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lundi 18 juillet 2005

Saoul-FifreMonoblog

Tant-Bourrin est parti en vacances sans me préciser du tout s'il avait l'intention de nous poster des cartes postales virtuelles depuis ses diverses destinations. Ce serait techniquement faisable, mais peut-être compte-t-il se mettre en vacance de job ET de blog ? Nous verrons bien.

En attendant, je suis le seul maître à blordg et je vais faire à nouveau "ma Geneviève". Certes, l'expression est de moins en moins usitée au fur et à mesure que les témoins oculaires directs de la grande époque où flamboyaient les Analectes quittent un à un ce bas monde, mais il existe encore en province des Elisabeth's fanclubs remplis de petites vieilles et de petits vieux rigolards (mais toujours élégants) qui se pissent dessus de rire en évoquant la réponse à la demande en mariage de Jérome ou bien les inénarrables tests d'Élisabethabilité . De vrais drogués qui connaissent Le Grand Œuvre de Monsieur l'Administrateur par cœur. L'un d'entre eux lance un vers :

- << Elisabeth, tu as l'air rancunière, tu ne sais pas ce qu'est le pardon ? >>

... et le chœur entier de hurler à l'unisson la suite du poème :

- << C'EST L'UN DES RARES CONCEPTS DONT LA COMPRÉHENSION M'ÉCHAPPE !!! >>

Et tous de se taper mutuellement sur les cuisses...

Ha, toute une époque ! Mais même s'ils n'ont pas connu en temps réel le suspense, le stress, les mains qui tremblent dans l'attente du billet inédit, les petits djeuns peuvent en avoir une idée, tout est enregistré, accessible, avec cependant un bémol de taille, à jouer "cruellissimo" : les commentaires sont bloqués.

La porte est en chêne massif, bardée de fer forgé. Pas de serrure, pas de charnières. Ni sonnette, ni cloche, ni guichet, ni œilleton. Un simple bristol blanc punaisé, avec écrit :

Fermé pour relâche. Le rêve se termine. Ici commence la vraie vie.

lundi 4 juillet 2005

Tant-BourrinLa bêtise au front de taureau

Nous vivons décidément des temps extraordinaires. En témoigne cette info publiée dans la presse ce week-end.

Voilà, un nouveau pas est franchi dans l'avancée de l'insondable connerie humaine : une femme a vendu son front comme espace publicitaire, sous forme de tatouage, au plus offrant, et ce pour avoir les moyens d'inscrire son fils dans un établissement scolaire privé.

Pris comme ça, à la légère, c'est juste une brève à classer dans la rubrique "insolite", une petite info qui attire l'oeil, fait sourire et alimente les discussions autour de la machine à café le lendemain.

Mais à bien y réfléchir, un léger frisson d'effroi me parcourt l'échine devant ce condensé de la crétinerie rampante.

Trois réflexions me viennent en tête...

Tout d'abord, même si cela peut paraître politiquement incorrect (choeur des vierges : "pauvre femme, réduite à vendre son front pour offrir les meilleures chances à son fils !"), je pense que la mère de famille en question souffre vraisemblablement d'un déficit neuronal dans la zone du cortex cérébral abritant la jugeote, la dignité humaine et l'estime de soi. Eût-elle été réduite aux dernières extrêmités pour nourrir ou loger sa famille, j'aurais pu comprendre (sans l'approuver) la démarche. Mais là... Un front marqué à vie pour payer deux à trois ans d'école privée à son fils, ça me dépasse.

Ensuite, pour qu'une transaction aussi infâme puisse se faire, il faut aussi un acheteur. Cynique. Prêt à tout. Vomitif à souhait. GoldenPalace.com est de cette trempe : quand on se nourrit de l'exploitation de la misère humaine en faisant miroiter des gains rapides par le jeu, on peut tout aussi bien chier sur la tête (ou plus précisément sur le front) des gens. Ce qu'ils ont fait.

Enfin, dernier point : si nos amis de GoldenPalace.com font ça, c'est bien qu'ils espèrent avoir en retour des retombées positives en terme de fréquentation de leur site de merde. Imaginer que quiconque, à l'écoute de cette info ou croisant un être humain tatoué sur le front, puisse être séduit par une telle forme de publicité et avoir envie d'aller jouer du fric en ligne sur RottenPalace me paraît inconcevable. Mais hélas, inconcevable n'est pas moderne...

