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samedi 7 juillet 2012

AndiamoLa Samar...

Parfois le jeudi, qui était autrefois le jour des mômes au lieu et place du mercredi , ma mère nous annonçait à mon frère, ma sœur et à moi :

-Bon ! On va manger de bonne heure, puis je vous emmène au magasin.

Magasin… Le mot magique ! Généralement c’était la Samaritaine, « la Samar » comme on l’appelait familièrement.

Mais avant le départ il y avait les recommandations, elle nous connaissait bien notre mère !

-Je vous préviens : pas de bagarres, je n’achète rien, hormis les vêtements dont vous avez besoin… Compris ?

Et dans un ensemble parfait digne des petits chanteurs à la croix de bois nous répondions :

-Oui M’man !

Pourquoi aller à la Samar acheter les vêtements ? Car ils étaient de bonne qualité et pas trop chers.

Tout compte fait elle achetait seulement les culottes courtes, pantalons, chemises, pour le reste c’était du « fait maison ». Les pulls, les jupes et robes de ma sœur, les blousons pour mon frère et moi, et même des capuchons en tissu caoutchouté. La vieille « Singer » à pédale unique reprenait régulièrement du service, et les aiguilles à tricoter ne chômaient pas.

En tout début d’après-midi nous partions, le bus 151 à plate-forme, un antique T4 nous emmenait jusqu’à la porte de Pantin, vingt minutes environ, puis le métro ligne 5 jusqu’à la gare de l’est dans une brinqueballante « Sprague Thomson » verte, changement ligne 7 jusqu’à la station Pont Neuf.

Nous comptions bien sûr les DUBO DUBON DUBONNET, ces affiches qui tapissaient les tunnels du métro entre deux stations, le remugle caractéristique du métro parisien. Ma mère qui sans cesse, nous recommandait de ne pas nous approcher du quai. Les « PSCCCHH « ! Des portes automatiques des voitures actionnées par des vérins pneumatiques. Toutes ces choses, ces senteurs, aujourd’hui disparues.

A peine sortis du métro, on la voyait, immense face à la Seine (le plus beau fleuve du monde, normal il abreuve la plus belle ville de l'univers). Non je ne suis pas chauvin, j'y suis né mais je suis resté modeste.

Que de monde ! On avait beau y aller assez souvent, tant à la Samar qu’aux galeries Lafayette ou encore à la Belle Jardinière (fermée depuis belle burette… Pardon lurette) nous nous tenions la main, de peur d’en perdre un en route. J’aurais dû les serrer tous un peu plus fort car ils sont partis.

Les étroits escaliers mécaniques…

-Regarde où tu mets les pieds, tu vas te faire coincer ! L’odeur de la cire qui envahissait tout, les parquets de bois joliment entretenus qui craquaient sous nos pieds , les stands avec pratiquement une vendeuse derrière chacun d’ eux, robe noire et col claudine blanc de rigueur.

Enfin le rayon « enfants », essayage de culottes courtes bien entendu, pour mon frère et moi.

-Tu comprends, la peau des genoux ça repousse, les trous dans les pantalons ils ne se bouchent pas tout seuls, et puis avec des « brise fer » comme vous…

Pour nous faire rire, ma mère allait toujours faire un petit tour au rayon chapeaux. Elle en esssayait quelques uns, histoire de nous faire rire. Pourtant elle les portait bien, mais elle s’arrangeait pour faire des grimaces, provoquant notre hilarité.

A la sortie, lorsque c’était la saison, elle achetait un ou deux cornets de marrons. Les marchands étaient là, le coin est bon pour la vente, gros chaudrons noirs, les braises bien rouges et la bonne odeur de la châtaigne cuite.

Quelques châtaignes dans un cornet fait d’un papier journal entortillé. Les fruits brûlants qu’il faut décortiquer, avant de les croquer tout chauds, bien trop chauds, notre impatience nous faisait faire des : ouh la la ! Hu hu hu ! En ouvrant grand la bouche, et soufflant tout ce qu’on pouvait afin d’évacuer le trop de chaleur qui nous brûlait la langue et le palais.

Enfin nous rentrions, commentant bruyamment l’après-midi, et annonçant les prochaines stations sans consulter les cartes placardées au-dessus des portes.

