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samedi 28 mai 2005

Saoul-FifreMistral Cognant

J'ai posé le pied sur la Provence pour la première fois il y a de ça 21 ans et j'y suis resté collé. Pour moi, le négropède errant sans racines, le gars aux vingt déménagements pour qui toute terre est une plaque chauffée au rouge à mes pieds toujours sautillants, elle me fit office de Terre Promise, en attendant mieux, car elle n'est pas toujours là où on croit la trouver c);^) . Vous connaissez la chanson de Dj'awny Ali Dey, quand même ? Ça donne quelque chose dans ce genre :

La terre crame sous mes pieds
et je pue toujours la corne brûlée
et je m'essouffle après l'Amour
sans jamais jamais le rattraper
La terre promise n'est pas tenue
la commande pas toujours livrée
Je vais où mes chansons rapportent
Je ne fais rien qu'amasser...

Je me présentai donc à la douane de l'Empire du soleil et du Royaume des vents par Amour : je venais rendre visite à mon amie, rencontrée en Corrèze mais habitante et native d'ici. D'emblée, je trouvai les droits de douane exorbitants. Le royaume était sans conteste venté, il faisait un Mistral à "desbana li bioù" (décorner les bœufs), nous étions en plein hiver et il faisait vraiment un froid de canard (encore ! Thomas Fersen, c'était le mot "parapluie" qu'il glissait dans chacune de ses chansons et la Nothomb, c'est "pneu", d'ailleurs, elle me gonfle...). Et j'étais là, à me racorquir les nouilles, en Arles, au bord de la "113", pile dans l'axe du canal rhodanien et, croyez-moi si vous voulez, j'éprouvais une extrême difficulté à garder mon bras tendu à l'horizontale et mon pouce à la verticale, pour faire mon stop. Je vacillais, je m'arc-boutais contre les rafales, n'y voyant goutte, clignotant des paupières sur mes yeux pleins de larmes et je me disais, frigorifié : "quel sens de l'accueil, dans cette région !" quand une bonne âme, un "essetrangé", sans doute, s'arrêta pour me prendre. Toujours incroyable, mais vrai (car provençal et impossible ne sont pas français), entre Arles et Salon (50 bornes) nous avons doublé 2 voitures avec caravane, et une berline normale, RENVERSÉES par le vent ! Après chacune, mon bienfaiteur levait le pied et nous sommes arrivés à bon port à 30 km / h. C'était ça, le Sud ?!?!

La maison de mon amie n'avait qu'une cheminée comme chauffage et nous restions serrés devant, à écouter le souffle inquiétant des bourrasques, les tuiles exploser au sol, les arbres fouetter l'air... En panne de combustible, nous avons été obligés de sortir couper des branches mortes à la scie. De beaux arbres bien vivants avaient été déracinés. Je suis parti, revenu, reparti, venu à nouveau pour finalement rester. Nous voulions "d'la marmaille", comme chante Linda Lemay, et nous en avons eu. J'ai trouvé un travail sympa, en plein air. Aucune ironie là dessous, j'aimais vraiment mon métier mais rien n'est parfait. Je montais aux poteaux de téléphone, j'en plantais, je tirais des câbles... Mon patron (un malin) avait inscrit sa petite boîte privée à une convention collective de l'industrie qui ne prévoyait pas "les intempéries". Nous avions donc le choix entre travailler sous la neige, les grêlons, la pluie... ou bien perdre le salaire de la journée. Nous avons vécu deux hivers rigoureux : 85 et 86. Toute la partie aérienne des oliviers a gelé, comme pendant le terrible hiver 56, popularisé par l'abbé Pierre. Il n'y a pas eu de production d'huile d'olives pendant plusieurs années. Ni de la vierge, ni de la deuxième pression super chaude. Les pro-vent sots, les vré de vré, me disaient : "ici, le froid est sain et sec". D'abord, c'est une contrepèterie belge. Et ensuite, quand le mercure descend au niveau - 17 du parking souterrain, et que le Mistral prend son élan à Lyon, qu'il accélère et que les freins pètent dans la descente... Ayayaye ! Il traverse les manteaux en cuir, les gros pulls, il vrille, il tord, il mord, il pince, il perce, il serre... Comme vous attrapez une bonne bronco-pneumo-grippo-tachycardie (avec hypothermie persistante), ça vous refroidit un peu quant au côté sain du froid sec. Avec le climat océanique humide bordelais, j'étais enrhumé, point-barre. Mais le pire restait à vivre. Car, sauf événements climatiques exceptionnels, je vous accorde que la Provence n'est pas réputée pour ses basses températures. J'ai connu en Normandie de bonnes grosses caillantes équivalentes, mais, je le répète, sans ce côté "inquisiteur sadique" bien propre au Mistral.