Alors donc, puisque le futur serait aux panneaux publicitaires humains, allons-y gaiement : que les plus beaux fleurons de l'industrie française se lancent eux aussi dans le créneau !

Et demain peut-être aurez-vous, partageant pour la première fois de tendres moments avec une jeune femme, la surprise de découvrir, tatoué sur son sein : "l'Aréole, parce que je le vaux bien !". Et continuant à parcourir son corps, vous lirez "AirWick, une bonne claque aux mauvaises odeurs" tout au bas de ses reins. Et si c'est avec un monsieur, vous lirez peut-être, lorsqu'il sera en de bonnes dispositions, tatoué sur son membre viril, "quand je fais de la purée Mousseline, je suis sûr que tout le monde en reprend"... Que de bonheur à venir !

Et pourquoi s'arrêter là ? Si la chose devient monnaie courante, les cours du tatouage de pub vont s'effondrer, même l'épicier du coin pourra s'offrir un front. Et peut-être même pire : avec un marché de l'emploi toujours aussi désastreux, pourquoi un employeur n'imposerait-il pas demain à ses employés de prouver leur motivation et leur attachement à l'entreprise en se faisant tatouer le nom de celle-ci sur leur front ?

Je vais certes sûrement un peu vite en besogne, mais qui aurait cru il y a quelques années qu'un jour des mères de famille donneraient, contre rémunération, une marque commerciale comme prénom à leur nouveau-né ? Ou se feraient tatouer ainsi le front ?

Et que se passera-t-il quand, malgré ce sacrifice, l'employé se retrouvera viré comme un malpropre parce que les actionnaires exigent du 10% de rentabilité ?

Une seule chose me console : celui-ci pourra alors toujours se faire tatouer, juste en dessous du nom de son ex-employeur, "...c'est de la merde !"

Ça n'arrangera rien du point de vue esthétique, mais au moins, ça le défoulera !

vendredi 1 juillet 2005

Tant-BourrinUne page de pub

Nombreux sont les sites et les blogs, surtout ceux issus des formules clés en main, truffés plus ou moins insidieusement de publicités, elles-mêmes plus ou moins ciblées en fonction des billets. Vous vous documentez sur les Pyrénées ? Paf ! On vous balance une pub pour Canigou ! Vous vous délectez d'un billet comparatif sur les meilleures bières du monde ? Paf ! Une pub pour les Pompes Funèbres Générales ! Vous lisez un billet sur le noble labeur des pêcheurs en haute mer ? Paf ! On vous balance une pub pour le Figaro, c'est-à-dire de quoi emballer le poisson (j'ai obtenu le même résultat en consultant un billet sur les troubles intestinaux, je me demande bien pourquoi ?)...

Alors, puisque tout est publicité, moi j'ai pris la liberté de faire ma propre publicité. Mais contrairement à Jacques Dutronc, ce ne sera pas pour moi-même, mais pour Olivier Marais, un jeune auteur-compositeur-interprète pétri de talent qui vient de sortir un nouvel album autoproduit.



Pour vous mettre tout de suite à l'aise, je tiens à préciser que :

- je ne suis pas le producteur de l'album,

- je n'ai rien composé, ni écrit, ni chanté sur cet album,

- je ne touche pas un centime sur les ventes de l'album,

- je ne touche pas un centime non plus pour cette publicité éhontée,

- Olivier n'est pas mon frère, mon père, mon fils ou mon cousin. Ce n'est pas non plus le fils de mon boss. Ce n'est pas non plus ma soeur, ma mère, ma fille ou ma cousine qui aurait changé de sexe en cours de route,

- bref, cette publicité est avant tout un coup de coeur...

Pour tout vous dire, je connais Olivier depuis 1999, après être tombé par hasard sur son site, avoir écouté trois extraits de chansons enregistrées à l'époque dans des conditions techniques apocalyptiques (son pourri, paroles quasi inaudibles) et avoir malgré tout ressenti une émotion intense : a star was born, pourvu que les little pigs ne le eatent pas en cours de raod !

