Par Epictete,
vendredi 1 septembre 2006 à 00:35 ::General
Personne ne peut me déranger, il n’y a que moi qui puisse me déranger. Quand je ne supporte pas un événement, c’est parce qu’il réveille en moi des choses que je ne supporte pas. Chacun a son petit lot d’événements qu’il ne supporte pas, parce qu’il a un lot de peurs qu’il ne supporte pas. Certains ne supportent pas la vue du sang, d’autres la violence, d’autres la pauvreté, d’autres de voir mourir des gens, de vieillir, peu importe. Ce que je ne supporte pas, ce sont les coups que cela crée en moi. Je me rends compte de cela, je suis attentif à la sensation……..Et je n’ai pas de réflexion proprement dite sur la pensée ; seulement me rendre compte que je suis l’auteur de mon propre dérangement.
Dans le cadre de la journée mégalomaniaque sponsorisée par BYALPEL le 22 août, je vous présente également une des premières photos de moi, nue. Je n’ai rien flouté. Mon père s’en était chargé lors de la prise de vue.
A ma naissance je pesais 2 kilos, vomissais régulièrement en exhibant un splendide teint jaune. « Quel gros pigeon malingre ! » s’extasiait le pédiatre à ma mère. 44 années et 50 kilos plus tard, que dire ? Je vomis moins, mais il m’arrive d’avoir le teint terreux.
Appliquons la méthode de « littérature définitionnelle » (*) à :« Je vomis moins, mais il m’arrive d’avoir le teint terreux ».
1 ) Je rejette brutalement par la bouche modérément, néanmoins il a lieu que la carnation de mon visage soit couleur de la terre.
2 ) Je repousse avec violence par la cavité de la partie inférieure du visage en communication avec l’appareil digestif d’une retenue qui porte à garder en toutes choses une certaine mesure, malgré cela il se produit que la couleur de la chair de la partie antérieure de ma tête se présente d’une impression produite par les diverses radiations constitutives de la lumière, en l’occurrence de la troisième planète du système solaire.
3 ) ...
Stop ! J’ai des carottes sur le feu, des courses à faire, une bibliothèque à vider …
(*) Trouvée dans « Abrégé de littérature potentielle » : à partir d'un énoncé donné, on remplace chaque vocable signifiant par une de ses définitions d'un dictionnaire donné. On réitère l’opération sur le nouvel énoncé obtenu, et ainsi de suite.
Par Tant-Bourrin,
mercredi 30 août 2006 à 00:11 ::La vraie vie
Tchic... tchic... tchic... tchic...
La main araignée se déplace sur la table et s'approche du regard qui brille, au-dessus d'un grand sourire qui anticipe.
Qui anticipe quoi ?
Bin, le saut de la main araignée, pardi !
Et d'ailleurs, hop, la main araignée, suffisamment proche de sa proie, a bondi et la pique de furieux guili-guili dans une déflagration de rires enfantins.
Les rires enfantins de Tant-Bourriquet - car vous l'avez déjà deviné, c'était lui la proie - qui résonnent et réveillent tout à coup un écho sur les parois osseuses de mon crâne. Un écho vieux de quarante ans. Un écho de mes propres rires, quand j'avais à peu près l'âge de Tant-Bourriquet.
Et je revois la main araignée qui me tournait autour, s'approchait et me sautait dessus. La même main araignée à laquelle j'ai redonné vie spontanément, simplement, sans calculer, pour faire rire Tant-Bourriquet autant qu'elle m'avait fait rire à son âge.
La même main araignée ?
Non, en fait, pas tout à fait : la mienne était boiteuse, elle avait une patte coupée, deux phalanges de l'annulaire que mon père avait perdues au boulot, bien des années plus tôt.
Une main araignée boiteuse mais tellement aimante et chatouillante. Une main araignée qui avait dû faire rire mes frères et ma soeur autant que moi. Et puis qui est entrée en hibernation : nous étions grands, et on ne fait plus rire les grands avec une main araignée. Alors elle a dormi, dormi...