Le pire est au dessus de nos têtes, comme un dard. Ne dit-on pas "darder ses rayons" ? Et "vespéraux", si on a sa carte de Pouète à jour de cotisations ? Et "zénithaux", s'il est midi au soleil et qu'on fait la journée continue ? Ho le mal de tronche ! J'ai l'impression que ma cervelle est en train de griller. Et moi qui la préfère "bleue", avec du persil ? Et le Mistral qui se lève ! Il pourrait nous rafraîchir, comme d'habitude, ce "marque-mal" ? Il est brûlant. On dirait le simoun. Comment peut-on supporter des chaleurs pareilles ? On peut pas. Le soir, j'avais 41° de fièvre. J'étais fébrilige, comme on dit ici. Alors ya la solution traditionnelle : encore aujourd'hui, on va se faire "tirer le soleil". Ha, le travail manque pas. La demande est supérieure à l'offre. Tout le monde connaît Unetelle ou l'autre, là, qui a reçu "le Don", de sa mère ou d'un sorcier yaqui-yaqu'a. Elle vous fait pencher la tête en arrière, vous pose un verre plein d'eau sur le front et récite une prière en Latin dessus (il parait que ça marche aussi avec "tu me fais tourner la tête", d'Edith Piaf). L'eau se met à bouillir dans le verre, elle la jette et en rajoute de la froide jusqu'à ce que ça ne bouille plus. Là, elle y met cinq doses de pastis, deux glaçons, un peu d'eau (pas trop, malheureuse, tu vas me le noyer et il va falloir recommencer du début). Elle te le fait boire cul sec (quand c'est sec, c'est sain) et tu es guéri. En tout cas, tu en est persuadé.

Avec le temps, je me suis endurci aux météores extrêmes de la Provence, mais il m'a fallu quand même plusieurs années. Pour la chaleur, je ne m'y suis pas encore fait, mais disons que j'ai pris le rythme officiel. Il y a un hymne officiel, La Coupo Santo, chanson à boire écrite par Frédéri Mistraou, qui parle de verres de vin remplis à ras bord et qui se chante en chœur à la fin et au début de tous les repas officiels... Et à la sortie de la messe. Et quand le maire arrive. Et il y a un rythme officiel : on arrête de travailler quand ça commence à être intenable et on reprend quand ça recommence à être supportable. A part qu'on s'arrête de plus en plus tôt et qu'on redémarre de plus en plus tard pour s'adapter à un tout petit problème mondial dont vous avez peut être entendu parler : le réchauffement de la planète. Je sais pas chez vous, mais nous, on est en plein dedans : les deux dernières années détiennent le record de pluviométrie basse. On a reçu 200 mm d'eau / an alors que la moyenne annuelle sur 100 ans est de 650 mm. Ça craint. En température, dans la liste des 6 années les plus chaudes du siècle, on trouve les 5 dernières années. Je ne suis pas statisticien, mais il me semble difficile de s'en sortir avec une pirouette genre "c'est un cycle". Comme on sait que notre société industrielle produit du chaud, des gaz qui grignotent la couche d'ozone (notre protection contre les ultraviolets et donc contre les cancers de la peau) du gaz carbonique, de la pollution (qui forme une couche qui augmente l'effet de serre), moi, le scientifique qui me dit "il va bientôt y avoir une nouvelle période de froid", je le regarde bizarrement.