Depuis, Olivier a continué à travailler ses textes, ses musiques, écrit des dizaines et des dizaines de chansons, sorti un premier disque autoproduit en 2000, encore un peu balbutiant, fait de la scène, beaucoup de scène, et résultat : il a sorti il y a une semaine "Nous les garçons", un nouvel album, son premier chef d'oeuvre absolu !

Que dire ? Olivier est le meilleur pour vous pondre une mélodie qui vous envoie un hameçon dans l'oreille et vous grappe le cerveau et l'âme en moins de deux, le meilleur pour tisser dans ses textes, à partir des petits riens du quotidien, un univers tendre et plein d'humour. Le meilleur, vous dis-je, et il faut vous dépêcher de le découvrir avant qu'il ne remplisse le Stade de France.

Qu'est-ce que vous faites encore sur ce blog ? Allez vite le découvrir, screugneugneu !

dimanche 26 juin 2005

Saoul-FifrePierre, feuille, ciseaux...

Hier, on s'est tapé un délire avec mon second fils (16 ans) : on jouait à "pierre, feuille, ciseaux". Le jeu de pauvre par excellence, le jeu qu'on peut jouer à poils sur une île déserte, le jeu qui ne rapporte pas un centime aux boîtes internationales de vidéo games, le jeu "plus politiquement correct, tu meurs", puisque peuvent y jouer les sourds, les muets, les aveugles (si si), les culs-de-jatte et les manchots (il suffit d'une main). Ostracisme, où es-tu ? Avec "pierre, feuille, ciseaux", personne n'est laissé sur le bas-côté de l'autoroute de la joie. Et que celui qui ne sait pas y jouer change de blog immédiatement : t'entends, Gates Junior-Junior ? Casse-toi d'ici ! J'aime bien aussi le côté "intuition prémonitoire" du jeu car même après 7 ans de hautes études en biologie micromoléculaire, il est très dur de s'empêcher d'essayer de "deviner" ce que l'autre va sortir...

Alors ya mon grand dadais qui sort une pierre (poing fermé) de derrière son dos. Moi aussi. En principe, ya "bataille", et on recommence. Ben, là, histoire de pimenter les règles et de renouveler un peu un truc ringard qui a dû être inventé par les chasseurs de mammouths des grottes des Eyzies pour se désennuyer un peu durant un hiver particulièrement longuet, que fais-je ? Je dis :

- << tracto-pelle ! Le tracto charge la pierre et j'ai gagné et on ne répond pas à son père ! >>

Mon fils, qui a oublié d'être lent de la comprenette, gamberge 3 secondes et dit, en faisant une conque avec sa main :

- << Bon, alors moi, je dis "ravin", le tracto tombe dans le ravin et j'ai gagné...! >>

Et le copain de mon fils, qui nous regardait, il met sa main bien à plat, paume vers le bas, et il dit :

- << Moi je dis "pont", le pont permet de traverser le ravin mais peut être démoli par le tracto, et j'ai gagné !!!

On s'est mis à rigoler comme des bossus (qui, eux aussi, ont le droit de jouer à ce jeu décidément très "open minded") et on a continué à jouer à "tracto, ravin, pont" pendant toute l'après-midi comme des débiles profonds, sans se soucier des risques épileptiques (voir notice ci-jointe).

Je vous quitte pour vite aller le déposer à la Propriété Industrielle. Va y avoir du procès dans l'air !!

jeudi 2 juin 2005

Saoul-FifreAs-tu ouï le Non ?

Je vais quand même dire 2 mots sur le résultat du référendum car je suis très étonné des réactions de beaucoup de blogueurs dans la tonalité j'ai honte ou bien et merde

Autant je comprends que pendant la campagne, on... fasse campagne, autant une fois la voix de la France exprimée, j'aimerais que les français ferment leur grande gueule. C'est ce que Chirac a fait et il me semble que c'est la seule chose à faire quand on est un tant soit peu attaché à la démocratie.

Bon, les blogs sont des espaces de dialogues libres qu'il n'est bien sûr pas question de censurer et nous pouvons continuer à en parler, mais le style "les français sont tous des cons : ils n'ont pas voté comme moi" me met en joie au premier rabord mais me fout les boules au deuxième.

