essuient une tempête et la pirogue chavire. Chacun doit regagner la rive à la nage et traverser les sables mouvants. Pour avancer dans les sables mouvants sans s'enfoncer, il convient de marcher avec les jambes repliées et retirer ses jambes doucement, Icek me montre le geste. Malheureusement, l'un des évadés, moins adroit que les autres s'enfonce un peu plus à chaque pas et avance très lentement. La marée monte et le submerge peu à peu. On ne lui voit que les épaules, puis la tête, et lorsque seules les mains dépassent encore appelant au secours, le spectacle devient insoutenable. Dieudonné cherche à le secourir mais n'y parvient pas, c'est la fin. Arrivés à terre, le piroguier leur promet d'aller chercher de l'aide, mais les abandonne purement et simplement. Que faire, rentrer au bagne pour subir une peine de cachot, ou essayer de survivre en forêt, en proie aux chasseurs de prime, au risque d'y laisser sa peau? Deux d'entre eux préfèrent rentrer et Dieudonné reste seul avec un autre, vivant de cueillette et de pêche, dans une cabane au milieu de la forêt.

Mais il est très tard et je vois que Icek est fatigué. Je lui propose de remettre la suite de son récit au lendemain. Le soir suivant, il reprend son histoire : Dieudonné décide d'organiser une nouvelle évasion. Pour cela, il faut trouver d'autres détenus avec de l'argent. Ils ne tardent pas à se manifester et Dieudonné les enrôle avec un autre piroguier réputé meilleur marin que le précédent. Cette fois, la pirogue file vers l'est en longeant la côte. Après sept jours de mer, ils arrivent au Brésil. Enfin finie la peur d'être abattus comme des chiens par un chasseur de primes. Les quatre hommes débarquent et font 60 kilomètres à pied à travers la forêt amazonienne, rongés par le paludisme. L'un d'eux est blessé à la jambe, la gangrène s'installe, sa jambe empeste, mais à force d'efforts surhumains, ils arrivent tous quatre épuisés à Santa Isabel, vendent leurs dernières pépites pour se payer un billet de train jusqu'à Belem où ils arrivent en plein milieu du carnaval, portant leur camarade mourant sur leurs épaules et prétextant qu'il aurait bu un coup de trop pour n'être pas démasqués. Les voila inondés de confettis, baignés dans l'euphorie générale, jusqu'au domicile d'un ancien ami évadé, mais le blessé décède. Quelques mois après, les deux autres sont dénoncés, repris et extradés. Dieudonné reste libre. Il ne tarde pas à trouver du travail (il était ébéniste) et gagne honnêtement sa vie. Tellement honnêtement, que lorsqu'il est enfin reconnu à son tour, les brésiliens prennent sa défense et refusent de l'extrader. Il ne consentira à rentrer en France qu'à la condition que son procès soit révisé, ce qui finit par avoir lieu. Dieudonné sera réhabilité et retrouvera les sien pour mener une vie de famille paisible jusqu'à sa mort en 1944. Icek Baron vivra plus que centenaire jusqu'au début des années 90 : il n'avait pas revu la France depuis presque 80 ans.

Un jour, un médecin de Saint Laurent eut la néfaste idée de lui organiser un retour en terre natale, Icek ne reconnut pas son pays, il ne supporta pas le choc et décéda quelques jours après...



(1) Le bagne est "abominable", disait Dieudonné, et ses mœurs y sont abjectes, on y dépense toute son énergie à s'extraire du vice. La malaria et les mauvais traitement faisaient osciller le taux de mortalité entre 10 et 20% par an. Le bagne sera fermé en 1938.


Veuillez me pardonner mais j'ai écrit ce texte de mémoire, je ne suis pas certain de tous les détails.

mercredi 23 mai 2012

Scout toujoursLes Perses

Qui se souvient encore de cette colossale fresque grecque exhumée par Jean Prat pour l'ORTF en 1961 ? Cette tragédie d'Eschyle m'était apparue pour la première fois à l'époque où la télévision couleur n'existait pas. Les scènes n'en faisaient que plus vraies. Ces impressionnants personnages à la couleur de pierre étaient si authentiques qu'ils semblaient sortir tout droit des gigantesques bas-reliefs de Persépolis.

Quel spectacle grandiose pour l'enfant que j'étais. Plus tard, beaucoup plus tard, en contemplant les murs du palais de Darius, je crus revoir les perses de la frise bouger et se mettre à parler, ressuscitant ainsi les personnages de mon enfance. J'entendais la complainte des vieux gardiens du temple attendant le retour de leur armée vaincue.