Je trouve que le climat d'ici est très dur. Je trouve qu'il est de pire en pire et nous flippons même méchamment, car qui dit sécheresse insistante dit incendies récurrents... Nous n'avons jamais compris les hordes déferlantes qui venaient envahir le littoral : l'eau est trop chaude, les parkings sont à Pétahouchnock, la bouffe est dégueulasse, les prix scandaleux... Quel plaisir autre que masochiste y a t'il à faire des milliers de kilomètres pour étendre sa serviette sur du gravier ou des galets (côte d'azur) à 10 centimètres de son voisin, sur une plage pleine comme un œuf, alors qu'à l'intérieur des terres, le séjour avec piscine, chaise longue, gazon, arbre, et personne autour vaut 2 fois moins cher ? Pourquoi des vikings à la peau fragile viennent-ils se faire revenir la couenne à l'huile solaire et s'appliquent-ils à eux-mêmes la recette du homard thermidor ? Pourquoi cette fascination pour la mer alors qu'un petit ruisseau ombragé est tellement plus rafraîchissant et dépaysant ? Autant de questions toujours sans réponses en l'état actuel des recherches.

En tout cas, nous, dès que le cagnard devient trop virulent, on s'en va chez les nordistes. Les bouchons, on sait ce que c'est : on les croise !

jeudi 26 mai 2005

Tant-BourrinCamisoles

Un homme, jeune, un ado presque encore. Qui bouge vaguement les lèvres, comme pour parler, mais aucun son ne sort de sa bouche. Il oscille doucement. D'avant en arrière. D'arrière en avant. Sans relâche. Sans fin. Il tangue, le regard comme perdu, étranger à tout ce qui l'entoure.

Un autre homme, un peu plus loin. Il ne suit pas le flux incessant de la foule sur le trottoir. Sa démarche est hésitante, il part à droite, dévie sur la gauche, s'arrête, puis refait quelques pas maladroits. Les passants sont gênés, l'évitent, sa démarche erratique les perturbent, il ne les voit pas, il parle dans le vide.

De l'autre côté du mur, une vieille femme, sur un fauteuil, immobile, impavide, l'oeil vide et hagard, la lippe pendante. Elle reste là des heures durant, aucun souffle de vie ne semble plus agiter son corps, aucune étincelle ne subsiste dans son regard.


Triste spectacle me direz-vous : un autiste, un ivrogne et une grabataire. Dans quel sombre asile, quel triste hôpital sommes-nous là ?

Aucun : le jeune homme est assis sur un banc, un baladeur vissé sur les oreilles, l'autre homme est pendu à son téléphone portable, la vieille dame regarde la télévision.

Une vieille blague de cours d'école me remonte à l'esprit : celle de ce fou qui s'agrippe au mur d'enceinte de son asile, passe la tête au-dessus du faîte et, voyant des dizaines et des dizaines de personnes déambuler sur le trottoir, finit par demander à l'une d'elles : "vous êtes nombreux là-dedans ?"

Aujourd'hui, il ne m'étonnerait guère que le passant réponde : "oui, et chacun de nous a sa propre camisole."

Et moi ? Quelle est ma camisole ? Ne commencerait-elle pas à ressembler à ça ? ;~)

mardi 24 mai 2005

Saoul-FifreCons de bêtes

J'aime bien manger du canard (sinon je n'en élèverais pas) mais je ne les aime pas EUX. Je les aime au four, avec des rutabagas. Ça fait péter, les rutabagas, mais c'est très bon, très fin. Il nous faudrait une bonne Occupation pour réhabiliter les rutabagas. Et ceux qui les aimeraient pas, les rutabagas, on leur mettrait un bonnet d'âne marron pour les reconnaître dans la rue...

Vous pouvez leur filer à boire de l'eau propre tous les matins, aux canards, la première chose qu'ils vont faire, c'est de se ranger autour et de chier dedans. Du bucolique le plus pur. Ils la trouvent fade, l'eau. Les poules, elles arrivent après et elle tordent le bec en caquetant leur désapprobation. La poule n'est pas perverse : elle aime l'eau claire. Le canard boit tout ce qu'il mange. Sa cuisine est innommable, mais il fait la cuisine : vous lui donnez une queue d'artichaut, par exemple. Il va la tremper dans sa gamelle pleine d'eau et il reviendra la chercher quand elle sera bien pourrie, bien ramollie. Vous lui donnez du grain, ben il va venir le dégueuler dans son eau pour le réingurgiter après. Les escargots passent au mixer de leur bec, avec la coquille et tout, et puis pareil : on trempe, on mouille, et tout ce qu'on mange, on boit beaucoup d'eau pour faire passer. On ne s'étonne surtout pas d'avoir la chiasse en permanence : foie de canard, il n'y aura jamais de place sur cette terre pour un palmipède constipé ! Tout ça finissant bien sûr... dans la bassine. Et bonjour les regards vindicatifs et les égosillements furax si je veux nettoyer leur chaudron de sorcière puant comme 100 000 diables ! Ce sont des choses qui ne se font pas si l'on connaît et respecte la déontologie canard.