Il y a quand même une vraie vague populaire non manipulée dans ce vote : tous les tenants du oui "tenaient" et avaient accès aux médias . La pub pour le oui a battu son plein, ce ne sont pas des racontars, ça a été mesuré, il y a eu un temps de parole supérieur pour les hérauts du oui. Ça ne me choque en rien, le monde est ce qu'il est et le pouvoir c'est ça : avoir les rênes d'organes décisionnaires et maîtriser les médias (blogs à succès compris).

Mais, messieurs les puissants, un peu de pudeur : quand on a les leviers, les points d'appuis et qu'on n'arrive pas à remuer la pierre, on la joue "profil bas"...

Et un peu de sens esthétique aussi, par pitié ? C'est beau, un peuple qui s'exprime. C'est un peu cacophonique vu que c'est une addition d'individus, mais un peuple qui, pour une fois, résiste à la publicité ? Fait preuve d'esprit critique ?

Lavasse publicité lance une grande campagne, elle inonde de spots hachement convaincants la télé en prime time, la radio, Libé, Le Monde, le Figaro etc... Et les dirigeants se rendent dans la salle aux ordinateurs pour voir les résultats obtenus : les ventes du produit baissent dans la France entière !!! C'est pas beau ça ?

Alors, juste pour le fun, vous pouvez aller là, ou vous trouverez un billet mignon tout plein indécrottables Et bravo Psyché pour tout le blog !

et, de là, vous pouvez aller là, lire un billet ironique de Michel Onfray

et puis aussi une transcription d'une émission de Laurent Ruquier très éclairante

samedi 28 mai 2005

Saoul-FifreMistral Cognant

J'ai posé le pied sur la Provence pour la première fois il y a de ça 21 ans et j'y suis resté collé. Pour moi, le négropède errant sans racines, le gars aux vingt déménagements pour qui toute terre est une plaque chauffée au rouge à mes pieds toujours sautillants, elle me fit office de Terre Promise, en attendant mieux, car elle n'est pas toujours là où on croit la trouver c);^) . Vous connaissez la chanson de Dj'awny Ali Dey, quand même ? Ça donne quelque chose dans ce genre :

La terre crame sous mes pieds
et je pue toujours la corne brûlée
et je m'essouffle après l'Amour
sans jamais jamais le rattraper
La terre promise n'est pas tenue
la commande pas toujours livrée
Je vais où mes chansons rapportent
Je ne fais rien qu'amasser...

Je me présentai donc à la douane de l'Empire du soleil et du Royaume des vents par Amour : je venais rendre visite à mon amie, rencontrée en Corrèze mais habitante et native d'ici. D'emblée, je trouvai les droits de douane exorbitants. Le royaume était sans conteste venté, il faisait un Mistral à "desbana li bioù" (décorner les bœufs), nous étions en plein hiver et il faisait vraiment un froid de canard (encore ! Thomas Fersen, c'était le mot "parapluie" qu'il glissait dans chacune de ses chansons et la Nothomb, c'est "pneu", d'ailleurs, elle me gonfle...). Et j'étais là, à me racorquir les nouilles, en Arles, au bord de la "113", pile dans l'axe du canal rhodanien et, croyez-moi si vous voulez, j'éprouvais une extrême difficulté à garder mon bras tendu à l'horizontale et mon pouce à la verticale, pour faire mon stop. Je vacillais, je m'arc-boutais contre les rafales, n'y voyant goutte, clignotant des paupières sur mes yeux pleins de larmes et je me disais, frigorifié : "quel sens de l'accueil, dans cette région !" quand une bonne âme, un "essetrangé", sans doute, s'arrêta pour me prendre. Toujours incroyable, mais vrai (car provençal et impossible ne sont pas français), entre Arles et Salon (50 bornes) nous avons doublé 2 voitures avec caravane, et une berline normale, RENVERSÉES par le vent ! Après chacune, mon bienfaiteur levait le pied et nous sommes arrivés à bon port à 30 km / h. C'était ça, le Sud ?!?!