Et la main araignée boiteuse, plus flétrie, plus tachetée de brun, est sortie un jour de sa torpeur. Une main araignée boiteuse et vieillie, mais toujours hilarogène pour mes neveux et nièce.
Mais les petits-enfants grandissent aussi, et la vieille main araignée boiteuse se trouva bientôt fort désoeuvrée. Alors elle repartit se plonger dans le sommeil.
Et puis vient Tant-Bourriquet, le petit-fils qu'on n'attendait plus, le petit retardataire de la vie.
Mais la main araignée boiteuse, plus ridée que jamais, ne se réveilla pas. Elle resta inerte, paralysée sur le bras d'un fauteuil d'une maison de retraite, au-dessous d'un regard qui brillait pourtant d'amour.
Et un jour de novembre, on sut qu'elle ne se réveillerait définitivement plus. Tant-Bourriquet sera le seul petit-fils a n'avoir pas connu la main araignée boiteuse.
Araignée du matin, chagrin...
En fait, je n'avais jamais repensé au jeu de la main araignée depuis des décennies.
Et puis ça m'est juste revenu comme ça, d'un seul coup. J'ai fait tchic, tchic, tchic et ma main s'est métamorphosée dans les yeux de Tant-Bourriquet. J'ai fait guili-guili et le rire a explosé dans sa gorge.
La boucle est bouclée : voilà, Tant-Bourriquet arrive à peu près à l'âge de mes premiers souvenirs, et je sais que tout ce qu'il vivra projettera de-ci de-là en filigrane de vieilles images enfouies, en un immense looping de quarante ans.
Mais un looping qui n'existera que dans ma tête, la vie de Tant-Bourriquet n'appartient qu'à lui et son chemin sera forcément - et c'est tant mieux - différent du mien.
Allez, viens, Tant-Bourriquet, je vais te refaire la main araignée !
On ne sait même pas s'il s'appelle vraiment comme ça. Certains exégètes le font naître en Phrygie, sans doute parce qu'il reste stoïque sous les caresses, qu'il ne se laisse pas aller au plaisir, qu'il semble en quelque sorte phrygide ? La Phrygie, plus connue actuellement sous le nom de "Turquie", la modification du nom s'étant faite progressivement, mais l'unanimité étymologique se faisant sur le phonème original "question sexe, j'ai un TRUC QUI tourne pas rond"... D'autres savants font provenir le célèbre philosophe de Toulouse, avançant comme argumentation principale que, quel que soit le mal qu'on lui faisait, il continuait à voir la vie en rose. Mais ils forment une minorité dans le monde des lettres. La rumeur semblant venir d'un blog prenant la tombe comme symbole du détachement et même du mépris que nous devrions avoir face à tout ce qu'il n'est pas en notre pouvoir de changer, la mort en étant l'exemple le plus éblouissant et le plus évident.
Il se retrouve avec un nom grec, Epiktêtos, qui a le sens de "acquis", "non inné", chez Platon et Aristote. Nom qui lui va pas mal, puisque pour démêler ce qui est mien (mes actions, mes désirs, mes opinions...) de ce qui est étranger, en moi (les événements extérieurs, la réputation, la recherche de la gloire, les autres...), il faut bosser, se battre avec courage contre la souffrance, la peur, pour gagner SA LIBERTÉ. Et s'y cramponner mordicus.
Pourquoi un nom grec, puisqu'il se retrouve à Rome, esclave ? Epic vient peut-être de "épi" (spicum) et tete de "testa", tête, têtu..., un esclave, c'est pas bien peigné ? Toujours est-il qu'après bien des souffrances qu'il surmonte et qui lui donnent son brevet de stoïcien, il est affranchi, enseigne un moment, et puis fuit les ordonnances du tyran Domitien et se réfugie dans la cité libre de Nicopolis, en Epire, où il crée son école. C'est grâce aux notes de son meilleur élève, le bon Arrien, que quelques bribes de son enseignement nous sont parvenues. Et en Epire que le vieux sage, traumatisé par une vie de privations de nénettes et de refus du confort, s'oublia dans la boisson en grommelant ses revendications d'ivrogne.