D'une façon périodique rapprochée, il y a embrouille chez les canards. Je n'ai jamais compris pourquoi, alors que la colère ou le désaveu de la poule sont transparents. Les canards se placent en rond et commencent à débattre en faisant de grands gestes du cou, d'avant en arrière et d'arrière en avant, en étendant les ailes, en se dandinant d'une patte sur l'autre, sur place... Il n'y a aucune agressivité précise, ce n'est pas dirigé vers quelqu'un ou quelque chose. Ils font un petit tour sur eux-mêmes, aléatoirement. On dirait une sorte de rituel gestuel, qui leur permet peut-être d'évacuer le stress de la difficulté à vivre en groupe, à supporter la hiérarchie naturelle ? En tout cas, ça couine tant que ça peut. Contre qui ? Contre quoi ? Contre la carence généralisée des postures oppositionnelles, sans doute ? Quand un couple se tourne autour, cherche à fonder quelque chose d'un peu profond, ou quand une cane s'isole pour faire son nid, une ligue se forme pour aller leur expliquer qu'ils menacent la belle homogénéité du groupe. Coups de bec, arrachage de duvet, alors que chez les poules, ces penchants naturels sont respectés même par "les jeunes cons", ces petits voyous de coqs qui débarquent la bitte sous l'aile, prête à dégainer.

J'aime pas les canards. Mais qu'est-ce qu'ils sont bons (avec des rutabagas) !

Par contre, j'aime bien aller chez les poules. La poule est comme le sac d'Hermès : triste mais juste, elle se lève et se couche avec le soleil. Le monde appartient aux poules. Inlassablement, elle gratte : sa journée n'est qu'un long repas, et pourtant elle n'a pas un gramme de cellulite. Suivez le coach ! Son secret ? Mangez par terre, le simple exercice de vous pencher brûlera vos calories excédentaires. Elle en parle à son aise, elle qui est bricolée la tête en bas et les fesses en l'air !? La poule a l'œil sélectif : vous ne lui ferez pas prendre une fourchette pour un couteau. Elle sait très bien que seul le couteau est comestible et qu'il suffit de toc-toquer pour qu'il entrouvre sa coquille. La poule a le bec incisif : elle pique les trop gros grains en leur centre pour obtenir des petits bouts pour ses poussins. Et, régulièrement, en aiguise le fil sur une pierre. Et les autres, là, pfff, avec leur cuillère à purée ?

La poule est une employée modèle sérieuse. On peut compter sur elle pour faire son métier de poule, à savoir : pondre, couver et élever ses petits. Et recommencer. Je parle des miennes, les vraies poules, les races anciennes qu'on se refile sous le manteau à l'intérieur d'un réseau d'initiés très fermé appelé "volaille-connekcheun" dont le mot de passe, cette semaine, est "sélection naturelle". Et on peut aussi compter sur mes coqs pour faire leur métier de coqs, à savoir : confesser les poules au fond de mon jardin.

On ne devrait pas dire "patience d'ange" mais "patience de poule". D'abord, même dans mon réseau, personne n'a jamais vu d'anges en vrai, ces vulgaires imitateurs de poules qui ont des ailes mais ne s'accroupissent pas et qui se collent leur œuf derrière la tête... mais surtout, je vois mal un ange rester 21 jours sur son nid en ne se levant qu'une fois par jour pour manger, boire et chier, le tout en 10 minutes ? Et quand les poussins commencent à naître, elle ne quitte PLUS DU TOUT le nid, de peur qu'on les lui pique. Elles peuvent jeûner des jours, si les naissances sont très échelonnées. Et l'ange, pendant ce temps là, il est où, vous pouvez me le dire ?

Dans le poulailler, aucun poulet n'aurait l'idée saugrenue de s'approcher d'une poule entourée de poussins. Les jeunes cons sont cons, mais pas à ce point là, quand même ? Ce sont des couillus, des obsédés sexuels, mais ils sentent confusément qu'il y a du "Basic Instinct" là dessous et ils n'ont guère envie de se faire crever les yeux ou trancher la carotide. Il y a encore tant de poulettes à baiser... Ce serait dommage... Pour elles...