Le mysticisme de Zarathoustra m'avait gagné. Aujourd'hui, en revoyant cette extraordinaire reconstitution théâtrale, je reste totalement ébloui. La pièce d'Eschyle n'a absolument pas vieilli et force mon admiration : avec quel respect et quelle empathie les grecs savaient traiter de leurs pires ennemis, quelle leçon pour nous. Tout ceci me plonge dans une inévitable réflexion : que serait devenu l'occident si Darius ou Xerxès avaient triomphé des grecs? Rome n'aurait probablement pas existé et nous non plus, qui sait, le monde aurait-il été meilleur? Rappelons que Bagdad alias Babylone, ancienne colonie Perse, deviendra plus tard le plus grand foyer culturel du monde... Mais qui étaient donc ces perses, imposants guerriers du désert à la barbe bouclée ? C'étaient ni plus ni moins les habitants de l'Iran, ce peuple dont nous ignorons tout mais que nous soupçonnons des pires intentions. Allah a pris la place d'Ahura-Mazda, et Mahommet celle de Zarathoustra. Les minarets ont remplacé les colonnes de Persépolis, mais les iraniens sont toujours perses et fiers de l'être. Alors, aujourd'hui, à l'heure où certains parlent de troisième guerre mondiale, comment ne pas s'interroger : devrons nous affronter à nouveau 25 siècles plus tard, les ennemis d'Athènes, ou aurons nous la sagesse du calife persan Haroun al Rachid* qui dès le huitième siècle, décida d'accepter la culture grecque et de la marier avec la culture orientale pour faire de Bagdad la capitale mondiale du multi-culturalisme ? Les "maisons de la sagesse" fondées par le calife, étaient d'impressionnantes bibliothèques où étaient traduits en arabe la quasi-totalité des ouvrages aussi bien littéraires, philosophiques, mathématiques, astronomiques, médicaux ou historiques, issus des différentes civilisations tant bien grecque que persane, hébraïque, indienne ou chinoise. Les savants venaient de toute part pour les consulter. Ce rayonnement dura plus de 4 siècles. Hélas, tout ceci disparut lors de l'invasion mongole de 1258...



* Le calife Haroun al Rachid, qui correspondait avec Charlemagne, est devenu plus tard un personnage des mille et une nuits (ne pas le confondre avec Haroun el Poussah qui en était un autre)

jeudi 17 mai 2012

Saoul-FifreSept ans

Sept ans de réflexion, comme a dit Tant-Bourrin... Il est certain que les blogbo-members n'ont pas pu abattre un tel boulot sans réfléchir un tant soit peu quoique Tant-Bourrin, en me faisant cette suggestion, "réfléchissait" surtout à la scène où Marilyn Monroe se rafraichit la touffe sur une bouche ... d'aération.

On dit sept ans de malheur , aussi, et c'est vrai qu'on a bien contribué à "casser la glace" entre nous et plein de commentateurs, mais le malheur en résultant, je vois pas. Encore une superstition sans fondements.

Sept ans ! C'est embarrassant, pour rester dans une tonalité polie !

Dont cinq de sarkozisme, je tiens à le souligner !

Sept ans, c'est aussi "l'age de raison" et là-dessus j'abonde : je pense que nous avons été raisonnables en nous débarrassant de Pisse-Partout. D'ailleurs, nos pôtes allemands ont émis des velléités de virer Merkel aussi, dans la foulée. On va peut-être finalement réussir à supprimer les dispositions dévastatrices du traité de Maastricht, ainsi que la loi "Pompidou" dont parlait le scout , remettre en route la planche à billets et cesser d'engraisser les banquiers avec nos sous ?

Bon on aurait pu aussi vous déclamer Les poètes de sept ans mais ça aurait pu faire croire qu'on se la pète alors que vraiment, la main sur le cœur et la bouche en cul de poule, ça ne nous ressemble pas du tout !

Un peu Andiamo, peut-être, mais juste un poil, alors.... Non l'ancien, pas taper, pas taper !

Vous avez vu Sept ans au Tibet , bien sûr ? Un bien beau film mais trop froid pour nous. Je vous jure que sept ans au Teebee, c'est nettement plus chaleureux !

Bon ben voilà : après avoir patienté pendant sept ans, Blogborygmes va enfin connaitre un vrai succès, avec des abonnés en veux-tu, en voilà, des fans, des addictifs. La gloire, quoi !

Comme Tintin et Milou.

Ben oui : Blogborygmes va plaire aux jeunes qui aiment les blogs de 7 à 77 ans !

On a plus qu'à tenir le coup.

Je vous le dis : c'est pas gagné....

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