Les « ouais t’as triché » ponctuaient les : Stalingrad ; Jaurès ; Laumière et autre Ourcq. Vociférations vite calmées par l’appel au calme maternel.

C’était hier et loin pourtant, où sont tous mes repères ? Les ampoules remplacées par des néons, le crieur de journaux à la sortie des bouches de métro. Le père d’un copain vendait même des saucissons à la sortie de la porte de Pantin ! Les cartes aux tracés constellés de petites loupotes qui vous indiquaient la ligne à parcourir lorsque vous appuyiez sur le bouton de la station où vous désiriez vous rendre. Les portillons automatiques qui se fermaient à l’approche d’une rame, interdisant l’accès aux quais, et les gros distributeurs de friandises, peints en bleu avec écrit en relief, brut de fonderie : « chocolat Menier ».

Et surtout cette odeur si caractéristique qui a disparue elle aussi, comme toutes les choses et les êtres qui m’ont accompagné.


Voici une photo de la SAMAR, fermée depuis quelques années au motif : "mise aux normes" réouverture... ? Leur slogan était, souvenez-vous : ON TROUVE TOUT A LA SAMARITAINE.

mercredi 4 juillet 2012

Saoul-FifreMargotte

La rencontrer pour la première fois, c'est un peu comme n'avoir jamais vu la mer, même pas à la télé, et enfin l'atteindre. Ça fout un choc. Ça en a flanqué à plein de gens, ça m'a filé une sacrée décharge, d'entrée, et ça en fichera à plein d'autres encore, si j'en crois les réactions que je peux surprendre, moi qui suis à ses côtés, en position d'observateur privilégié.

Elle fascine, elle interroge, par son mutisme dense, compact, phase d'analyse devant l'inconnu, qui évoluera vers plus de chaleur humaine si vous avez la chance rare d'être passés indemnes au travers de ses cribles critiques. C'est son regard droit, profond, présent à la relation, qui parlera pour elle au début, son visage atypique qui éveillera votre curiosité, ses longs cheveux "blond vénitien", parait-il, qui fouetteront vos fantasmes le long d'ornières creusées par les femmes mythiques éternelles chevauchant leurs ondulations sauvages.

Elle a su garder au fond de ses yeux cette flamme de phare porteur d'espoir pour des nageurs épuisés en dérive, jouets de courants contraires ou victimes espérées par les récifs. Des hommes la croisent au plus près et prennent la position instinctive du chien d'arrêt, le regard interloqué, un peu de bave aux commissures, aux ordres de leur cochon intérieur. Je le connais bien, ce moment hors du temps et des normes en vogue, pour l'avoir vécu et revécu. Des hommes lui décrivent les sentiments vrais qu'ils éprouvent et l'histoire se répète, repiquant à l'envi ce sentiment de déjà-vu. D'autres restent muets, ne parvenant qu'à rouler dans leur âme infiniment un trouble hors du champ lexical.

N'avoir que l'embarras du choix : cocagne, mais son choix est essentiellement d'ordre temporel.

Ou bien c'est "Tout de suite !", tu me plais à condition qu'entre nous cela devienne "Plus jamais !"... Je te choisis étranger, nomade dans l'âme, avec ton billet de bateau ou d'avion dans la poche, sans bagages et sans mémoire, sans remords ni culpabilité...

Ou bien c'est "Pour toujours !", et dans ce cas là, j'ai besoin d'un temps de réflexion pour m'engager dans la durée. Je recherche, pour que ma petite entreprise ne sombre pas dans la crise, un amant, mais aussi le futur père de mes enfants, leur éducateur, mon co-retraité et, soyons triviaux, un côté animal, mais quand même cultivé, un jardinier, un affineur de fromages, un lécheur de timbres soigneux et un défricheur de garrigue.

Sans grand espoir, je présentai mon curriculum vitae. Je vins à tout hasard avec mon kama-soutra illustré par Dubout sous le bras. Après moultes tergiversations et une longue période d'essai, j'obtins enfin mon CDI.