Une poule qui défend ses petits est terrifiante : elle double de volume en ébouriffant ses plumes et en écartant les ailes de son corps. L'adversaire se retrouve face à Hulk la poule et fuit sans demander son reste sinon c'est l'attaque en piqué du Baron Rouge qui prend le relais. Vient l'éducation des petits. Les mille choses qu'ils auront à apprendre pour survivre. Ce qui est comestible, par exemple... Je lance du grain à la volée. La mère poule, comme on dit, fonce dessus comme un V2, glousse de surexcitation et picore frénétiquement comme un marteau-piqueur. Le touriste citadin de base se dit : "Voilà une mère bien égoïste, la voracité lui fait oublier ses petits". Mais s'il avait aiguisé son regard et affiné son ouïe, il aurait vu la poule saisir un morceau de grain au bout de son bec, LE LANCER à un de ses poussins et lui dire : "voilà la taille de grain qu'il te faut, tu ne t'étoufferas pas avec", et chaque poussin d'attendre sagement qu'elle leur distribue CE QUI SE MANGE. A eux de le mémoriser. Il faudra qu'ils apprennent aussi à se poudrer dans de la terre cendreuse, à se percher, à choisir de préférence des itinéraires couverts pour échapper aux prédateurs, avant de devenir de beaux poulets pour que je puisse inviter l'ami Jean-Luc qui sait préparer une poule au pot "d'un autre monde"...

Car j'adore la poule au pot, mais je l'aime aussi vivante, courageuse, dévouée... et surtout : pas prise de tête !

Les autres poules, les RI492, les sélectionnées, les inséminées artificieusement, qu'on élève entassées dans des univers concentrationnaires, à qui on coupe bec, ergots, ongles pour ne pas qu'elles se suicident mutuellement, celles que vous achetez parce qu'elles sont abordables, quoi, je préfère serrer les dents, ne pas trop y penser et ne pas touiller dans la plaie. Vous n'êtes pas gentils, non plus : dans une économie de marché, le consommateur a un pouvoir de nuisance fantastique : le boycott. Déjà, vous pouvez partir du principe que les nuggets et autres chickensandwiches de chez MacMickey ou Couic proviennent immanquablement de ce genre d'élevages. Et dorénavant, qu'un seul cri s'élève de vos poitrines :

boycot cotcotcot COOODDDEEETTTTT !!!

lundi 23 mai 2005

Tant-BourrinRévélation fracassante : la guerre, c'est moche !

Une vraie bombe journalistique : le New York Times, dans son édition de vendredi, a publié un reportage citant un rapport d'enquête criminelle de l'armée américaine reconnaissant que plusieurs prisonniers avaient été torturés à mort en 2002.

Branle-bas de con-bas aussitôt ce scoop ahurissant révélé au grand jour : kooooââ ?!? Ce n'est dieu pas possible : les Etats-Unis ? l'axe du Bien ? des tortures ? Rôôôôôôôh !!!

Les Nations Unies sont pour le coup très colère : elles ont fait les gros yeux (les Nations Unies ont suivi des cours à l'Actors Studio) et ont jugé dimanche "totalement inacceptables" et "inexcusables" les tortures et homicides américains sur des prisonniers en Afghanistan. Bah dis donc, elles n'y vont pas avec le dos de la cuillère, les Nations Unies ! Le George WC Bouché, il va avoir bien du mal à s'en remettre !

Flash-back : reportons-nous quelques années en arrière, en 1991. Première guerre du Golfe : 18 trous par mètre carré du sol irakien. Un carnage.

Les journalistes, à l'époque, n'y voient rien à redire, et l'intervention se fait sous l'égide des Nations Unies. Non, vraiment, rien à dire, tout est clean...

D'abord, les méchants, c'est les autres qui font rien qu'à envahir le Koweït et à égorger les bébés dans les couveuses. Nous, on est les gentils tout plein. Et d'une.