La maison de mon amie n'avait qu'une cheminée comme chauffage et nous restions serrés devant, à écouter le souffle inquiétant des bourrasques, les tuiles exploser au sol, les arbres fouetter l'air... En panne de combustible, nous avons été obligés de sortir couper des branches mortes à la scie. De beaux arbres bien vivants avaient été déracinés. Je suis parti, revenu, reparti, venu à nouveau pour finalement rester. Nous voulions "d'la marmaille", comme chante Linda Lemay, et nous en avons eu. J'ai trouvé un travail sympa, en plein air. Aucune ironie là dessous, j'aimais vraiment mon métier mais rien n'est parfait. Je montais aux poteaux de téléphone, j'en plantais, je tirais des câbles... Mon patron (un malin) avait inscrit sa petite boîte privée à une convention collective de l'industrie qui ne prévoyait pas "les intempéries". Nous avions donc le choix entre travailler sous la neige, les grêlons, la pluie... ou bien perdre le salaire de la journée. Nous avons vécu deux hivers rigoureux : 85 et 86. Toute la partie aérienne des oliviers a gelé, comme pendant le terrible hiver 56, popularisé par l'abbé Pierre. Il n'y a pas eu de production d'huile d'olives pendant plusieurs années. Ni de la vierge, ni de la deuxième pression super chaude. Les pro-vent sots, les vré de vré, me disaient : "ici, le froid est sain et sec". D'abord, c'est une contrepèterie belge. Et ensuite, quand le mercure descend au niveau - 17 du parking souterrain, et que le Mistral prend son élan à Lyon, qu'il accélère et que les freins pètent dans la descente... Ayayaye ! Il traverse les manteaux en cuir, les gros pulls, il vrille, il tord, il mord, il pince, il perce, il serre... Comme vous attrapez une bonne bronco-pneumo-grippo-tachycardie (avec hypothermie persistante), ça vous refroidit un peu quant au côté sain du froid sec. Avec le climat océanique humide bordelais, j'étais enrhumé, point-barre. Mais le pire restait à vivre. Car, sauf événements climatiques exceptionnels, je vous accorde que la Provence n'est pas réputée pour ses basses températures. J'ai connu en Normandie de bonnes grosses caillantes équivalentes, mais, je le répète, sans ce côté "inquisiteur sadique" bien propre au Mistral.

Le pire est au dessus de nos têtes, comme un dard. Ne dit-on pas "darder ses rayons" ? Et "vespéraux", si on a sa carte de Pouète à jour de cotisations ? Et "zénithaux", s'il est midi au soleil et qu'on fait la journée continue ? Ho le mal de tronche ! J'ai l'impression que ma cervelle est en train de griller. Et moi qui la préfère "bleue", avec du persil ? Et le Mistral qui se lève ! Il pourrait nous rafraîchir, comme d'habitude, ce "marque-mal" ? Il est brûlant. On dirait le simoun. Comment peut-on supporter des chaleurs pareilles ? On peut pas. Le soir, j'avais 41° de fièvre. J'étais fébrilige, comme on dit ici. Alors ya la solution traditionnelle : encore aujourd'hui, on va se faire "tirer le soleil". Ha, le travail manque pas. La demande est supérieure à l'offre. Tout le monde connaît Unetelle ou l'autre, là, qui a reçu "le Don", de sa mère ou d'un sorcier yaqui-yaqu'a. Elle vous fait pencher la tête en arrière, vous pose un verre plein d'eau sur le front et récite une prière en Latin dessus (il parait que ça marche aussi avec "tu me fais tourner la tête", d'Edith Piaf). L'eau se met à bouillir dans le verre, elle la jette et en rajoute de la froide jusqu'à ce que ça ne bouille plus. Là, elle y met cinq doses de pastis, deux glaçons, un peu d'eau (pas trop, malheureuse, tu vas me le noyer et il va falloir recommencer du début). Elle te le fait boire cul sec (quand c'est sec, c'est sain) et tu es guéri. En tout cas, tu en est persuadé.