Et depuis, je ne compte plus les regards torves et incrédules, tant masculins que féminins, que je suis obligé de supporter, et que je vous traduis à la louche ainsi :

- Mais qu'est-ce qu'elle lui trouve ?!?!

dimanche 1 juillet 2012

Tant-BourrinTares trek (épisode 5)

An 2562. La Terre a, depuis près de trois siècles, intégré la Fédération intergalactique, regroupant des civilisations issues de milliers de galaxies différentes. Paix, connaissances et progrès règnent désormais en maîtres sur une immense partie de l’univers. Et chaque jour, des pionniers, à bord de leurs vaisseaux supraluminiques, explorent des espaces inconnus en quête de nouvelles planètes à pacifier.

Suite des épisodes 1, 2, 3 et 4



Crrrrrr... Tchffff... Blam !
Crrrrrr... Tchffff... Blam !
Crrrrrr... Tchffff... Blam !

Le pas moins léger que naguère du lieutenant Taanb-Ouhrin résonnait dans les coursives du Blogborygmus.

Crrrrrr... Tchffff... Blam !
Crrrrrr... Tchffff... Blam !
Crrrrrr... Tchffff... Blam ! CHTONGGG !

Le lieutenant retint un juron et massa son nez endolori suite à une énième collision frontale avec une paroi. Il avait loupé la porte de la salle de pilotage d'un mètre à peine, mais ce mètre-là coûtait bien cher à son appendice nasal martyrisé. Décidément, depuis sa dernière (més)aventure, il avait bien du mal à se faire à ses prothèses à vapeur.

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jeudi 28 juin 2012

Scout toujoursBernard Dimey

Mais qui était Bernard Dimey, ce poète parisien, amoureux de Montmartre, compagnon des ivrognes, des putes, des truands et des artistes, disparu si prématurément à l'âge de 50 ans en 1981, et à qui nous devons entre autres, deux des plus belles oeuvres de la chanson française ?

Tout d'abord Mémère , cette émouvante chanson taillées sur mesure pour un Michel Simon bouleversant jusqu'aux larmes, qui nous dépeint la complainte d'un vieux couple de Paname.

Et que dire de Syracuse , cette extraordinaire invitation aux voyages si merveilleusement interprétée par la douce voix d'Henry Salador, ce natif de Guyane qui mieux que tout autre pouvait imprimer dans les esprits cette nostalgie exotique si bien décrite dans la chanson.

Dimey écrivit pour les plus grands, d'Aznavour à Greco, en passant par Reggiani, Mouloudji et Montand.

L'interminable liste de ses poèmes serait trop longue à évoquer ici, citons simplement "le bestiaire de Paris", recueil de poèmes désespérés sur les bas-fonds parisiens.

Que rajouter de plus ? Rien, contentons nous simplement d'écouter ces deux chansons et disons nous que si le nom de Dimey est un peu tombé dans l'oubli, ces chansons elles, ont acquis une véritable immortalité. Même si les ruines de Syracuse disparaissaient dans un séisme, sa chanson survivra et continuera d'émouvoir les esprits, tant que la langue française existera. Dans cent ans encore, on aura la larmiche à l'oeil en écoutant la voix chevrotante de Michel Simon, et pour cela, je vous dis un grand MERCI Monsieur Dimey, vous nous avez beaucoup apporté.

lundi 25 juin 2012

AndiamoLa souris verte

C’est une belle journée de printemps. Eric Chalan sort de l’hôpital, sa petite valise à la main. Il est joyeux, un peu pâle certes, le long séjour sans aucun doute. D’un pas décidé, il se dirige vers la brasserie toute proche.

- Un demi s’il vous plaît, garçon !

Le « garçon » est une serveuse qui lui apporte son verre, avec juste de la mousse « comme il faut », ni trop, ni trop peu.

- Oh ! Excusez-moi, Madame, je vous ai appelé garçon, car habituellement…

- Oui, je sais, ça n’est pas la première fois…

- Je suis un peu perdu vous savez. Quand on sort de là...

Joignant le geste à la parole, il lui montre l’hôpital situé de l’autre côté de la rue.

- Oui, je connais, et vous savez où aller ?

- Ben… Pas trop, non, il y a si longtemps, alors les amis…

- Si ça vous intéresse, je loue une chambre de bonne au sixième, au-dessus de mon appartement, pour vous ça ne sera pas trop cher !