D'où la 3ième hypothèse sur la provenance de son nom : Épire qui tête.
Et pour ceux qui veulent se pencher sur sa pensée ...
Par Epictete,
lundi 28 août 2006 à 00:22 ::General
Si je veux diriger et donner forme à ma vie, ce sera toujours selon un modèle qui est fonction du passé. Ou alors, étant incapable de cette modification, je vais me laisser flotter par réaction. Mais la compréhension de la totalité de la vie porte en soi sa propre action, dans laquelle n’entre ni le fait de se laisser aller, ni celui d’imposer un modèle. Cette totalité doit être comprise d’instant en instant, sans cesse. Il faut que sonne le glas du moment passé.
Petite recette populaire à utiliser en période humide.
Ingrédients
- 10 trousses à maquillage
- 1 aller-retour PARIS/ LES MUREAUX
- 1 ou 2 sacs à dos WestPak de grande taille
Préparation
Vous êtes debout sur le quai 13 de la gare SAINT-LAZARE tenant votre amie XX la vache par le cou. Vous attendez le prochain train pour les Mureaux. Pourquoi ? Pourquoi pas pour Versailles ? Aux Mureaux, il y a également un grand parc et les gens sont moins guindés.
Bien sûr, vous auriez pu aller à STRASBOURG, voir la machine à laver de Michou. XX aurait beaucoup aimé regarder le hublot pendant des heures. Mais votre budget n’est plus ce qu’il était et Michou délaisse son linge pour d’irréels cocktails dînatoires.
Le train arrive à quai. Méprisez les regards jaloux des autres passager qui se posent sur vous quand vous engagez XX à monter dans le wagon. Ils savent bien que la vache est certainement l’animal le plus paisible et le plus désintéressé de notre environnement. Mon vétérinaire me l’avouait encore récemment quand je lui demandais ses préférences.
Comme il est hors de question d’apprendre à XX le caniveau, sachez reconnaître les signes avant-coureurs et ouvrez votre sac à dos au bon moment. Pendant le voyage, refaites-vous une beauté.
A la gare des Mureaux, prenez le grand boulevard sur votre gauche. Puis un truc comme première à gauche, seconde à droite et tout droit. Le parc est devant vous. Laissez paître XX une bonne heure en admirant en concert la valse des vélomoteurs et autres engins bruyants circulant dans le voisinage. Cela vaut bien un son et lumière sur fond de musique baroque, non? non.
Une fois XX repue, faites le trajet inverse pour vous retrouver sur le quai de la gare des Mureaux. Il est temps de ramener votre amie dans sa brie natale. Car ce n’est pas Pascal qui viendra la chercher en voiture.
Suggestions
- Vous pouvez reproduire cette recette avec n'importe quel ami végétarien.
- Aux heures de pointe, la préparation aura un goût nettement plus épicé.
Où le Chevalier de Tant-Bourrin reçoit des offres alléchantes
XIIIème siècle après Jésus-Christ - Quelque part dans le Royaume de France
L'étrange équipage cheminait sur le chemin boueux d'un mois d'août médiéval pourri.
En tête, sur son destrier qui eût été blanc s'il n'avait pas été lui-même boueux, chevauchait le Chevalier Hippobert Canasson de Tant-Bourrin, la mine déconfite après ses dernières mésaventures, les anneaux de son armure déstructurée pendant de plus en plus tristement autour de sa taille et de ses membres.
Derrière lui, sur sa bourrique miteuse que la boue n'arrivait pas à rendre plus sale qu'elle ne l'était à l'ordinaire, ronflait son écuyer Saoul-Fifre, une nuée de grosses et grasses mouches bourdonnant joyeusement autour de sa tête.
Or donc, il advint qu'au détour du chemin boueux surgit subitement un quidam sur un cheval.