Avec le temps, je me suis endurci aux météores extrêmes de la Provence, mais il m'a fallu quand même plusieurs années. Pour la chaleur, je ne m'y suis pas encore fait, mais disons que j'ai pris le rythme officiel. Il y a un hymne officiel, La Coupo Santo, chanson à boire écrite par Frédéri Mistraou, qui parle de verres de vin remplis à ras bord et qui se chante en chœur à la fin et au début de tous les repas officiels... Et à la sortie de la messe. Et quand le maire arrive. Et il y a un rythme officiel : on arrête de travailler quand ça commence à être intenable et on reprend quand ça recommence à être supportable. A part qu'on s'arrête de plus en plus tôt et qu'on redémarre de plus en plus tard pour s'adapter à un tout petit problème mondial dont vous avez peut être entendu parler : le réchauffement de la planète. Je sais pas chez vous, mais nous, on est en plein dedans : les deux dernières années détiennent le record de pluviométrie basse. On a reçu 200 mm d'eau / an alors que la moyenne annuelle sur 100 ans est de 650 mm. Ça craint. En température, dans la liste des 6 années les plus chaudes du siècle, on trouve les 5 dernières années. Je ne suis pas statisticien, mais il me semble difficile de s'en sortir avec une pirouette genre "c'est un cycle". Comme on sait que notre société industrielle produit du chaud, des gaz qui grignotent la couche d'ozone (notre protection contre les ultraviolets et donc contre les cancers de la peau) du gaz carbonique, de la pollution (qui forme une couche qui augmente l'effet de serre), moi, le scientifique qui me dit "il va bientôt y avoir une nouvelle période de froid", je le regarde bizarrement.

Je trouve que le climat d'ici est très dur. Je trouve qu'il est de pire en pire et nous flippons même méchamment, car qui dit sécheresse insistante dit incendies récurrents... Nous n'avons jamais compris les hordes déferlantes qui venaient envahir le littoral : l'eau est trop chaude, les parkings sont à Pétahouchnock, la bouffe est dégueulasse, les prix scandaleux... Quel plaisir autre que masochiste y a t'il à faire des milliers de kilomètres pour étendre sa serviette sur du gravier ou des galets (côte d'azur) à 10 centimètres de son voisin, sur une plage pleine comme un œuf, alors qu'à l'intérieur des terres, le séjour avec piscine, chaise longue, gazon, arbre, et personne autour vaut 2 fois moins cher ? Pourquoi des vikings à la peau fragile viennent-ils se faire revenir la couenne à l'huile solaire et s'appliquent-ils à eux-mêmes la recette du homard thermidor ? Pourquoi cette fascination pour la mer alors qu'un petit ruisseau ombragé est tellement plus rafraîchissant et dépaysant ? Autant de questions toujours sans réponses en l'état actuel des recherches.

En tout cas, nous, dès que le cagnard devient trop virulent, on s'en va chez les nordistes. Les bouchons, on sait ce que c'est : on les croise !

jeudi 26 mai 2005

Tant-BourrinCamisoles

Un homme, jeune, un ado presque encore. Qui bouge vaguement les lèvres, comme pour parler, mais aucun son ne sort de sa bouche. Il oscille doucement. D'avant en arrière. D'arrière en avant. Sans relâche. Sans fin. Il tangue, le regard comme perdu, étranger à tout ce qui l'entoure.

Un autre homme, un peu plus loin. Il ne suit pas le flux incessant de la foule sur le trottoir. Sa démarche est hésitante, il part à droite, dévie sur la gauche, s'arrête, puis refait quelques pas maladroits. Les passants sont gênés, l'évitent, sa démarche erratique les perturbent, il ne les voit pas, il parle dans le vide.

De l'autre côté du mur, une vieille femme, sur un fauteuil, immobile, impavide, l'oeil vide et hagard, la lippe pendante. Elle reste là des heures durant, aucun souffle de vie ne semble plus agiter son corps, aucune étincelle ne subsiste dans son regard.


Triste spectacle me direz-vous : un autiste, un ivrogne et une grabataire. Dans quel sombre asile, quel triste hôpital sommes-nous là ?

Aucun : le jeune homme est assis sur un banc, un baladeur vissé sur les oreilles, l'autre homme est pendu à son téléphone portable, la vieille dame regarde la télévision.

Une vieille blague de cours d'école me remonte à l'esprit : celle de ce fou qui s'agrippe au mur d'enceinte de son asile, passe la tête au-dessus du faîte et, voyant des dizaines et des dizaines de personnes déambuler sur le trottoir, finit par demander à l'une d'elles : "vous êtes nombreux là-dedans ?"

Aujourd'hui, il ne m'étonnerait guère que le passant réponde : "oui, et chacun de nous a sa propre camisole."

Et moi ? Quelle est ma camisole ? Ne commencerait-elle pas à ressembler à ça ? ;~)

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