- Ça n’est pas de refus. Pour le paiement, je vais chercher du boulot tout de suite, je suis honnête vous savez !

- Je n’en doute pas une seconde ! Repassez ce soir à dix-neuf heures après mon service, je vous conduirai, j’ai une voiture.

A dix-neuf heures tapantes, Eric est devant l’établissement. La femme sort, caban bleu marine, petits escapins noirs, elle est âgée de quarante ans tout au plus, cheveux blonds, une très jolie teinture. Elle se dirige vers une Dauphine verte, ouvre la porte et invite l’homme à monter.

- Je suis un peu perdu, vous savez. Depuis le temps que je suis soigné, j’ai perdu le fil : les nouveaux francs, la vague des yéyés... Décidément, les sixties comme ils disent ont tout chamboulé ! Les Batteles notamment !

- Vous voulez dire les Beatles ?

- Oui, c’est ça, vous savez l’anglais et moi !

Après un parcours relativement court, ils arrivent devant un immeuble assez cossu de Meudon. Ils descendent, la femme précède l’homme, un antique ascenseur à grilles métalliques les conduit au second. Toujours devant, la femme ouvre une porte en bois exotique verni.

- Entrez et attendez-moi là ! L’homme pose sa valise sur une moquette bordeaux sans la moindre poussière, se penchant un peu, il aperçoit le séjour richement meublé.

- C’est joli chez vous !

- Je suis veuve, répond la femme qui s’avance une clé à la main. En mourant, mon mari m’a laissé tout ça (d’un geste large elle désigne l’appartement). Pour le reste, je suis obligée de travailler, mais je ne me plains pas : avec les pourboires, je gagne confortablement ma vie.

L’ascenseur les a mené au cinquième étage, le dernier, c’est à pied qu’ils l’ont gravi. Autrefois l’ascenseur ne desservait pas le dernier étage réservé aux gens de maison.

Une porte grise, une petite chambre mansardée, un lit, une armoire, une table, une chaise.

- Voilà, vous êtes chez vous !

- Je ne sais comment je pourrai vous remercier, Madame.

Nous verrons plus tard, le travail ne manque pas, vous trouverez rapidement un emploi. En attendant, je suis sûre que vous n’avez rien pour le dîner ?

- Euh... Non !

- Bon, je vous invite pour ce soir, descendez à vingt heures.

- Mais je…

- Allons, pas de chichis, ce sera à la fortune du pot !

Ding dong ! Vingt heures, Eric est sur le pas de la porte.

- Entrez, je vous en prie, je venais tout juste de nous préparer un apéro ! Vous aimez le whisky au moins ?

- Oui, oui, bien sûr !

A la tienne, à la mienne. Eric en est à son second verre, la tête commence à lui tourner. Le manque d’habitude, depuis le temps qu’il n’a pas bu une goutte d’alcool songe-t-il.

Soudain, tout bascule, sa vue se brouille, les meubles tournent, Eric s’écroule….

Une souris verte
Qui courait dans l'herbe
Je l'attrape par la queue...

La musique lui vrille les tympans, la sono diffuse à fond la comptine, Eric a froid. Petit à petit il émerge du brouillard, il ne sait pas où il est, ses mains sont attachées dans son dos.

Je suis nu comme un ver, voilà pourquoi j’ai froid, songe-t-il…

Je la montre à ces Messieurs
Ces Messieurs me disent...

Et la musique qui hurle !

Bordel ! Y’a quelqu’un ?

La musique soudain s’arrête.

- Soyez poli, Eric Chalan, on pourrait vous entendre !

Un rire suit cette phrase. Debout au bord de la fosse se tient la serveuse, elle tient une caisse serrée contre elle.

- Qu’est-ce qui vous prend, connasse ? hurle Eric.

- Allons restez calme et poli, Monsieur Eric Chalan. Là où vous êtes, nul ne peut vous entendre et encore moins vous secourir. Nous sommes en pleine cambrousse, ordure, dans une usine désaffectée. La fosse dans laquelle tu t’agites descend à trois mètres, les parois sont lisses. Le palan situé juste au-dessus m’a permis de te descendre « en douceur » : je ne voulais pas t’esquinter afin que tu profites au maximum du joli spectacle.