Et puis on tue très proprement, par frappe chirurgicale : la bombe, une fois arrivée au sol, cherche son chemin vers sa cible (en demandant de l'aide aux passants si besoin est) puis, pensant avoir trouvé son objectif, frappe à la porte, demande poliment "je vous prie de bien vouloir m'excuser, auriez-vous l'obligeance de me confirmer que vous êtes bien un haut dignitaire du régime en place ?", et, en cas de réponse positive, répond "dans ce cas, permettez que j'explose". Boum ! Le haut dignitaire est atomisé, très proprement, sans même tacher la moquette ou les tapisseries. Pas de dégâts collatéraux donc. Une guerre propre. Et de deux.

Bref, les journaleux ont tout gobé, à l'instar d'un troupeau d'oies engraissées en prévision des fêtes de fin d'année : pas la moindre crise de foi pendant le gavage.

Ce n'est qu'après, quand les sables du désert eurent à peu près digéré les dizaines de milliers d'Irakiens envoyés au casse-pipe, quand les ruines eurent mis un patch pour arrêter de fumer, que les journalistes commencèrent à se poser des questions. "Et si nous nous étions un petit peu fait bourrer le mou ?", se demandèrent-ils tout à coup.

Ce fut alors le grand mea culpa, à celui qui s'auto-flagellerait le plus fort en hurlant : "Plus jamais ça ! Nous ne nous laisserons plus manipuler !"

Quel rapport avec les révélations du New York Times, me direz-vous ?

Bof, juste le fait que nos amis journalistes et responsables onusiens poussent des grands cris d'orfraies, s'éberluent de découvrir l'horreur de la torture, la présence de tortionnaires dans les rangs de la plus grande armée du monde, porteuse des valeurs démocratiques et fournisseuse officielle de liberté et de Coca-Cola aux peuples opprimés.

Bah oui, c'est un scoop, ça, Coco : la guerre, ça tue. La guerre, c'est moche. La guerre, c'est "tous les moyens sont bons, surtout les pires". Qui, hormis un journaliste ou un politique, peut encore imaginer qu'une guerre puisse se faire dans le respect de la convention de Genève ? Sans quelques viols systématiques de-ci, de-là ? Sans humiliation du vaincu ? Sans un chouia de torture ? Il faut bien que nos cons battants puissent se détendre un peu en donnant libre cours à leur créativité...

Bref, tout semble porter à croire que certains en sont restés à une image d'Epinal de la guerre à l'ancienne, comme celle de 1870 où les officiers capturés par l'ennemi pouvaient rentrer librement chez eux moyennant la promesse sur l'honneur de ne plus participer au combat (promesse qui était d'ailleurs scrupuleusement tenue). Evidemment, pour la piétaille de base, ce n'était pas vraiment la même chanson : ça commençait déjà à ressembler bougrement aux boucheries des guerres du XXème siècle et d'après. Mais bon, ça avait quand même de la gueule, quoi !

A moins... A moins que, loin d'être naïfs, nos amis journalistes et pontes des Nations Unies ne feignent l'indignation, parce que c'est un exercice obligé et incontournable dans un monde où la tartufferie règne en maîtresse. L'indignation outrée, un bel outil de comm' pour faire accroire que la chose est exceptionnelle et qu'hormi les quelques ballots pris la main sur la gégène, les autres soldats n'ont pas la moindre tachounette de sang sur leur bel uniforme.

Pardon ? Vous avez dit faux-culs ?

Bah, les faucons ont toujours besoin de faux-culs !

dimanche 22 mai 2005

Saoul-FifreLa danse des connards laquais

Ho que voilà une belle transition ! Mon dieu qu'elle tombe à pic (pique ?) avec plein de finesse : au début des années 80, on avait encore la queue coincée sous les flamboyantes seventies mais on ne savait pas que nous galopions déjà vers le consensus mou propice aux affaires. Nous tombèrent dessus une bonne et une mauvaise nouvelle, comme on dit chez rigoler.com Traditionnellement, on commence par la bonne :

  • Le président Francesoir Militairand autorisait les radios libres

Et la mauvaise :