La femme a descendu la caisse de bois à l’aide d’une ficelle. Arrivée en bas, elle a tiré sur l’autre ficelle située sur l’un des bords du couvercle, des petits couinements se sont fait entendre.

- Mais ce sont des rats, ils sont peints en vert, c’est quoi cette horreur ?

Trempez la dans l'huile
Trempez la dans l'eau...

La chanson continue à se déverser dans les oreilles d’Eric

- Moins fort… Moins fort !

- Et en plus, ce sont des horreurs affamées : quatre jours qu’ils n’ont rien mangé, ces pauvres petits rats !

- Mais vous êtes qui à la fin ?

- Ah oui ! Je ne me suis pas présentée : Ariane Novelle, la Maman du petit Flavien, Flavien Novelle, tu te souviens ?

Tout lui revient, ce petit bout de femme au premier rang de la salle du tribunal, ce petit bout de femme se rongeant les ongles jusqu’au sang, se triturant les phalanges, à s’en faire péter les jointures… Tout lui revient, il ne l’avait pas reconnue, dix ans l’ont métamorphosée, en mieux.

Je me suis engagée dans cette brasserie située devant l’hôpital psychiatrique il y a six mois. Je savais que tu allais sortir bientôt. Et tous, je dis bien tous les anciens détenus, viennent s’en jeter un à la brasserie en sortant, il m’a suffit d’attendre !

La musique a repris.

Ça fera un escargot tout chaud.


Dix ans plus tôt...

- Il chantait « la souris verte », votre honneur…

- Vous regardez trop de films Américains Chalan ! Appelez-moi : Monsieur le juge !

- Bi.. Bien votre… Monsieur le juge, alors je n’ai pas pu résister, je l’ai fait monter dans ma voiture. Je n’ai pas pu résister, Monsieur le juge, c’était une pulsion !

- Une pulsion, Chalan ? Vous l’avez violé, un enfant de six ans, puis massacré, il n’y a pas d’autres termes, un acharnement pareil, nous n’avions jamais vu ça, Chalan… Jamais !

La peine de mort avait été requise par le procureur de la République.

La sentence est tombée, les avocats de l'innommable ont plaidé la non-responsabilité au moment des faits : quinze ans en hôpital psychiatrique surveillé. Dans la réalité après traitements, il sera déclaré « guéri » et sortira au bout de dix ans.

Dans la salle, Ariane, la maman de Flavien, s’est tordu nerveusement les mains. Elle a regardé le tribunal, incrédule : c’est tout ? a-t-elle murmurée.

vendredi 22 juin 2012

Saoul-FifreHuile rouge

Ma mère a eu beau plonger ses recherches généalogiques profondément dans le temps, elle n'a pas réussi à nous exhumer d'origines provençales. Catalanes, oui et aussi minorquines, alsaciennes, franche-comtoises, algériennes, mais la Provence a débarqué dans notre arbre par hasard.

Même du côté de Margotte, née à Marseille mais de lignées débarquant d'Aveyron, du Limousin, d'Italie ou du Béarn. Devant ce fait établi, nous n'avons fait ni une ni deux et sommes partis à la conquête de connaissances locales pour nourrir nos racines transplantées. La langue principalement car il faut des mots pour nommer les choses et comprendre les gens. Et puis la climatologie, très liée à la tradition avec ses proverbes prédictifs bien pratiques, les fêtes votives, ses jeux et ses symboles qui nous mènent tout logiquement à sa gastronomie et à la chimie des liquides. A ce stade du petit coup dans le nez, nous accédons directement à la culture de la joie, aux poètes et aux félibres, sans intermédiaires endimanchés. Les yeux sombrés dans ces constellations que notre ciel clair et pur rend fascinantes, nous comprenons mieux Mirèio. Le jour venu, les étoiles, ne tenant pas en place, s'appuieront sur leurs ailes et sillonneront l'espace en piaillant. L'ornithologie nous apprendra à saluer, de leur nom et d'un coup de casquette ces compagnons de vie, nos locataires du dessus.

Et l'indispensable botanique, bien sûr. Les plantes nous nourrissent, nous dessoiffent, nous meublent, nous condimentent, nous enjolivent et nous soignent. Justement, un des premiers stages de Flore et Vie que nous avons suivi, avec Margotte, était sur les herbes de la Saint-Jean. Car la Saint-Jean est la période de l'année où, sous nos latitudes, le soleil reste visible le plus longtemps et monte le plus haut au dessus de l'horizon. Les plantes "solaires", celles dont la quantité et la force de leurs principes actifs dépendent de l'ensoleillement, abondent et les herboristes savent que c'est le moment de les cueillir, de les préparer pour s'en servir tout au long de "l'an que ven". Il s'agit du caille-lait, de la cataire, de la reprise, de la toute-bonne, de l'armoise, du chrysanthème commun, de la cynoglosse, de l'immortelle jaune, de l'herbe-au-vent, de la mélisse, du bouillon-blanc, de l'épine-du-christ, de la rue...

Mais la plus célèbre, c'est le millepertuis, l'Hypericum Perforatum ou erbo de sant Jan, erbo de millo traou, Trescalan, en langue d'Oc.

On ne peut pas confondre cette plante avec une autre. Déjà ce petit buisson couronné de fleurs jaunes en cette saison attire l'œil de loin. Rapprochez-vous, prenez un bouquet floral et frottez-le entre vos doigts, ils devraient rougir. Allez, si vous voulez être bien sûrs, prenez une de ses petites feuilles et présentez-la au soleil. Ses rayons traversant la feuille par des dizaines de trous microscopiques vous indiqueront le pourquoi de son appellation en français. Nous sommes le 22 Juin, vous avez donc, selon votre lieu de vie, un mois pour préparer votre huile rouge. La plupart des sites internet qui en parlent vous conseilleront de ramasser votre millepertuis au midi solaire (14 h, en été). Permettez-moi de corriger ici cette erreur. Traditionnellement, les provençaux se levaient très tôt le matin du 24 Juin afin de se trouver aux lieux de récolte, au sommet des collines, au lever du soleil. Il faut ramasser les sommités florales encore noyées de rosée, et les tasser au fur et à mesure dans un petit bocal en verre. Quand celui-ci est bien plein, remplir les vides avec une bonne huile d'olives, fermer et abandonner le bocal en plein soleil pendant un mois. Filtrer, conserver votre huile rouge dans un flacon pendant 2 ans maximum. En fait les provençaux se faisaient leur "oli roudgé" tous les ans.

Plusieurs études scientifiques ont paré le millepertuis de qualités. Il serait analgésique, anti-inflammatoire, anti-dépresseur léger, anti-prurigineux, utile pendant la ménopause, en cas de règles douloureuses... Vous avez là surtout un produit cicatrisant à l'efficacité redoutable, tellement qu'il ne faut surtout pas l'utiliser sur plaies profondes : la plaie se referme si vite qu'elle risque d'emprisonner un foyer infectieux. Il est donc idéal pour :

- Brûlures
- Râpures superficielles
- Coups de soleil. En curatif ! En préventif, il a au contraire un effet inverse photosensibilisant. Ce n'est pas une crème solaire !
- Bonne huile de massage en cas de douleurs articulaires, rhumatismes, ulcères...

Perso, nous en avons été ravis pour nos trois enfants en période de couches. On nettoyait bébé à l'eau, on le séchait à la serviette, on l'enduisait d'huile rouge bien dans les plis et on lui remettait une couche propre. Pas un seul érythème fessier, ni boutons, ni démangeaisons... Ah ça ! On s'est pas ruiné en talc Mort-ange !

mardi 19 juin 2012

Tant-BourrinCroque en Jap

- Tant-Bourriquet, mon garçonnet,
Vas-tu enfin cesser de lire
Tous ces comic-books japonais
Qui ne feront que t'avilir ?

Car, dedans, point de phylactères,
Point de contenu alambiqué !
Qu'apprécies-tu dedans ? Mystère !
Je ne comprends pas, mon biquet !

- Mais le texte, papa, on s'en fout,
Car il y a la bonne mesure
De gros bruitages qui assurent
Et d'onomatopées de fou !

Tant pis si tu as des vapeurs !
Je trouve au fil de ma lecture
Le plaisant frisson de la peur
Et je m'ouvre aux autres cultures !

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