  • Un banc de requins de la variété franchouillarde tentait de, et réussissait à introduire un tube dans le cul des français. Que ce soit bien clair : je n'ai aucune position élito/snobo/intello contre la chanson simple et populaire. Margotte et moi sommes allés récemment à un concert de Michel Delpech et je ne crache pas dans la bouillie : "Un flirt avec Marianne dans l'île de Whight" est vraiment une Oeuvre impérimable ! "Billy le bordelais", "La chenille qui redémarre" "Oune, dos, tres", passez-les moi en boucle, OK mais là, j'ai craqué. Dans "La danse des canards", la musique en vaut une autre mais sous prétexte que "la mélodie, c'est le succès", l'équipe de paro-niais, de pas-reliés (car ils s'y sont mis à trois !) a vraiment frappé bas, très très bas. On peut même parler de non-paroles. Nous étions récemment dans un vrai bal popu aveyronnais et, entre deux bourrées, l'orchestre a joué le morceau. Le chanteur, qui connaissait impeccablement les paroles des autres chansons, avait tellement honte, que, sur les "canards", il a fait Lalalala la les 3/4 du temps.

Parenthèse culturelle : dans les années 40/50, une chanson à succès un peu niaise s'appelait un "saucisson". La forme et la fermeté y étaient déjà mais c'est Boris Vian, directeur artistique chez Philips entre autres q;^) qui fit remarquer que "tube" conviendrait mieux, puisque CREUX .

Le résultat de la bonne nouvelle fut que pendant deux ans, tous les vendredis soirs, avec mon ami le célèbre ténor Jean-Luc V., nous avons déliré dans une émission nocturne. Et comme il fallait meubler, et que Jean-Luc taquinait la guitare avec beaucoup de talent, j'ai déversé ma bile sur la mauvaise nouvelle en écrivant un pastiche en dix minutes sur un mauvais coin de table. C'est pas du Verlaine, d'accord, mais faut dire que j'avais pas d'absinthe sous la main.

C'est la danse des connards
Qui remuent d'autres connards
En chantant des conneries
Qui puent l'képi

Ils ont pris une fanfare
Et des paroliers ringards
Car il n'y a que quand c'est con
Que ça ramène des ronds

Pour bronzer aux Baléares
Et manger du bon caviar,
Il faut bien faire la putain
Sinon on a rien :

Les clients, ils aiment le cul
Et pour pas qu'ils soient déçus
On parle du popotin
Et ça marche bien...

Passe-nous tes pépètes
Donne-nous tes gros sous
Plus la chanson est bête
Plus tu la répètes
Et plus c'est chouette pour nous !

C'est la danse des connards
Des truands du show-bizznard
Des vedettes attrape-nigauds
Des impresarios...

C'est la machine à milliards
La gaieté obligatoire :
On se marre entre copains
En faisant COIN-COIN !

Ce n'est pas un cauchemar
Ça se danse tous les soirs :
Les bourgeois, les intellos
Comme les prolos...

On en mangera pas ce soir
On ne veut plus de canard
Pitié pour nos intestins
Changez de refrain !!

vendredi 20 mai 2005

Tant-BourrinOh noooooo !

Il est des jours où une petite part de votre enfance se détache du mur de votre vie et éclate sur le sol dans un nuage de poussière. Laissez-moi donc vous compter la chose, mais pour cela, revenons quelques années en arrière...

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jeudi 19 mai 2005

Saoul-FifreImmaculée ! Signé : la mouche

Après le premier jet de Tant-bourrin, si puissant dans la pénétration des fondements même de nos demi-blogosphères, je crains que la suite de notre avancée prospective n'aboutisse assez rapidement à une difficulté à pousser plus avant notre désir mutuel de communiquer. Le transit intellectal, privé de débouchés, risque de nous acculer dans une position déséquilibrée intenable sans de multiples et répétées crispations internes. Avec l'assoupissement qui guette, c'est la chair de notre axe réflexif qui se racornit et perd de sa substance dans des baudruches qui ne résistent pas au premier glissement sémantique contenant/contenu. La fonction réveille l'organe et il n'est plus l'heure des relâchements intempestifs. Nous connaissons nos annales sur le bout des doigts et ne sommes pas du genre à faire l'impasse sur des matières à l'examen... Accumulant pointes, saillies, introduisant pour ce faire l'humour gras, au risque de nous enfoncer profondément dans le ridicule, nous ouvrirons aussi nos colonnes aux analyses et aux insinuations de lecteurs qu'habiterait une ardeur durable de bel acabit. Nous serons toujours prêts à recueillir les geysers de vos créativités et à les répandre sur la toile. Là sont les leviers de nos aspirations profondes, des plus linguistiques aux plus pompeuses.

Tendancieusement vôtre
Saoul-fifre

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